Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 7 février 2018, n° 17/01006

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. com., 7 févr. 2018, n° 17/01006
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 17/01006
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, 27 mars 2017, N° 17/00077
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 07 Février 2018

RG N° : 17/01006

AA

Arrêt rendu le sept Février deux mille dix huit

Sur APPEL d’une ORDONNANCE DE REFERE rendue le 28 mars 2017 par le Président du tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND (RG n° 17/00077)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. François RIFFAUD, Président

M. François KHEITMI, Conseiller

Mme Audrey ARSAC, Vice-Présidente placée auprès de Mme la Première Présidente, déléguée par ordonnance de Mme la Première Présidente en date du 18 septembre 2017

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

M. N K Y

Clinique de la […]

[…]

Représentant : la SCP VIGNANCOUR ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANT

ET :

M. I X

[…]

[…]

Représentant : la SCP LANGLAIS GENEVOIS & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

[…]

[…]

63057 CLERMONT-FERRAND

Non représenté – assigné à personne morale (personne habilitée) le 29 juin 2017

INTIMÉS

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 29 Novembre 2017, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Monsieur KHEITMI et Madame ARSAC, magistrats chargés du rapport, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 07 Février 2018 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. François RIFFAUD, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. X a été hospitalisé le 7 mai 2013 à la Clinique de la Châtaigneraie afin d’y subir une ethmoïdectomie par voie nasale. Cette intervention a été pratiquée par N K Y.

M. X a regagné son domicile le lendemain.

Le 9 mai, il s’est plaint de maux de tête. N Y l’a revu le 9, le 10 et le 11 mai pour un nettoyage du nez.

Malgré cela, M. X a continué à se plaindre de céphalées et de vertiges. N Y a alors décidé de l’hospitaliser de nouveau à compter du 12 mai et de le placer sous traitement antibiotique.

Un scanner, réalisé le 13 mai 2013, a révélé un pneumo-encéphale.

Son état s’est amélioré et M. X a quitté la clinique de la Châtaigneraie le 15 mai.

Ses maux de tête étant réapparus, il s’est présenté le 17 mai 2013 au CHU de Clermont-Ferrand, où N Z a réalisé en urgence la fermeture d’une brèche ostéo- méningée.

En 2014, M. X s’est de nouveau plaint de maux de tête. Il a subi un scanner en mars 2014, puis un prélèvement de rhinorrée en mai. Cet examen a révélé une positivité de béta 2 transferrine.

Une nouvelle intervention a alors été pratiquée le 16 juin 2014, visant notamment à la mise en place d’un drain lombaire.

En décembre 2014, M. X a été hospitalisé pour un enregistrement de longue durée de la pression crânienne par ponction lombaire. Cet examen a confirmé des épisodes d’hypertension intracrânienne.

Le 19 janvier 2015, M. X a fait l’objet d’une nouvelle opération, aux fins de mise en place d’une dérivation ventriculaire.

En mai 2015, il a subi deux interventions : une première le 11 mai, visant à la fermeture de la brèche ostéo-méningée toujours présente, une seconde le 21 mai, pour une ablation du matériel endonasal.

Lors d’une consultation du 27 août 2015, il a été constaté une récidive de la brèche et une chirurgie par voie neurochirurgicale bicoronale a été envisagée.

Par acte du 11 mai 2015, M. X a fait assigner la Clinique de la Châtaigneraie, M. N Y et la CPAM du Puy-de-Dôme aux fins de voir organiser une mesure d’expertise judiciaire. Par acte du 18 mai 2015, M. X a appelé le Régime social des indépendants (RSI) en la cause.

C’est dans ces conditions que, par ordonnance du 16 juin 2015, une mesure d’expertise a été confiée au docteur L G.

Celui-ci a déposé son rapport définitif le 18 octobre 2016.

