Cour d'appel de Rennes, 30 octobre 2013, n° 12/02928

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 30 oct. 2013, n° 12/02928
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 12/02928

Texte intégral

7e Ch Prud’homale

ARRÊT N°451

R.G : 12/02928

M. E X

C/

Société DANFOSS SARL

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 OCTOBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Catherine ELLEOUET-GIUDICELLI, Président,

Madame Liliane LE MERLUS, Conseiller,

Madame Mariette VINAS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame A B, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 17 Septembre 2013

devant Madame Catherine ELLEOUET-GIUDICELLI, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Octobre 2013 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur E X

XXX

XXX

XXX

Comparant en personne, assisté de Me KERNEIS Mathilde, substituant Me Annaïc LAVOLE, avocat au barreau de RENNES;

INTIMEE :

Société DANFOSS SARLvenant aux droits de la SA Z par suite d’une fusion du 12/11/2010

XXX

XXX

représentée par Me Nathaly BLIN, avocat au barreau de PARIS.


FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. E X a été embauché, le 14 septembre 1981, par la S.A. Z, en qualité de chaudronnier. Il est devenu par la suite responsable achat, avec un statut de cadre.

Il a été licencié pour motif économique, le 4 février 2009, et il a saisi le conseil de prud’hommes de SAINT BRIEUC, pour contester ce licenciement.

Par jugement du 2 avril 2010, le conseil l’a débouté de ses demandes.

M. X a relevé appel de cette décision. Mais l’affaire n’étant pas en l’état d’être plaidée, la procédure a été radiée par un arrêt du 21 juin 2011.

M. X a sollicité une remise au rôle et, dans des conclusions du 24 avril 2012, qu’il a fait développer à la barre, et qui seront tenues ici pour intégralement reprises, il expose ses arguments et développe des moyens, auxquels il sera répondu, pour obtenir la réformation de la décision entreprise et la condamnation de la S.A.R.L. DANFOSS, venant aux droits de la société Z, à lui payer :

—  120 000 euros de dommages et intérêts licenciement sans cause réelle et sérieuse ou pour non-respect de l’ordre des licenciements,

—  57 419,11 euros de complément d’indemnité de licenciement ou, subsidiairement 2286,03 euros,

—  2571 euros de congés payés afférents à la contrepartie financière de la clause de non concurrence,

—  3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans des conclusions du 12 septembre 2013, qui ont été développées à la barre et qui seront aussi tenues ici pour intégralement reprises, l’intimée demande la confirmation de la décision et la condamnation de l’appelant à lui payer une somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L’ARRÊT :

Sur le licenciement :

Attendu que M. X expose qu’en 2001, la société Z a été acquise par la société DEVI qui, en 2003, a intégré un groupe danois, le groupe DANFOSS, qui compte plus de 20 000 salariés et qui exerce dans les domaines du chauffage, de la réfrigération et des automatismes,

qu’en dernier lieu, il avait pour missions d’assurer l’approvisionnement des lignes de production en lien avec les prévisions commerciales, la politique de stock et les objectifs en vigueur, de développer le partenariat avec les fournisseurs ainsi que diverses tâches liées à la qualité,

qu’à partir de 2009, la société, invoquant des difficultés financières, informait le comité d’entreprise de sa volonté de supprimer 4 postes d’assistantes commerciales ou d’ordonnancement et un poste de responsable des achats et, après un entretien, le 23 janvier, elle le licenciait, pour motif économique, le 4 février 2009,

que pour sa part, il conteste tant le motif économique invoqué, qui résiderait dans la nécessité de réorganiser l’entreprise pour faire face à une situation économique difficile et pour anticiper une future baisse des commandes, baisse rendue prévisible par la diminution des constructions de maison individuelles, que la réalité de la suppression de son D et le respect de l’ordre des licenciement,

qu’en effet, même si le marché du chauffage électrique connaissait un ralentissement après une période de forte croissance en raison de la baisse de commande de maisons individuelles, la société Z enregistrait toujours des bénéfices en 2008 et avait eu des résultats satisfaisants en 2009,

que donc la nécessité de supprimer des postes pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise n’était pas démontrée,

