Cour d'appel de Paris, 4e chambre section a, 8 novembre 2006

  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Apposition de la marque·
  • Contrefaçon de modèle·
  • Concurrence déloyale·
  • Protection du modèle·
  • Risque de confusion·
  • Effort de création·
  • Modèle de vêtement·
  • Transposition

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch. sect. a, 8 nov. 2006
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Paris, 10 aout 2005
  • 2004/64921
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Référence INPI : D20060102
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Texte intégral

Vu l’appel interjeté par la société CHARABIA du jugement rendu le 10 août 2005 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

- dit qu’en commercialisant des cardigans du modèle LINARES, la société DAUPHITEX s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon au préjudice de la société CHARABIA,
- fait interdiction à la société DAUPHITEX de fabriquer ou importer, détenir, offrir en vente ou vendre le modèle de cardigan « LINARES » ou tout autre produit contrefaisant le modèle F1 31 Filippa de la société CHARABIA, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée,
- condamné la société DAUPHITEX à payer 1 euro à titre de dommages-intérêts à la société CHARABIA,
- ordonné une publication dans la limite de 10.000 euros dans trois journaux au choix de la société CHARABIA,
- condamné la société DAUPHITEX à payer à la société CHARABIA la somme de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ; Vu les dernières écritures signifiées le 24 août 2006 par lesquelles la société CHARABIA, poursuivant la réformation du jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et sur le montant des dommages- intérêts, demande à la Cour de :

- à titre principal
- dire que la société DAUPHITEX s’est rendue coupable de faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire,
- condamner la société DAUPHITEX à lui verser la somme de 250.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de son modèle,
- condamner la société DAUPHITEX à lui verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,
- à titre subsidiaire
- condamner la société DAUPHITEX à lui régler la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts provisionnels,
- faire injonction à la société DAUPHITEX de produire, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, sous la forme de documents certifiés par son commissaire aux comptes, l’ensemble des bons de commandes, l’état des stocks, les factures de revente, les bons de livraison concernant les produits contrefaisants,
- ordonner la publication de l’arrêt à intervenir, in extenso ou par extraits, dans cinq journaux ou périodiques, aux frais de la société DAUPHITEX, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 4.000 euros,
- condamner la société DAUPHITEX à lui payer la somme de 15.000 euros en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ; Vu les ultimes conclusions signifiées le 28 septembre 2006 aux termes desquelles la société DAUPHITEX prie la cour de réformer le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté la société CHARABIA de ses demandes au titre de la concurrence déloyale, et formant appel incident, de :

- dire la société CHARABIA irrecevable à revendiquer des droits d’auteur sur le modèle de cardigan « FILIPPA F131 » dénué d’originalité,

— dire qu’elle n’a commis aucun acte de contrefaçon ou de concurrence déloyale,
- débouter la société CHARABIA de l’ensemble de ses demandes,
- ordonner la mainlevée de la saisie contrefaçon diligentée le 22 juin 2004,
- condamner la société CHARABIA à lui verser la somme de 25.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 15.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Considérant que la société CHARABIA, spécialisée dans la création et la commercialisation d’articles de prêt-à-porter pour enfants, revendique des droits d’auteur sur un modèle de cardigan dénommé « FILIPA » qu’elle caractérise ainsi :

- la présence sur la bordure inférieure d’une frange nouée de façon spécifique,
- une maille côtelée,
- des manches raglans diminuées ; Que la collection printemps-été 2003 dont fait partie le modèle ci-dessus a été déposée, entre les mains de Maître B, huissier de justice, suivant procès-verbal de constat du 21 juin 2002 ; Que reprochant à la société DAUPHITEX qui exploite la marque « LILI GAUFRETTE » de commercialiser un cardigan reproduisant les caractéristiques du modèle « FILIPA », la société CHARABIA, après avoir fait pratiquer une saisie-contrefaçon dans un de ses magasins, l’a assignée devant le tribunal de commerce de Paris en contrefaçon et concurrence déloyale ; I – Sur la protection du modèle dénommé « FILIPA » par le droit d’auteur Considérant que, pour contester l’originalité de ce modèle, la société DAUPHITEX soutient qu’elle a utilisé avant la société CHARABIA l’ensemble des caractéristiques revendiquées qui résulteraient de la combinaison de deux modèles dénommés « LEGANA », « LAUGIER » et « LIEGE » issus de ses propres collections « LILI GAUFRETTE » et qu’en outre, le choix d’associer un élément décoratif constitué d’une bordure à franges à un modèle classique de cardigan pour bébé ne confère pas à ce vêtement une physionomie propre ; Qu’il convient donc d’examiner la teneur et la portée de ces trois modèles ; 1) Sur le modèle « LEGANA » Considérant que la société DAUPHITEX produit aux débats la copie officielle de la déclaration de dépôt simplifié du modèle « LEGANA » en date du 1(er) juin 2001, à laquelle est joint un croquis du « sweat manches longues » numéroté 59/1 ainsi qu’une fiche produit, une fiche technique et une photographie du dit modèle ; Qu’il ressort de l’examen de ces pièces que ce vêtement, en forme de pull-over à encolure ronde, réalisé en maille à côtes simples, comporte des manches montées droites et une bordure inférieure constituée d’une frange courte, formée de pompons, comme indiqué sur la fiche technique ;

