Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 13 novembre 2018, n° 18/02914

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 13 nov. 2018, n° 18/02914
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 18/02914
Décision précédente : Tribunal de commerce de Chartres, 12 septembre 2017, N° 2013J02469
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

VM

Code nac : 36C

12e chambre

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 13 NOVEMBRE 2018

N° RG 18/02914 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SK6D

AFFAIRE :

E X

C/

Y X

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 13 Septembre 2017 par le Tribunal de Commerce de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2013J02469

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Michel FESTIVI de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN,

Me Mathilde PUYENCHET,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur E X

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Michel FESTIVI de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 – N° du dossier 2012361 -

Représentant : Me Georges-david BENAYOUN de la SELARL CBA-CABINET BENAYOUN ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0135

Madame F X

née le […] à PONTOISE

de nationalité Française

102 rue Saint-Brice

[…]

Représentant : Me Michel FESTIVI de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 – N° du dossier 2012361 -

Représentant : Me Georges-david BENAYOUN de la SELARL CBA-CABINET BENAYOUN ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0135

APPELANTS

****************

Madame I J

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Madame G K

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Madame L M

de nationalité Française

La Fauconnière

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Madame N O

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Monsieur P X

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Madame Q R

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Madame Z X

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

Maître S T agissant en qualité de mandataire ad hoc de la succession de Madame H U épouse X suivant ordonnance du Tribunal de Grande Instance de CHARTRES en date du 16/06/2015 (DA et conclusions signifiées le 16.03.2018 à domicile)

de nationalité Française

[…]

[…]

non constitué

Maître S T, agissant en qualité de mandataire ad’hoc de la succession de Monsieur Y X, suivant ordonnance du Tribunal de grande instance de CHARTRES en date du 11/04/2016 (DA et conclusions signifiées le 16.03.2018 à domicile)

de nationalité Française

[…]

[…]

non constitué

SA GROUPE X N° SIRET : 806 72 0 3 71

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

SAS AE X

N° SIRET : 792 07 7 9 43

[…]

[…]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000015 – N° du dossier 267

Représentant : Me Stéphane GAUTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R233 -

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Octobre 2018 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Mme N MULLER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Mme N MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSÉ DU LITIGE

La société anonyme à directoire et conseil de surveillance Groupe X, principalement implantée en Eure et

Loir (28), exerce une activité de préparation, négoce et réparation de machines agricoles, pièces détachées et

installations d’irrigation. Elle emploie plus de 200 salariés.

Jusqu’en 2013, le capital de cette société était intégralement détenu par la famille X, à savoir M. Y et

Mme H X, ainsi que leurs huit enfants dont Z et E X, ces deux derniers, travaillant

dans la société, détenant des parts importantes du capital (36,17% pour Z X et 33,28 % pour

E X, son épouse et ses deux enfants Mathieu et F), à la suite des donations reçues de leurs

parents.

Y X présidait le conseil de surveillance, tandis qu’E X présidait le directoire. Z X

était membre du directoire et directrice générale.

Le 22 juin 2011, un protocole d’accord est signé entre l’ensemble des membres de la famille X d’une part,

et trois cadres dirigeants de la société ainsi que Z X d’autre part (devant constituer une société

« Holding des managers »), l’objet de ce protocole étant la cession du contrôle de la société Groupe X

(51% du capital) au profit de cette holding. Ce protocole a été signé sous condition suspensive d’obtention

d’un financement à hauteur de 3,2 millions d’euros.

Les acquéreurs n’ayant pu obtenir le financement, un nouveau projet de protocole a été rédigé en juillet 2012.

E X et ses enfants refuseront toutefois la signature de ce projet au motif, principalement, d’une

sous-évaluation du prix des actions.

Le 28 juillet 2012, le conseil de surveillance procède à la nomination de V C en qualité de nouveau

président du directoire, aux lieu et place de E X.

Le même jour, l’assemblée générale des actionnaires décide la nomination de deux nouveaux membres du

directoire, à savoir Messieurs A et B, portant ainsi, avec M. C et M. E X à 4 le

nombre des membres du directoire. L’assemblée générale décide également de mettre fin aux fonctions de

membre du conseil de surveillance de F X, fille d’E X.

