Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 30 novembre 2010, n° 09/03269

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 2e ch - sect. 1, 30 nov. 2010, n° 09/03269
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 09/03269
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

XXX

Numéro 5124/ 10

COUR D’APPEL DE PAU

2e CH – Section 1

ARRET DU 30 novembre 2010

Dossier : 09/03269

Nature affaire :

Recours contre les décisions des commissions d’indemnisation de victimes

Affaire :

FONDS DE GARANTIE

C/

X O,

A O,

D Z épouse Y,

P Z,

B Y

Monsieur AG AH

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 30 novembre 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 12 Octobre 2010, devant :

Monsieur BERTRAND, Président chargé du rapport

Monsieur BEAUCLAIR, Conseiller

Madame POELEMANS, Conseiller

assistés de Madame SAYOUS, Greffier, présent à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

Le Ministère Public a eu connaissance de la procédure le 23 août 2010

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

FONDS DE GARANTIE

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représenté par la SCP J.Y RODON, avoués à la Cour

assisté de la SCP BERNADET, avocats au barreau de PAU

INTIMES :

Monsieur X O

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Monsieur A O

né le XXX à XXX

XXX

XXX

XXX

Madame D Z épouse Y

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Mademoiselle P Z

née le XXX à

XXX

XXX

Monsieur B Y

né le XXX à

XXX

XXX

représentés par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour

assistés de Me SAGARDOYTHO, avocat au barreau de PAU

Monsieur AG AH

Près le Tribunal de Pau

Cour d’Appel

XXX

sur appel de la décision

en date du 17 AOUT 2009

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES

Objet succinct du litige-Prétentions et arguments des parties

Vu l’appel interjeté le 16 septembre 2009 par le FONDS de GARANTIE d’une décision de la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions Pénales (CIVI), prés le tribunal de grande instance de Tarbes, du 17 août 2009,

Vu la communication au ministère public le 23 août 2010, qui s’en rapporte,

Vu les conclusions du FONDS de GARANTIE du 22 octobre 2009,

Vu l’appel provoqué du FONDS de GARANTIE à l’égard de Madame Y D, prise ès qualités de représentante légale de Mademoiselle R Z, selon acte du 23 août 2010,

Vu les conclusions de Messieurs X et A O, de Monsieur B Y, de Madame D Y née HAHID, de Mademoiselle R Z, du XXX,

Vu le désistement d’appel du FONDS de GARANTIE du 7 octobre 2010 à l’égard de Messieurs O X, A et Y B,

Vu l’ordonnance de clôture du 28 septembre 2010 pour fixation à l’audience du 12 octobre 2010

— - – - – - – - – - – - – - – -

Par arrêt du 22 mai 2008 la cour d’assises des Hautes-Pyrénées a déclaré Monsieur Z A coupable d’avoir, à Tarbes le 17 juillet 2005, volontairement donné la mort à Madame Z K son épouse ; la cour d’assises a également accueilli les constitutions de parties civiles des enfants, des frères et soeurs de la victime

Monsieur Z A, condamné à la peine de quinze ans de réclusion criminelle, étant insolvable, le FONDS de GARANTIE a proposé des indemnisations qui, pour certaines, ont été refusées.

Sur requête présentée le 8 septembre 2008 par les proches de Madame Z K, la CIVI prés le tribunal de grande instance de Tarbes, par la décision entreprise du 17 août 2009, a :

— constaté qu’un accord est intervenu entre le FONDS de GARANTIE et Messieurs X et A O, ainsi qu’avec la représentante légale du mineur B Y, Madame D Y,

— procédé à la radiation de leurs demandes respectives,

— dit que le FONDS de GARANTIE versera à Madame Z D épouse Y, en sa qualité de représente légale de sa soeur mineure R Z, la somme de 45.000 € en réparation de son préjudice moral,

— dit que le FONDS de GARANTIE versera à Madame Z D épouse Y la somme de 30.000 € en réparation de son préjudice moral

Le FONDS de GARANTIE demande de réformer intégralement cette décision, et de fixer l’indemnisation du préjudice moral subi par Madame Z D épouse Y à la somme de 20.000 €, et celui subi par Mademoiselle R Z à hauteur de 30.000 €.

Il rappelle que la CIVI, juridiction autonome, n’est pas liée par les décisions rendues dans le cadre de l’instance pénale, qu’en particulier elle n’est pas tenue de supporter la charge totale des indemnités fixées par une cour d’assises, en raison de la particularité du procès pénal.

Il soutient qu’en l’espèce, sans remettre en cause le caractère dramatique des faits, il apparaît que les demandes sont élevées, compte tenu des indemnités habituellement allouées, que Madame Z D épouse Y était majeure et ne vivait plus chez sa mère.

