Cour administrative d'appel de Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 13BX00601

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Chronologie de l’affaire

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alyoda.eu · 14 novembre 2013

L'affaire qui se présente aujourd'hui nous permet de revenir une nouvelle fois sur la question de la portée du droit d'être entendu dans une procédure administrative, droit résultant de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne. Rappelons rapidement les faits. M. Z., ressortissant tunisien né en 1967, est entré une première fois régulièrement en France en 1999 sous couvert d'un visa de court séjour ; il a eu en 1999 un enfant avec une ressortissante tunisienne résidant alors régulièrement en France ; il a demandé en 2001 une première carte de séjour refusée par le …

 

Association Lyonnaise du Droit Administratif

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 16 juill. 2013, n° 13BX00601
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 13BX00601
Décision précédente : Tribunal administratif de Limoges, 19 décembre 2012, N° 1201285

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL SB

DE BORDEAUX

N° 13BX00601

________ République Française

M. A Y

________

AU NOM DU PEUPLE Français

Mme Mireille Marraco

Président

________

La Cour administrative d’appel de Bordeaux

M. Patrice Lerner

Rapporteur (2e chambre)

________

M. David Katz

Rapporteur public

________

Audience du 2 juillet 2013

Lecture du 16 juillet 2013

______

335-01-03

C

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2013, présentée pour M. A Y, demeurant XXX à XXX, par Me Moreau ;

M. Y demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1201285 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 29 juin 2012 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai d’un mois et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination d’une éventuelle mesure d’éloignement ;

2°) d’annuler l’arrêté contesté ;

3°) d’enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 15 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sous réserve que celui-ci renonce à l’aide juridictionnelle ;

Il soutient :

— que le préfet aurait dû consulter la commission du titre de séjour avant de lui refuser le titre de séjour qu’il sollicitait ;

— que le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l’article 6-5 de l’accord franco-algérien et celles de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, compte tenu des efforts qu’il a entrepris pour s’intégrer en France et de l’affection ophtalmologique dont souffre son fils ; que, pour les mêmes raisons, il est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ;

— que l’intérêt supérieur de son fils tel qu’il est prévu par l’article 3-1 de la convention internationale relative aux droit de l’enfant exige qu’il reste en France avec ses parents ;

— que le préfet a estimé, à tort, que l’obligation de quitter le territoire était une conséquence automatique du refus de titre de séjour ;

— que l’obligation de quitter le territoire n’a pas respecté la procédure prévue par l’article 41.2 de la charte des droits fondamentaux de l’union européenne ;

— que, de même, la décision l’obligeant à quitter le territoire français est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

Vu le jugement et l’arrêté attaqués ;

Vu l’ordonnance du 26 février 2013 fixant la clôture de l’instruction de la présente affaire au 5 avril 2013 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2013, présenté par le préfet de la Haute-Vienne qui conclut au rejet de la requête ; il soutient :

— que l’appelant ne rentrait pas dans les cas limitativement prévus à l’article L. 312-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile où il est tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

— que les certificats médicaux produits ne montrent pas que, contrairement à ce qu’a estimé le médecin de l’agence régionale de santé, le fils de l’appelant ne pourrait avoir le suivi nécessité par son état de santé en Algérie ;

— que la mesure d’éloignement n’a pas été prononcée automatiquement du fait du refus de titre ;

— que l’article 41-2 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne peut être invoqué que dans le cadre des rapports avec les organes européens ;

Vu la décision en date du 31 janvier 2013 par laquelle le bureau d’aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Bordeaux a accordé le bénéfice de l’aide juridictionnelle totale à M. Y ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L’affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l’article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 2 juillet 2013, le rapport de M. Patrice Lerner, premier conseiller ;

1. Considérant que M. Y, né le XXX en Algérie et de nationalité algérienne, est entré en France le 16 juin 2011 sous couvert d’un passeport revêtu d’un visa délivré par les autorités espagnoles accompagné de son épouse et de son fils Z alors âgé de 4 ans ; qu’il s’est maintenu irrégulièrement sur le territoire et a sollicité, le 19 octobre 2011, un titre de séjour « vie privée et familiale » en invoquant l’état de santé de son fils ; que le préfet de la Haute-Vienne lui en a refusé la délivrance par un arrêté du 29 juin 2012, a assorti cette décision d’une obligation de quitter le territoire national dans un délai d’un mois et a fixé, comme pays de renvoi, le pays dont l’intéressé a la nationalité ; que M. Y fait régulièrement appel du jugement du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral :

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : « (…) Le certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 5° au ressortissant algérien, qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ; qu’aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » ; qu’enfin, aux termes de l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait d’institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. » ;

