Cour d'appel de Paris, CT0175, du 12 septembre 2006, 25

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, ct0175, 12 sept. 2006, n° 25
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 25
Importance : Inédit
Décision précédente : Autorité des marchés financiers, 15 septembre 2005
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006952456
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

1ère Chambre – Section H

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2006

(no 25, 10 pages) Numéro d’inscription au répertoire général :

2005/24231 Décision déférée à la Cour : rendue le 16 septembre 2005 par l’AUTORITÉ DES MARCHES FINANCIERS DEMANDEUR AU RECOURS : – M. Bruno X… né le 22 décembre 1954 à NEUILLY SUR SEINE Nationalité : Française Profession : Administrateur de société Demeurant : … 75015 PARIS représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués associés près la Cour d’Appel de PARIS assisté de Maître Paul-Albert IWEINS, avocat au barreau de PARIS Toque J 10 cabinet TAYLOR WESSING 42, avenue Montaigne 75008 PARIS – la société EURAZEO, SA agissant poursuites et diligences de son représentant légal dont le siège social est : 3, rue Jacques Bingen 75017 PARIS représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués associés près la Cour d’Appel de PARIS assistée de Maître Jean-François PRAT, avocat au barreau de PARIS Toque T 12 cabinet BREDIN PRAT 130, rue du faubourg Saint Honoré 75008 PARIS EN PRÉSENCE : – l’AUTORITÉ DES MARCHES FINANCIERS 17 Place la Bourse 75082 PARIS représentée par Mme Brigitte Y… et Mme Florence Z…, munies d’un pouvoir COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 30 mai 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

— M. Alain CARRE-PIERRAT, Président

— M. Henri LE DAUPHIN, Conseiller

— Mme Agnès A…, Conseillère

qui en ont délibéré GREFFIER, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU MINISTÈRE B… : L’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. Hugues C…, Avocat Général, qui a fait connaître son avis. ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par M. Alain CARRE-PIERRAT, Président

— signé par M. Alain CARRE-PIERRAT, président et par M. Benoît TRUET-CALLU, greffier présent lors du prononcé. [* *] [* *]

A la fin de l’année 1999, le titre de la société EURAFRANCE ayant subi une importante décote par rapport à la valeur de ses actifs et afin de corriger cette situation, son Conseil d’administration a décidé de proposer à l’assemblée générale un programme de rachat d’actions qui a donné lieu à un avis, préalablement visé par la COB, publié le 6 décembre 1999, qui a été adopté par l’assemblée générale du 21 décembre 1999 .

Le 26 décembre 1999, le groupe UBS WARBURG a annoncé, par voie de communiqué, avoir franchi le seuil de 10% de participation dans le capital de la société EURAFRANCE, expliquant son investissement par l’importante décote existant entre la valeur des actions EURAFRANCE et sa valeur d’actif net .

Fin novembre 2000, le conseil d’administration de la société EURAFRANCE a annoncé qu’il soumettrait à sa prochaine assemblée générale une nouvelle résolution spécifique visant à une politique active de rachat de ses propres actions pour les annuler et réduire ainsi sa décote qui a été votée par l’assemblée générale du 18 décembre 2000.

M. Bruno X…, secrétaire général de la société EURARANCE, chargé par M. Bruno D…, vice-président directeur général de la société, de la mise en .uvre de cette politique, a confirmé à la société de Bourse CAI Chevreux (ci-après CAIC) ses instructions de rachat des actions de la société, au jour le jour, pour la période allant du 19 décembre 2000 au 27 février 2001 .

Lors des trois journées des 24 janvier, 8 et 27 février 2001, la société EURAZEO, venant aux droits de la société EURAFRANCE, a acquis, hors marché et à l’issue de la séance de bourse, trois blocs de ses titres .

Le 15 mars 2001, le directeur général de la COB a confié au service de l’inspection de cette autorité une enquête sur le marché du titre de la société EURAFRANCE à compter du 1er février 2001 et sur le rachat de ses propres titres auquel elle a opéré .