Il s’oppose à l’octroi d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, eu égard à son statut.

Les intimés demandent de :

— déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir l’appel du FONDS de GARANTIE contre B Y, représentée par sa mère Madame Z D épouse Y,

— déclarer irrecevable l’appel du FONDS de GARANTIE contre les mineurs R Z et B Y, sans référence à leurs représentants légaux,

— constaté que le jugement attaqué est devenu définitif à leur égard,

— au fond confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

— condamner le FONDS de GARANTIE au paiement d’une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens

Sur la procédure ils considèrent que l’appel du FONDS de GARANTIE est irrecevable pour défaut de qualité et d’intérêt à agir d’une part, en ce qu’il est dirigé contre les mineurs R Z et B Y sans leurs représentants légaux d’autre part, l’appel provoqué formé par le FONDS de GARANTIE contre Madame Z D épouse Y, en qualité de représentante légale de Mademoiselle R Z, ne pouvant régulariser la procédure ; ils soutiennent également que l’appel est irrecevable puisqu’en réglant le montant des indemnités, le FONDS de GARANTIE a acquiescé à la décision de première instance.

Sur le fond ils soutiennent que la CIVI les a indemnisé en se conformant aux indemnisations allouées par la cour d’assises, définitives, compte tenu de l’importance du traumatisme, que Madame Z D épouse Y assume les conséquences résultant de la disparition de sa mère et de l’incarcération de son père en s’occupant de sa jeune soeur, que Monsieur Z A, âgé de 65 ans, est insolvable comme ne détenant aucun patrimoine réalisable.

Sur ce

Sur le désistement du FONDS de GARANTIE

Le FONDS de GARANTIE s’est désisté par acte du 7 octobre 2010 de son appel formé à l’encontre de Messieurs O X et A, et contre Monsieur Y B, conformément à la décision entreprise qui avait constaté l’accord intervenu entre le FONDS de GARANTIE et ces derniers, étant précisé que l’enfant B Y était représenté par sa mère Madame D Y.

Dès lors la cour n’est plus saisie que de l’appel interjeté sur les indemnités allouées à Madame D Z épouse Y d’une part, à Madame D Z épouse Y d’autre part en qualité de représentante légale de sa soeur mineure Mademoiselle R Z.

Dès lors le moyen tiré de l’irrecevabilité de l’appel formé à l’encontre des trois intimés dont le FONDS de GARANTIE s’est désisté est sans objet.

Sur l’irrecevabilité de l’appel dirigé contre Mademoiselle R Z

Si le FONDS de GARANTIE a, dans sa déclaration d’appel du 16 septembre 2009, mentionné Mademoiselle R Z sans préciser qu’elle était représentée par sa soeur Madame D Z épouse Y, ses conclusions du 22 octobre 2009 mentionnent expressément cette qualité.

Dès lors que le FONDS de GARANTIE a fait assigner Madame D Z épouse Y, en qualité de représentante légale de sa soeur Mademoiselle R Z, par acte du 23 août 2010, dont la qualification d’appel provoqué importe peu, la déclaration d’appel est régularisée.

Contrairement à ce que soutiennent les intimées, le FONDS de GARANTIE n’a pas réglé les indemnités que la CIVI a alloué à Madame D Z épouse Y et à Madame D Z épouse Y, ès qualités de représentante légale de sa soeur Mademoiselle R Z, mais uniquement celles allouées, au titre de l’accord intervenu, aux trois autres proches de la victime, ses frères et son petit-fils B ; par conséquent ils ne peuvent prétendre à un quelconque acquiescement du FONDS de GARANTIE pour ce qui les concerne, l’appel est recevable.

Sur le fond

Il est constant que les articles 706-3 et suivants du code de procédure pénale instituent au bénéfice des victimes d’infractions un mode de réparation autonome, que la CIVI fixe un mode de réparation en fonction des éléments qui sont soumis à son appréciation, conformément au droit commun, qu’elle ne peut se déterminer par la seule référence à la décision pénale.

Par conséquent et sur ce point les victimes ne pouvaient pas se prévaloir, dans leur requête en indemnisation présentée le 20 août 2008 devant la CIVI, des indemnisations allouées par la cour d’assises des Hautes-Pyrénées selon arrêt du 22 mai 2008 en considérant que ces indemnisations étaient définitives, et qu’elles devaient être intégralement reprises par la Commission ; elles ne peuvent pas plus demander la confirmation de la décision de la CIVI en ce que le premier juge les a indemnisé en se conformant aux indemnités allouées par la cour d’assises selon des décisions définitives à ce jour.

