Cour d'appel de Rennes, 17 décembre 2013, n° 12/07659

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 17 déc. 2013, n° 12/07659
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 12/07659

Texte intégral

1re Chambre

ARRÊT N° 466

R.G : 12/07659

M. G A

C/

C ADHERENTS RADIO TAXIS DE L’AGGLOMERATION RENNAISE (D)

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 DECEMBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller, entendue en son rapport

GREFFIER :

Madame K L, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 Novembre 2013

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l’audience publique du 17 Décembre 2013, date indiquée à l’issue des débats.

****

APPELANT :

Monsieur G A

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Dominique TOUSSAINT de la SELARL TOUSSAINT DOMINIQUE, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

C ADHERENTS RADIO TAXIS DE L’AGGLOMERATION RENNAISE (D) dit TAXIS RENNAIS

XXX

XXX

Représentée par Me Philippe LE GOFF de la SELARL CRESSARD/LE GOFF AVOXA SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de RENNES

Depuis le 1er Avril 1999, Monsieur G A, artisan-taxi, exploite l’autorisation de stationnement numéro 23 qui lui a été délivrée par la Ville de Rennes.

Le 1er Mai 1999, Monsieur A a adhéré au C Adhérents Radio Taxis de l’Agglomération Rennaise (D), dit 'Les Taxis Rennais', qui regroupe environ 80% des taxis rennais et permet à ces derniers de bénéficier de courses relayées par son central téléphonique.

Le 17 Avril 2010, une altercation a opposé Monsieur A à l’un de ses collègues membre du C, Monsieur E Y, pour laquelle chacun d’eux a déposé plainte.

Destinataire d’un courrier de dénonciation de Monsieur Y, le conseil d’administration du C D a décidé d’engager une procédure disciplinaire et par courrier du 11 Mai 2010, Monsieur A a été convoqué le 27 Mai suivant devant le conseil consultatif de discipline du groupement.

Lors de la réunion du 27 Mai, à laquelle Monsieur A ne s’est pas présenté, le conseil consultatif de discipline a décidé de proposer au conseil d’administration de couper durant 7 jours l’attribution des courses de Monsieur A et de soumettre au vote des adhérents l’exclusion de Monsieur A.

Le 1er Juin, le conseil d’administration a validé ses propositions et décidé de convoquer une assemblée générale extraordinaire le 21 Juin suivant.

La coupure de l’attribution de courses est intervenue du 14 au 21 Juin.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire, à laquelle Monsieur A s’est présenté assisté de son conseil, a été votée son exclusion définitive, qui lui a été notifiée par courrier du 02 Juillet 2010.

Parallèlement, la Commission Communale des Taxi et Voiture de petite remise, réunie en formation disciplinaire le 08 Juin 2010, a décidé la suspension pour une durée de 3 mois de l’autorisation de stationnement numéro 23 de Monsieur A et cette suspension a fait l’objet d’un arrêté municipal du 27 Août 2010.

Le Tribunal Administratif de Rennes a annulé ces décisions.

Par acte du 20 Septembre 2010, Monsieur A a assigné le C D devant le Tribunal de Grande Instance de Rennes aux fins de voir annuler les décisions précitées et indemniser son préjudice.

Par jugement du 25 Septembre 2012, le Tribunal de Grande Instance de Rennes a:

— débouté Monsieur A de ses demandes,

— condamné Monsieur A au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— condamné Monsieur A aux dépens.