A l’issue de son enquête, le service de l’inspection de l’Autorité des marchés financiers ( ci-après l’AMF ) a rédigé un rapport, en date du 24 novembre 2003 (cotes 000853 à 001113 du dossier de l’AMF), aux termes duquel la société EURAFRANCE et M. Bruno X… auraient commis diverses infractions au règlement n 90-04 de la COB dans le cadre de son programme de rachat d’actions, et qu’une série d’intermédiaires, la société de bourse EXANE, la société de gestion ELLIOT ASSOCIATES, la société de bourse CAI Chevreux, auraient, durant les mois de janvier et février 2001, acheté des titres EURAFRANCE dans le but de faire monter le cours du titre afin de permettre leur revente à un cours artificiellement gonflé à la société EURAFRANCE, l’inspection concluant que l’ensemble de ces faits s’inscrivaient dans le cadre d’une politique délibérée de hausse du cours, destinée à permettre à EURAFRANCE de racheter sa participation à un actionnaire minoritaire à un cours pré-déterminé ;

Le 16 juin 2004, l’AMF a notifié les griefs retenus par la Commission spécialisée du Collège de l’AMF , au cours de sa séance du 27 janvier 2004, à l’encontre de : -

la société EURAFRANCE, devenue la société EURAZEO, représentée par M. E…, pour avoir communiqué des informations privilégiées, en contravention avec les dispositions des articles 1er, 2 et 3 du Règlement COB n 90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée, et avoir réalisé des transactions qui constituaient une entrave à l’établissement des cours, susceptibles de donner lieu à une sanction sur la base des articles 2, 3 et 7 du Règlement COB n 90-04 , – M. Bruno X…, secrétaire général de la société EURAFRANCE, pour avoir communiqué des informations privilégiées, en contravention avec les dispositions des articles 1er, 2 et 3 du Règlement COB n 90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée, et autorisé des transactions qui constituaient une entrave à l’établissement des cours, susceptibles de donner lieu à une sanction sur la base des articles 2, 3 et 7 du Règlement COB n 90-04 , -

MM. Emmanuel F… et Marc G…, vendeurs chez EXANE, pour avoir respectivement communiqué et exploité des informations privilégiées en méconnaissance des articles 1er et 4 du Règlement COB n 98-08 et pour avoir l’un et l’autre entravé le libre établissement des cours, comportements susceptibles de donner lieu à sanction sur la base des articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n 90-04 et de l’article 3-4-10 du Règlement général du Conseil des marchés financiers (RGCMF), -

la société EXANE pour avoir exploité une information privilégiée, en méconnaissance des articles 1er et 4 du Règlement COB n 98-08 et pour avoir entravé le libre établissement des cours, comportement susceptible de donner lieu à sanction sur la base des articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n 90-04 et de l’article 3-4-10 du RGCMF , -

MM. H… d’Espouy et Philippe Guyot, du CAIC, pour avoir entravé le libre établissement des cours, comportements susceptibles de donner lieu à sanction sur la base des articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n 90-04 et de l’article 3-4-10 du RGCMF .

Le 16 septembre 2005, la Commission des sanctions de l’AMF a prononcé, sur le fondement du Règlement COB n 90-04, relatif à l’établissement des cours, les sanctions pécuniaires suivantes :

* 500.000 euros à l’encontre de la société EURAZEO, prise en sa qualité d’émetteur,

* 50.000 euros à l’encontre de M. Bruno X…, secrétaire général de la société EURAZEO ,

* 300.000 euros à l’encontre de la société EXANE, prestataire de services d’investissement ,

* 50.000 euros à l’encontre de M. I…

G…, sales Trader de la société EXANE ,

* avertissement à l’encontre de M. Emmanuel F…, sales Trader de la société EXANE , et a prononcé la mise hors de cause de M. H… d’Espouy, directeur du sales trading de la société Credit Agricole Indosuez Chevreux (CAIC) et celle de M. Philippe J…, facilitateur de la même société ,

LA COUR ,

Vu le recours formé par la société EURAZEO, le 16 décembre 2005, à l’encontre de cette décision ;

Vu l’exposé des moyens invoqués, déposé le 16 décembre 2005, par lequel la requérante demande à la cour :

* à titre principal, d’annuler dans toutes ses dispositions la décision déférée,

* à titre subsidiaire, de la réformer et, statuant à nouveau, de constater qu’aucun manquement n’est susceptible d’être caractérisé à

son encontre , et, d’ordonner, aux frais de l’AMF, la publication de l’arrêt à intervenir au bulletin des annonces légales obligatoires, ainsi que sur le site internet de l’AMF ;