3. Considérant que M. Y soutient que son fils souffre de problèmes ophtalmologiques nécessitant un suivi régulier qui ne pourrait être réalisé en Algérie ; que, toutefois, le préfet, comme ce motif était invoqué à l’appui de la demande de titre qui lui était présentée, a sollicité l’avis du médecin de l’agence régionale de santé qui a considéré que ce suivi pouvait être réalisé en Algérie ; que les certificats médicaux produits, tant au cours de la phase administrative que de la phase contentieuse, qui sont peu circonstanciés, ne permettent pas de remettre en cause cet avis ; qu’ainsi, eu égard aux circonstances de l’entrée et du séjour de M. Y en France, à la brièveté et au caractère irrégulier de ce séjour, le refus opposé par le préfet à sa demande de certificat de résidence ne peut être regardé comme ayant méconnu son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations des traités précités, ni comme étant entaché d’une erreur manifeste quant à l’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ; que l’intérêt supérieur de son fils a bien été une considération primordiale du préfet, qui a sollicité l’avis du médecin de l’agence régionale de santé, préalablement à la prise de cette décision ;

4. Considérant qu’en vertu des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le préfet n’est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 de ce code ou, dans le cas d’un ressortissant algérien, par les stipulations de l’accord franco-algérien ayant le même objet que ces dispositions ; qu’ainsi qu’il vient d’être dit, M. Y n’entre pas dans les prévisions du 5° de l’article 6 dudit accord ; qu’il n’allègue pas qu’il remplirait les conditions pour obtenir un certificat de résidence sur le fondement d’autres stipulations de cet accord ; que, par suite, il n’est pas fondé à soutenir que, faute de saisine de la commission du titre de séjour, l’arrêté attaqué aurait été pris au terme d’une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination d’une éventuelle mesure d’éloignement :

5. Considérant que, lorsqu’il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement du I de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le préfet se situe dans le champ d’application de la directive 2008/115/CE relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; que, par suite, les droits fondamentaux de l’Union européenne trouvent à s’appliquer dont celui du droit à une bonne administration qui comprend notamment le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre, énoncé au 2 de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ; que, toutefois, ce droit n’implique pas que l’administration organise, de sa propre initiative, un entretien avec l’intéressé, ni même l’invite à produire des observations, mais seulement que, informé de ce qu’une décision lui faisant grief est susceptible d’être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou orales ; qu’enfin, une atteinte à ce droit n’est susceptible d’affecter la régularité de la procédure à l’issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu’il lui revient, le cas échéant, d’établir devant la juridiction saisie ;

6. Considérant qu’en vertu de l’article R. 311-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, tout étranger qui sollicite un titre de séjour doit se présenter personnellement en préfecture, et qu’aux termes de l’article R. 311-13 du même code : « En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l’étranger est tenu de quitter le territoire français.» ; qu’ainsi M. X ne pouvait ignorer que si la demande de titre de séjour qu’il avait présentée, en invoquant les circonstances de fait qui la justifiaient selon lui, était refusée, il serait susceptible de faire l’objet d’une mesure d’éloignement ; qu’en se bornant à soutenir qu’il aurait dû être entendu avant l’édiction d’une telle mesure alors qu’il n’allègue pas avoir disposé d’éléments nouveaux et pertinents à porter à la connaissance du préfet, il n’établit pas que les principes fondamentaux du droit de l’Union européenne dont s’inspire la Charte des droits fondamentaux qu’il invoque auraient été méconnus ;

7. Considérant qu’il ne résulte ni de la motivation de l’arrêté contesté, ni d’aucun autre élément du dossier que le préfet de la Haute-Vienne se serait estimé tenu de prendre à l’encontre de l’appelant une décision l’obligeant à quitter le territoire national du seul fait qu’il lui avait refusé la délivrance d’un titre de séjour ;

8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, la mesure d’éloignement en litige n’a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l’intéressé, ni méconnu les stipulations de l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant et n’est pas entachée d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. Y ou de son fils ;

9. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. Y n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du 29 juin 2012 du préfet de la Haute-Vienne ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction et celles tendant au versement d’une indemnité à son conseil doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C Y et au ministre de l’intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l’audience du 2 juillet 2013 à laquelle siégeaient :

Mme Mireille Marraco, président,

M. Jean-Pierre Valeins, président-assesseur,

M. Patrice Lerner, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 16 juillet 2013.

Le rapporteur, Le président,

Patrice LERNER Mireille MARRACO

Le greffier,

Hélène de LASTELLE du PRE

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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Cour administrative d'appel de Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 13BX00601