Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 5 mai 2006, n° 05/03794

  • Reproduction des caractéristiques essentielles·
  • Antériorité du modèle argué de contrefaçon·
  • Imitation de la présentation des produits·
  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Assignation dans le délai de quinzaine·
  • Fait distinct des actes de contrefaçon·
  • Dessins sur des articles de vaisselle·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Imitation de la gamme de produits·
  • Validité du constat d'huissier

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 5 mai 2006, n° 05/03794
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 05/03794
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bobigny, 2 février 2005, N° 2004/1129
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Bobigny, 3 février 2005
  • 2004/01129 (réquisition)
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 004007
Classification internationale des dessins et modèles : CL19-99
Référence INPI : D20060056
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Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS 4e Chambre – Section B ARRÊT DU 5 MAI 2006 (n° , 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 05/03794 Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2005 – Tribunal de commerce de BOBIGNY – RG n° 2004/1129

APPELANTE S.A.R.L. SOIZICK représentée par son gérant ayant son siège […] 06800 CAGNES SUR MER représentée par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour, assistée de Maître Emmanuelle H, avocat au Barreau de Paris, C610

INTIMEE S.A.R.L. PERLIMPIMPIN en la personne de son gérant, dont le siège social est […] 06600 ANTIBES représentée par Maître Pascale BETTINGER, avoué à la Cour, assistée de Maître Philippe A, avocat au Barreau de Grasse.

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire, après rapport oral prévu par l’article 31 du décret n°205 1678 du 28 décembre 2005, a été débattue le 17 mars 2006, en audience publique, devant la cour composée de : Madame PEZARD, président, Madame REGNIEZ, conseiller, Monsieur MARCUS, conseiller, qui en ont délibéré.

GREFFIER, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé en audience publique par Madame PEZARD, président.

— signé par Madame PEZARD, président et par L. MALTERRE-PAYARD, greffier présent lors du prononcé. La cour est saisie de l’appel interjeté par la S A SOIZICK (ci-après la société SOIZICK) à rencontre d’un jugement du 3 février 2005 contradictoirement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny qui :

- a dit l’action de la société SOIZICK recevable, – s’est déclaré compétent,
- a reçu la société SOIZICK en ses demandes mais les a dites mal fondées et l’en a déboutée,
- a débouté la société à responsabilité limitée PERLIMPIMPIN (ci-après la société PERLIMPIMPIN), venant aux droits de Madame Christelle V, de sa demande de dommages et intérêts,
- a condamné la société SOIZICK à payer à la société PERLIMPIMIN, venant aux droits de Madame Christelle V, la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et débouté la société PERLIMPIMPIN du surplus de sa demande,
- a rejeté, comme irrecevable ou mal fondée, toute autre demande des parties incompatible avec la motivation retenue ci-dessus ou le dispositif et les en a déboutées,
- a condamné la société SOIZICK aux dépens ;

Il convient de rappeler que : Le 3 juillet 2000, Madame S de LA BRUGUIERE (ci-après Madame de L), de son vrai nom LARACINE, a déposé à l’INPI, sous le numéro d’enregistrement 00 4007, vingt-quatre dessins en couleur opposables sur tous supports. Elle produit et vend des pièces de vaisselle destinées aux arts de la table, en porcelaine blanche de Limoges et cristal de Bohème, peintes à la main avec des motifs qu’elle a créés. Le 20 septembre 2001, elle a adressé à Madame Christelle V (ci-après Madame V) qui exploite un magasin à l’enseigne PERLIMPIMPIN à Antibes (06) une lettre de mise en demeure, suite à un procès-verbal de constat d’huissier établi le 26 juillet 2001, pour que cesse la vente d’articles qui, selon elle, sont des produits contrefaisant ses créations. En octobre 2002, s’est constituée la société SOIZICK dont les co-gérants sont Monsieur Dominique G et Madame de L. La société SOIZICK a acheté l’ensemble des droits de création et de commercialisation (en exclusivité) de Madame de L. Le 17 mars 2004, elle a adressé à la société PERLIMPIMPIN une nouvelle lettre de mise en demeure, recommandée A/R, à la suite d’un procès-verbal de constat d’huissier dressé au salon « MAISON & OBJET » de Villepinte (93) le 26 janvier 2004. C’est dans ces circonstances que le 23 juin 2004, par exploit d’huissier remis à personne, la société SOIZICK a assigné Madame V.

