Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 24 avril 2012, n° 10/07889

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 3e ch. com., 24 avr. 2012, n° 10/07889
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 10/07889

Sur les parties

Texte intégral

3e Chambre Commerciale

ARRÊT N°193

R.G : 10/07889

SA CUIR CENTER INTERNATIONAL

SARL SOCIETE D’EXPLOITATION POUR LE MOBILIER LA LITERIE ET L’AMEUBLEMENT

C/

COMPAGNIE ATLANTIQUE DU CUIR

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 AVRIL 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Alain POUMAREDE, Président,

Mme Françoise COCCHIELLO, Conseiller,

Mme Brigitte ANDRE, Conseiller, entendu en son rapport et rédacteur

GREFFIER :

Madame Y Z, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 14 Février 2012

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Avril 2012 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTES :

SA CUIR CENTER INTERNATIONAL

XXX

XXX

Représentée par la SCP BAZILLE JEAN-JACQUES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

assistée de Me Antoine DEROT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

SARL SOCIETE D’EXPLOITATION POUR LE MOBILIER LA LITERIE ET L’AMEUBLEMENT (nom commercial : ROCHE BOBOIS)

XXX

XXX

Représentée par la SCP BAZILLE JEAN-JACQUES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

assistée de Me Antoine DEROT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

COMPAGNIE ATLANTIQUE DU CUIR

XXX

XXX

Représentée par la Société d’avocats GOURVES-D’ABOVILLE, Postulant avocats au barreau de RENNES

assistée de la SCP CALVAR & ASSOCIES, Postulant, avocats au barreau de NANTES

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 1er août 1995, la société Cuir Center International SA, propriétaire de la marque 'Cuir Center', a consenti à la société Compagnie Atlantique du Cuir SA un contrat de franchise aux termes duquel elle s’engageait à mettre à sa disposition l’ensemble des éléments composant la franchise (signes de ralliement de la clientèle, savoir-faire et collection de produits) et lui concédait le droit exclusif de les exploiter sur le département de la Loire Atlantique.

En 2006/2007, des négociations tendant au rachat par le franchiseur des titres de la société Compagnie Atlantique du Cuir ont échoué, le prix proposé ayant été estimé insuffisant.

Le 6 octobre 2007, la SARL X a ouvert un magasin à l’enseigne Natuzzi Store dans le voisinage immédiat du franchisé, ce nouveau point de vente offrant, comme le magasin Cuir Center, des produits de la marque Natuzzi.

Se plaignant de concurrence déloyale et de violation de la clause d’exclusivité insérée dans le contrat de franchise, la société Compagnie Atlantique du Cuir a, le 8 avril 2008, assigné les sociétés Cuir Center International et X devant le tribunal de commerce de Nantes aux fins d’obtenir qu’il leur soit fait interdiction, sous astreinte, de poursuivre la vente des produits Natuzzi et qu’une expertise soit ordonnée.

Le 1er juillet 2008, la société Cuir Center International a notifié à la société Compagnie Atlantique du Cuir SA sa décision de procéder à une réorganisation des réseaux de distribution des produits de marque Natuzzi dont elle a l’exclusivité en France, en supprimant les Galeries Natuzzi dans les magasins Cuir Center et en réservant, à compter de la fin de l’année 2008, au réseau Natuzzi Stores l’exclusivité de la commercialisation des dits articles.

Le 27 septembre 2010, le tribunal de commerce de Nantes a :

déclaré recevable la société Compagnie Atlantique du Cuir en son action à l’encontre des sociétés Cuir Center International SELMA,

ordonné une expertise aux fins de chiffrer le préjudice lié à la concurrence déloyale sur la gamme Natuzzi, entre le 6 octobre 2007 et le 31 décembre 2008.,

débouté la société Compagnie Atlantique du Cuir de sa demande de condamnation des sociétés Cuir Center International et SELMA à astreinte,

ordonné l’exécution provisoire,

réservé les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

condamné les sociétés Cuir Center International et SELMA aux dépens.

