Cour d'appel de Versailles, du 6 janvier 2000, 1997-6015

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

A la suite d’une demande de requalification; le congé à l’origine avec offre de renouvellement, qualifié par le juge de congé sans offre de renouvellement, permet au preneur de remettre au bailleur les clés du local donné à bail avant même la décision du juge sans que ne lui soit imputable la disparition de son fonds de commerce. Celle-ci sera considérée comme résultant du congé décla ré sans offre de renouvellement; dès lors, l’indemnité d’éviction sera évaluée en fonction de la valeur du fonds et non de la valeur du droit au bail.

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 6 janv. 2000, n° 97/06015
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 1997-6015
Importance : Inédit
Textes appliqués :
Décret du 30 septembre 1953 article 8
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006936212
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Par contrat en date du 1er février 1986, Madame X… et Madame Y… ont donné à la SARL GUERY différents locaux dépendant d’un immeuble situé à POISSY 60-64 rue du Général de Gaulle. Les locaux loués se décomposaient de la façon suivante : Î au rez-de-chaussée à gauche, une boutique de 69 m environ et, à la suite, une pièce avec accès par l’escalier commun ; Î au premier étage à droite une pièce actuellement à usage de salle de bain d’environ 7 m ; Î au premier étage à gauche, un logement de quatre pièces, W.C., entrée, d’une superficie d’environ 65 m ; Î au sous-sol, une cave de 25 m environ, en face de la descente d’escalier. Le bail était consenti et accepté pour une durée de neuf années entières et consécutives, à compter du 1er janvier 1986 pour s’achever le 1er février 1995. Il était stipulé que le preneur ne pouvait exercer dans les lieux loués que le commerce de coiffure, parfumerie, soins esthétiques, articles de PARIS, bijouterie, prêt à porter féminin, lingerie, chaussures, maroquinerie. Une clause particulière disposait que le preneur était autorisé à effectuer des transformations et à aménager le local du premier étage. Aux termes d’un acte authentique en date du 21 juin 1993, la société SCI CAMBORICIENNE a acquis les locaux objet dudit bail et est venue au droit des anciens bailleurs. Le 11 avril 1994, la société GUERY écrivait à la société CAMBORICIENNE qu’elle avait été très surprise de constater, en pénétrant dans ses locaux, que des travaux avaient été effectués sans autorisation de sa part : murs extérieurs et cloisons abattus pour une nouvelle ouverture des portes, alors qu’au départ il était simplement question de remplacer des fenêtres. La société GUERY faisait effectuer, par huissier, les constatations des travaux réalisés. Ce dernier relève aux termes de son procès de constat en date du 15 avril 1994 que : – les ouvriers s’affairent à l’agrandissement de la porte « d’entrée de l’appartement » – à gauche

de la porte palière, une seconde ouverture a « été effectuée sur le palier, il existait un placard » mural qui a été supprimé… – l’appartement du premier étage est à usage de vestiaire, « de réfectoire, de réserve de lingerie et de réserve de »produits de coiffure« - en raison des travaux, l’appartement est inutilisable et »la porte palière ayant été démontée, il est libre « d’accès à toute personne » ; Depuis lors, la société GUERY n’a plus disposé de ce local. Le 25 juin 1995, la S.C.I. CAMBORICIENNE a délivré un congé avec offre de renouvellement à la société GUERY. Le congé subordonnait le renouvellement du bail en vigueur à l’acceptation par le locataire des nouvelles conditions énumérées, à savoir : Î le loyer annuel en principal H.T. et hors charges serait porté à la somme de 100.000 francs payable d’avance par quart aux quatre termes d’usage et pour la première fois le 1er janvier 1995 ; Î Le dépôt de garantie serait porté à la somme de 55.000 francs correspondant à six mois de loyer Î le bail porterait sur les locaux sis 60-64 rue du Général de Gaulle à POISSY et dont la désignation était la suivante ; Î au rez-de-chaussée à gauche, une boutique de 69 m environ et, à la suite, une pièce avec accès par l’escalier commun ; Î au premier étage à gauche, un appartement de deux pièces avec un couloir de 30 m environ, avec accès par escalier commun, étant précisé que la SCI CAMBORICIENNE prendrait à sa charge la construction de la cloison séparative, la création de deux portes et la réinstallation des deux ballons d’eau chaude sans remplacement ; Î au sous-sol, une cave de 7 m , en face de la descente d’escalier ; Le locataire pourrait exercer, dans les locaux loués, le commerce de coiffure, parfumerie, soins esthétiques, articles de PARIS, bijouterie, chaussures, maroquinerie, à l’exclusion de tout autre, toutes les dispositions du bail actuellement en vigueur demeurant inchangées. La société GUERY a estimé qu’elle ne pouvait accepter et considère qu’en subordonnant le