Par conclusions signifiées le 8 mars 2006, la société SOIZICK, appelante, demande à la cour de :

- déclarer la société SOIZICK bien fondée en son appel,

Y faisant droit,
- infirmer purement et simplement le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau,
- dire et juger qu’en commercialisant des objets reprenant toutes les caractéristiques des créations de la société SOIZICK, la société PERLIMPIMPIN s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon de modèles et de concurrence déloyale, En conséquence,
- condamner la société PERLIMPIMPIN à verser à la société SOIZICK la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour actes de contrefaçon et une même somme de 50 000 euros pour actes de concurrence déloyale,
- faire interdiction à la société PERLIMPIMPIN de poursuivre la vente, l’exposition, l’importation et la commercialisation des articles contrefaisants sous astreinte de 150 euros par pièce contrefaisante à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
- ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois journaux au choix de la société SOIZICK et aux frais de la société PERLIMPIMPIN, sans que le coût global de ces insertions n’excède la somme de 30 000 euros H.T. ; dire que la société PERLIMPIMPIN sera tenue au remboursement de ces publications si la société SOIZICK les effectue à ses frais avancés,
- condamner la société PERLIMPIMPIN à verser à la société SOIZICK une somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel ; Par conclusions signifiées le 3 mars 2006, la société PERLIMPIMPIN, intimée, demande à la cour de :

- in limine litis, recevant la société PERLIMPIMPIN en son exception de nullité et y faisant droit,
- dire et juger la société SOIZICK irrecevable en son action en contrefaçon,
- à défaut, l’y dire mal fondée et la débouter de toutes ses demandes,
- confirmer purement et simplement le jugement entrepris en toutes ses dispositions s’y rapportant ainsi que du chef des autres dispositions favorables à la société PERLIMPIMPIN, Pour le surplus et dans tous les cas, recevant la société PERLIMPIMPIN en ses appel incident et demande additionnelle et l’y disant bien fondée :

- s’entendre condamner la société SOIZICK à payer à la société PERLIMPIMPIN, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire la somme de 23 000 euros,

— la condamner également à lui payer la somme additionnelle de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile et les entiers dépens ;

Ceci étant exposé

Sur l’exception de nullité Considérant que la société PERLIMPIMPIN, intimée, soulève la nullité de plein droit du procès-verbal du constat d’huissier en date du 26 janvier 2004 sur lequel la société appelante fonde son action en contrefaçon au motif que cette dernière n’aurait pas agi dans le délai de quinzaine de la date de ce procès-verbal, précisant que l’assignation diligentée est datée du 23 juin 2004, soit plus de cinq mois après l’expiration du délai de quinzaine ; Considérant toutefois, ainsi que le relèvent les premiers juges, que le procès-verbal en cause a été dressé en dehors de toute ordonnance, que le président du tribunal de grande instance de Bobigny aurait pu rendre sur requête de la société SOIZICK, laquelle est en conséquence fondée à n’assigner la société PERLIMPIMPIN que le 23 juin 2004 ; Que l’exception de nullité sera déclarée irrecevable et le jugement confirmé sur ce point ;

Sur la contrefaçon Considérant que la société PERLIMPIMPIN demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il n’a reconnu ni nouveauté ni originalité aux dessins de Madame de L au motif qu’il est apparu à cette époque un phénomène de mode consistant en un fort développement du marché des articles de vaisselle peints à la main ; Considérant que, contrairement à ce que retiennent l’intimée et le tribunal, les créations de Madame de L ne sont pas banales dès lors que l’ensemble des caractéristiques appartenant auxdits articles de vaisselle, à savoir : le choix des couleurs vives apposées sur les articles de porcelaine, les motifs de coeurs, de carrés, d’arabesques, ou de fleurs formés à partir de lignes courbes ou par des points, l’utilisation récurrente d’une fine note d’or permettant de faire ressortir la forme adoptée par le motif, reflète l’effort créatif et l’empreinte de la personnalité de Madame de L, qui dès 1997 divulguait son oeuvre dans la revue FIGARO MAGAZINE MÉDITERRANÉE en date du 6 septembre 1997 mais également dans le magazine RÉSIDENCES DÉCORATION n°18 de septembre-octobre 1997 ; Qu’en l’absence d’éléments pertinents, il convient de constater que l’intimée ne rapporte pas la preuve d’une date de création antérieure à celles réalisées par Madame de L en 1997 ; qu’au surplus, il ne ressort du dossier aucune pièce