Les sociétés Cuir Center International et X ont relevé appel de cette décision.

Le 22 juin 2011, le conseiller de la mise en état a débouté l’intimée de sa demande tendant à voir déclarer l’appel irrecevable.

Les sociétés Cuir Center International et X demandent à la Cour de :

réformer le jugement en ce qu’il a déclaré la société Compagnie Atlantique du Cuir recevable en son action à l’encontre des sociétés Cuir Center International et X lui ouvrant droit à réparation sous réserve d’un débat ultérieur, à l’issue de la mesure d’instruction ;

constater que la société Cuir Center International n’a pas violé les dispositions du contrat de franchise du 1er août 1995 ;

constater que les sociétés Cuir Center International et X n’ont pas commis d’actes de concurrence déloyale ;

débouter la société Compagnie Atlantique du Cuir de toutes ses demandes ;

condamner la société Compagnie Atlantique du Cuir au paiement à chacune d’elles d’une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Compagnie Atlantique du Cuir conclut à la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu’il a cantonné le préjudice à la période expirant le 31 décembre 2008. Elle forme une demande reconventionnelle en paiement d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour les appelantes le 1er décembre 2011 et pour l’intimée le 13 février 2012.

L’ordonnance de clôture a été reportée au 14 février 2012.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les sociétés appelantes demandent à la Cour de réformer le jugement en ce qu’il a déclaré l’action de la société Compagnie du Cuir recevable sans toutefois opposer la moindre fin de non-recevoir. La Cour n’est donc saisie d’aucun moyen d’irrecevabilité propre à réformer ce chef de la décision.

Elles demandent par ailleurs à la Cour de constater l’absence de violation, par la société Cuir Center International, des dispositions du contrat de franchise et, par les sociétés Cuir Center International et X, d’actes de concurrence déloyale.

Sur la violation du contrat de franchise

Aux termes de l’article 5.1 du contrat de franchise, le franchiseur s’interdit de concéder à des tiers, dans la zone d’exclusivité du franchisé, le droit d’exploiter tout ou partie des éléments de la franchise.

Or, la franchise est définie par le contrat comme la conjonction de trois éléments au rang desquels figure la collection de produits.

Celle-ci est à son tour définie de la manière suivante : 'Les meubles d’intérieur et articles de décoration portant la Marque, dont le Franchisé est distributeur, ou bien qui sont fabriqués pour le Franchiseur et selon ses instructions, ou encore, simplement référencés par lui'.

Il est constant que la collection des produits de la franchise Cuir Center comprenait depuis 1990, des produits fabriqués par la société Industrie Natuzzi Spa sous sa propre marque.

Depuis l’année 2000, la société Cuir Center International, devenue le franchisé exclusif pour la France des produits de marque Natuzzi, en assurait la commercialisation selon deux modes de distribution parallèles :

un espace d’exposition dédié à la marque Natuzzi au sein des magasins Cuir Center (les Galeries Natuzzi),

des magasins sous enseigne Natuzzi, les Natuzzi Stores, vendant uniquement des produits de cette marque.

Les pièces produites et les explications des parties révèlent que la collection Cuir Center ne comprenait pas l’ensemble des produits signés Natuzzi mais seulement une collection exclusive de ces produits.

Il s’en infère que le franchisé ne pouvait prétendre à l’exclusivité, sur son secteur, de la vente de tous les produits signés Natuzzi mais seulement à l’exclusivité de la vente des produits Natuzzi référencés par le franchiseur dans la collection de produits Cuir Center.

Les parties s’opposent sur l’existence ou non de produits signés Natuzzi qui auraient été vendus indifféremment dans l’un et l’autre circuit de distribution.

Les pièces produites par les sociétés appelantes révèlent cependant que le catalogue Cuir Center 'Nouvelle collection 2008« présente le canapé Malcom également inclus dans le catalogue Natuzzi Stores (non daté) versé aux débats par le franchiseur comme élément de comparaison tandis que le catalogue Cuir Center 'Nouvelle collection 2007-2008 » offre à la vente le canapé Kole de la même ligne que le modèle Kool du catalogue Natuzzi Stores.