En octobre 2012, M. E X et Mme F X ont assigné les autres actionnaires de la société

devant le tribunal de commerce de Chartres, en nullité des décisions du 28 juillet 2012 prises tant par

l’assemblée générale que par le conseil de surveillance, et en réparation du préjudice subi du fait de leurs

révocations qu’ils estiment abusives. Ils ont également sollicité la dissolution de la société Groupe X au

motif d’une mésentente grave entre actionnaires.

Le 24 novembre 2012, la société Groupe X procède à la mise à pied et au licenciement d’E X,

cette décision faisant l’objet d’une instance actuellement pendante devant le conseil de prud’hommes de

Chartres.

Le 5 décembre 2012, l’assemblée générale de la société Groupe X met fin au mandat d’E X en

tant que membre du directoire.

En mars 2013, M. E X fait délivrer une seconde assignation à la société Groupe X devant le

tribunal de commerce de Chartres aux fins de nullité de sa révocation en tant que membre du directoire.

En décembre 2013, la société Groupe X procède au licenciement de F X. Par jugement du 10

novembre 2015 confirmé par arrêt de cette cour, le conseil de prud’hommes de Chartres a prononcé la

résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X aux torts de la société Groupe X, condamnant

cette dernière au paiement de diverses indemnités et dommages et intérêts.

Par jugement du 13 septembre 2017, après jonction des deux instances introduites en octobre 2012 et mars

2013, le tribunal de commerce de Chartres :

— s’est déclaré incompétent au profit du conseil de prud’hommes de Chartres pour connaître de la demande

reconventionnelle formée par la société Groupe X en nullité du contrat de travail de M. E X, et

en remboursement des salaires perçus par ce dernier, – a dit que les révocations de Mme F X et de

M. E X n’étaient ni vexatoires ni abusives, et qu’il n’y avait pas lieu de leur accorder des indemnités,

— a dit qu’il n’y avait pas lieu à dissolution anticipée de la société Groupe X,

— a laissé les dépens à la charge de E et F X.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l’appel interjeté le 9 janvier 2018 par M. E et Mme F X.

Vu les dernières conclusions notifiées le 13 septembre 2018 par lesquelles M. E et Mme F

X demandent à la cour de :

— infirmer le jugement du 13 septembre 2017 en ce qu’il a jugé que :

— les révocations de M. E X et de Mme F X ne sont ni vexatoires ni abusives ;

— Il n’y a pas lieu d’accorder des indemnités à Monsieur E X et Madame F X ;

— en ce que le Tribunal a laissé les entiers dépens à la charge des demandeurs.

— Statuant à nouveau,

— dire que la révocation de Monsieur E X du 28 juillet 2012 en sa qualité de Président du Directoire

est abusive ;

— en conséquence, condamner solidairement la société Groupe X, Madame I J, Madame G

K, Madame L M, Madame N O, Monsieur P X, Madame

Q R, Madame Z X, et les ayant droits de Monsieur Y X et Madame H

X à l’exception de Monsieur E X, à payer à ce dernier la somme de 100.000 euros pour

révocation dans des conditions vexatoires.

— dire que la révocation de Monsieur E X du 5 décembre 2012 en sa qualité de membre du directoire

et de directeur général est abusive ;

— en conséquence, condamner solidairement la société Groupe X, Madame I J, Madame G

K, Madame L M, Madame N O, Monsieur P X, Madame

Q R, Madame Z X, et les ayants droit de Monsieur Y X et Madame H

X à l’exception de Monsieur E X à payer à ce dernier la somme de 300.000 euros pour

révocation abusive.

— dire que la révocation de Madame F X du 28 juillet 2012 en sa qualité de membre du conseil de

surveillance de la société Groupe X est abusive ;

— en conséquence, condamner solidairement la société Groupe X, Madame I J, Madame G

K, Madame L M, Madame N O, Monsieur P X, Madame

Q R, Madame Z X, et les ayants droit de Monsieur Y X et Madame H

X à l’exception de Monsieur E X, à payer à Madame F X la somme de 60.000 euros

pour révocation dans des conditions injurieuses et vexatoires.