Vu le recours formé par M. Bruno X…, le 16 décembre 205, à l’encontre de cette décision ;

Vu l’exposé des moyens invoqués, déposé le 16 décembre 2005, par lequel le requérant demande à la cour :

[* à titre principal, d’annuler dans toutes ses dispositions la décision déférée ,

*] à titre subsidiaire, de la réformer et, statuant à nouveau, de constater qu’aucun manquement n’est susceptible, en tant que personne publique, de lui être imputé ,

[* à titre plus subsidiaire, de constater que c’est à tort que la commission des sanctions de l’AMF a cru pouvoir déceler son rôle personnel dans la réalisation des manquements allégués ,

*] de dire en conséquence, n’y avoir lieu à sanction à son encontre ; Vu les observations déposées le 20 mars 2006 par L’AMF tendant au rejet des recours ;

Vu les mémoires en réplique des requérants, déposés le 27 avril 2006, aux termes desquels ils demandent, au visa de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de constater que l’AMF développe dans ses observations des moyens et éléments nouveaux et verse aux débats des pièces nouvelles et, à titre principal, d’annuler la procédure devant la cour et par voie de conséquence de prononcer la nullité de l’ensemble de la procédure de sanction ainsi que la nullité de la décision frappée de recours, la société EURAZEO précisant que faute de pouvoir bénéficier, le cas échéant, d’un recours de plein contentieux contre la décision de la cour, il n’y a pas lieu que

celle-ci se prononce sur le fond, et, à titre subsidiaire, d’écarter les pièces no2A et 2C produites devant la cour ;

Ou’ à l’audience du 30 mai 2006, les conseils de la société EURAZEO et de M. Bruno X…, la représentante de l’AMF, le représentant du ministère public en ses observations tendant au rejet du recours, les conseils des requérants ayant eu la parole en dernier ;

SUR CE ,

* sur les demandes en annulation :

Considérant que les requérants font, en premier lieu, valoir à cette fin que, en violation des dispositions de l’article 6 OE 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et des articles R.621-38 à R.621-40 du Code monétaire et financier, l’AMF les a sanctionnés en s’appuyant sur des faits dont elle n’était pas saisie et sur lesquels ils n’ont pas été appelés à s’expliquer, en soutenant que la Commission des sanctions a fondé sa décision non seulement sur l’existence d’une collusion entre Eurafrance et Exane en vue de l’acquisition à un prix artificiellement élevé de la participation d’UBS Warburg, mais également sur une collusion entre Eurafrance et UBS Warburg elle-même, prétendument destinée à contourner le refus de la COB d’autoriser un rachat du bloc d’UBS Warburg ; qu’ils soulignent, en outre, que rien ne permet de déterminer dans la décision sur quels éléments se fonde la Commission pour prétendre, afin d’étayer sa thèse d’une manipulation destinée à permettre la vente de ce bloc, que le refus du Collège de la COB était intervenu le matin du rachat du bloc d’UBS, le 27 février 2001, dès lors que l’extrait du procès-verbal de la réunion de ce Collège ne précise pas l’heure à laquelle celle-ci s’est tenue ;

Mais considérant que force est de constater, d’abord, que la décision critiquée ne fait pas référence à une quelconque collusion et, ensuite, que la notification de griefs, visant plusieurs transactions de bloc (…) effectuées hors séance au dernier cours coté par Exane au profit d’Eurafrance ( soit 2.817.310 titres rachetés) entre le 24 janvier et le 27 février 2001…, incriminait, sans ambigu’té, les circonstances du rachat par la société Eurafrance d’une partie de la participation d’UBS Warburg à son capital qui est effectivement intervenu sous forme d’une transaction de bloc hors séance ;

Et que la Commission spécialisée du Collège n’a pas à spécifier dans la notification de griefs les mobiles qui ont conduit les mis en cause à commettre des manquements, cette notification ne devant comporter que les agissements et leur qualification juridique et non les éléments de preuve qui figurent dans le rapport d’enquête et que la Commission des sanctions à l’obligation d’analyser;

