Cour d'appel de Paris, 11 février 2009, n° 08/01093

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 11 févr. 2009, n° 08/01093
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 08/01093
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 22 novembre 2007, N° 06/42598

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

2e Chambre – Section A

ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2009

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 08/01093

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Novembre 2007 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 06/42598

APPELANTE

Madame D Z divorcée X

née le XXX à XXX

de nationalité française

XXX

représentée par Maître Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Maître Bruno GELIX, avocat au barreau de PARIS, toque : L 158, plaidant pour la SELARL GELIX Conseil

INTIMÉ

Monsieur F X

né le XXX à XXX

de nationalité française

retraité

XXX

représenté par Maître Rémi PAMART, avoué à la Cour

assisté de Maître Jacques LEBLOND, avocat plaidant pour la SCP LEBLOND et Associés, avocats au barreau de PARIS, toque P 88

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l’affaire a été débattue le 5 janvier 2009, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, présidente,

Madame Isabelle LACABARATS, conseillère

Madame Dominique REYGNER, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l’arrêt : Madame G H

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, présidente, et par Madame G H, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur X et Madame Z, mariés le XXX après contrat de séparation des biens sont divorcés aux torts exclusifs de Madame Z par un arrêt confirmatif de cette cour du 6 mai 1999 contre lequel le pourvoi à été rejeté le 24 janvier 2002.

Par acte reçu par Maître A notaire le 25 septembre 1995 Monsieur X a déclaré révoquer purement et simplement la totalité des avantages matrimoniaux et donations qu’il avait pu consentir à son épouse sous quelque forme que ce soit au cours du mariage.

Le 11 juillet 2002 Monsieur X a fait assigner Madame Z pour voir dire qu’il avait intégralement financé de ses deniers personnels l’ensemble du patrimoine des époux et l’activité professionnelle de l’épouse pendant le mariage et ce dans une intention libérale, que les propriétés divises ou indivises de Madame Z constituent donc des donations et pour avoir paiement, par provision, du montant évalué de ces donations par l’expert C soit 1.022.932,30 €.

Par jugement du 28 mai 2004 du tribunal de grande instance de Paris a désigné Maître B aux lieu et place de Maître C, dit que du 10 juin 1960, date du mariage, jusqu’à la fin de l’année 1992 il existe une confusion des patrimoines des époux X-Z, dit qu’en conséquence toutes les acquisitions des époux tant mobilières qu’immobilières leur appartiendront indivisément par moitié à l’exception de la SCI Ker Choupi et de la SCI Patrimoniale Hoche, fixé à la charge de Monsieur X une indemnité de jouissance pour l’appartement XXX à Paris, dont la moitié au profit de Madame Z, rejeté la demande d’indemnité de jouissance pour les chambres de service et pour le mobilier, condamné Monsieur X à rembourser à Madame Z les remboursements de la mutuelle, débouté Madame Z de sa demande de dommages-intérêts, dit que le solde des comptes bancaires communs sera partagé par moitié à la date de leur fermeture et rejeté la demande de Monsieur X pour procédure abusive.

Par arrêt du 25 janvier 2006 la cour a réformé ce jugement sur la fin de la confusion du patrimoine indivis, fixé celle-ci au 25 septembre 1993, confirmé le jugement pour le surplus et y ajoutant dit que l’indemnité d’occupation est due depuis le 2 octobre 1995, rejetant les autres demandes.

La cour est saisie de l’appel relevé par Madame Z du jugement du 23 novembre 2007 du tribunal de grande instance de Paris qui a condamné Monsieur X à payer à Madame Z une avance en capital de 100.000 € sur les droits de celle-ci dans le partage à intervenir, débouté les parties du surplus de leurs demandes, alloué 3.000 € à Monsieur X pour ses frais irrépétibles et ordonné l’exécution provisoire.

Par dernières conclusions du 10 décembre 2008 Madame Z demande de :

— confirmer le jugement sur l’avance sur partage et l’exécution provisoire de ce chef et en ce qu’il a débouté Monsieur X de sa demande de dommages-intérêts

— l’infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,

— rectifier le jugement en ce qu’il rapporte que l’indemnité de jouissance court à compter de 2004 alors que le jugement du 28 mai 2004 a fixé le point de départ au 1er septembre 1995

— confirmer que la boutique acquise en viager par acte du 2 septembre 1996 soit postérieurement à la période de confusion du patrimoine est sa propriété et n’entre pas dans le patrimoine confondu ni dans le partage

— condamner Monsieur X à lui payer une avance complémentaire de 200.000 €

— constater qu’en prononçant la confusion du patrimoine sans en délimiter le périmètre le jugement du 28 mai 2004 confirmé par l’arrêt du 25 janvier 2006 a nécessairement remis en cause dans son ensemble le régime de la séparation des biens pour la période du 10 juin 1960 au 25 septembre 1993

