Cour d'appel de Paris, 4e chambre section a, 7 avril 2004

  • Actes postérieurs à la résiliation du contrat·
  • Contrat de licence exclusive d'exploitation·
  • Diffusion de publicité sur site internet·
  • Manquement à l'obligation d'exploitation·
  • Brevets français, européen et étranger·
  • Résiliation aux torts du licencié·
  • Non-paiement de redevances·
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  • Exploitation

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch. sect. a, 7 avr. 2004
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 20 juin 2003
  • 2002/02430
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR9603926
Titre du brevet : Accumulateur froid à chaleur latente
Classification internationale des brevets : F25D
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : WO9700580
Référence INPI : B20040063
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Texte intégral

Vu l’appel interjeté par la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT du jugement rendu le 20 juin 2003 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

- débouté la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT de l’intégralité de ses demandes,
- l’a condamnée à payer à Thaï NGUYEN V la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts ainsi que celle de 33.440 euros à titre de redevance correspondant à la commande de la société CERITOL,
- dit qu’en diffusant sur le réseau Internet une documentation publicitaire sur le système ICEBORE après la résiliation du contrat de licence, la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT a commis des actes de contrefaçon au préjudice de Thaï NGUYEN V,
- interdit, en tant que de besoin, à la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision,
- condamné la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT à verser à Thaï NGUYEN V la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- autorisé Thaï NGUYEN V à faire publier le dispositif du jugement dans trois journaux ou revues de son choix, aux frais de la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT sans que le coût total de ces insertions n’excède la somme de 9.600 euros,
- condamné la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT à verser à Thaï NGUYEN V la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens ; Vu les dernières écritures signifiées le 3 mars 2004 par lesquelles la société GEA ERGE SPIRALE et SORAMAT, poursuivant la réformation du jugement entrepris, demande à la Cour de :

- à titre principal
- constater que le contrat de licence du 22 juillet 1997 a été résilié par Thaï NGUYEN V en violation des dispositions contractuelles,
- condamner Thaï NGUYEN V à réparer le préjudice subi du fait de la résiliation du contrat de licence à hauteur de 522.473 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
- débouter Thaï NGUYEN V de ses demandes, fins et conclusions,
- Subsidiairement
- commettre un expert avec mission de fournir à la Cour tous éléments d’information sur les conditions et difficultés de mise en oeuvre du contrat de licence de brevet du 22 juillet 1997 telles que ces difficultés sont exposées par les parties et donner un avis sur les préjudices invoqués,
- condamner Thaï NGUYEN V à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Vu les dernières conclusions signifiées le 27 février 2004 aux termes desquelles Thaï NGUYEN V sollicite la confirmation du jugement déféré sauf sur le montant des dommages-intérêts qui lui ont été alloués et formant appel incident sur ce point, demande à la Cour de :

- condamner la société GEA ERGE SPIRALE à lui verser les sommes suivantes :

- 1.200.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice subi du fait des manquements à ses obligations contractuelles,
- 36.384 euros représentant la redevance proportionnelle due, avec intérêts au taux légal à

