Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 27 mai 2021, n° 20/04797

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 16e ch., 27 mai 2021, n° 20/04797
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/04797
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Nanterre, JEX, 17 septembre 2020, N° 20/03765
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78G

16e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 27 MAI 2021

N° RG 20/04797 – N° Portalis DBV3-V-B7E-UCTW

AFFAIRE :

S.C.I. FMO

C/

C B

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Septembre 2020 par le Juge de l’exécution de Nanterre

N° RG : 20/03765

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 27.05.2021

à :

Me Quentin LANCIAN, avocat au barreau de PARIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPT MAI DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.C.I. FMO

[…]

92200 NEUILLY-SUR-SEINE

N° SIRET : 438 263 360 (RCS Nanterre)

Représentant : Me Quentin LANCIAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1991 – N° du dossier 20200212

APPELANTE

****************

Madame C B

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Avril 2021, Madame Caroline DERYCKERE, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sylvie NEROT, Président,

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth TODINI

EXPOSE DU LITIGE

La SCI FMO, constituée entre Mme X-E A ex épouse Y et M. F Y à raison respectivement de 40% et 60% des parts, était propriétaire d’un bien immobilier situé 56, Boulevard d’Argenson à Neuilly-sur-Seine.

Concomitamment à la procédure de divorce en instance entre les époux et associés, la SCI FMO a consenti au profit de M Z, par acte notarié du 19 novembre 2019, une promesse de vente du bien immobilier pour la somme de 2 760 000. La vente a été passée par acte du 5 mars 2020, et le divorce de Mme A et M Y, prononcé 26 mai 2020.

Dans la perspective de ces deux évènements, Mme A dûment autorisée à cet effet le 19 février 2019 par le juge de l’exécution de Nanterre, a signifié lors de la vente de l’immeuble, une saisie conservatoire entre les mains du notaire en garantie du paiement de sa créance contre M Y et

la SCI FMO, provisoirement évaluée à 1 264 000 € représentant le montant de la prestation compensatoire escomptée et sa créance sur le fruit de la vente de l’immeuble en qualité d’associée. Une procédure de contestation de cette saisie a été introduite par assignation du 28 mai 2020.

Dans le même temps, Me C B qui a été la première avocate de Mme A dans la procédure de divorce, craignant des difficultés pour recouvrer ses honoraires, a sollicité par requête du 19 février 2020 devant le juge de l’exécution de Nanterre, l’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire sur toutes les sommes dues par la SCI FMO à Mme A, en garantie du paiement de sa créance d’honoraires réclamée de 84 816 euros TTC, à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 19 février 2020 dans la limite de 52 500 € HT (63 000 € TTC).

Lors de la signification de cette mesure conservatoire par acte du 26 février 2020, la SCI FMO en sa qualité de tiers saisi n’a pas déféré à son obligation de révéler à l’huissier l’étendue de ses obligations à l’égard de Mme A.

Forte de cet élément, Mme B a obtenu du juge de l’exécution une nouvelle ordonnance sur requête du 11 mars 2020, l’autorisant à faire pratiquer « toute saisie conservatoire sur les biens et avoirs, outre créances détenues contre les tiers, de la SCI FMO['], pour sûreté et conservation des causes de la saisie conservatoire autorisée le 19 février 2020' ».

Le 20 mars 2020, Mme B a alors fait pratiquer une nouvelle saisie conservatoire de créance contre la SCI FMO pour la somme totale de 63 000 euros TTC. La saisie a été dénoncée le 25 mars 2020 à la SCI FMO, qui l’a contestée devant le juge de l’exécution par assignation du 29 mai 2020

Par jugement contradictoire rendu le 18 septembre 2020, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre a :

— débouté Mme B de son exception de nullité (de l’assignation),

— rejeté l’ensemble des demandes de la SCI FMO,

— condamné la SCI FMO au paiement des dépens de l’instance tenue devant le juge de l’exécution,

— condamné la SCI FMO à payer à Mme B la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— rappelé que la décision est de plein droit exécutoire par provision.

Le 5 octobre 2020 la SCI FMO a interjeté appel de la décision. La déclaration d’appel a été signifiée à Mme B par acte du 4 novembre 2020 délivré à sa personne. Elle n’a pas constitué avocat.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe le 24 novembre 2020, dûment signifiées à l’intimée défaillante par acte du 3 décembre 2020 déposé à l’étude de l’huissier, et auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SCI FMO, appelante, demande à la cour de :

— confirmer le jugement du 18 septembre 2020 rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité soulevée par Mme C B.