Le second catalogue Natuzzi Stores versé aux débats, afférent à la collection 2002/2003, était quant à lui largement obsolète en 2007/2008 et donc de peu d’intérêt pour démontrer une prétendue étanchéité entre les gammes vendues dans les circuits respectifs.

Sachant que le catalogue et les publicités Cuir Center se prévalaient du concept de 'familles de composables Natuzzi', il faut en déduire que les modèles proposés se déclinaient en de multiples versions et éléments, de sorte que les modèles identifiés comme identiques correspondaient à une offre importante de variantes proposées indifféremment, à la même période, dans les deux circuits de distribution.

Dès lors, en faisant ouvrir, sur le secteur réservé à son franchisé, une surface de vente offrant ou ayant vocation à offrir des produits au moins partiellement identiques à ceux faisant partie de la collection Cuir Center, le franchiseur a violé l’obligation d’exclusivité à laquelle il était tenu.

Cette violation des obligations contractuelles justifie l’expertise ordonnée par le tribunal de commerce, indépendamment de l’existence ou non d’actes de concurrence déloyale.

Le contrat de franchise conférait au franchiseur la maîtrise de la détermination de la collection de produits dont il entendait assurer la distribution sous sa marque. Aussi, le seul fait de supprimer la sélection exclusive de produits signés Natuzzi de sa collection ne suffit pas à caractériser une faute, dès lors qu’il n’est pas démontré un appauvrissement corrélatif de la collection vendue sous l’enseigne Cuir Center, ni une modification substantielle de l’attractivité de la marque ou des conditions d’activité des franchisés.

La société Compagnie Atlantique du Cuir ne démontre pas dès lors la violation, par le franchiseur, postérieurement au 31 décembre 2008, d’une obligation contractuelle.

Sur la concurrence déloyale

La concurrence déloyale reprochée à la société Cuir Center International n’est pas établie dans la mesure où cette société ne vendait pas elle-même les produits NATUZZI et n’était donc pas en concurrence avec son franchisé.

La concurrence déloyale reprochée à la société X n’est pas davantage établie dans la mesure où l’existence d’un risque de confusion entre les enseignes 'Cuir Center’ et 'Natuzzi Store’ n’est pas démontrée. En effet, la vente d’articles partiellement identiques dans deux surfaces de vente ne constitue pas un élément suffisant pour créer, dans l’esprit de la clientèle, un risque de confusion entre les établissements en cause alors que leurs caractéristiques principales sont par ailleurs nettement différenciées. La mission donnée par le jugement du tribunal de commerce de Nantes sera en conséquence modifiée en ce qu’elle donne mission à l’expert de chiffrer le préjudice lié à la concurrence déloyale alors qu’il ne peut résulter que de la violation des stipulations contractuelles.

Sur les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile

En équité, la société Cuir Center International sera condamnée à verser à la société Compagnie Atlantique du Cuir une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu en revanche à application de l’article 700 du code de procédure civile au profit des sociétés appelantes.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme le jugement rendu le 27 septembre 2010 par le tribunal de commerce de Nantes sauf en ce qu’il a donné pour mission à l’expert de chiffrer le préjudice lié à la concurrence déloyale sur la gamme NATUZZI entre le 6 octobre 2007 et le 31 décembre 2008 ;

Statuant à nouveau,

— Dit que l’expert aura pour mission de chiffrer le préjudice subi par la SA Compagnie Atlantique du Cuir du fait de la violation de l’exclusivité conférée par le contrat de franchise signé le 1er août 1995 sur les produits de marque Natuzzi référencés dans la collection de produits 'Cuir Center’ pendant la période comprise entre le 6 octobre 2007 et le 31 décembre 2008 ;

— Constate que les sociétés Cuir Center International et X n’ont pas commis d’actes de concurrence déloyale ;

— Condamne la société Cuir Center International SA à payer à la société SA compagnie Atlantique du Cuir la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la société Cuir Center International aux dépens d’appel lesquels seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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