Que, en tout état de cause, il convient de relever, d’abord, que la société EURAZEO a, devant la Commission des sanctions, contesté que EURAFRANCE ait mis en oeuvre une politique délibérée de hausse du cours destinée à permettre à UBS WARBURG de lui vendre sa participation et qu’aucun accord n’était intervenu entre EURAFRANCE et UBS WARBURG sur le rachat d’une quantité de titres, ni sur un quelconque prix d’achat, avant le 27 février 2001 et que, ensuite, M. Bruno X… ne saurait soutenir que le rapporteur, désigné au sein de la Commission des sanctions, n’ayant, dans le cadre de son rapport du 27 mai 2005, examiné le dossier qu’à l’aune de la notification de griefs, sans évoquer la thèse du service de l’inspection d’un détournement du programme de rachat destiné à l’acquisition du bloc d’UBS Warburg par Eurafrance, il n’avait pas considéré devoir formuler d’observations ou saisir le rapporteur de demandes, à ce titre, alors qu’il avait l’entière latitude de formuler toutes

observations utiles sur cet acte de procédure ainsi que sur l’enquête qui était jointe et qui, dès la première page du rapport, évoquait les relations entre les sociétés EURAFRANCE et UBS WARBURG, et qu’il lui était loisible de demander l’audition, de toute personne dont le témoignage lui paraissait utile à la manifestation de la vérité;

Considérant que, en deuxième lieu, M. Bruno X… n’est pas fondé à invoquer une violation des droits de la défense motif pris que

Considérant que, en deuxième lieu, M. Bruno X… n’est pas fondé à invoquer une violation des droits de la défense motif pris que le service de l’inspection de l’AMF a vicié la procédure, dirigeant le Collège puis la Commission des sanctions vers une thèse contraire à la réalité et empêchant la Commission de statuer de façon impartiale, en omettant de retranscrire et de traduire des enregistrements de conversations tenues en langue anglaise, contraires à la thèse de l’accusation, dès lors que, d’une part, il n’est pas contesté que l’intégralité des enregistrements a été mise à la disposition du requérants et que, d’autre part, l’obligation de traduction concerne l’acte d’accusation, en l’espèce la notification de griefs, la personne poursuivie devant être, aux termes de l’article 6.3 a) de la Convention, informé dans une langue qu’il comprend et de manière détaillée, de la nature de la cause de l’accusation portée contre lui, et non certains des éléments d’appréciation versés aux débats, d’autant que M. Bruno X… a lui-même remis une pièce en langue anglaise sans traduction ( dépêche Bloomberg , cotes 1552-1553), circonstance qui démontre sa connaissance de cette langue en usage sur les marchés financiers et usuellement pratiquée dans l’environnement professionnel du secrétaire général d’une société d’investissement de l’importance de la société EURAFRANCE ; que, en tout état de cause, Bruno X… ne soutient pas n’avoir aucune connaissance de cette langue, ni même n’allègue en avoir une pratique

insuffisante ;

Considérant que, en troisième lieu, la société EURAZEO prétend que les observations de l’AMF devant la cour portent atteinte au caractère équitable de la procédure dès lors que ces observations et la production de nouvelles pièces ( pièces 2A et 2C) n’ont pas été soumises à la contradiction devant la Commission des sanctions, de sorte que se trouveraient modifiés les termes du débat tenu devant celle-ci et changé les termes de l’accusation ;

Mais considérant que la faculté offerte à l’AMF par l’article R.621-46 du Code monétaire et financier, de présenter dans la procédure du recours des observations écrites communiquées aux parties ne porte pas atteinte par elle-même aux droits de l’auteur du recours à un procès équitable dès lors que celui-ci dispose de la faculté, en l’espèce mise en oeuvre par la société EURAZEO , d’y répliquer par écrit et oralement ; qu’au demeurant les nouvelles pièces produites aux débats et les longs développements de l’AMF ne sont pas de nature à modifier les termes du débat tels que posés par la notification des griefs ;

Qu’il suit de là que ces moyens qui ne sont pas fondés, seront rejetés ;

* sur le fond :