Pour le surplus :

— infirmer le jugement du 18 septembre 2020 rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre.

Et statuant à nouveau :

— rétracter l’ordonnance rendue le 11 mars 2020 dont il est référé ;

— prononcer la mainlevée de la mesure de saisie conservatoire sur créances signifiée le 20 mars 2020 à la SCI FMO ;

— condamner Mme C B au paiement de la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement des entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la SCI FMO fait valoir :

— que l’ordonnance du 11 mars 2020 désigne avec trop d’imprécision la créance fondée en son principe qui justifierait la mesure de saisie conservatoire ; qu’en conséquence, la saisie conservatoire pratiquée est entachée d’une irrégularité manifeste ;

— que Mme A n’est créancière de la SCI FMO, ni au titre de sa créance de prestation compensatoire, laquelle n’est opposable qu’au seul M. Y, ni au titre de ses droits allégués sur le fruit de la vente, lesquels ne constituent pas une créance certaine et fondée en son principe en l’absence de toute décision de distribution des dividendes ; que Mme A ne justifie en aucun cas des créances qu’elle allègue contre la SCI FMO ; que dès lors ces créances « fictives » ne sauraient faire l’objet d’une saisie conservatoire de créance par le tiers qu’est Mme B ;

— qu’en tout état de cause la prétendue dette de la SCI FMO envers Mme A n’est ni liquide ni exigible puisque, à la suite de l’ordonnance du 19 février 2020 rendue au profit de Mme A, les sommes concernées ont été saisies entre les mains de l’étude notariale ayant procédé à la vente de l’hôtel particulier et que, dans l’attente de l’examen du référé-rétractation de ladite ordonnance, ces sommes sont toujours séquestrées entre les mains de l’étude notariale et ainsi indisponibles pour la SCI FMO ; qu’en conséquence, il n’existe aucune créance fondée en son principe sur la possibilité de la voir condamner aux causes de la saisie ;

— subsidiairement, qu’à la suite de la vente de son principal bien immobilier la SCI FMO est actuellement dotée d’un important actif dont 1 264 000 euros sont séquestrés entre les mains d’un notaire ; que Mme B ne démontre pas une menace suffisamment significative sur le recouvrement de la créance qu’elle invoque contre la SCI FMO, le premier juge ayant fait à cet égard une confusion en ne considérant que le comportement de Mme A mais non pas les menaces sur le recouvrement induites par la SCI FMO.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 16 mars 2021.

L’audience de plaidoirie a été fixée au 14 avril 2021 et le prononcé de l’arrêt au 27 mai 2021 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

MOTIFS DE LA DECISION

Pour statuer comme il l’a fait en validant la saisie conservatoire autorisée le 11 mars 2020, le premier juge, a rappelé les dispositions relatives aux obligations pesant sur le tiers saisi recevant signification d’une saisie conservatoire puis, a constaté que Mme B ne sollicitant pas de condamnation de la SCI FMO en qualité de tiers saisi puisqu’elle ne dispose pas encore d’un titre exécutoire, pour en déduire que les articles R523-4 et R523-5du code des procédures civiles d’exécution ne trouvaient pas à s’appliquer. Et revenant sur les critères posés par l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution, le juge a retenu que Me B avait bien un principe apparent de créance fondée sur sa convention d’honoraires, qu’elle pouvait exécuter conservatoirement sur la créance de Mme

A contre la SCI FMO dont elle détient 40% du capital, que seule la situation de Mme A devait être prise en considération puisque la SCI n’a que la qualité de tiers saisi, et que Mme A n’avait pas réglé spontanément sa dette, ni ne disposait des éléments financiers nécessaires, ce qui fondait les crainte de Mme B pour le recouvrement de sa créance, justifiant ainsi la saisie conservatoire.

Ce faisant, il apparaît que le premier juge a commis une confusion entre les deux saisies conservatoires pratiquées sur requête de Mme B :

— celle du 26 février 2020 ayant été pratiquée contre Mme A entre les mains de la SCI FMO cette dernière ayant la qualité de tiers saisi, et

— celle du 20 mars 2020 ayant été pratiquée contre la SCI FMO entre les mains de la société Générale, pour garantie des causes de la saisie du 26 février 2020, au motif exposé dans la requête que la SCI FMO n’avait pas procédé aux déclarations attendues du tiers saisi lors de la notification de cette première saisie conservatoire, ce qui la rendait débitrice des causes de la saisie aux lieu et place de Mme A.