renouvellement du bail à l’acceptation de ces nouvelles conditions, la bailleresse l’avait purement et simplement acculée à ne pas accepter ce congé avec « offre de renouvellement », ne lui laissant aucun autre choix. L’acte de renouvellement n’ayant dès lors pas été accepté par la société GUERY, la S.C.I. CAMBORICIENNE a introduit une procédure de fixation du loyer renouvelé, en mentionnant, notamment, que la société GUERY avait restitué une partie des lieux initialement loués; C’est dans ces conditions que la SARL GUERY a remis les clés à la S.C.I. CAMBORICIENNE au mois de décembre 1995 et que par acte en date du 9 mars 1996, elle a assigné la S.C.I. CAMBORICIENNE devant le tribunal de grande instance de VERSAILLES aux fins de voir : Î constater la résiliation du bail à l’initiative de la bailleresse la S.C.I. CAMBORICIENNE ; Î dire que la résiliation fautive du bail commercial dont s’agit était imputable à la S.C.I. CAMBORICIENNE ; Î que la S.C.I. CAMBORICIENNE en imposant à la SARL GUERY de nouvelles conditions, qu’elle savait ne pas être en mesure d’accepter, l’avait acculée à refuser de nouvelles conditions et qu’en conséquence le refus du renouvellement du bail commercial dont s’agit était imputable à la S.C.I. CAMBORICIENNE ; Î condamner en conséquence la S.C.I. CAMBORICIENNE à lui payer la somme de 1.300.000 francs d’indemnités d’éviction en application de l’article 8 du décret de 30 septembre 1953 ; Î condamner la S.C.I. CAMBORICIENNE au paiement de la somme de 500.000 francs à titre de dommages et intérêts ; Î condamner la S.C.I. CAMBORICIENNE au paiement de la somme de 25.000 francs en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La cour est saisie de l’appel, par la SCI CAMBORICIENNE, contre le jugement du tribunal de grande instance de VERSAILLES en date du 3 juin 1997 qui a dit que le congé délivré le 25 juin 1994 emportait droit, pour la SARL GUERY, à une indemnité d’éviction et a ordonné une expertise. Par conclusions d’incident en date du 5

février 1998, la société GUERY a saisi le conseiller de la mise en état d’une demande tendant à ce qu’il soit ordonné que le jugement déféré soit assorti de l’exécution provisoire en ce qu’il avait ordonné cette expertise. Par ordonnance du 7 mai 1998, ce magistrat a dit que le jugement déféré, en date du 3 juin 1997, serait assorti de l’exécution provisoire en ce qu’il avait ordonné une expertise. Dans ses conclusions au fond, en date du 20 mai 1999, la S.C.I. CAMBORICIENNE fait valoir, sur le congé du 25 juin 1994, que celui-ci mentionne expressément « congé avec offre de renouvellement » et répond aux exigences du décret du 30 septembre 1953 dont il reproduit, in fine, l’article 5 dernier alinéa. En revanche, il ne vise ni ne reproduit les dispositions des articles 8 et 9 du même décret et ne saurait être considéré comme un congé avec refus de renouvellement. La société GUERY ne peut valablement soutenir que les travaux exécutés par la S.C.I. CAMBORICIENNE -qui, le 15 avril 1994, a clairement précisé que les travaux seraient suivis d’une remise en état des lieux- l’auraient été sans son accord. Elle ne rapporte par ailleurs pas la preuve de ce que les travaux l’auraient empêchée d’exercer son activité. Il n’est pas plus justifié que, postérieurement à la signification du mémoire en fixation de loyer, elle ne pouvait plus disposer de l’ensemble des locaux. Elle rappelle que la société GUERY lui a restitué les clefs le 22 décembre 1995 et qu’à l’audience de la commission départementale de conciliation en matière de baux commerciaux au cours de laquelle elle a déclaré qu’elle n’entendait pas demander le renouvellement du bail, elle n’a pas mentionné qu’elle entendait contester le congé notifié. La véritable raison du départ de la société GUERY est en fait l’impossibilité de parvenir à un accord sur le prix du loyer, face à une conjoncture devenue moins favorable à la suite de la création de nouveaux salons de coiffure dans POISSY. Dès lors, la S.C.I.

CAMBORICIENNE demande à la cour de condamner la société GUERY à lui payer 110.000 francs d’indemnité d’occupation (H.T. et hors charges) avec intérêts depuis chaque échéance trimestrielle et anatocisme, 25.000 francs de dommages intérêts et 25.000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La société GUERY souligne qu’à aucun moment elle n’a donné son accord pour la modification de la consistance des lieux ou leur changement de destination. Le congé délivré le 25 juin 1994 s’analyse en un congé avec refus de renouvellement dès lors que le renouvellement était soumis à un certain nombre de conditions : modification de la consistance des lieux, modification de la destination du bail (suppression des deux destinations « lingerie et prêt à porter féminin ». A cet égard, le mémoire notifié ne saurait revenir sur les termes du congé ce qui aurait été seulement possible par l’exercice du droit de repentir, dans les formes et délais prévus. En lieu de cela, la S.C.I. CAMBORICIENNE a immédiatement reloué les locaux. La société GUERY demande en conséquence à la cour de confirmer la décision déférée et, évoquant, de fixer le montant de l’indemnité d’éviction à 2.391.198 francs. Elle demande en outre que l’indemnité d’occupation soit fixée à 106.045 francs et sollicite 20.000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. * SUR CE LA COUR Attendu que, quelle que soit la qualification que le bailleur a donné au congé qu’il a donné à la société GUERY, il appartient à la cour d’examiner quelle est l’exacte nature de cet acte ; qu’il n’importe à cet égard que l’article 5 dernier alinéa du décret du 30 septembre 1953 y ait été visé et reproduit et que les articles 8 et 9 du même décret n’y aient pas été visés ; Attendu que le congé en question mentionne expressément "que le présent congé a pour objet de subordonner le renouvellement du bail actuellement en vigueur à l’acceptation par le signifié des