Considérant que, à titre préliminaire, il convient d’adopter la motivation retenue par la Commission des sanctions et les conséquences juridiques qu’elle en a tirées quant à l’application du règlement COB no 90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée, du règlement COB no 90-04 relatif à l’établissement des cours, du règlement général du CMF et des articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier ;

Que, en outre, il y a lieu de relever que la société EXANE, M. I…

G… et M. Emmanuel F… n’ont pas contesté les manquements qui leur ont été imputés quant à la manipulation de cours des actions de la société EURAFRANCE, ni les sanctions prononcées à leur encontre ; sur la présomption de légitimité de la société EURAFRANCE :

Considérant que la société EURAZEO soutient qu’elle a été sanctionnée abusivement pour n’avoir pas respecté les présomptions de légitimité posées, pour l’émetteur dans l’exécution de son programme de rachat, par l’article 7 du règlement COB no 90-04, relatives aux seuils ou plafonds d’intervention et avoir été en collusion permanente avec UBS WARBURG ;

Mais considérant que la Commission des sanctions a justement relevé que les interventions de la société EURAFRANCE, par l’intermédiaire de CAIC, dans le cadre du programme de rachat d’actions ont présenté, du 19 décembre 2000 au 27 février 2001, deux caractéristiques simultanées, puisqu’elles se sont le plus souvent déroulées dans la dernière demi-heure de cotation, au plus haut de la fourchette et à la limite des 25%, celle-ci ayant été dépassée à quatre reprises ;

Qu’en effet, il résulte des éléments du dossier, d’abord, qu’au cours des 48 séances, où CAIC a mis en oeuvre le programme de rachat, 43 des interventions de cette dernière ont eu lieu pendant la dernière demi-heure de cotation, étant précisé que 30 de ces interventions représentaient plus de la moitié du volume de la demi-heure et 11 plus de 90% de ce volume; que la société EURAZEO ne saurait contester que ces interventions de la dernière demi-heure ont significativement influencé les derniers cours cotés du titre EURAFRANCE, afin d’obtenir un effet haussier du cours de son titre, avec pour objectif le rachat de bloc de titres hors séance ;

Que, ensuite, ces interventions, distinctes de celles ayant permis

des transactions de blocs hors séance, au dernier cours coté, ont été telles que le montant total de rachat a dépassé les 10 % du capital dans un laps de temps de deux mois et demi, pour atteindre un total de 11,18 % du capital ;

Que, surtout, au regard de la réglementation relative à la présomption de légitimité, la société EURAFRANCE a, en janvier 2001, dépassé la limite des 25%, à hauteur de 90,5 % le 3, de 24,5 % le 4, de 16,9 % le 11 et de 6,5 % le 12, avec des interventions représentant respectivement 37,4 %, 9,2 %, 38,4% et 48,5 % des échanges , alors qu’il lui appartenait de veiller au respect de ce plafond ;

Considérant qu’il s’évince de ces constatations purement objectives que c’est à bon droit que la décision critiquée a retenu que la société EURAFRANCE ne saurait se prévaloir d’une quelconque présomption de légitimité pour l’exécution de son programme, dès lors qu’elle a transgressé les plafonds quotidiens de rachats ;

sur le manquement de manipulation de cours :

Considérant que les requérants posent comme postulat, au soutien de leur critique de la décision attaquée, que la Commission des sanctions de l’AMF a entendu sanctionner une collusion nouée entre la société EURAFRANCE et la société UBS WARBURG ;

Mais considérant que si, ainsi qu’il l’a été précédemment retenu, la Commission a fait état dans sa décision de la très forte préoccupation de la société EURAFRANCE de diminuer la participation de cet associé en acquérant auprès de lui, au prix – nécessairement élevé – qui lui conviendrait, un bloc de titres, la motivation de cette décision ne se fonde pas sur des considérations liées au mobile qui aurait inspiré les requérants, mais exclusivement sur une analyse purement factuelle et technique prenant en

considération tant l’évolution du cours de bourse que le rôle tenu par chacun des intervenants à l’occasion des transactions de bloc hors séance intervenues les 24 janvier, 8 et 27 février 2001 ;

Que, néanmoins, au-delà de ce postulat, la société EURAZEO produit aux débats une consultation du professeur K…, relative à l’évolution du cours de bourse du titre EURAFRANCE, et appuie son argumentation quant à l’absence de manipulation de cours, avec M. Bruno X…, sur l’analyse de différents enregistrements ;

