Cour d'appel de Versailles, du 7 mai 1998, 1997-7459

  • Règles spécifiques au divorce·
  • Divorce, séparation de corps·
  • Prestation compensatoire·
  • Conditions·
  • Révision·
  • Rente·
  • Constat·
  • Domicile·
  • Adultère·
  • Communauté de vie

Résumé de la juridiction

Lorsqu’il est justifié que, à des périodes différentes et successives, une femme se rend, de manière régulière, au domicile d’un ami pour y passer la nuit où elle semble y disposer d’une garde robe, ces éléments, non utilement contredits, caractérisent l’existence d’une relation durable, stable et permanente impliquant une communauté de vie qui établissent la réalité d’une vie maritale, laquelle n’implique pas nécessairement l’existence d’un domicile commun. Il s’en suit que la demande de suppression de la prestation compensatoire versée sous forme de rente formée par la mari peut être accueillie

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 7 mai 1998, n° 97/07459
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 1997-7459
Importance : Inédit
Textes appliqués :
Code civil 273, 279
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006934495
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Texte intégral

J- C P et M H se sont mariés le 21 février 1969. Suite à une demande conjointe en divorce, ce dernier a été prononcé par un jugement rendu le 18 octobre 1992 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de PONTOISE homologuant la convention définitive. Aux termes de cette convention et d’un acte notarié du 5 septembre 1992, Madame H s’est vue attribué deux appartements situés à CERGY, une soulte de 1.101.244,90 francs, une prestation compensatoire sous forme d’un capital de 213.600,00 francs et une prestation sous forme de rente selon les modalités suivantes, 20.000,00 francs par mois jusqu’au 31 décembre 1993, 16.000,00 francs par mois du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, 11.000,00 francs du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000, 6.000,00 francs du 1er janvier 2001 jusqu’au décès de l’une de des parties ; il était prévu que cette rente cesserait immédiatement « dans le cas de remariage ou de vie maritale de Madame P ».

Soutenant que Madame H entretenait des relations suivies et constantes avec Monsieur V , Monsieur P a sollicité la suppression immédiate du service de la rente de prestation compensatoire par une requête en date du 9 février 1996.

Par un jugement en date du 21 mars 1997, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de PONTOISE a constaté que Monsieur P ne démontrait pas que Madame H vivait maritalement avec un autre homme et ordonnait la reprise du paiement et le règlement des mensualités dues ; sur l’article 279 et 273 du Code Civil, il déclarait toute demande tendant à la modification des dispositions relatives à la prestation compensatoire irrecevable dès lors que la situation qu’il décrivait ne caractérisait pas l’exceptionnelle gravité exigée par ces articles.

Le premier Juge a estimé que si Madame H entretient souvent ou assez souvent des relations sexuelles avec Monsieur V , une telle liaison ne constitue pas une vie maritale.

Monsieur P a relevé appel de cette décision et sollicite son infirmation ; il demande de juger qu’en raison de la vie maritale entretenue par Madame H avec Monsieur V le service de la prestation compensatoire n’est plus due à compter du mois de juin 1995 ; il réclame le remboursement de 414.000,00 francs avec les intérêts au taux légal à compter de la demande initiale, ainsi que 20.000,00 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il expose que Madame H vit de manière constante et stable au domicile de Monsieur V alors encore qu’il existe des liens économique entre eux car ils ont constitué le 7 novembre 1995 une société dont Madame H est gérante.

Madame H conclut au débouté de Monsieur P de son appel et soutient qu’il n’établit pas sa vie maritale avec un autre homme ; elle demande de rejeter des débats le constat d’adultère dressé le 30 juillet 1997 comme constituant une atteinte intolérable à l’intimité de la vie privée, réclame la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur P à lui verser une somme de 10.000,00 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Elle indique que l’huissier s’est introduit dans le domicile de Monsieur V en son absence et a établi un constat d’adultère alors que les ex-époux P / H sont dégagés du devoir de fidélité depuis 5 ans. Elle indique que la jurisprudence sanctionne des constats réalisés ainsi alors que l’acte n’a pour seule justification que le souci du requérant de préserver ses intérêts patrimoniaux ; elle indique que l’huissier ne devait que relever des indices matériels extérieurs. Elle ajoute que la décision autorisant ce constat a fait l’objet d’une suspension. En tout état de cause, elle expose que ce constat n’établit pas une véritable communauté de vie entre elle et Monsieur V.

