Cour d'appel de Paris, 12 septembre 2006, n° 06/02221

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 12 sept. 2006, n° 06/02221
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 06/02221
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 29 novembre 2005, N° 05/00577

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

18e Chambre D

ARRET DU 12 septembre 2006

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 06/02221

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 novembre 2005 par le conseil de prud’hommes de Créteil section industrie RG n° 05/00577

APPELANTE

SA PETIT VEHICULE

XXX

XXX

représentée par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : D 683

INTIME

Monsieur G H X

XXX

XXX

XXX

représenté par M. Güner TAHIR, délégué syndical

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 mai 2006, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Hélène IMERGLIK, conseillère faisant fonction de présidente, chargée d’instruire l’affaire et Mme C D, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène IMERGLIK, présidente

Mme C D, conseillère

Mme Annick FELTZ, conseillère

Greffier : Mlle E F, lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par Mme Hélène IMERGLIK, présidente

— signé par Mme Hélène IMERGLIK, présidente, et par Mlle E F, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCEDURE

M. G H X a été embauché le 1er juillet 1989 par la société Petit véhicule, exerçant sous l’enseigne Princesse Tam-Tam, en qualité de magasinier-préparateur de commandes. Son lieu de travail était situé à Rungis (94).

M. X a été en arrêt maladie du 10 août 2002 au 14 novembre 2004.

Par courrier du 24 janvier 2005 remis en mains propres, la société Petit véhicule confirmé à M. X qu’à compter du 25 janvier 2005, il était affecté dans les nouveaux locaux de l’entreprise à Wissous (91). La société avisait le salarié que cette nouvelle affectation n’entraînait aucune modification de son contrat de travail puisqu’elle se situait à l’intérieur de la même zone géographique et qu’à défaut de s’y conformer, il s’exposait à un licenciement pour faute grave.

M. X a porté au bas de ce courrier la mention manuscrite suivante : 'j’ai reçu la lettre le 24.01.05 à 14h00. Je refuse pour aller à Wissous parce que j’habite très loin et j’ai un problème de santé. Je ne peux pas faire le trajet 6 heures par jour pour aller et retour'.

Par lettre du 16 février 2005, faisant suite à un entretien préalable du 9 février précédent, la société Petit véhicule a licencié M. X pour faute grave en raison de son refus de changer de lieu de travail.

L’entreprise occupe habituellement plus de onze salariés et la convention collective de l’industrie du bâtiment régissait les relations de travail.

Contestant son licenciement, M. X a, le 22 mars 2005, saisi le conseil de prud’hommes de Créteil de demandes tendant en dernier lieu au paiement des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’une allocation de procédure.

Par jugement du 30 novembre 2005, le conseil de prud’hommes a condamné la société Petit véhicule à payer à M. X :

—  2 591,64 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 259,16 euros au titre des congés payés induits,

—  4 470,57 euros à titre d’indemnité de licenciement,

—  7 774,92 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  500 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Petit véhicule a interjeté appel de cette décision. Elle conclut à son infirmation et au débouté intégral de M. X. Elle sollicite le remboursement des sommes qu’elle a versées en exécution du jugement et une somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M. X sollicite la confirmation du jugement mais demande l’augmentation du montant de l’indemnité de licenciement à 4 659,05 euros, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 15 549,84 euros et de l’allocation de procédure à 1 500 euros.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 29 mai 2006, reprises et complétées lors de l’audience.

Motifs de la décision

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi motivée :

'nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour la faute grave suivante :

Refus de changement de lieu de travail lié au transfert des locaux de notre entreprise sur un même secteur géographique.

Cette conduite met en cause la bonne marche de l’entreprise. Les explications recueillies auprès de vous au cours de l’entretien ne nous ont pas permis de modifier cette appréciation'.

Le changement de lieu de travail refusé par le salarié, et à l’origine de son licenciement, était ainsi motivé par le transfert des locaux de l’entreprise à Wissous et la disparition du site de Rungis où travaillait M. X.

La distance séparant les sites de Rungis et de Wissous est de 4,4 kilomètres.

L’employeur verse aux débats l’itinéraire suivi en transports en commun par M. X entre son domicile à Avon (77) et l’entrepôt de Rungis (94) et celui qu’il aurait dû suivre entre ce même domicile et Wissous (91).