— rappeler qu’il n’appartient pas au juge de l’incident de statuer sur le bien fondé du prononcé de la confusion du patrimoine en considération de l’autorité de la chose jugée

— rappeler qu’il n’appartient pas non plus au juge de l’incident d’ajouter au jugement du 28 mai 2004 tant un périmètre à la confusion du patrimoine que des exceptions autres que celles stipulées au dit jugement

— constater que les actions détenues par Monsieur X dans les Stés Sogetex et Sirius, Sogetex Gestion et les SCI Pantin Saint Gervais Sovipierre I et II, Met F associés et Patoard ainsi que les meubles meublant les résidences de Paris, Carnac et Pra-Loup ne sont pas mentionnés dans les exceptions et qu’elles sont donc nécessairement incluses dans le patrimoine commun des époux

— subsidiairement, constater que Monsieur X ne justifie pas du caractère de biens propres de titres acquis pendant la période de confusion du patrimoine et financés par le compte joint des ex-époux

— très subsidiairement réformer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer 3.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 3 décembre 2008 Monsieur X demande de confirmer le jugement et de condamner Madame X au paiement de 30.000 € de dommages-intérêts pour procédure particulièrement abusive et 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’étendue de la masse à partager

Considérant que Madame Z soutient que l’expression « confusion du patrimoine » conduit nécessairement à retenir que le régime de la séparation des biens a été aboli pour la période visée dans le jugement du 28 mai 2004 puis celle visée dans l’arrêt du 25 janvier 2006 et qu’ainsi, hormis les deux actifs précisés au dispositif du jugement, la totalité du patrimoine tant mobilier qu’immobilier des ex-époux acquis tant indivisément qu’en nom propre appartient indivisément et par moitié aux deux époux, sans récompense ; qu’alors tous les biens mobiliers et immobiliers acquis par Monsieur X à son seul nom doivent être inclus dans le partage, notamment les participations dans Sogetex, Sogetex Gestion, Sirius et diverses SCI et qu’en prétendant que ces biens lui sont propres Monsieur X ajoute aux exceptions ;

Qu’en retenant que le régime de séparation des biens n’était pas remis en cause, le premier juge a vidé le jugement du 28 mai 2004 de sa substance et outrepassé le droit d’interpréter le dit jugement ; qu’en adoptant le principe d’une confusion des patrimoines les décisions rappelées, quoique statuant ultra petita mais définitivement ont opportunément tiré les conséquences de l’impossibilité de faire les comptes sur une période de trente cinq ans relativement à l’ensemble des acquisitions et sont revêtues de l’autorité de la chose jugée ;

Considérant que l’intimé soutient que son ex-épouse tire parti d’une rédaction maladroite du jugement de 2004 pour revendiquer des biens acquis par lui en son nom propre et de ses deniers ; que la confusion de patrimoine ne concernait que les biens énumérés soumis aux débats, ses biens propres n’étant pas visés, d’autant que la question soumise au tribunal portait sur l’existence des donations qu’il alléguait au profit de son épouse ; que Madame Z a elle-même défini l’étendue des débats ; que ses développements sur le pouvoir d’interprétation comme la décision ultra petita sont inopérants et qu’il est impossible d’intégrer au partage des biens qui sont propriété personnelle d’un époux ;

Considérant que dans ses conclusions récapitulatives du 6 octobre 2003 Monsieur X entendait voir le tribunal dire qu’il avait intégralement financé le patrimoine des époux et l’activité professionnelle de Madame Z et ce dans une intention libérale, qu’il en résultait des donations directes et indirectes au profit de celle-ci, dont il demandait le paiement pour la valeur portée dans les conclusions de l’expert C ; que dans ses conclusions récapitulatives du 8 octobre 2003 Madame Z, qui énumérait les biens tant mobiliers qu’immobiliers acquis pendant le mariage contestait que son mari ait pu financer de ses seuls deniers personnels tant les biens acquis à leur deux noms que ceux acquis à son nom et l’existence de donations, hormis des financements résiduels avec contreparties de sa part ;

Considérant qu’en régime de séparation des biens, tant à l’égard de son conjoint que des tiers un époux peut prouver par tous moyens qu’il a la propriété exclusive d’un bien et que les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier de sa propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément chacun pour moitié ;

