Cour d'appel de Paris, 11 mars 2014, n° 11/00097

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Chronologie de l’affaire

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Stéphane Piedelièvre · Gazette du Palais · 9 octobre 2014
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 11 mars 2014, n° 11/00097
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 11/00097
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 7 août 2011, N° 10/86218

Sur les parties

Texte intégral

République française

Au nom du Peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9

ARRÊT DU 11 Mars 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 11/00097

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Août 2011 par le Juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 10/86218 (Mme Z A)

APPELANTE

Madame D-I E veuve Y

XXX

XXX

Représentée par Me Edwin BUTTERY, Avocat au barreau de Paris, toque : P346

plaidant pour le cabinet MARVELL AVOCATS et substituant Me Olivia COLMET DAAGE

INTIMÉES

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU 47 BOULEVARD DE MENILMONTANT-PARIS 11 EME

Chez SA Jean CHARPENTIER Syndic-Agence Nation

XXX

XXX

non comparante

XXX

XXX

XXX

ANGLETERRE

représentée par Me Victoria DAVIDOVA, Avocat au barreau de Paris, toque : P 141

substituant Me Xavier NORMAND BODARD, Avocat au barreau de Paris, toque : P141

plaidant pour de la SCP NORMAND & ASSOCIES, Avocat au barreau de PARIS, toque : P0141

CIC PARIS

CM CIC SERVICES POLE IDF SURENDETTEMENT

XXX

XXX

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral de Madame B LEFEVRE, l’affaire a été débattue le 28 Janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

— Madame B LEFEVRE, Conseillère faisant fonction de Présidente

— Madame F G, Conseillère

— Madame B C, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Faisant fonction de greffier, Madame Cécile LE BLAY, lors des débats

ARRÊT :

— RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

— signé par Madame B LEFEVRE, Conseillère faisant fonction de présidente et par Madame Cécile LE BLAY, Adjointe Administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Par déclaration en date du 25 février 2010, Mme D E veuve Y a saisi la commission de surendettement des particuliers de Paris, qui le 16 novembre 2010 a recommandé des mesures consistant en un plan provisoire de 24 mois afin que la débitrice puisse sortir d’une indivision immobilière.

Saisi d’une contestation de Mme Y, le juge de l’exécution de Paris a, par jugement du 8 août 2011, déclaré la débitrice irrecevable à solliciter le bénéfice d’une procédure de surendettement, estimant qu’elle avait, avant la saisine de la commission, organisé son insolvabilité.

Mme Y a relevé appel de cette décision du 16 septembre 2011.

Par arrêt du 23 octobre 2012, la cour a sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal de grande instance de Paris dans l’instance en action paulienne engagée par le CFCL.

Le tribunal de grande instance ayant statué, l’instance a repris et l’affaire appelée à l’audience du 28 janvier 2014 où elle a été examinée puis mise en délibéré au 11 mars 2014, par mise à disposition au greffe.

A l’audience, le conseil de Mme Y développe ses écritures. Il sollicite un nouveau sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour d’appel saisie d’un recours à l’encontre de la décision de première instance. Subsidiairement au fond, il demande à la cour d’infirmer la décision critiquée et de renvoyer l’affaire à l’examen de la commission, sollicitant la condamnation du CFCL au paiement d’une indemnité de procédure de 5000€ et aux dépens.

Il soutient sa demande de sursis, arguant d’un risque de contrariété de décision, affirmant que sa cliente et ses enfants, bénéficiaires de la donation critiquée argumentent sérieusement à l’encontre de la décision rendue par le tribunal de grande instance le 6 novembre 2012, la cour pouvant dans le cadre de ce recours parfaitement constater que les actes critiqués -donation et vente de biens immobiliers- ont été conclus en l’absence de fraude aux droits du créancier.

Rappelant les dispositions de l’article L330-1 du code de la consommation et la jurisprudence en la matière, il affirme la bonne foi de Mme Y expliquant que son endettement est quasi-exclusivement constitué par une dette commerciale cédée à la CFCL, dette dont elle s’était portée caution avec époux Xhui décédé. Il en déduit qu’elle n’a été coupable d’aucun des faits habituellement retenus pour caractériser la mauvaise foi (fausse déclaration, engagement inconsidéré, etc). Il conteste toute organisation de son insolvabilité, reprenant les actes réalisés par les époux, et disant notamment que la donation partage de biens immobiliers du couple en 2000 relevait d’une saine gestion patrimoniale, compte tenu de leur âge. Il nie également que Mme Y ait eu connaissance d’un portage de la propriété d’un bien immobilier par une société BEAUDESOIR dissoute en 2008, dont il conteste que sa cliente ait été la seule actionnaire. Il affirme que la dissolution de la société, dissimulée par son contradicteur, met à néant son argumentation. Il conclut que 'les biens n’ont pas été détournés, puisque leur contrepartie financière est tombée dans le patrimoine des débiteurs et a servi à compléter les ressources du couple en grande difficulté financière’ et que ces ventes, dix ans avant la saisine de la commission, ne sauraient caractériser la mauvaise foi. En dernier lieu, il critique les recommandations de la commission, fondées sur une appréciation erronée des revenus de sa cliente.

Le conseil du CFCL reprend ses écritures déposées à l’audience du 11 septembre 2012, soutenant que l’appel de Mme Y est mal fondé et sollicitant sa condamnation au paiement de la somme de 1000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Il affirme que la débitrice, ainsi que l’a retenu le premier juge a, dès les premières poursuites, organisé son insolvabilité d’une part en procédant avec son époux à une donation partage et d’autre part, en transférant la propriété d’un immeuble situé à Cannes à une société dont elle était seule actionnaire, seule la part sociale qu’elle détient ayant été émise.