Selon actes introductifs d’instance des 4 et 19 janvier 2017, M. I X a fait assigner en référé devant le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand M. K Y, en présence du RSI, aux fins de le voir condamner :

— à lui payer la somme provisionnelle de 40 000 euros à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice,

— à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— à supporter les dépens de l’instance et les dépens au titre de la précédente expertise, taxés à la somme de 1 340 euros.

M. K Y demandait à la juridiction de relever l’existence de contestations sérieuses et soulevait notamment la nullité de l’expertise, faute de réponse à ses dires. Il niait tout manquement, que ce soit à son obligation d’information ou dans le suivi post-opératoire.

Par ordonnance du 28 mars 2017, le président du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, statuant en référé, a condamné M. K Y à payer à M. I X la somme de 10 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice, outre la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens, comprenant les frais d’expertise. La décision a également réservé les droits du RSI.

Par déclaration électronique du 18 avril 2017, M. Y a interjeté appel total de cette décision.

Dans ses dernières écritures, notifiées le 16 novembre 2017, M. Y conclut à la réformation de l’ordonnance du 28 mars 2017, au débouté de l’ensemble des demandes de M. X, et à la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de l’instance, étant dit que la SCP VIGNANCOUR & associés pourra recouvrer directement les frais dont elle a fait l’avance sans en avoir reçu provision.

Au soutien de ses prétentions, il indique que la demande de M. X se heurte à plusieurs contestations sérieuses.

Il fait valoir en premier lieu que l’expert, en réaction à ses dires, s’est contenté de compléter son

rapport sur trois points, mais a laissé sans réponse ses observations sur l’information donnée avant l’intervention chirurgicale, sur la conduite à tenir en cas de suspicion de brèche ostéoméningée post opératoire par ethmoïdectomie et sur les conséquences médico-légales en cas de faute.

Il considère que le rapport de l’expert ne répond pas à ces questions, y compris implicitement, et que cette irrégularité constitue une inobservation de la règle posée par l’article 276 du code de procédure civile, de nature à en entraîner la nullité.

Il fait ensuite valoir qu’il n’a commis aucune faute dans la délivrance de l’information. Il nie avoir affirmé, lors de l’expertise, qu’il n’informait pas oralement les patients de tous les risques encourus et reproche à l’expert d’avoir déformé ses propos. Il soutient que, lors de la consultation du 24 avril 2013, il a expliqué à M. X en termes simples et compréhensibles le but de l’intervention, son déroulement, ainsi que le risque d’écoulement nasal de liquide céphalo-rachidien et le risque de méningite. Il en a référé au médecin traitant de M. X, devant ce dernier. Il lui a enfin remis la notice d’information établie par le conseil national professionnel d’D et la société française d’D, qui mentionne expressément le risque d’écoulement nasal de liquide céphalo-rachidien. Il souligne avoir fait signer à son patient deux documents de 'consentement éclairé’ par lesquels M. X a formellement reconnu avoir été informé et avoir reçu les réponses à ses questions concernant l’intervention.

En tout état de cause, M. Y soutient qu’il n’existe pas de lien de causalité entre un manquement éventuel à l’obligation d’information et le préjudice allégué par M. X dans la mesure où l’intervention objet du litige était indispensable. Il fait également valoir que, compte tenu des informations données, il n’y a eu aucune perte de chance d’éviter le risque qui s’est réalisé, ni aucun préjudice d’impréparation.

M. Y invoque ensuite son absence de faute sur la technique opératoire. Il rappelle que le médecin n’est pas tenu d’une obligation de résultat et qu’aucune faute n’a été retenue par l’expert s’agissant de l’indication chirurgicale et de la technique opératoire, la brèche ostéo-méningée étant une complication rare mais classique de l’intervention.