Considérant, en premier lieu, que l’analyse faite par le professeur K…, si elle tend à minimiser l’évolution haussière du cours de l’action EURAFRANCE, présente une approche essentiellement théorique qui fait largement abstraction des données purement factuelles et objectives relevées, à juste titre, par la Commission des sanctions ;

Qu’en effet, l’analyse de la mise en oeuvre par la société EURAFRANCE de son programme de rachat, du 19 décembre 2000 au 27 février 2001, démontre que tant l’évolution du cours de son titre, en hausse continue, que l’augmentation significative des volumes échangés, sont en nette rupture avec la période antérieure; que, l’on relève, ainsi, que le titre coté 73 ç, début janvier 2001, a atteint 83,6 ç en clôture le 27 février 2000, cette dernière séance, en hausse de 6,5 % par rapport à la veille, ayant marqué la fin de cette période haussière, étant, en outre, relevé que le titre EURAFRANCE s’était, à partir du 6 février 2001, nettement désolidarisé du CAC 40 et de manière totalement opposée, à la hausse; que, par ailleurs, il y a lieu de souligner que, après cette période, le titre a connu une forte baisse, passant de 83,6 çle 27 février à 66 ç le 22 mars 2001, soit une décote de 21 % ;

Que les volumes moyens quotidiens échangés en séance sur le titre EURAFRANCE ont été beaucoup plus significatifs pendant cette période

que lors de la précédente, ces volumes étant de 31

525 titres, entre le 1er janvier et le 18 décembre 2000, en séance, 31 transactions de blocs hors séance étant intervenues pour un montant total de 81

220 titres correspondant à 7,8 % des volumes échangés en séance, alors que sur la période de mise en oeuvre de son programme de rachat, entre le 19 décembre 2000 et le 27 février 2001, on relève trois transactions en séance (113

200, 450

000 et 400

000 titres) ainsi que trois transactions hors séance (326

000, 284

639 et 2

500

000 titres), étant précisé que hors ces six transactions, le volume total échangé a été de 2

105

168 titres, de sorte que si l’on compare cette période de rachat au reste de l’année 2000, les volumes quotidiens sont en hausse de 39 %, hors les six transactions de blocs, et de 279 % en prenant en compte ces six transactions ;

Que la société EURAZEO soutient, vainement, pour expliquer la tendance haussière, au cours de la période de rachat, de l’action EURAFRANCE qu’elle serait la conséquence des effets d’une réduction de capital de 4,55 %, intervenue le 5 février 2001, et d’une division du nominal de l’action par 10, opérée le 8 février 2001; qu’en effet l’annulation de 4,55 % du capital n’explique pas le décrochage du cours du titre EURAFRANCE par rapport au CAC 40, une telle annulation ne pouvant avoir pour effet qu’un décalage ponctuel sur la journée de l’annonce de la réduction du capital, les deux cours devant, par la suite, évoluer en parallèle, alors qu’il a été constaté, ainsi que précédemment relevé, que le cours de ce titre s’est désolidarisé du CAC 40 sur plusieurs semaines et dans des proportions importantes; que, de même, l’étude et la pratique des marchés enseignent que la division du nominal de l’action par 10 n’a produit un réel impact sur l’évolution du cours que pour une durée relativement brève ;

Considérant, en second lieu, que la Commission des sanctions a procédé à une analyse précise et circonstanciée, notamment au plan

chronologique, des transactions intervenues les 24 janvier, 8 et 27 février 2001, ainsi que des communications téléphoniques enregistrées entre les différents protagonistes à ces transactions, de sorte que la cour, s’y référant expressément, en adopte la motivation ;

Considérant que la société EURAZEO, pour en contester le bien-fondé, soutient vainement, d’abord, que le service de l’inspection a reconnu ne pas avoir établi un rôle d’EURAZEO dans l’organisation de manoeuvres sur le marché du titre et d’en conclure que cette constatation aurait dû suffire pour qu’aucune condamnation ne soit prononcée à leur encontre, alors qu’en réalité si le rapport d’enquête conclut comme non établie l’ampleur exacte du rôle de M. Bruno X… -et non d’EURAZEO – dans l’organisation des manoeuvres, il n’en précise pas moins qu’on peut toutefois considérer que M. Bruno X… a été directement associé à ces manoeuvres les manoeuvres de M. I…

