Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 5, 19 décembre 2018, n° 18/18894

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 5, 19 déc. 2018, n° 18/18894
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/18894
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 6 mai 2018, N° 2017002760
Dispositif : Autorise à faire ou à ne pas faire quelque chose

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 19 DECEMBRE 2018

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/18894 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6FZR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mai 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2017002760

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Thomas VASSEUR, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

SARL Y Z

[…]

[…]

Représentée par la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocats postulants au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Jean-Jacques ISRAËL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1133

DEMANDERESSE

à

SARL VIACAB prise en la personne de son gérant M. A X

[…]

[…]

Représentée par M. A X, Gérant de la société VIACAB

DÉFENDERESSE

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 21 Novembre 2018 :

La société Viacab, détenue à 50% par M. X qui est son gérant, a été créée en 2011 et exploite notamment les noms commerciaux et les marques déposées SOS Z et les sites de même nom sur lesquels elle propose un service de réservation de Z à Paris et en région parisienne.

La société Y Z exploite à Paris et en région parisienne une centrale de réservation, diffuse

des appels auprès des Z affiliés et propose un service d’abonnement à une clientèle d’entreprise ou de particuliers.

Estimant que la société Y Z exerce une concurrence déloyale en ne respectant pas la réglementation de la profession de chauffeur de taxi, ce qui l’a empêchée de développer son réseau, la société Viacab a, par acte en date du 10 janvier 2017, fait assigner la société Y Z devant le tribunal de commerce de Paris qui, par un jugement en date du 7 mai 2018, a :

— condamné la société Y Z à cesser de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course sous astreinte de 5.000 euros par infraction constatée, à compter de 60 jours après la signification du jugement pour une période de 90 jours au-delà de laquelle il pourra à nouveau y être fait droit ;

— condamné la société Y Z à payer à la société Viacab une somme de 58.900 euros en dommages et intérêts pour concurrence déloyale, majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement et jusqu’à parfait paiement ;

— débouté la société Viacab de toutes ses demandes autres, plus amples ou contraires ;

— ordonné l’exécution provisoire du jugement, nonobstant appel et sans caution ;

— condamné la société Y Z à payer à la société Viacab la somme de 20.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société Y Z aux dépens.

Par déclaration du 23 mai 2018, la société Y Z a interjeté appel de ce jugement.

Puis, par acte du 18 octobre 2018, la société Y Z a fait assigner la société Viacab devant le premier président de la cour d’appel de Paris pour que soit ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement entrepris.

Se référant à l’audience à ses conclusions du 24 octobre 2018, la société Y Z, assistée de son avocat, demande d’arrêter l’exécution provisoire attachée au jugement entrepris, de condamner la société Viacab aux entiers dépens et au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter l’ensemble des demandes de la société Viacab.

Elle précise oralement à l’audience et de manière expresse que sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire ne porte que sur les chefs de condamnation financière et non sur le chef de condamnation lui interdisant de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course.

La société Y Z expose que la société Viacab ne remplit pas ses obligations légales en matière de dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce, qu’elle est en état de cessation des paiements, que les pièces qu’elle produit elle-même montrent qu’elle est fortement endettée et que ses ressources sont minimes pour être constituées, pour l’essentiel, du produit des actions judiciaires qu’elle exerce à l’encontre d’autres sociétés. La société Y Z souligne ainsi que la société Viacab n’a pas pu honorer ses dettes à l’égard de sociétés du groupe Uber, lesquelles ont dû procéder à des mesures de saisies conservatoires.