Appelant de ce jugement, Monsieur A, par conclusions du 03 Juin 2013, a demandé que la Cour:

— infirme le jugement déféré,

— dise que le conseil d’administration était irrégulièrement constitué et en conséquence déclare nulles sa décision du 1er Juin 2010 et celle de l’assemblée générale extraordinaire du 21 Juin 2010,

— dise la procédure irrégulière pour défaut du principe du contradictoire et de respect des droits de la défense de Monsieur A,

subsidiairement:

— dise la sanction de l’exclusion injustifiée,

en toute hypothèse:

— condamne le C à lui payer une indemnité de 102 euros par jour courant à compter du 21 Mai 2010 et jusqu’au rétablissement à son bénéfice du système d’attribution de courses,

— condamne le C à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de son préjudice moral,

— déboute le C de toutes ses demandes,

— le condamne à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— le condamne au paiement des dépens de première instance et d’appel avec droit de distraction pour ceux dont il a été fait l’avance.

Par conclusions du 05 Juin 2013, le C D a sollicité que la Cour:

— déboute Monsieur A de ses demandes,

— confirme le jugement déféré,

— condamne Monsieur A à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— le condamne au paiement des dépens de première instance et d’appel avec droit de distraction pour ceux dont il a été fait l’avance.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION:

Monsieur A conclut à la nullité de l’entière procédure disciplinaire diligentée contre lui par le C au motif que son conseil d’administration, qui a initié la procédure en décidant de l’entendre suite à la plainte de Monsieur Y, puis de convoquer le conseil consultatif de discipline, et qui a ensuite validé la proposition du conseil consultatif en convoquant une assemblée générale extraordinaire, est irrégulièrement composé.

L’un de ses membres, Monsieur Z, a en effet été élu le 27 Mars 2010 comme membre de ce conseil en violation des dispositions des statuts du groupement, dans la mesure où il ne bénéficiait pas d’une année entière d’ancienneté en son sein.

Selon l’article 16 des statuts du groupement, 'toute personne jouissant du plein exercice de ses droits civiques et comptant au moins 1 an d’activité dans le C est éligible aux différents postes du conseil d’administration du groupement'.

Le groupement ne conteste pas que Monsieur Z ait été élu le 27 Mars 2010 alors qu’il ne disposait pas d’une année d’activité, mais expose qu’en l’absence d’autre candidat, les membres du C, parfaitement au courant de sa situation, ont voté librement pour lui.

Monsieur A, qui est membre du groupement et qui avait donc voix élective lors de l’élection du conseil d’administration, n’a pas contesté la régularité de l’élection de Monsieur Z.

Lorsqu’il s’est présenté le 04 Mai 2010 devant le conseil d’administration, il n’a pas contesté la régularité de sa composition (s’il conteste désormais avoir comparu le 04 Mai, cette allégation, formellement contredite par les mentions figurant sur le procès-verbal et les attestations versées aux débats, ne repose sur aucun moyen sérieux).

Enfin, il n’a pas plus contesté la régularité de la composition du conseil à réception de son courrier du 11 Mai 2010 le convoquant devant le conseil consultatif de discipline et ne justifie pas dans ses conclusions d’un quelconque grief que lui aurait causé le défaut d’ancienneté de Monsieur Z.

Au demeurant, ce défaut d’ancienneté ainsi que l’irrégularité potentielle de la désignation de Monsieur Z ne violent pas l’une des dispositions impératives prévues par l’article L251-5 du code de commerce, ce dont il résulte que les actes passés par le conseil d’administration du groupement n’encourent pas l’annulation et que le moyen soulevé par Monsieur A est inopérant.

Monsieur A conclut ensuite à la violation de ses droits de la défense, la procédure suivie ne lui ayant pas permis de connaître les griefs retenus contre lui et de préparer sa défense.

Les premières étapes de la procédure ne souffrent aucun reproche: le conseil d’administration a pris connaissance du courrier de plainte que lui avait adressé Monsieur Y, puis décidé lors de sa réunion du 22 Avril de consulter un avocat, et lors de sa réunion du 29 de provoquer un conseil consultatif de discipline; le 04 Mai 2010 le conseil d’administration a entendu Monsieur A.