qu’elle l’était d’autant moins que parallèlement à la suppression de 5 postes, Z augmentait certains cadres, ne facturait pas certains coûts à DANFOSS avec qui elle n’avait pas encore fusionné, et embauchait des salariés au motif que nonobstant les licenciements économiques et le gel des embauches, le groupe DANFOSS se réservait la possibilité de procéder à des recrutements pour assurer le bon fonctionnement de la société,

qu’en outre si la société a soutenu que son poste ayant été supprimé, ses tâches ont été réparties entre divers autres salariés, cela est faux car en réalité il a été remplacé dans ses fonctions d’achat, par M. Y, que si ce dernier avait été censément embauché comme responsable d’un projet 'ayant pour mission de gérer un projet d’amélioration des lignes de production déjà conceptualisé', ce projet n’a jamais vu le jour et M. Y sous l’intitulé 'Responsable supply chain’ a en réalité repris ses missions de responsable de chaîne d’approvisionnement,

que donc son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, qu’il l’est d’autant plus que l’employeur n’a pas respecté un ordre de licenciement, alors que, même si son poste était supprimé, il devait en établir un entre tous les salariés de l’entreprise exerçant des fonctions de même nature et ayant une formation professionnelle commune,

qu’en réalité, il semblerait que le choix de la société DANFOSS était motivé par la volonté de se séparer des salariés les plus anciens qui avaient été en lien avec la société Z,

que son licenciement est aussi injustifié du fait du manquement de l’employeur a son obligation de reclassement qui est en l’espèce une obligation renforcée, le seul fait d’avoir interrogé les différentes entreprises du groupe susceptibles d’avoir un poste disponible correspondant à sa classification étant insuffisant ;

Attendu que l’intimée réplique que la société Z, tout comme le groupe DANFOSS, connaissait effectivement à l’époque des difficultés économiques qui l’ont obligé par deux fois à procéder à des réorganisations,

qu’en effet le contexte de crise mondiale a entraîné une baisse d’activité qui s’est répercutée sur son chiffre d’affaires et qui a fait que les résultats commerciaux ont été bien en dessous des objectifs fixés et bien inférieurs à ceux nécessaires pour assurer sa rentabilité, qu’elle s’est donc trouvée dans l’obligation, pour sauvegarder sa compétitivité, de se restructurer et de mettre en oeuvre une procédure de licenciement économique qui a reçu l’approbation du comité d’entreprise

que c’est à bon droit que le conseil a retenu qu’elle justifiait de ses difficultés économiques, de ses recherches de reclassement qui avaient échoué notamment en l’état du refus du salarié de transmettre son curriculum vitae,

qu’il a aussi justement retenu qu’il n’y avait pas lieu d’établir un ordre de licenciement puisqu’il était le seul salarié à occuper un poste de responsable d’achat,

que si M. X maintient dans ses conclusions d’appel que son poste n’aurait pas été supprimé, il n’en est rien, la baisse des commandes ayant entraîné celle des achats et les tâches de M. X ont été réparties entre les différents services de la société Z tandis que les tarifs d’achat étaient discutés ou négociés par le groupe ou des intervenants extérieurs,

que M. Y a lui occupé un poste consistant en la gestion et la supervision de l’unité d’assemblage et de production de la société, unité chargée de la réception, la préparation et l’expédition des produits qui arrivent à la société et qui permettent d’assembler les câbles chauffants, le responsable supply chain n’étant pas chargé des opérations d’achat en amont, que même si M. Y a repris une tâche antérieurement exercée par M. X, en tant que responsable d’achats, il ne s’agissait que d’une tâche précise et particulière soit la mission de relations fournisseurs concernant les achats de matières premières ;

Attendu que la volonté d’une entreprise de se restructurer pour sauvegarder sa compétitivité ne saurait permettre, même en cas de démonstration de la nécessité de sauvegarder la dite entreprise ce qui n’est pas le cas puisque M. X produit des éléments statistiques démontrant que le dernier semestre 2008 a vu une reprise dans la construction des maisons individuelles secteur particulièrement porteur pour les planchers chauffants commercialisés par Z, de licencier certains salariés pour en embaucher d’autres sur dans les mêmes fonctions, qu’ainsi la volonté du groupe DANFOSS annoncée lors d’un comité d’entreprise du 13 janvier 2009 de 'gel des embauches’ en se réservant la possibilité d’engager un responsable 'supply chain’ et un technicien BE, alors que parallèlement était licencié un salarié cadre responsable des achats, exclut, contrairement à ce qu’a retenu le conseil tout caractère réel et sérieux du licenciement,