M. Y fait valoir qu’il n’a commis aucune faute dans le suivi post-opératoire. Il indique ainsi qu’il a réalisé 3 endoscopies les 9, 10 et 11 mai, qu’il n’existait aucun écoulement de liquide cérébro-spinal dans la période post-opératoire et que seule une pneumocéphalie minime a été objectivée sur le scanner du 13 mai 2013, et non une brèche ostéo-méningée. Il considère que, lorsque la brèche n’est pas visible au scanner ou en cas de fuite minime, il convient de laisser le patient en observation, la rhinorrée cérébro-spinale pouvant se tarir spontanément en quelques jours. Il invoque à cet égard les avis de ses confrères ainsi que les recommandations de la société française d’D de 2008. Il reproche à l’expert de ne pas préciser sur quel consensus médical et/ou références scientifiques il fonde son avis contraire.

A supposer qu’une faute existe, M. Y rappelle que celle-ci ne relève pas du geste médical, mais se limiterait au retard de trois jours pris dans le colmatage de la brèche. Il en déduit que le préjudice indemnisable ne doit pas intégrer les conséquences de la découverte, en juin 2014, d’une brèche éthmoïdale gauche, sans rapport avec la brèche localisée à droite, colmatée et guérie le 17 mai 2013 par l’intervention du docteur Z. Il rappelle à cet égard que, suite à cette intervention, M. X a été guéri pendant un an.

A titre très subsidiaire, il invoque le caractère manifestement excessif de la provision sollicitée dans la mesure où les préjudices ne sont pas déterminés en l’absence de consolidation, et où ils ne résultent pas de ses manquements allégués, mais de récidive de rhinorrhée.

Dans ses dernières écritures, notifiées par la voie électronique le 20 novembre 2017, M. X sollicite la confirmation de l’ordonnance déférée en ce qu’elle a jugé que la demande de provision

présentée par M. X n’était pas sérieusement contestable et en ce qu’elle lui a alloué la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et son infirmation en ce qu’elle a limité la provision allouée à la somme de 10 000 euros.

En conséquence, il conclut au débouté des demandes de M. Y, ainsi qu’à sa condamnation :

— à lui payer la somme provisionnelle de 40 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice,

— à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— à supporter les entiers dépens de l’instance, de l’instance de référé-provision, ainsi qu’aux dépens des frais d’expertise antérieurement ordonnés, lesquels ont été taxés à la somme de 1 340 euros par ordonnance du 30 mars 2016.

En réponse au moyen de nullité du rapport d’expertise, il indique que l’expert a pris soin de préciser que les réponses aux observations étaient incluses dans le rapport. Il conteste ensuite toute déformation des propos de M. Y et soutient que si tel avait été le cas, N B, intervenant en qualité de sachant, l’aurait relevé. Il fait ensuite valoir que, si l’expert n’a pas répondu aux dires de M. Y portant sur la perte de chance, c’est qu’il a considéré que le préjudice du patient ne se limitait pas à une perte de chance.

Il fait grief à M. Y d’avoir manqué à son obligation d’information en se contentant de la délivrance d’une notice écrite, sans précisions orales sur la totalité des risques encourus. Il relève en outre que les documents écrits sont lacunaires et non personnalisés. Il considère que ce manquement justifie une indemnisation au titre d’un défaut de préparation aux conséquences du risque, ainsi qu’au titre de la perte de chance d’éviter le dommage.

Il relève ensuite que l’expert a retenu une faute de M. Y dans le suivi post-opératoire.

Il met enfin en exergue la gravité des séquelle subies, ainsi que leurs répercussions professionnelles. Il rappelle que l’expert, s’il n’a pas fait de chiffrage définitif, a néanmoins évalué les souffrances endurées à un minimum de 4/7 et a retenu un déficit fonctionnel temporaire total de 41 jours ainsi qu’un déficit partiel d’au moins 18 mois. Il précise qu’il a subi de nouvelles interventions chirurgicales depuis les opérations d’expertise et qu’il a notamment été hospitalisé du 18 au 22 septembre 2016 au CHU de Clermont-Ferrand pour la prise en charge d’une cranioplastie sur mesure après craniectomie sur infection du site opératoire dans le cadre d’une prise en charge d’une brèche ostéoméningée iatrogène.