— condamner solidairement la société Groupe X, Madame I J, Madame G K,

Madame L M, Madame N O, Monsieur P X, Madame Q R,

Madame Z X, et les ayants droit de Monsieur Y X et Madame H X à l’exception de

Monsieur E X aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions notifiées le 14 mai 2018 au terme desquelles les sociétés Groupe X et

AE X, ainsi que Monsieur P X et Mesdames I X, G X, L X,

N X, Q X et Z X demandent à la cour de :

— mettre hors de cause La société AE X, aucune demande n’étant dirigée contre elle ;

— déclarer l’appel de Monsieur E X et de Madame F X irrecevable et en tout cas infondé,

en conséquence :

— rejeter les demandes de Monsieur E X et de Madame F X comme étant infondées ;

— condamner solidairement Monsieur E X et Madame F X à verser à chaque intimé une

somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, en raison de l’abus du droit d’ester en justice que

constitue leur action ;

Faisant droit à l’appel incident des intimés

— condamner Monsieur E X à verser à la société Groupe X :

631.175,11 euros au titre des sommes indûment perçues sous couvert d’un contrat de travail sans cause, nul et

de nul effet au regard du droit des sociétés ;

— condamner à leur charge solidaire, Monsieur E X et Madame F X à régler aux intimés

en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile une somme de 30.000 euros ;

— statuer ce que droit sur les dépens à la charge solidaire de Monsieur E X et de Madame F

X.

Me S T, es qualité de mandataire ad’hoc de la succession de M. Y X et de Mme H X,

bien que régulièrement cité par acte d’huissier délivré à domicile le 16 mars 2018, n’a pas constitué avocat. La

décision sera rendue par arrêt par défaut.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 20 septembre 2018.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du

code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement dont appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. E X et Mme F X concluent à l’infirmation du jugement entrepris uniquement en ce

qui concerne la demande tendant à voir déclarer abusive les révocations de leurs diverses qualités dans le

directoire et le conseil de surveillance de la société Groupe X.

— sur la demande de mise hors de cause de la société AE X

La société AE sollicite sa mise hors de cause dès lors qu’aucune demande n’est formée à son encontre. Les

appelants ne forment aucune observation sur cette demande de mise hors de cause, et n’ont formé aucune

demande à l’encontre de la société AE X, de sorte qu’il convient de faire droit à la demande de mise

hors de cause.

1 ' sur le retrait des fonctions de Président du directoire de M. E X

Les dispositions de l’article L.225-61 du code de commerce (nécessité d’un juste motif) applicables aux

membres du directoire ne trouvent pas à s’appliquer s’agissant du mandat de président du directoire, qui reste

librement révocable

.

Il résulte de l’article 2004 du code civil que le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble.

Une telle décision de révocation n’est soumise à aucune condition de motif.

A défaut de dispositions statutaires, la révocation du président du directoire, indépendamment de ses fonctions

de membre de cette collégialité, peut intervenir à tout moment sur décision du conseil de surveillance, sans la

nécessité d’un motif. Il n’en reste pas moins que tout mandataire social, même librement révocable, doit être

mis en mesure de s’expliquer et que la révocation ne doit pas être accompagnée de circonstances vexatoires ou

brutales.

En l’espèce, M. X soutient que le motif de sa révocation, à savoir son départ en retraite, est erroné dès lors

qu’il avait informé la société qu’il n’envisageait plus de faire valoir ses droits à la retraite. Il affirme en outre

que cette révocation a été faite dans des conditions qu’il qualifie de vexatoires.

La révocation du président du directoire, indépendamment de ses fonctions de membre de cette collégialité,

pouvant intervenir à tout moment, il importe peu que le motif du départ en retraite soit éventuellement erroné.

Le seul fait que M. C, potentiel acquéreur d’une partie des actions, ait été désigné en qualité de nouveau

président, ne permet pas en outre de caractériser d’éventuelles conditions vexatoires de cette révocation, ni un

quelconque abus dans la décision prise.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a dit que la révocation de M. X en qualité de Président

du directoire n’était pas abusive.