Dans le premier cas, la créance susceptible d’apparaître fondée en son principe est bien celle de Mme B contre Mme A, évaluée provisoirement à 63 000 € TTC au titre de la convention d’honoraires liant les deux parties, le risque menaçant le recouvrement tenant au présupposé que la seule richesse de Mme A depuis le prononcé du divorce, tient à ses droits dans le capital de SCI gérée par son ex mari, et la prestation compensatoire due par ce dernier.

Ce sont les éléments retenus ici par le premier juge, alors que la demande de la SCI FMO portait sur la rétractation de l’ordonnance sur requête du 11 mars 2020 exécutée à son préjudice le 20 mars 2020.

Or, du chef de cette seconde saisie à la lecture des motifs de la requête, la créance paraissant fondée en son principe de Mme B contre la SCI FMO, repose sur le titre exécutoire que Mme B pourrait obtenir contre la SCI FMO la condamnant au paiement des causes de la saisie du 26 février 2020, en sanction du silence gardé par la SCI sur ses obligations à l’égard de Mme A, en application de l’article R523-4 du code des procédures civiles d’exécution.

C’est pourquoi devant le premier juge, la SCI FMO a tenté de plaider d’une part qu’elle avait un motif légitime au sens de l’article R523-5 pour ne pas avoir fourni ces informations immédiatement à l’huissier, et d’autre part, que Mme A ne détenait contre elle aucune créance saisissable, ce qui privait Mme B de toute chance d’obtenir sa condamnation aux causes de la saisie.

En effet, étant d’ailleurs rappelé qu’à peine de caducité de la mesure conservatoire le créancier doit en application de l’article R 511-7 du code des procédures civiles d’exécution introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, il s’agirait pour Mme B en l’espèce, d’assigner la SCI et d’obtenir la condamnation de celle-ci à lui payer 63 000 € au titre des causes de la saisie du 26 février 2020. Or, pour y parvenir, il conviendrait au préalable que Mme B obtienne un titre exécutoire contre Mme A du montant attendu de ses honoraires à hauteur de 63 000 € représentant les causes de la saisie autorisée le 20 février 2021, ET que Mme A pour ce qui la concerne, ait obtenu contre la SCI FMO un titre exécutoire au moins équivalent à ce montant, puisque même en cas de défaut de réponse du tiers saisi à l’huissier instrumentaire, le tiers n’est condamné aux causes de la saisie que pour autant qu’il soit lui-même effectivement débiteur du débiteur principal.

Il en résulte qu’en l’état, Mme B ne dispose pas d’un principe apparent de créance suffisamment caractérisé pour fonder l’autorisation de procéder à une mesure conservatoire contre la SCI FMO, au sens de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution. En outre, en admettant que Mme A fasse liquider ses droits contre la SCI, cette dernière fait opportunément remarquer qu’en

exécution de la propre saisie conservatoire de Mme A entre les mains du notaire détenteur du prix de vente de l’immeuble, la somme de 1 264 000 € ainsi séquestrée est une garantie suffisante pour assurer Mme B du recouvrement de sa créance d’honoraires d’avocat.

Dans ces conditions, il convient de rétracter l’ordonnance du 11 mars 2020 ayant autorisé une mesure conservatoire contre la SCI FMO, et subséquemment d’ordonner la mainlevée de la mesure de saisie conservatoire sur créances exécutée le 20 mars 2020 au préjudice de la SCI FMO.

Hormis en sa disposition ayant rejeté l’exception de nullité de l’assignation soulevée par Mme C B qui échappe à l’effet dévolutif de l’appel en raison de la défaillance de l’intimée, il convient d’infirmer le jugement.

Mme C B supportera les entiers dépens et l’équité commande d’allouer à la SCI FMO la somme de 3500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire rendue en dernier ressort, et dans les limites de l’effet dévolutif de l’appel,

INFIRME la décision entreprise,

Statuant à nouveau,

Rétracte l’ordonnance du 11 mars 2020 ayant autorisé une mesure conservatoire contre la SCI FMO,

Ordonne la mainlevée de la mesure de saisie conservatoire sur créances exécutée le 20 mars 2020 au préjudice de la SCI FMO,

Condamne Mme C B à payer à la SCI FMO la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme C B aux dépens de première instance et d’appel.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Sylvie NEROT, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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