Il indique en outre qu’il était chef d’entreprise d’une société de charpente couverture qui a dû être placée en liquidation judiciaire et pour laquelle il s’était porté caution à hauteur de plus de 30 000 euros. Il est aujourd’hui sans emploi, reconnu invalide par la MDPH.

En réponse aux moyens de M. Y, il soutient que, en présence d’une faute de ce dernier, il est indéniable qu’une indemnisation lui sera allouée, peu important de savoir si elle ne le sera que s’agissant des préjudices imputables au retard pris dans la reprise chirurgicale.

Le RSI n’ a pas constitué avocat.

Il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 novembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la question de la faute dans la délivrance de l’information

La question de la validité du rapport d’expertise est ici indifférente, les documents versés aux débats étant suffisants pour apprécier si le manquement de M. Y à son obligation d’information est sérieusement contestable.

En premier lieu, M. Y ne démontre pas avoir délivré une information orale à M. X sur les risques liés à l’ethmoïdectomie. Le patient le conteste et N Y a, au cours des opérations d’expertise, tenu à ce sujet des propos ambigus.

En outre, l’information qu’il a délivrée par écrit apparaît insuffisante. Aucun des deux documents signés par M. X ne mentionne les risques propres à l’ethmoïdectomie. Il s’agit en réalité de notices types, utilisées quel que soit le type d’intervention envisagé et mentionnant dans l’abstrait les risques de toute opération, sans les identifier.

Le consentement éclairé élaboré par le conseil national de l’D vise en outre une notice B4, que le patient reconnaît avoir reçue. Or, l’examen des pièces versées aux débats par M. Y démontre que la notice relative à l’ethmoïdectomie par voie endonasale porte la référence B 7, et non B 4.

Il n’est donc pas établi que M. X ait reçu une information, écrite ou orale, sur les risques spécifiques à l’ethmoïdectomie, et notamment sur le risque d’apparition de brèche ostéo-méningée.

Le manquement à son obligation d’information imputable à M. Y n’étant pas sérieusement contestable, M. X est fondé à solliciter le versement d’une provision à ce titre.

Il faut cependant relever que le risque qui s’est réalisé varie entre 0 et 2,3 % des cas. En outre, il n’est pas démontré qu’existait une alternative à cette intervention au regard de la pathologie de M. X, qui présentait une polypose diffuse occupant toutes les cavités sinusales et les cellules de la face.

Dans ces conditions, la provision accordée sera limitée à la somme de 3 000 euros au titre du manquement à l’obligation d’information.

2. Sur la faute dans le suivi post-opératoire

M. Y conteste l’existence de cette faute ainsi que le lien causal entre le manquement, s’il existe, et les dommages allégués par M. X.

Il sera tout d’abord rappelé que l’expert a écarté toute faute dans le choix du type d’intervention et dans la réalisation de l’acte chirurgical.

Il retient en revanche une faute dans le suivi post-opératoire, indiquant : 'le fait de traiter une brèche ostéo-méningée certaine par une antibiothérapie probabiliste associée à une corticothérapie sans proposer une ré-intervention chirurgicale de colmatage n’est pas conforme aux règles de l’art'.

Il convient ici de rappeler que le scanner pratiqué le 13 mai 2013 a mis en évidence les éléments suivants :

— 'on retrouve des traces de pneumo-encéphalie prédominant au niveau de l’apex avec quelques bulles d’air au niveau fronto-pariétal'

— 'aucune collection intra- ou extra-cérébrale n’est visible à l’heure actuelle'

— conclusion : 'présence d’une pneumocéphalie minime'.