nouvelles conditions suivantes : – le loyer annuel en principal hors taxes serait porté à la somme de cent dix mille francs (110.000 francs), payable d’avance et par quart, aux trimestres d’usage, et pour la première fois le premier janvier mil neuf cent quatre-vingt-quinze ; – le dépôt de garantie serait porté à la somme de cinquante cinq mille francs (55.000 francs), correspondant à six mois de loyer ; – le bail porterait sur les locaux sis 60 à 64, rue du Général de Gaulle à POISSY (Yvelines) et dont la désignation suit : Î au rez-de-chaussée, à gauche, une boutique de 69 m environ, à la suite une pièce avec accès par l’escalier commun, Î au premier étage, à gauche, un appartement de deux pièces avec un couloir, de 30 m environ (cf. surface marquée en jaune sur le plan annexé), avec accès par l’escalier commun, étant précisé que la S.C.I. CAMBORICIENNE prendrait à sa charge la construction de la cloison séparative, la création de deux portes et la réinstallation des deux ballons d’eau chaude électrique, sans remplacement. Î Au sous-sol, une cave de 7m en face de la descente d’escalier. – le locataire pourrait exercer dans les lieux loués le commerce de coiffeur, parfumerie, soins esthétiques, articles de Paris, bijouterie, chaussures, maroquinerie, à l’exclusion de tout autre. – toutes les autres dispositions du bail actuellement en vigueur demeurant inchangées." ; Attendu que, comme l’ont exactement relevé les premiers juges, la destination des lieux est réduite (suppression des destinations prêt à porter féminin et lingerie, « occupation, jouissance », page 3 du bail précédent) et la consistance des lieux est, elle aussi, réduite (au premier étage, deux pièces pour une superficie d’environ 30 m au lieu de : "au premier étage à droite, une pièce actuellement à usage de salle de bails d’environ 7 m ; au 1er étage à gauche, un logement de quatre pièces WC, entrée d’une superficie d’environ 65 m )" ; Attendu sur ce dernier point que l’acceptation par locataire de voir le bailleur

effectuer des travaux dont il n’est, au contraire, nullement démontré qu’elle ait été avisée de leur exacte nature ne saurait s’analyser en une autorisation donnée à celui-ci d’effectuer des travaux qui ont eu pour effet d’amputer la surface louée ; Attendu que ce congé qualifié de congé avec offre de renouvellement s’analyse comme l’ont, ici encore, exactement relevé les premiers juges, en un congé avec refus de renouvellement, l’offre de renouvellement n’étant que d’un renouvellement partiel et différent ; Attendu dans ces conditions que le preneur auquel a été délivré un congé avec refus de renouvellement a droit à une indemnité d’éviction ; Attendu que la cour ne peut, une fois encore, que confirmer l’analyse du tribunal en ce qu’il observe que la remise des clefs par le preneur le 22 décembre 1995 ne saurait s’analyser en une renonciation à ses droits ; que de même la poursuite de l’activité pendant 18 mois, par le preneur ne permet pas de dire que celui-ci aurait tacitement renoncé à une partie de son droit ; Attendu qu’il y a lieu, comme le demande la société GUERY, d’évoquer en ce qui concerne l’indemnité ; Attendu que cependant la SCI CAMBORICIENNE a cru devoir s’abstenir de conclure sur le montant de celle-ci ; qu’en application de l’article 16 du nouveau code de procédure civile, il y a lieu de réouvrir les débats pour lui permettre de s’expliquer sur ce point ; Attendu que, d’ores et déjà, il y a lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile pour les frais irrépétibles d’appel d’ores et déjà exposés ; * PAR CES MOTIFS Statuant publiquement et contradictoirement, – CONFIRME le jugement déféré et statuant plus avant ; – ÉVOQUE en ce qui concerne le montant de l’indemnité et enjoint à la S.C.I. CAMBORICIENNE de conclure, dans le délai d’un mois, au vu du rapport d’expertise, sur le montant de l’indemnité d’éviction ; – RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 9 mars 2000 à 9 h 30 pour clôture ; – LA CONDAMNE, pour les frais

d’ores et déjà exposés en appel, à payer à la société GUERY la somme de 20.000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; – réserve les dépens. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR MARON, CONSEILLER PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M. Thérèse Z…

F. ASSIÉ

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