2) Sur les modèles dénommés « LAUGIER » et « LIEGE » Considérant que les fiches produit de ces deux modèles, dont la datation est établie par un procès-verbal de constat d’huissier du 18 septembre 2001, sont illustrées de deux croquis légendes laissant apparaître les caractéristiques suivantes :

- modèle « LAUGIER » : un gilet à côtes plate 4 X 4 avec une bande décolorée en bas sur le devant et le dos, des emmanchures diminuées,
- modèle « LIEGE » : un pull côte plate jauge 9 (4 X 4), emmanchures diminuées (raglan), encolure dégagée, finition encolure bord côte 1 X 1, bande décolorée en bas du pull sur dos + devant (hauteur 4 cm) ; Considérant que la société DAUPHITEX établit, par l’extrait du dictionnaire du textile et les photographies produites aux débats, que l’apposition de franges, qui relèvent de l’art de la passementerie, est couramment utilisée dans le domaine vestimentaire, notamment pour l’ornementation des châles et écharpes ; que la société DAUPHITEX justifie avoir, antérieurement à la divulgation du modèle « FILIPA », transposé cet élément décoratif sur la bordure inférieure des pulls-over pour enfants, en élaborant le modèle « LEGANA » ; que l’examen du dessin annexé au dépôt du 1(er) juin 2001 révèle que la bordure, dite à pompons dans la fiche technique, s’apparente à une frange nouée, dont seule diffère la longueur des fils ; Considérant que les autres caractéristiques du cardigan « FILIPA » revendiquées par la société CHARABIA se retrouvent dans les modèles antérieurs invoqués par la société DAUPHITEX :

- le tricotage en maille côtelée dans le gilet « LAUGIER » et le pull « LIEGE »,
- les emmanchures raglan diminuées, dans le pull « LIEGE » ; Considérant qu’il s’ensuit que la combinaison d’une frange nouée, simple reprise d’un ornement décoratif déjà présent sur les vêtements en maille pour enfants, à un gilet à côtes plates et emmanchures raglan diminuées, forme constante et banale dans les modèles destinés au jeune âge, n’est pas révélatrice d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur ; Que le modèle « FILIPA » ne pouvant bénéficier de la protection instituée par le livre I du Code de la propriété intellectuelle, l’action en contrefaçon fondée sur celui-ci est irrecevable ; II – Sur la concurrence déloyale Considérant que la société CHARABIA reproche à la société DAUPHITEX des agissements constitutifs de concurrence déloyale résultant de l’imitation du modèle « FILIPA » de nature à engendrer un risque de confusion et sa banalisation, de la reprise de coloris identiques et de la pratique de prix inférieurs ; Mais considérant qu’il a été précédemment relevé que la société DAUPHITEX commercialisait antérieurement des modèles en maille tricotée et des pulls ornés de franges de sorte que la mise sur le marché du modèle « LINARES » litigieux ne traduit pas un comportement fautif ; qu’en outre, le cardigan « LINARES » étant commercialisé, revêtu de la marque « LILI GAUFRETTE », apposée sur l’étiquette du col et sur le devant, sur une vignette en tissu ornée de l’expression « LILI pour la vie », le risque de confusion n’est pas caractérisé, étant relevé, au surplus, que lors de la mise sur le marché en 2004 du cardigan « LINARES », la société CHARABIA avait cessé de commercialiser son modèle « FILIPA » et que les ventes de ce dernier en France n’ont pas dépassé 43

exemplaires ; Que la reprise des mêmes coloris ne saurait caractériser un agissement déloyal, s’agissant de couleurs pastels banales dans le domaine de l’habillement des jeunes enfants ; Que la différence infime entre les prix de vente pratiqués (64 euros pour le modèle LINARES, 75 euros pour le modèle FILIPA) ne démontre pas davantage une volonté d’accaparer de manière fautive la clientèle du concurrent ; Que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu’il a rejeté le grief de concurrence déloyale ; III – Sur les autres demandes Considérant que la société CHARABIA a pu de bonne foi se méprendre sur la portée de ses droits sur le modèle « FILIPA » de sorte que la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société DAUPHITEX doit être rejetée ; Considérant, en revanche, que les dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à la société DAUPHITEX, la somme de 15.000 euros devant lui être allouée à ce titre ; Que la solution du litige commande de débouter la société CHARABIA de sa demande formée sur ce même fondement ; PAR CES MOTIFS Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société CHARABIA de ses demandes au titre de la concurrence déloyale, Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau, Déclare irrecevable l’action en contrefaçon formée par la société CHARABIA, Y ajoutant, Déboute la société DAUPHITEX de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, Condamne la société CHARABIA à payer à la société DAUPHITEX la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la société CHARABIA aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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