Dans son dire du 22 février 2016, N B, médecin conseil de M. Y, rappelle donc qu’il n’existait aucun écoulement cérébro-spinal dans la période de suivi et invoque un rapport de 2008 de la société française d’D, aux termes duquel : 'en cas de rhinorrée cérébrospinale postopératoire sans complication infectieuse, il n’y a pas de données clairement établies sur la conduite à tenir. Par analogie aux brèches traumatiques, certains proposent un traitement conservateur (…). Cependant, si la rhinorrée est abondante et son site clairement identifié, il peut sembler raisonnable de proposer une fermeture par voie endonasale'. Il produit également des avis de médecins D, recueillis par N Y sur le site de discussion 'Les ORLentreeux'. N C, D à Grenoble, y indique 'en cas de fuite minime, on peut placer le patient en observation et vérifier si elle se tarit en 48 ou 72 h.' N E, D à Montpellier, indique : 'le problème reste le même en cas de brèche constatée en post-opératoire sur une rhinorrée de LCR. Soit elle est visible au scanner et ça veut dire que le trou est gros, il faut y retourner, ça ne se discute pas (…) Si elle n’est pas visible au TDM (ce qui est souvent le cas) c’est plus compliqué. C’est là qu’on peut se permettre d’être attentiste, car la brèche est minime, souvent fissuraire, et la rhinorrée se tarit généralement spontanément avec la cicatrisation muqueuse'. N F, D à Caen, indique : 'enfin en cas de brèche en post op immédiat, je mets personnellement 48 h d’antibiotiques, puis surveillance, mais il n’y a pas de consensus réel sur le sujet.' N E précise : 'en cas de brèche méningée il n’y a aucune indication de reprise chirurgicale immédiate (…). Une rhinorrée cérébro-spinale peut très bien se tarir spontanément dans les jours qui suivent l’opération (c’est la plupart du temps le cas si l’on se rend compte immédiatement de la brèche en per opératoire, elle reste généralement minime)'.

N B fait valoir que, au vu de ces éléments, il est difficile d’affirmer que M. Y n’a pas eu une attitude conforme aux règles de l’art, cela d’autant plus qu’il n’existait aucune rhinorrée abondante et que le site ne pouvait en être clairement identifié à ce moment là.

Le conseil de M. Y, dans son dire du 24 février 2016, demande donc à l’expert de préciser sur quel consensus médical et/ou références scientifiques il s’appuie pour conclure que le fait de ne pas proposer une intervention pour fermeture chirurgicale de la brèche ostéoméningée n’est pas conforme aux règles de l’art.

La lecture du rapport du docteur G ne révèle aucune réponse à cette question, fût-ce implicite.

N B relève ensuite que, à supposer que l’absence de fermeture dès le jour du scanner, soit le 13 mai, soit fautive, l’intervention a finalement été réalisée le 17 mai. Il formule donc deux questions :

— de quelle façon un retard de 4 jours dans le geste de la fermeture a pu modifier le pronostic, en l’absence de la survenue de toute complication cérébro-méningée infectieuse '

— ces 4 jours de délai peuvent-ils expliquer le profil évolutif pour le moins particulier dans le cas présent avec notamment la survenue, un an plus tard, d’une déhiscence au niveau ethmoïdal gauche (alors qu’initialement, le 17 mai 2013, le geste avait intéressé la région sphénoethmoïdale droite et que, dans un courrier du 28 juin 2013, N H indiquait : '… je pense donc que ce patient est guéri…') '

La lecture du rapport du docteur G ne révèle aucune réponse à ces questions, fût-ce implicite.

Au vu de ces éléments, il existe une contestation sérieuse sur l’existence d’une faute de M. Y dans le suivi post-opératoire et, à supposer cette faute constituée, sur son lien causal avec les dommages présentés par M. X à compter de l’année 2014.

Aucune provision ne pourra donc être allouée sur le fondement d’une faute de M. Y.

M. Y, partie la plus succombante, devra supporter les dépens de première instance et d’appel, qui comprendront les frais d’expertise.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X les frais d’instance irrépétibles exposés en première instance et en appel. M. Y sera ainsi condamné à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière de référé et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Réforme l’ordonnance déférée,

Statuant à nouveau,

Condamne M. K Y à payer à M. I X la somme de 3 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ;

Condamne M. K Y à supporter les dépens de première instance et d’appel, qui comprendront le coût de l’expertise judiciaire et à payer à M. I X la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en cause d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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