2 ' sur la révocation de M. E X de ses fonctions de membre du directoire

Il résulte de l’article L. 225-61 du code de commerce que les membres du directoire peuvent être révoqués par

l’assemblée générale, ainsi que, si les statuts le prévoient, par le conseil de surveillance. Si la révocation est

décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Le procès-verbal de l’assemblée générale du 5 décembre 2012 de la société Groupe X comporte une

résolution unique aux termes de laquelle celle-ci décide de mettre fin aux fonctions de membre du directoire

de M. E X, pour les motifs suivants :

— M. E X, en sa qualité de mandataire social et membre du directoire, a une attitude d’opposition

systématique aux décisions et demandes du directoire,

— M. E X, en sa qualité de mandataire social a une attitude de représentant auprès des filiales non

conforme à l’intérêt du groupe, ce qui s’est notamment caractérisé, lors de la tenue de l’assemblée

d’approbation des comptes de la société Duret dont la substance a été rapportée aux membres du conseil de

surveillance,

— M. E X ne respecte pas l’obligation de réserve et de loyauté attachée à ses fonctions,

— la société Groupe X a été destinataire d’une assignation par laquelle M. E X demande

notamment la dissolution judiciaire de la société Groupe X, ce qui est manifestement non conciliable avec

l’exercice des fonctions normales de dirigeant.

M. X soutient que sa révocation est abusive en ce qu’elle ne repose sur aucun juste motif, les quatre

motifs allégués étant imprécis, vagues, infondés, et étrangers à la situation de la société Groupe X.

Si, comme le soutient M. X, certains motifs et notamment l’attitude d’opposition systématique et le non

respect des obligations de loyauté et de réserve sont imprécis, le motif tiré de la procédure intentée par M.

X aux fins de dissolution judiciaire de la société est en revanche tout à fait clair et non critiqué par ce

dernier.

Le fait pour un membre du directoire d’assigner la société et ses actionnaires devant le tribunal de commerce

pour solliciter la dissolution de la société, en ce qu’il met en péril la vie même de cette société avec les

conséquences qui peuvent en découler sur ses différents partenaires, clients et salariés, est manifestement

contraire à l’intérêt même de la société, caractérisant ainsi amplement le juste motif de la révocation.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a dit que la révocation de M. X en qualité de membre du

directoire n’était pas abusive, étant précisé que M. X ne critique pas les conditions matérielles dans

lesquelles cette révocation est survenue.

3 ' sur la révocation de Mme F X de ses fonctions de membre du conseil de surveillance de

la société Groupe X

Il résulte de l’article L. 225-75 du code de commerce que les membres du conseil de surveillance peuvent être

révoqués à tout moment par l’assemblée générale ordinaire.

Le contrôle de la valeur du motif de la révocation n’appartient qu’à la seule assemblée générale.

En l’espèce, le procès-verbal de l’assemblée générale ordinaire du 28 juillet 2012 de la société Groupe X

comporte une résolution aux termes de laquelle celle-ci décide de mettre fin aux fonctions de Mme F

X en qualité de membre du conseil de surveillance au motif que les postes de ce conseil sont réservés aux

« non opérationnels ».

Mme F X soutient que sa révocation est intervenue dans des conditions injurieuses et vexatoires

portant préjudice à sa dignité et à son honneur. Elle fait valoir qu’elle n’a pas été « invitée » (sic) à l’assemblée

générale, qu’elle n’a pas pu entendre les griefs qui lui étaient reprochés et qu’elle n’a pas pu s’exprimer.

Force est ici de constater que Mme X ne conteste pas avoir été régulièrement convoquée à l’assemblée

générale du 28 juillet 2012, peu important qu’elle y ait également été « invitée ».

Les éléments du dossier permettent en outre d’établir que Mme F X était présente ou représentée

à l’assemblée générale du 28 juillet 2012 puisqu’il est précisé au procès-verbal des délibérations ' dont la

validité n’est pas discutée ' que 12 actionnaires sur 13 sont présents ou représentés, et qu’ils représentent

149.998 actions sur 150.000 actions, de sorte qu’un seul actionnaire est absent titulaire de 2 actions, cet absent

ne pouvant dès lors être que H ou AG X.