Se référant à ses conclusions remises le 21 novembre 2018, la société Viacab, qui se fait représenter à l’audience par son gérant, M. X, demande qu’il soit dit et jugé que la société Y Z, contrairement à ses affirmations, n’apporte aucune preuve démontrant l’incapacité de Viacab en tant que créancier à rembourser la condamnation en cas d’infirmation en appel, qu’elle ne démontre en

rien que l’exécution provisoire du jugement entrepris risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Elle sollicite en conséquence que la société Y Z soit déboutée de ses demandes et condamnée à une amende civile de 10.000 euros au titre d’une procédure menée de manière abusive, à une somme de 10.000 euros « au titre de désorganisation économique » ainsi qu’à la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle indique qu’elle n’a jamais connu la moindre défaillance financière ou la moindre condamnation en concurrence déloyale contrairement à la société Y Z plusieurs fois condamnée à ce titre, qu’elle compte deux actionnaires, M. X et la société Via Telecom, détenant chacun 50% d’un capital social de 2.000 euros, que son chiffre d’affaires s’élève à 17.000 euros pour l’année 2017 hors indemnisations judiciaires, qu’elle a obtenu en 2018 un total de 318.000 euros de condamnations prononcées à son profit par diverses décisions judiciaires. Elle expose ne faire l’objet d’aucune procédure collective, de sorte qu’elle n’est pas en état de cessations de paiements, contrairement à ce que soutient son adversaire.

SUR CE,

En vertu de l’article 524 du code de procédure civile, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, par le premier président statuant en référé, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conséquences manifestement excessives justifiant l’arrêt de l’exécution provisoire peuvent s’apprécier par rapport aux facultés de paiement du débiteur et par rapport à celles de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire. L’appréciation du fond du litige et les critiques éventuellement encourues par la décision attaquée sont en revanche inopérantes.

Au cas d’espèce, c’est la capacité qu’aurait la société Viacab à rembourser le montant de la condamnation en cas d’infirmation du jugement de première instance que remet en cause la société Y Z.

A cet égard, il convient de relever que la société Y Z indique, en s’appuyant notamment sur les recherches d’un expert-comptable qu’elle a missionné à cette fin, que la société Viacab n’a pas déposé ses comptes annuels pour les exercices clos entre 2014 et 2017 inclus. De fait, le site Infogreffe indique que les comptes annuels n’ont été déposés pour aucun de ces quatre exercices. En outre, l’analyse de la liasse fiscale au 31 décembre 2017 transmise par la société Viacab fait apparaître que les capitaux propres de cette société sont négatifs, à hauteur de 158.744 euros et que le passif exigible, de 169.671 euros, est largement supérieur à l’actif disponible, de 56.758 euros. Il est par ailleurs établi que la société Uber, titulaire de créances sur la société Viacab pour un montant de plus de 80.000 euros, n’est pas parvenu à en recouvrer le montant.

Si ces éléments sont insuffisants à justifier qu’il soit fait droit à la demande d’arrêt de l’exécution provisoire, ils sont cependant suffisamment probants pour que soit ordonnée la consignation de la somme due par la société Y Z.

Par ailleurs, le premier président, statuant en matière d’arrêt de l’exécution provisoire, n’a pas le pouvoir d’ordonner une condamnation à dommages-intérêts, ainsi que le demande la société Viacab.

La présente consignation étant formée dans l’intérêt de la société Y Z, qui n’a pas obtenu gain de cause sur l’ensemble de ces prétentions, il convient de rejeter les demandes de chacune des parties formulées sur ce fondement et de dire que chacune conservera par-devers elle la charge des dépens exposés dans le cadre de la présente instance.

Enfin, la société Viacab est dénuée d’intérêt pour demander la condamnation de son adversaire à une

amende civile, qui ne serait au demeurant pas justifiée dans la présente affaire.

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire ;

Autorisons la société Y Z à consigner la somme de 78.900 euros entre les mains du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris, dans un délai de quinze jours à compter de la délivrance de la copie exécutoire de la présente ordonnance ;

Disons que faute de consignation dans ce délai, l’exécution provisoire retrouvera son entier effet ;

Disons que le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris ne sera délié de sa mission que sur la volonté commune des parties exprimée par une transaction ou sur présentation de l’arrêt de la cour d’appel statuant sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement susvisé et de sa signification ;

Disons n’y avoir lieu de statuer sur la demande indemnitaire formulée par la société Viacab ;

Déclarons irrecevable la demande de la société Viacab tendant au prononcé d’une amende civile ;

Disons que les parties conserveront chacune la charge des dépens qu’elles ont respectivement exposés dans la présente procédure ;

Rejetons les demandes de chacune des parties formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Conseiller

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Textes cités dans la décision

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