Il ressort de la comparaison des ces deux itinéraires résultant d’une recherche sur le site internet de la RATP que, sans modifier la gare de départ du salarié qui était celle de Fontainebleau-Avon SNCF, le premier trajet lui prenait 1 heure 53 minutes et que le second devait lui prendre 2 heures avec les mêmes moyens de transport, le même nombre de correspondances (quatre) en ajoutant quatre minutes de marche à pied à l’arrivée.

M. X ne fournit ni explication ni preuve à l’appui de son affirmation selon laquelle le nouveau trajet le contraignait à une heure de marche à pied supplémentaire avant de commencer son travail et les problèmes de risque de retards qu’il mentionne sont identiques pour les deux trajets comparés.

Il s’ensuit que le changement d’affectation envisagé, rendu indispensable par le déménagement de la société, s’effectuait sur le même secteur géographique et n’augmentait pas de façon sensible les contraintes de M. X liées au trajet. Il s’agissait par conséquent d’une modification de ses conditions de travail et non de son contrat de travail.

Les dispositions des articles L.321.1.2 du Code du travail et 22.b de la convention collective, relatives aux modifications du contrat de travail ne peuvent par conséquent être utilement invoquées par le salarié.

Dès lors, M. X ne pouvait refuser le changement géographique notifié par l’employeur, sauf à prouver que celui-ci agissait fautivement ou abusivement.

Le salarié soutient qu’en raison de son arrêt maladie il ignorait que l’entreprise devait être transférée à Wissous et que l’employeur a agi de mauvaise foi en l’avertissant seulement la veille du jour où il devait prendre ses nouvelles fonctions.

Cependant, entre la reprise de M. X le 14 novembre 2004 et la notification de changement de site le 24 janvier 2005, il s’est écoulé deux mois et dix jours pendant lesquels le salarié a travaillé dans l’entreprise. Compte tenu de l’importance et de la durée des préparatifs nécessaires et du trouble causé dans les conditions de travail des salariés pour opérer le déménagement total d’une entreprise, M. X ne peut prétendre qu’en plus de deux mois il n’aurait jamais entendu parler du transfert et que seul le courrier du 24 janvier 2004 l’en aurait informé.

Par ailleurs, la société Petit véhicule produit les attestations régulières de Mmes A, adjointe au responsable logistique dans la société, Lloret, assistante logistique, déléguée du personnel et membre du comité d’entreprise, et Y, assistante logistique, et de M. Z, chef d’équipe, dont il ressort que l’ensemble du personnel de la société avait été informé à plusieurs reprises de la fermeture de l’entrepôt de Rungis en 2005 et du transfert progressif de tout le personnel à Wissous et que des plans des lignes de bus avaient été affichés dans l’entreprise avant les premières mutations.

Mme A indique en outre :'après avoir demandé à Monsieur X de prendre son poste au nouvel entrepôt, celui-ci a immédiatement exprimé un refus direct et catégorique d’exercer son activité à Wissous'.

Mme B, responsable logistique dans la société Petit véhicule relate dans son attestation du 4 août 2005 que, depuis son retour après maladie en novembre 2004 M. X, 'n’a pas cessé d’exprimer son refus d’exercer son activité à l’entrepôt de Wissous arguant du fait que cela était trop loin pour lui malgré le fait que nous lui avons indiqué que cette nouvelle affectation ne rallongeait pas son trajet actuel'.

Il s’ensuit qu’il ne peut être reproché à l’employeur ni abus, ni mauvaise foi, ni faute dans la mise en oeuvre du déménagement du site de l’entreprise.

Dans ces conditions, M. X ne pouvait sans commettre de faute grave rendant impossible le maintien du contrat de travail même pendant la période de préavis, refuser de prendre son poste dans les nouveaux locaux.

Le licenciement pour faute grave du salarié est par conséquent justifié. Il convient dès lors d’infirmer le jugement dans toutes ses dispositions et de débouter M. X de toutes ses demandes.

M. X sera condamné à rembourser à la société Petit véhicule les sommes qu’elle lui a versées en exécution du jugement infirmé.

Les conditions d’application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ne sont pas réunies et les demandes de ce chef seront rejetées.

Par ces motifs

La cour

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et ajoutant,

Déboute M. X de toutes ses demandes ;

Condamne M. X à rembourser à la société Petit véhicule les sommes qu’elle lui a versées en exécution du jugement infirmé ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne M. X aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Paris, 12 septembre 2006, n° 06/02221