qu’en effet, et quels que soient les titres couvrant les missions de M. Y embauché concomitamment au licenciement de M. X, il apparaît que le premier remplissait les missions antérieurement confiées à M. X puisque le responsable administratif de la société indiquait dans un courriel du 12 février 2009, après avoir exposé les modalités de répartition des tâches de M. X pendant la durée de son préavis entre plusieurs salariés, dont M. Y à qui était confiée la relation fournisseur de matières premières, qu’ 'un gros travail de transfert de tâches des achats/stocks/ production des ENR est en cours, le service supply chain en prenant la responsabilité’ et que la supply chain, en français chaîne logistique, désigne, comme le montre le courriel ci-dessus rappelé, l’ensemble des maillons de la logistique d’approvisionnement : achats, gestion des stocks, manutention stockage ;

Attendu que M. X dont l’indemnisation relève de l’article L 1235-3 du code du travail justifie de ce que, après 27 années dans une société où il avait fait une très brillante carrière, s’est retrouvé à 53 ans au chômage et qu’il n’a toujours pas retrouvé d’D, que cette situation aura aussi une incidence sur sa retraire,

que cependant et comme le soutient l’employeur il a effectivement refusé de bénéficier des formations organisées par C D et limité à 30 Km le périmètre de recherche, qu’il lui sera donc alloué à titre de dommages et intérêts une somme de 80 000 euros ;

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement :

Attendu que M. X expose qu’il n’a pas été rempli de ses droits à ce titre, qu’en effet, dans le cadre du licenciement économique envisagé, il avait été prévu que les 4 assistantes licenciées bénéficieraient d’un doublement de leur indemnité de licenciement, tandis que lui en tant que cadre aurait droit à une prolongation de la durée de son congé de reclassement,

qu’il n’y a donc pas eu égalité des salariés au regard de la perte d’D et qu’il n’a pas adhéré à la convention de reclassement, qu’il a donc droit au doublement de la prime et donc à 57419,11 euros supplémentaires, que de toute façon le calcul opéré est faux puisque l’intégralité de ses années n’a pas été prise en compte ;

Attendu que la société réplique qu’en l’état des difficultés probables de réinsertion du salarié, elle avait arrêté la décision de porter de 9 mois à 12 mois le congé de reclassement, que cette décision a été jugée par le conseil de nature à remplir le salarié de ses droits, que le fait qu’il ait refusé d’y adhérer ne peut lui être imputé ;

Attendu que le principe d’égalité de traitement entre salariés, édicté par l’article L 1133-1 du code du travail, implique que les différences de traitement soient justifiées par une exigence professionnelle essentielle et déterminante et ait un objectif légitime, qu’en l’espèce aucun de ces éléments n’est justifié, le principe d’égalité nécessitant que soit proposé à M. X, en cas de refus de bénéficier du congé de reclassement, refus qui relevait de sa seule décision, le doublement de son indemnité de licenciement, que dès lors il doit être fait droit à cette demande;

Sur les congés payés afférents à la contrepartie de la prime de non concurrence :

Attendu que M. X expose qu’il a perçu 25 704 euros à ce titre que donc les congés payés correspondants lui sont dus, que la société prétend qu’il a été rempli de ses droits à ce titre, mais que l’analyse des bulletins de salaire produits ne permet pas de retenir sa position, qu’il sera donc également fait droit à cette demande ;

Attendu que l’équité justifie en la cause l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’appelant ;

Attendu qu’en application de l’article L 1322-4 du code du travail, l’intimée doit être condamnée d’office à rembourser à C D les indemnités chômage versées au salarié pendant une période de six mois ;

Attendu que l’intimée qui succombe doit être condamnée aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud’homale,

REFORME le jugement entrepris,

CONDAMNE la société DANFOSS à payer à M. E X :

—  80 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  57 419,11 euros de complément d’indemnité de licenciement,

—  2571 euros de congés payés afférents à la contrepartie financière de la clause de non concurrence,

—  3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamne à rembourser à C D, les indemnités chômage versées à M. X, dans la limite de six mois,

La CONDAMNE aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :

G. B C. ELLEOUET-GIUDICELLI

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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