Ni le syndicat des copropriétaires du XXX, ni le CIC n’ont comparu.

SUR CE, LA COUR

Considérant que le sursis prononcé par la cour avait pour terme le prononcé de sa décision par le tribunal de grande instance de Paris, la cour n’ayant nullement subordonné l’examen de la loyauté de la débitrice au caractère définitif de cette décision ; qu’en effet, ainsi que le relève Mme Y, la cour ne peut pas statuer uniquement par référence à des jugements ayant tranchés différents litiges opposant le débiteur à ses créanciers et en l’espèce, les éléments factuels contenus dans le jugement du 6 novembre 2012, qui ne font l’objet d’aucune contestation devant la cour saisie d’une procédure de surendettement, sont suffisants pour lui permettre de statuer ;

Considérant qu’en vertu de l’article L 330-1 seul le débiteur de bonne foi est protégé par le code de la consommation, l’organisation par le débiteur de son insolvabilité pour se soustraire aux poursuites de ses créanciers caractérisant sa mauvaise foi exclusive du bénéfice d’une procédure de surendettement ;

Que Mme Y invoque donc en vain sa prétendue loyauté lors du dépôt de la déclaration de surendettement ou l’absence d’engagements inconsidérés, dès lors que son créancier n’allègue nullement de tels faits mais prétend qu’elle aurait, avec son époux, organisé son insolvabilité, le privant depuis de nombreuses années de toute possibilité de poursuivre sur les biens du couple l’exécution des décisions de justice rendues à son profit ;

Que dès lors, à supposer ces faits établis, leur ancienneté ne permettrait nullement d’écarter la mauvaise foi alléguée, dès lors, que les procédés malhonnêtes dénoncés ont permis à Mme Y de maintenir son train de vie au détriment des créanciers figurant à la procédure, privés de toute possibilité d’agir efficacement pour recouvrer leurs dus ;

Considérant en premier lieu, qu’il ressort du jugement du 6 novembre 2012 et des pièces produites que les époux Y (qualifiés de commerçants très avertis, au fait de montages financiers complexes dans la motivation d’un arrêt de la cour d’appel du 27 octobre 2000) ont procédé à une donation partage de la nue-propriété d’un bien immobilier au profit de leurs enfants, le 16 octobre 2000, soit entre les débats devant la cour et le délibéré d’une décision rendue le 27 octobre 2000 confirmant le jugement du tribunal de grande instance du 25 novembre 1998 fixant la créance du CFCL ; qu’il en ressort également que la veille de la revente de ce bien par les bénéficiaires de la donation, ceux-ci ont autorisé le notaire à remettre l’intégralité du prix de vente à leurs parents ;

Qu’il s’en évince, la distraction d’un bien du patrimoine de M et Mme Y, avec la volonté d’ailleurs avouée de le soustraire au gage des créanciers ; qu’en effet, Mme Y dit dans ses dernières conclusions que ce bien n’aurait pas été détourné puisque sa 'contrepartie financière est tombée dans le patrimoine des époux débiteurs et a, de fait, servi à compléter les ressources du couple’ (page 11 2e §) faisant ainsi l’aveu d’une volonté de maintenir son niveau de vie au détriment de ses créanciers ;

Qu’il convient d’ajouter que la vente sus-mentionnée, le 8 août 2001 est intervenue au profit d’une société BAUDESOIR LIMITED à un prix de quasi-identique à celui auquel le bien avait été acquis dix-sept ans auparavant et payé au moyen d’un crédit consenti par les vendeurs à l’acquéreur ; qu’il ressort d’un rapport annuel de la dite société (la pièce 6 de l’intimée) que Mme Y en était titulaire de la seule part sociale de la société BAUDESOIR et non titulaire, comme elle le soutient toujours d’une part sur cinq cents ;

Que la dissolution de cette société, le 19 février 2008, alors que le bien immobilier acquis en 2000 avait été revendu en 2004 en exécution de décisions nécessairement prises ou avalisées par Mme Y (seule actionnaire) démontre sa persistance dans une volonté de conserver, au détriment de ses créanciers, une partie de son patrimoine étant relevé, que les actifs de cette société (et notamment le prix de la cession de 2004) avaient vocation à réintégrer son patrimoine et que leur sort demeure inconnu ;

Que ses éléments sont suffisants pour caractériser la fraude de Mme Y et sa volonté d’échapper depuis des années aux poursuites de ses créanciers, la saisine de la commission de surendettement des particuliers apparaissant comme l’aboutissement d’une démarche, qui a consisté pour Mme Y (avec son époux jusqu’au décès de celui-ci en avril 2007 puis seule) à distraire du gage de ses créanciers tous ses actifs immobiliers puis de disposer du prix de ceux-ci afin de maintenir son train de vie avant d’obtenir l’effacement de ses dettes, incontournable au regard des revenus déclarés et à l’absence de patrimoine dont il est allégué ;

Considérant qu’en cette matière où la saisine du tribunal et de la cour et les notifications des décisions se font sans l’intervention d’un huissier et où le ministère d’avocat n’est pas obligatoire, il n’y a pas de dépens ; qu’en revanche, il paraît équitable de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner Mme Y, partie perdante, à rembourser les frais irrépétibles de son adversaire ;

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de sursis à statuer ;

Confirme le jugement rendu par le juge de l’exécution de Paris, le 8 août 2011 ;

Condamne Mme Y à payer à la CFCL la somme de 1000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et par lettre recommandée avec avis de réception aux parties.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, 11 mars 2014, n° 11/00097