Le conseil consultatif est prévu par les dispositions du chapitre V du règlement intérieur du groupement et a pour mission d’orienter le jugement du conseil d’administration lorsque celui-ci est appelé à délibérer sur l’application d’éventuelles sanctions envers un contrevenant; il étudie et émet un avis quant à la sanction à appliquer dans tous les cas de manquement aux statuts ou règlement intérieur, ou d’agissements susceptibles de porter atteinte au fonctionnement ou à la réputation du groupement.

L’article 18 du règlement intérieur prévoit que la comparution devant le conseil consultatif est obligatoire et que la défaillance d’une personne convoquée est sanctionnée par une coupure du système d’attribution des courses durant 7 jours hors vacances scolaires.

Par courrier recommandé du 11 Mai 2010, Monsieur A a été convoqué le 27 Mai à 15 heures devant le conseil consultatif de discipline: le courrier précisait l’objet de ce conseil, qui était que Monsieur A s’explique 'au vu du courrier de plainte (courrier ci-joint) de Monsieur Y E (voiture n°36)' et le courrier adressé par Monsieur Y au président du C était joint à la convocation; celle-ci précisait qu’il était possible à Monsieur A de se faire assister par un membre du groupement et de porter à la connaissance du conseil consultatif tout élément jugé utile.

Le délai de seize jours laissé à Monsieur A pour organiser sa défense devant le conseil consultatif était suffisant et dès lors, cette étape de la procédure est régulière.

Ensuite, s’il est exact que Monsieur A était souffrant et en arrêt de travail le 27 Mai, aucune pièce ne justifie qu’il ait cherché à en aviser les instances du groupement et ait demandé un report du conseil consultatif; les courriers dans lesquels lui-même et son conseil ont contesté la tenue de ce conseil consultatif sont postérieurs à la réunion du 27 Mai; en outre, dans son courrier daté du 03 Juin 2010, Monsieur A se prévaut d’un refus volontaire de sa part de comparaître le 27 Mai.

Dès lors, il ne peut être reproché au conseil consultatif d’avoir tenu sa réunion en son absence et les décisions prises par ce conseil consultatif sont régulières.

Pour le même motif est régulière la décision prise par le conseil d’administration du groupement sur proposition du conseil consultatif, qui sanctionne Monsieur A d’une coupure du système d’attribution durant sept jours en raison de son absence de comparution à la réunion du 27 Mai 2010.

En revanche, la procédure suivie devant l’assemblée générale extraordinaire du 21 Juin 2010, ayant abouti à l’exclusion du groupement de Monsieur A est irrégulière en ce qu’elle l’a empêché de préparer utilement sa défense.

Par courrier recommandé du 08 Juin 2010, Monsieur A a été convoqué devant l’assemblée générale extraordinaire afin qu’il soit statué sur son exclusion du groupement; le courrier recommandé de convocation précisait que seraient entendus Monsieur A, Monsieur Y, Monsieur B et Monsieur X, que seraient lus les rapports du conseil consultatif de discipline du 27 Mai 2010 et du conseil d’administration du 1er Juin et que Monsieur A pouvait se faire assister du conseil de son choix, faire valoir ses moyens de défense, présenter toutes explications jugées utiles et faire valoir son opinion sur la mesure susceptible de lui être appliquée.

Toutefois, aucune pièce n’était jointe à la convocation.

Ces pièces et notamment les comptes-rendus du conseil consultatif et du conseil d’administration ont été réclamés par le conseil de Monsieur A par courrier et télécopie des 11 et 13 Juin et elles lui ont été postées le 15 Juin par courrier recommandé. Toutefois, celui-ci n’est arrivé à sa destination que le 22 Juin 2010, soit postérieurement à la tenue de l’assemblée générale extraordinaire.

Il en résulte que le conseil de Monsieur A n’a pas été mis en mesure de préparer avant l’assemblée générale du 21 Juin 2010 la défense de son client et que par conséquent, la décision de l’assemblée générale extraordinaire doit être annulée comme ayant été prise en violation d’un droit fondamental de Monsieur A.