Il ressort également du procès-verbal du conseil de surveillance qui s’est tenu, le 28 juillet 2012 – une heure

avant l’assemblée générale – que Mme F X était présente à ce conseil. Il est précisé au

procès-verbal : « le président du conseil souligne que l’évolution du nombre de membres du conseil de

surveillance répond à une logique de permettre aux associés non opérationnels dans la société de veiller à la

bonne marche de l’entreprise….dans cette logique, il apparaît souhaitable que Mme F X, salariée

par ailleurs du groupe, quitte ses fonctions de membre du conseil de surveillance ». Il est encore précisé que le

président demandera à l’assemblée de se prononcer en ce sens. Il est ajouté : « F X indique que la

notion d’opérationnel qui justifie la demande est contestable car elle visait les cadres potentiellement

repreneurs qui auraient le contrôle de la société, sa position étant différente ».

Il est ainsi établi que Mme F X a parfaitement entendu le motif de sa révocation, et qu’elle y a

également répondu, du moins dans le cadre du conseil de surveillance qui s’est tenu une heure avant

l’assemblée générale. Mme F X ne produit en outre aucun élément permettant d’accréditer la thèse

selon laquelle elle aurait été empêchée de s’exprimer au cours de l’assemblée générale qui a suivi

immédiatement le conseil de surveillance.

Mme F X ne démontre pas dès lors le caractère prétendument vexatoire, voire injurieux des

conditions dans lesquelles sa révocation est survenue.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a dit que cette révocation n’était pas abusive.

4 ' sur l’appel incident de la société Groupe X, aux fins de restitution des salaires versés à M.

E X « sous couvert d’un contrat de travail sans cause, nul et de nul effet au regard du droit

des sociétés »

Il résulte de l’article 84 du code de procédure civile ' dans sa version applicable au présent litige – qu’en cas

d’appel d’un jugement statuant sur la compétence, l’appelant doit, à peine de caducité de la déclaration d’appel,

saisir, dans le délai d’appel, le premier président en vue, selon le cas, d’être autorisé à assigner à jour fixe ou

de bénéficier d’une fixation prioritaire de l’affaire.

En l’espèce, la société Groupe X reprend en cause d’appel, par le biais d’un appel incident, sa demande en

restitution des salaires versés à M. E X à hauteur de la somme de 631.175 euros, au motif que son

contrat de travail serait nul, et ce alors même que le premier juge s’est déclaré incompétent, au profit du

conseil de prud’hommes de Chartres, pour statuer sur cette demande, précisant que faute de contredit (en

réalité appel) dans le délai de 15 jours, le dossier serait transmis à la juridiction désignée.

En application des dispositions précitées, la partie du jugement statuant sur la compétence – qui a

nécessairement été disjointe de l’instance principale – ne pouvait être déférée à la cour autrement que par un

appel principal formé par celui qui conteste l’incompétence, à savoir la société Groupe X, ce dont il n’est

pas justifié.

En tout état de cause, et dans la présente instance, la cour n’est pas régulièrement saisie d’un appel sur la

décision d’incompétence du tribunal de commerce au profit du conseil de prud’hommes de Chartres.

5 – Sur la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive

Les intimés reprennent devant la cour la demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure

abusive, dont le tribunal les a déboutés en première instance.

L’exercice d’une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus que dans le cas d’erreur grossière

équipollente au dol ou à l’intention de nuire.

Les intimés affirment que l’action exercée par les appelants serait abusive en ce que ces derniers réclament la

dissolution d’une société et la sanction d’un abus de majorité sans caractériser le préjudice subi par la minorité.

Force est toutefois de constater que ces deux demandes de dissolution et d’indemnité sur le fondement d’un

abus de majorité ont été abandonnées par les appelants qui ne maintiennent que leurs demandes relatives au

caractère abusif de leurs révocations, celles-ci n’étant pas arguées d’abus par les intimés, de sorte qu’aucun

abus n’est caractérisé.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande reconventionnelle.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a condamné M. E X et Mme F X aux

dépens de première instance.

Ces derniers seront condamnés aux dépens d’appel. Il n’y a pas lieu à paiement de frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut,

Met hors de cause la société AE X,

Constate que, dans la présente instance, la cour d’appel n’est pas saisie de la décision d’incompétence du

tribunal de commerce au profit du conseil de prud’hommes de Chartres.

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Chartres en date du 13 septembre 2017 en ses dispositions

autres que celles portant sur la compétence,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. E X et Mme F X aux dépens d’appel.

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été

préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure

civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de

la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 13 novembre 2018, n° 18/02914