compter du 15 janvier 2002,
- 7.000 euros pour résistance abusive,
- 15.000 euros ea réparation du préjudice subi au titre de la contrefaçon,
- dire qu’en utilisant la référence au système breveté ICEBORE dans la présentation de son activité commerciale sur son site Internet, la société GEA ERGE SPIRALE a également commis des actes de parasitisme à son préjudice,
- condamner à ce titre la société GEA ERGE SPIRALE à lui verser la somme de 15.000 euros de dommages-intérêts,
- ordonner la publication de la décision à intervenir en intégralité ou par extraits, dans trois journaux périodiques de son choix, aux frais avancés de la société GEA ERGE SPIRALE sans que le coût global de ces insertions n’excède la somme de 20.000 euros HT,
- ordonner à la société GEA ERGE SPIRALE de publier en intégralité ou par extraits la décision à intervenir sur la page d’accueil de son site Internet et ce, pendant trois mois,
- condamner la société GEA ERGE SPIRALE à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Considérant que Thaï NGUYEN V, ingénieur spécialiste en énergie thermique, est l’inventeur d’un accumulateur de capacité frigorifique dénommé « ICEBORE », objet d’une demande de brevet français déposée le 29 mars 1996, enregistrée sous le N° 96 03926 ; qu’une extension internationale a été sollicitée le 1er avril 1997, visant la Communauté Européenne, les Etats-unis et le Japon, revendiquant la date d’antériorité du 29 mars 1996, enregistrée sous le numéro PCT FR 97/ 00580 ; que le brevet européen a été délivré le 26 septembre 2001 ; Que Thaï NGUYEN V a, par contrat du 22 juillet 1997, inscrit au registre national des brevets le 7 avril 1998, consenti à la société GEA ERGE SPIRALE une licence exclusive d’exploitation de ces brevets moyennant une rémunération fixe de 600.000 F HT payable en deux versements de 300.000 F et une rémunération proportionnelle assise sur les ventes de produits du contrat ; Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception du 5 mars 2001, Thaï NGUYEN V écrivait à la société GEA ERGE SPIRALE en sollicitant la communication des documents comptables et techniques lui permettant d’établir un bilan financier et technique du développement du procédé ICEBORE ; qu’en réponse à cette lettre, la société GEA ERGE SPIRALE lui interdisait toute utilisation de son nom ainsi que des outils GEA et lui demandait la restitution de tout élément ou document faisant référence à la société ajoutant qu’elle avait transmis le dossier à ses avocats; Que par lettre recommandée avec avis de réception du 6 avril 2001, Thaï NGUYEN V, reprochant à la société GEA ERGE SPIRALE l’inexécution du contrat de licence dans les termes des articles 7 et 7.1, notamment des carences dans l’exploitation du brevet et le développement de ventes des produits, résiliait le contrat en vertu de l’article 12.1, avec effet à compter du 6 juin suivant ; que par lettre du 6 décembre 2001, il sollicitait, conformément à l’article 12.4 du contrat de licence, un état des stocks en possession de la

licenciée ; Considérant que la société GEA ERGE SPIRALE reproche à Thaï NGUYEN V une résiliation injustifiée du contrat de licence au motif qu’elle a parfaitement rempli l’obligation de moyens mise à sa charge ; qu’elle fait valoir que le brevet n’ayant pas fait l’objet d’une application industrielle, elle a dû mener des travaux de recherche complexes pour mettre au point le procédé industriel et assurer la promotion du procédé ICEBORE, notamment par le biais de salons et de revues professionnels et qu’alors que ses efforts ont commencé à porter leurs fruits, au cours de l’année 2000, le concédant a notifié à contre-temps la résiliation de la licence, dans le seul but d’accaparer les efforts techniques et commerciaux qu’elle a déployés ; I – Sur la résiliation de contrat de licence Considérant que l’article 7.1 du contrat de licence stipule : « Le licencié est tenu d’assurer l’exploitation optimale des brevets du contrat . Il s’efforcera de développer les ventes des produits du contrat, avec la marge optimale compte de l’état de la concurrence » ; Que l’article 12.1 prévoit que le présent contrat sera résilié de plein droit si bon semble à l’une des parties, en cas d’inexécution par l’autre d’une ou plusieurs des obligations mises à sa charge, cette résiliation devenant effective deux mois après l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception exposant de façon précise les griefs de la partie victime d’une inexécution ; Que l’article 12.2 prévoit la faculté pour le concédant de résilier le contrat dans le cas où le licencié n’aurait pas effectué de ventes régulières des produits du contrat pendant une période de deux années consécutives, la présente clause ne prenant effet qu’après une période de douze mois à compter de la signature du contrat ; Considérant que la société GEA ERGE SPIRALE ne justifie pas avoir effectué des ventes régulières des tubes accumulateurs « ICEBORE », produits du contrat, dans les deux années qui ont suivi la première période de latence de douze mois prévue au contrat, soit dès le mois d’août 1998 ; Qu’elle ne saurait invoquer la rédaction sommaire et défectueuse de la demande de brevet français et l’insuffisance des données fournies par l’inventeur pour expliquer les délais importants de mise au point industrielle du procédé « ICEBORE » alors que, d’une part, se présentant comme l’une des premières sociétés européennes spécialisées dans le domaine de la production d’énergie thermique, l’ingénierie thermique et, d’autre part, revendiquant dans le préambule du contrat disposer de la capacité technique pour développer l’objet du brevet au stade industriel, et des moyens nécessaires pour en développer la commercialisation, elle était à même, dès la conclusion du contrat, d’apprécier les travaux de recherche nécessaires à la mise en oeuvre de l’application industrielle du brevet ; que l’attestation établie par M. B, professeur des Ecoles des Mines, qui précise que le brevet mettant en jeu un ensemble de phénomènes physiques qui devaient être évalués en vue de proposer une solution industrielle optimisée, la société GEA a dû réaliser des essais sur plusieurs années au sein du laboratoire de l’école, est inopérante pour établir la volonté de la société de développer de manière sérieuse le projet, les essais dont il est question n’ayant débuté qu’en 1999 ; qu’il convient de relever au surplus, que la société GEA ERGE SPIRALE a bénéficié pour la mise au point du procédé ICEBORE d’une aide à l’innovation de l’ANVAR dès le 8 octobre 1997 de sorte que le retard à réaliser des essais n’apparaît pas justifié ;