En conséquence, la Cour fait droit à la demande d’annulation de la décision d’exclusion du C prise le 21 Juin 2010.

Sur le préjudice subi par Monsieur A:

Le préjudice subi par Monsieur A en raison de l’irrégularité de la décision d’exclusion prise par l’assemblée générale n’est pas celui résultant de la coupure d’attribution des appels prise à son encontre au mois de Juin 2010 puisque cette sanction est régulière; il n’est pas non plus celui résultant de l’application de la sanction prise à son encontre (puis annulée par le Tribunal Administratif de Rennes) par l’arrêté municipal du 27 Août 2010, celui-ci étant la conséquence d’une procédure introduite par Monsieur Y et non par le C D.

D’autre part, l’exclusion de Monsieur A du groupement n’a pas eu pour conséquence de lui interdire de travailler: tous les artisans taxi ne sont pas affiliés à un groupement, tandis qu’existe sur Rennes un deuxième C de taxis, le C 'Artisans Taxis de Rennes', auquel une affiliation aurait pu être demandée.

Le préjudice économique éventuellement subi ne peut donc être envisagé que sur la base de la différence entre les résultats engendrés par une activité de taxi sans affiliation à un groupement et celle qui était engendrée par une activité avec affiliation.

Une expertise comptable est par conséquent ordonnée, aux frais avancés de l’appelant, afin de déterminer quels furent les résultats de l’activité de taxi de Monsieur A postérieurement à son exclusion du groupement et il est sursis à statuer sur le solde des demandes jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.

Dans l’attente, les demandes relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont réservées.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, après rapport à l’audience :

Annule la décision d’exclusion prise le 21 Juin 2010 par l’assemblée générale extraordinaire du C D à l’encontre de Monsieur G A.

Ordonne une expertise et sursoit à statuer sur le solde des demandes jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.

Désigne Monsieur XXX, avec pour mission de:

1) convoquer les parties et se faire remettre tous documents jugés utiles,

2) déterminer le chiffre d’affaires et le résultat annuels de Monsieur A durant les trois années ayant précédé son exclusion du C D,

3) déterminer le chiffre d’affaires et le résultat annuels de Monsieur A à compter de la date à laquelle son exclusion du C D a été effective et jusqu’au 31 Décembre 2013,

4) fournir à la Cour tous éléments jugés utiles à la solution du litige.

Fixe à la somme de 3.000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que Monsieur A devra consigner au moyen d’un chèque émis à l’ordre du régisseur de la Cour d’Appel de Rennes dans un délai d’un mois à compter de ce jour, faute de quoi la désigna−tion de l’expert sera caduque.

Dit que l’expert commencera ses opérations après avis de la consignation qui lui sera adressé par le greffe.

Dit qu’à l’issue de la première réunion des parties ou au plus tard de la deuxième réunion, l’expert communiquera aux parties, s’il y a lieu un état prévisionnel détaillé de l’ensemble de ses frais et honoraires et, en cas d’insuffisance de la provision allouée, demandera la consignation d’une provision supplémentaire.

Dit que l’expert dressera un rapport de ses opérations qui sera déposé au greffe de ce tribunal dans un délai de cinq mois à compter de l’avis de consignation ; qu’il aura, au préalable, transmis un pré-rapport aux parties et leur aura laissé un délai suffisant pour présenter leurs observations sous formes de dires auxquels l’expert sera tenu de répondre dans son rapport définitif.

Désigne Madame Jeorger-Le Gac, et à défaut tout autre magistrat de la chambre, pour contrôler les opérations d’expertise et, en cas d’empêchement de l’expert, procéder d’office à son remplacement.

Renvoie l’affaire à l’audience du 16 Juin 2014 afin de contrôle des opérations d’expertise.

Réserve les dépens.

LE GREFFIER.-. LE PRESIDENT.-.

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