Considérant que saisi exclusivement de la question du financement des acquisitions faites soit au nom des deux époux soit au nom de Madame Z, le tribunal, constatant que des prélèvements avaient été fait du compte commun alimenté par des loyers de biens acquis indivisément et par des salaires des deux époux, que des meubles acquis pour l’activité d’antiquaire de Madame Z s’étaient retrouvés au domicile conjugal, que le compte commun alimentait le fonds de commerce de Madame Z, a retenu la notion de « confusion de patrimoine » ; que cette notion, complétée par l’absence de preuve de l’intention libérale de Monsieur X, a fondé le rejet des prétentions du demandeur à voir constater l’existence de donations relativement aux biens cités et conduit à la décision de propriété indivise sur tous les biens meubles et immeubles acquis pendant la période de référence ;

Considérant que la demande actuelle de Mme Z ne se heurte pas à l’autorité de la chose jugée dès lors que les biens acquis par Monsieur X en son nom n’avaient pas été soumis à la discussion dans la procédure ayant abouti au jugement de 2004 puis l’arrêt de 2006 ;

Mais considérant que la notion de confusion de patrimoine qui traduit une situation de fait n’ a pas pu avoir pour effet de substituer à la séparation des biens le régime de la communauté, le régime matrimonial étant, en principe, intangible ; que la situation de fait particulière retenue par le jugement précité puis la cour ne saurait être généralisée à l’acquisition d’autres biens non visés à l’époque dans le débat ; qu’il incombe dès lors à Madame Z de rapporter la preuve selon le régime des ex-époux que les participations visées dans ses écritures, qui ont été faites au nom du mari, mais dont elle demande qu’elles figurent au partage comme biens indivis, ont été financées avec des fonds indivis ; que cette preuve n’est pas apportée ; que pour ce motif la demande principale de Madame Z sera rejetée ;

Sur l’avance complémentaire

Considérant que Madame Z soutient que son ex-mari est redevable d’une indemnité d’occupation de 4.344,80 € par mois depuis le 1er septembre 1995, et non 2004 comme porté dans le jugement déféré, qu’il perçoit des revenus indivis, qu’elle même vit dans un appartement de 60 m2 prêté par son fils, que sa retraite est de 649 € mensuels et que son activité professionnelle résiduelle ne génère que de faibles revenus ; que les situations en présence sont très déséquilibrées ;

Considérant que Monsieur X fait valoir qu’il ne discute pas l’avance accordée, déjà importante, que le projet d’état liquidatif n’est pas dressé, que son ex-épouse exploite un commerce prospère, qu’elle a pu acquérir une importante propriété en Bretagne, qu’elle a perçu le prix de vente de deux boutiques, qu’elle est logée gratuitement, que l’estimation du patrimoine immobilier est incertaine et que Madame Z a diverti à son seul profit des meubles ; que la situation financière de son ex-épouse est opaque et que des comptes restent à faire ;

Considérant que le patrimoine indivis est important ; que Monsieur X est définitivement débiteur envers l’indivision, dont moitié à Madame Z, d’une indemnité de jouissance à compter du 1er septembre 1995 pour l’appartement indivis qu’il occupe ; que nonobstant les éventuels comptes à faire, il convient, par réformation du jugement d’allouer à Madame Z une avance sur partage de 200.000 € ;

Sur les autres demandes

Considérant que Madame Z demande la rectification du jugement sur le point de départ de l’indemnité de jouissance due par son ex-mari et s’oppose par ailleurs à ce que figure au partage la boutique qu’elle a acquise le 2 septembre 1996 ; que Monsieur X soutient que ces demandes sont irrecevables comme nouvelles ;

Considérant que ces demandes ne sont pas irrecevables comme nouvelles en appel dès lors qu’elles se rattachent directement au litige et qu’en matière de partage toute demande constitue nécessairement une défense à la prétention adverse ;

Considérant que l’arrêt du 25 janvier 2006 ayant fixé le point de départ de l’indemnité de jouissance au 2 octobre 1995, le jugement déféré sera rectifié en ce sens ;

Considérant que Madame Z est fondée à s’opposer, conformément aux règles de la séparation des biens, à l’inclusion dans le partage de la boutique acquise par acte du 2 septembre 1996 en son seul nom dont le prix a été payé pour 60.000 francs comptant outre le service d’une rente annuelle de 48.000 francs ;

Considérant que la procédure ne traduit pas un abus caractérisé ;

Considérant que l’équité ne commande pas d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Rectifie le jugement en ce que le point de départ de l’indemnité de jouissance due par Monsieur X qui est le 2 octobre 1995

Confirme pour le surplus le jugement déféré sauf sur l’avance sur partage que la cour porte à 200.000 € et condamne Monsieur X au paiement de cette somme

Y ajoutant

Dit que la boutique acquise en son nom par Madame Z le 2 septembre 1996 est exclue du partage

Rejette la demande de dommages-intérêts pour Monsieur X

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile

Dit que chaque partie supportera la charge des dépens par elle exposés.

La Greffière, La Présidente,

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Cour d'appel de Paris, 11 février 2009, n° 08/01093