Que la société GEA ERGE SPIRALE ne démontre pas avoir courant 1997 et 1998 affronté des difficultés insurmontables qui l’auraient empêché de mettre au point le procédé breveté dans les délais prévus au contrat et ce, d’autant, comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges, qu’elle ne justifie pas avoir informé Thaï NGUYEN V des obstacles rencontrés en vue de sa commercialisation ; Qu’elle ne démontre donc pas avoir mis en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour exploiter de manière effective l’invention concédée dans les délais prévus au contrat ; qu’elle ne peut, pour contester la résiliation du contrat, se prévaloir de la seule réalisation d’une installation au cours de l’automne 2000 pour le compte de la société allemande CERITOL à laquelle Thaï NGUYEN a largement participé ; Que l’inertie de la société GEA ERGE SPIRALE à mettre en oeuvre le procédé breveté sans que soit rapportée la preuve d’un empêchement, puis à exploiter sérieusement l’invention, justifiait la résiliation du contrat de licence par Thaï NGUYEN V, comme l’ont estimé à juste titre les premiers juges ; que les demandes de la société GEA ERGE SPIRALE doivent donc être rejetées ; II – Sur la réparation du préjudice résultant du défaut d’exploitation du brevet Considérant que Thaï NGUYEN V sollicite, en premier lieu, l’allocation d’une indemnité de 1.200.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice constitué par le gain manqué pendant la durée de la licence exclusive, par les frais qu’il a engagés lors des salons professionnels et le temps qu’il a consacré à son licencié ; qu’il observe que la redevance étant assise sur le chiffre d’affaires résultant des ventes des installations mettant en oeuvre le brevet, qu’il estime à la somme annuelle de 5.000.000 euros, il est en droit de réclamer 8 %de cette somme, soit 400.000 euros par an ; Considérant qu’il ressort de l’article 5.2 du contrat de licence que le taux de la redevance sera fonction de la morge dégagée par chaque vente, les modalités de calcul de cette marge précisées dans l’annexe du contrat constituant l’assiette du taux de 8% ; Que l’article 12.1 paragraphe 2 du contrat de licence prévoit que l’exercice de la faculté de résiliation ne dispense pas la partie défaillante de remplir les obligations contractées jusqu’à la date de prise d’effet de la résiliation et qu’en outre, la partie défaillante sera redevable de l’indemnisation des dommages éventuellement subis du fait de l’inexécution et/ou la résiliation anticipée du contrat ; Mais considérant que le préjudice résultant du défaut d’exploitation sérieuse du brevet ne peut s’analyser qu’en une perte de chance en l’absence d’éléments précis permettant de retenir le chiffre d’affaires avancé par l’intimé ; qu’en lui allouant une indemnité de 100.000 euros les premiers juges ont exactement évalué ce préjudice ; Considérant par ailleurs que les premiers juges ont, par des motifs pertinents que la Cour adopte, relevé à juste titre, que s’agissant des frais engagés et du temps passé avec son licencié, Thaï NGUYEN V a perçu une somme de 600.000 F à titre de redevance fixe ; qu’il ne saurait, en outre, réclamer à la société GEA ERGE SPIRALE le remboursement des annuités de renouvellement de son brevet postérieurement à la date de résiliation du contrat de licence ; Considérant que Thaï NGUYEN V demande, en second lieu, le paiement de la redevance sur le système breveté vendu à la société CERITOL, conformément à l’article 12.4 du contrat ; Que la société GEA ERGE SPIRALE, sans dénier être débitrice d’une redevance sur le