Par ailleurs la circonstance que la solidarité nationale prenne en charge l’indemnisation des victimes d’infraction ne modifie pas, comme paraît le soutenir le FONDS de GARANTIE, l’appréciation de la CIVI sur le droit à réparation intégrale de leur préjudice.

La réparation ou, plus exactement l’indemnisation d’un préjudice d’affection, qui représente le préjudice moral subi par les proches à la suite du décès de la victime directe, est d’autant plus important qu’il existait une communauté de vie avec la victime, que s’agissant comme en l’espèce des enfants de Madame Z K, majeurs ou mineurs, il existe une présomption d’affection.

Le FONDS de GARANTIE conteste uniquement le montant des sommes fixées par la CIVI, compte tenu des sommes habituellement allouées, mais sans faire référence à une ou à des jurisprudences précises, ou à un référentiel connu ; les intimées, sauf la référence à la décision de la cour d’assises et à une jurisprudence qu’elles ne précisent pas, insistent sur les circonstances du crime, survenu dans le cercle familial, et sur la violence dans lesquelles le décès est survenu.

Il est constant qu’il existe des références relatives à l’indemnisation du dommage corporel, en particulier suite à la nomenclature DINTILHAC, que s’agissant du préjudice subi par un enfant en cas de décès de son père ou de sa mère, son indemnisation peut être comprise, sauf majoration :

— pour un enfant mineur, entre 20.000 et 25.000 €,

— pour un enfant majeur, selon qu’il vivait au foyer, entre 11.000 et 17.000 €.

Ces références chiffrées, quoique communes et actuelles, sont cependant utilisées principalement pour la réparation des préjudices des victimes d’un accident de la circulation, et sont insuffisantes en ce qu’elles ne tiennent pas compte des circonstances très particulières, comme en l’espèce, du décès de la victime directe, et des conséquences sur les proches.

Il résulte de l’ordonnance de mise en accusation de Monsieur Z A devant la cour d’assises du 2 novembre 2006, seul document produit aux débats, que celui-ci a volontairement donné la mort à son épouse en la frappant de plusieurs coups de couteau, à leur domicile, que si aucun de leurs enfants n’a assisté à cette scène, ils étaient tous préoccupés, depuis plusieurs années, des disputes entre leurs parents, dont l’origine était les dépenses de jeu de leur père, leur mère ayant dû se mettre à travailler pour payer les charges du ménage, exprimant sa volonté de voir son mari quitter la maison, que la révélation de la violence des circonstances du décès de leur mère, et le sentiment de culpabilité de n’avoir pas pu la protéger, ont majorés leur affection.

Il résulte également de cette ordonnance que, contrairement à son épouse qui avait évolué en obtenant son permis de conduire, maîtrisait mieux la langue française, gérait les comptes et avait pris l’ascendant sur lui, Monsieur A Z, resté analphabète, était dans l’incapacité de reconnaître sa dépendance aux jeux, et avait peu évolué dans son parcours ; par conséquent Madame Z K assumait un rôle essentiel pour ses enfants, et constituait la seule référence dans la sphère familiale.

La violence des circonstances du décès de Madame Z K, la proximité des liens qui l’unissaient à ses enfants, tous préoccupés du conflit entre leurs parents, et le bouleversement que cette perte tragique a occasionné dans une structure familiale traditionnelle, dont la mère représentait le pôle majeur, alors que leur père est incarcéré pour une longue durée, justifient que l’indemnisation du préjudice d’affection des enfants soit fixée aux sommes allouées par le premier juge, la majoration tenant à la minorité de Mademoiselle R Z, âgée de douze ans au moment du décès de sa mère, étant également justifiée.

Dès lors il convient de confirmer la décision entreprise.

Sur les demandes accessoires

L’équité ne commande pas l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’article R 92-15° du code de procédure pénale précise que les frais exposés devant les CIVI prévues par l’article 706-4 sont des frais de justice ; par conséquent contrairement à ce que demandent les intimées, les dépens d’appel seront pris en charge par le Trésor public

Par ces motifs

La cour

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

— Constate le désistement du FONDS de GARANTIE à l’égard de Messieurs O X et A et de Monsieur B Y,

— Déclare recevable l’appel du FONDS de GARANTIE en la forme,

— Confirme la décision de la CIVI prés le tribunal de grande instance de Tarbes du 17 août 2009,

— Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Dit que les dépens de l’appel seront supportés par le trésor public,

Arrêt signé par Monsieur BERTRAND, Président et par Madame SAYOUS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 30 novembre 2010, n° 09/03269