Monsieur P réplique que l’autorisation du Juge était une autorisation légale pour lui permettre de préserver ses droits élémentaires, alors encore que les constatations de l’huissier ne sont pas contestées ; il rappelle qu’il ne reproche pas à Madame H d’avoir refait sa vie mais expose qu’elle ne peut dès lors conserver le service de la rente.

Surabondamment, il rappelle qu’il a été licencié au début de l’année 1997 et que ses revenus sont de 30.000,00 francs par mois versés par les ASSEDIC dans le cadre d’une allocation dégressive ; il rappelle que vu son âge 54 ans, ses perspectives de retrouver un emploi sont réduites et limitées à la fin avril 2001 ; il sollicite dès lors la réduction de la prestations à compter du 1er janvier 1997 à 3.000,00 francs par mois puis à 1.000,00 francs par mois à compter du 1er janvier 2001. Il réclame enfin 20.000,00 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu’au vu des énonciations de la convention définitive, il appartient à Monsieur P , qui sollicite la suppression de la rente, d’établir la réalité de la vie maritale de Madame H , c’est à dire d’une relation stable et permanente de celle-ci avec un ami impliquant une communauté de vie ;

Qu’en l’espèce, Monsieur P justifie à l’aide de diverses attestations établies d’une part du 6 juin 1995 au 14 juin 1995, puis réitérées le 19 décembre 1995 par des détectives privés que Madame H se rendait de sa boutique au domicile de Monsieur V chez lequel elle passait la nuit pour repartir le lendemain matin habillée différemment ; que surtout un rapport de détective établit des faits identiques du 23 avril au 28 avril 1997 et, dès lors à présent seulement, la réalité d’une relation durable, stable et permanente, Madame H disposant au domicile de Monsieur V d’une garde robe, ce qui exclut de simples relations épisodiques ;

Qu’encore, Monsieur P justifie des relations économiques liant Madame HR à Monsieur V par la production des statuts de la société dont Madame H est gérante, Monsieur V ayant apporté une somme de 25.000,00 francs en numéraires et disposant de 250 parts à égalité avec l’intimée ;

Que l’acte de constat d’huissier qualifié par erreur de « constat d’adultère » réalisé certes au vu d’une ordonnance rendue sur requête mais dans des conditions pour le moins contestable au domicile de Monsieur V en son absence et celle de Madame H , ne peut qu’être écarté des débats ;

Que cependant, les attestations produites par Madame H pour contester les relations stables ne sont pas probantes ; qu’en effet, le fait que Madame V indique qu’elle rencontre son ex-mari à son domicile périodiquement est sans portée ; que l’attestation de la soeur de Madame H et de son père selon lesquelles l’intimée n’a jamais envisagé de vivre avec Monsieur V apparait pour le moins en contradiction avec la réalité ; que le fait pour un voisin d’attester avoir entendu la chasse d’eau de l’appartement de Madame H fonctionner n’établit pas sa présence dans les lieux, alors surtout que la communauté de vie n’implique pas nécessairement un domicile commun ;

Qu’il convient dans ces conditions de constater que Monsieur P établit qu’à compter du mois de juin 1995, Madame H a vécu maritalement avec Monsieur V et en infirmant la décision entreprise, de dire que le service de la rente au titre de la prestation compensatoire n’est plus du à compter du mois de mai 1997 ; qu’il y a lieu de condamner en tant que de besoin Madame H à rembourser les sommes trop perçues avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 1997 date des écritures portant cette demande ;

Qu’il n’apparait pas inéquitable de laisser à la charge de Monsieur P les frais non compris dans les depens et qu’il y a lieu de le débouter de sa demande formée en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, après débats en chambre du conseil :

— INFIRME la décision entreprise et statuant à nouveau :

— DIT qu’en raison de la vie maritale entretenue par Madame H le service de la prestation compensatoire n’est plus du à compter du mois de mai 1997,

— CONDAMNE en tant que de besoin Madame H à rembourser à Monsieur P les sommes par elle perçues depuis cette date avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 1997,

— DEBOUTE Monsieur P de sa demande formée en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

— CONDAMNE Madame H en tous les dépens, autorisation étant accordée à la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL de les recouvrer en application de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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