contrat CERITOL, conteste le montant réclamé ; Considérant que le coût de l’installation a été facturé à la société BECHEM CARL CERITOL pour un montant de 454.800 euros ; que le décompte produit par la société GEA ERGE SPIRALE n’est conforté par aucun élément comptable certifié ; qu’en outre, elle ne justifie pas précisément du calcul de la redevance au vu des modalités prévues à l’annexe 1 du contrat ; que la somme de 30.000 euros constitue une juste réparation du préjudice subi par le concédant du fait du non-paiement de la redevance ; Considérant que Thaï NGUYEN V ne rapporte pas la preuve que la société GEA ERGE SPIRALE a résisté à sa demande de mauvaise foi et dans l’intention délibérée de lui nuire de sorte que sa demande de dommages-intérêts doit être rejetée ; III – Sur les faits de contrefaçon et de parasitisme Considérant que Thaï NGUYEN V reproche à la société GEA ERGE SPIRALE d’avoir, dix mois après la prise d’effet de la rupture du contrat de licence, diffusé sur son site Internet une documentation relative au système breveté en le présentant comme l’une de ses innovations ; qu’il précise que la diffusion de ce document constitue une mise dans le commerce au sens de l’article L.613-3 du Code de la propriété intellectuelle ; Que la société GEA ERGE SPIRALE réplique que le site incriminé ne contient ni information de nature commerciale, ni incitation à entrer en négociation ; Mais considérant que la diffusion de cette publicité constitue, comme l’ont relevé les premiers juges, une opération matérielle tendant à mettre un produit en circulation ; que poursuivie au delà de la prise d’effet de la résiliation du contrat, elle était de nature à laisser accroire au public que la société GEA ERGE SPIRALE avait toujours la qualité de licenciée du brevet ICEBORE et caractérise un acte de contrefaçon ; que l’existence de tractations entre les parties pour renouer les liens contractuels n’autorisait pas la société GEA ERGE SPIRALE à poursuivre la diffusion de cette publicité ; Que le préjudice subi de ce fait par Thaï NGUYEN V a été exactement évalué à la somme de 5.000 euros par les premiers juges ; Considérant que l’intimé ne rapporte pas la preuve de faits distincts de la contrefaçon de nature à caractériser le grief de parasitisme ; Considérant que les mesures d’interdiction prononcées par les premiers juges pour mettre un terme aux agissements illicites seront confirmées ; qu’il en sera de même de la mesure de publication sauf à préciser qu’il sera fait mention du présent arrêt ; Considérant que les dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à Thaï NGUYEN V, la somme de 5.000 euros devant lui être allouée à ce titre ; que la solution du litige commande de rejeter la demande formée sur ce même fondement par la société GEA ERGE SPIRALE ; PAR CES MOTIFS Confirme le jugement entrepris sauf sur le montant de la redevance allouée à Thaï NGUYEN V ; Le réformant sur ce point et statuant à nouveau ; Condamne la société GEA ERGE SPIRALE à verser à Thaï NGUYEN V la somme de 30.000 euros en réparation du préjudice résultant du non-paiement de la redevance ; Y ajoutant; Dit que la mesure de publication fera mention du présent arrêt ; Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société GEA ERGE SPIRALE à verser à Thaï NGUYEN V la somme complémentaire de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne la société GEA ERGE SPIRALE aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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