G… et qu’EURAZEO en a bénéficié ( cote 1092 ) ;

Que, ensuite, les extraits des enregistrements invoqués, devant la cour, par les requérants, dont il convient de relever qu’ils sont souvent tronqués, ne sont pas de nature à modifier, lorsqu’ils sont repris dans leur intégralité et situés dans leur chronologie, l’appréciation portée par la Commission des sanctions sur l’implication de M. Bruno X… et de la société EURAFRANCE dans la manipulation de cours qui leur a été justement imputée relativement aux interventions des 24 janvier, 8 et 21 février 2001 ;

sur l’imputabilité du manquement :

Considérant que M. Bruno X… soutient que les manquements invoqués à son encontre ne sauraient lui être imputés personnellement motifs pris, d’une part, que, s’agissant de l’exécution d’un programme de rachat d’actions, le champ d’application du chapitre II du règlement

COB no 90-04, régissant le rachat par un émetteur de ses propres titres, est limité par l’article 6 dudit règlement aux seules personnes morales et ne permet pas d’imputer des manquements, à ce titre, aux personnes physiques et que, d’autre part, la Commission a abusivement estimé qu’il bénéficiait d’une autonomie personnelle pour la mise en place et la mise en oeuvre des manipulations de cours ;

Mais considérant, en premier lieu, que la Commission l’a, à bon droit, sanctionné non pas sur le fondement de l’article 6 précité, mais des articles 2 et 3 du même règlement qui sont applicables tant aux personnes morales qu’aux personnes physiques ;

Et considérant, en second lieu, que la Commission a pertinemment retenu que M. Bruno X… a personnellement, en sa qualité de secrétaire général de la société EURAFRANCE, conduit, en termes d’initiative, de coordination et d’exécution, le programme de rachat en cause, la seule circonstance qu’il ait pu faire valider certaines de ses décisions par M. Bruno D…, vice-pdg de la société EURAFRANCE, si elle est de nature à justifier la mise en cause de cette société et à caractériser le manquement qui lui est imputé, n’ayant pas pour effet, au vu de son implication personnelle, telle qu’elle a été établie, de l’exonérer de sa propre responsabilité ;

sur l’imputabilité du manquement à la société EURAZEO :

Considérant qu’il a été précédemment retenu que la société émettrice n’a pas respecté les conditions qui auraient pu lui permettre de bénéficier de la présomption de légitimité et, force est de constater, que, ainsi qu’établi par les enregistrements téléphoniques, la société EURAZEO parfaitement informée du déroulement de la nature des opérations de rachat de ses titres, loin de manifester la moindre opposition aux interventions litigieuses, y a activement participé en acquérant des blocs de titres hors séance

avec la connaissance du caractère artificiellement haussier des cours ;

Qu’il suit de là que la Commission des sanctions a justement retenu que la société EURAZEO s’est abstenue de désavouer, au cours de la période de référence, tant l’une quelconque des interventions illicites qu’elle a contribué à faire mettre en oeuvre que l’un quelconque des intervenants qui ont agi pour son compte ;

sur les sanctions :

Considérant que les manipulations de cours ainsi imputées tant à la société EURAZEO qu’à M. Bruno X…, revêtent, eu égard à l’importance du volume des transactions opérées directement liée à la répétition des opérations illicites, une gravité particulière dès lors que le fonctionnement du marché, ainsi que la Commission des sanctions l’a parfaitement caractérisé, par une motivation propre à être adoptée par la cour, a été constamment faussé pendant toute la durée du programme de rachat du titre EURAFRANCE ;

Qu’il suit de là que la Commission des sanctions a, au regard de l’ensemble de ces éléments, fait une juste appréciation des sanctions prononcées tant à l’égard de la société EURAZEO que de M. Bruno X…, de sorte que leurs recours seront rejetés ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette les recours de la société EURAZEO et de M. Bruno X… ,

Laisse les dépens à leur charge. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code monétaire et financier
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Cour d'appel de Paris, CT0175, du 12 septembre 2006, 25