probante permettant d’établir une antériorité de toutes pièces au dépôt de dessins et modèles ; Qu’en conséquence, les créations originales de Madame de L déposées le 3 juillet 2000 à l’INPI sous le numéro d’enregistrement 00 4007 bénéficient de la protection tant au titre du droit d’auteur qu’au titre du livre V du Code de la propriété intellectuelle ; Qu’il ressort du procès-verbal en date du 26 juillet 2001 et des pièces versées aux débats par la société PERLIMPIMPIN que cette dernière reprend les caractéristiques principales des articles de vaisselle créés par Madame de L dans la mesure où les motifs utilisés et leur agencement sont les mêmes, c’est à dire pour la plupart d’entre eux des coeurs et des carrés cernés d’arabesques et de pointillés ; que la société PERLIMPIMPIN utilise exactement les mêmes tons de couleurs et les mêmes styles de tracé, courbe ou pointillé, en note d’or pour dessiner des motifs similaires ; que même si les couleurs choisies sont également proposées dans le commerce par la société PEBEO dans sa gamme « porcelaine 150 », il n’en demeure pas moins que la société PERLIMPIMPIN reprend des couleurs identiques à celles utilisées par la société SOIZICK ; qu’ainsi, l’existence de ressemblances frappantes démontre que la société PERLIMPIMPIN a reproduit les caractéristiques essentielles des modèles vendus par la société SOIZICK ; Qu’en conséquence, la société PERLIMPIMPIN s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Sur la concurrence déloyale Considérant que la société SOIZICK sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il n’a pas condamné la société PERLIMPIMPIN en concurrence déloyale alors que des faits distincts de ceux articulés au titre de l’action en contrefaçon ont été accomplis par la société intimée, à savoir la création d’un même effet de gamme des articles litigieux, la copie servile par « surmoulage », la reprise des couleurs, des motifs ainsi que leurs agencements ; que partant, la société PERLIMPIMPIN a économisé des frais de recherche et de mise au point ; qu’elle ajoute que la concurrence déloyale est également constituée par la vente à vil prix des produits contrefaisants dans le même secteur géographique qui a entraîné un détournement de clientèle à son préjudice ; Considérant que c’est avec raison que le tribunal a rejeté la demande de la société SOIZICK tendant à voir condamner la société PERLIMPIMPIN au titre de la concurrence déloyale dès lors que la société appelante ne rapporte pas la preuve des faits distincts qu’ elle avance ; qu’ en effet, cette dernière ne démontre pas qu’ en dehors de la reproduction des articles de vaisselle, la société intimée vendait ces produits sous une même présentation ou encore offrait à la vente des lots contenant des pièces identiques ; qu’au surplus, la confusion pouvant résulter de la copie servile des produits ne pouvait induire le consommateur en erreur dès lors que la signature de chaque société était apposée sur les articles ; qu’enfin, elle ne prouve ni les frais de recherche et de mise au point qu’elle a engagés ni la vente à vil prix desdits articles contrefaisants ; Qu’en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur le préjudice Considérant qu’au vu des éléments soumis à la cour justifiant de l’atteinte portée aux droits de la société SOIZICK tant sur le plan patrimonial que sur le plan moral, il y a lieu d’allouer à la société appelante la somme de 8 000 euros au titre de la contrefaçon ; Qu’en conséquence, la société PERLIMPIMPIN sera condamnée à verser à la société SOIZICK la somme de 8 000 euros ;

Sur les autres demandes Considérant que c’est à tort que la société PERLIMPIMPIN fait valoir que la société SOIZICK lui a causé un préjudice certain et qu’elle n’a pour but que d’obtenir des fonds de diverses juridictions sur un fondement identique et des faits similaires dès lors qu’elle était dans son bon droit d’agir et que la société PERLIMPIMPIN succombe ;

Qu’en conséquence, la demande de la société PERLIMPIMPIN tendant à condamner la société SOIZICK pour procédure abusive sera rejetée ; Considérant qu’au vu des éléments versés aux débats, il n’y a pas lieu de prononcer une mesure de publication ; qu’en conséquence, la demande de la société SOIZICK sera rejetée de ce chef ; Considérant en revanche, qu’il sera fait droit à la demande d’interdiction de la société SOIZICK dans les termes du dispositif ; Sur l’article 700 du nouveau Code de procédure civile et les dépens Considérant que l’équité commande de laisser à la partie qui succombe la charge des frais de l’instance ; Que la société PERLIMPIMPIN sera condamné à verser à la société SOIZICK la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il n’a pas reconnu le grief de concurrence déloyale à l’encontre de la société PERLEVIPIMPIN ; Le réformant et y ajoutant, Condamne la société PERLIMPIMPIN à verser à la société SOIZICK la somme de 8 000 euros de dommages-intérêts au titre de la contrefaçon ;

Ordonne à la société PERLIMPIMPIN de cesser la vente, l’exposition, l’importation et la commercialisation des articles contrefaisants sous astreinte de 150 euros par pièce contrefaisante à compter de la signification du présent arrêt ; Condamne la société PERLIMPIMPIN à verser à la société SOIZICK la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne la société PERLIMPEMPIN aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP B ASKAL-CHALUT-N AT AL, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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