Cour administrative d'appel de Bordeaux, 15 juillet 2014, n° 12BX03267

  • Boisson·
  • Licence·
  • Santé publique·
  • Fermeture administrative·
  • Maire·
  • Justice administrative·
  • Arrêté municipal·
  • Collectivités territoriales·
  • Moralité publique·
  • Établissement

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 15 juill. 2014, n° 12BX03267
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 12BX03267
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 18 octobre 2012, N° 0905545

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL MCC

DE BORDEAUX

N° 12BX03267 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

_______

SARL SAEN

_______ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M. Aymard de Malafosse

Président

_______ La Cour administrative d’appel de Bordeaux

M. Bertrand Riou (3e chambre)

Rapporteur

_______

M. Guillaume de La Taille Lolainville

Rapporteur public

_______

Audience du 16 juin 2014

Lecture du 15 juillet 2014

_______

49-05-04

C

Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 27 décembre 2012 et régularisée le 31 décembre 2012, présentée pour la SARL SAEN, dont le siège est XXX à XXX, représentée par son gérant en exercice, par Me Magali Pascual ;

La société SAEN demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0905545 du 19 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté, en date du 3 décembre 2009, par lequel le préfet de la Haute Garonne a ordonné la fermeture provisoire pour une durée de quinze jours de son commerce d’épicerie de nuit sis XXX à Toulouse ;

2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que :

— l’auteur de l’acte était incompétent dans la mesure où seuls le maire et le secrétaire général de la ville avaient la possibilité de recourir aux sanctions fixées par l’arrêté municipal ; en outre, l’opportunité des poursuites est dévolue au seul maire ; en vertu de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet devait, avant d’agir, mettre le maire en demeure de le faire ;

— la décision critiquée est entachée d’une erreur de droit dès lors qu’une épicerie ne relève pas de la réglementation des débits de boissons appliquée en l’espèce ; une épicerie ne peut faire l’objet d’une fermeture administrative, depuis la loi du 14 mars 2011, que si son activité « cause un trouble à l’ordre, la sécurité ou la tranquillité publiques » et ne pouvait donc auparavant faire l’objet d’une fermeture administrative ; une épicerie ne relève pas de la réglementation des débits de boissons comme en atteste le code NAF qui est différent et comme en témoignent la charte de la vie nocturne instaurée par la mairie à l’intention des débits de boissons qui exclut les épiceries de nuit, ainsi que des réponses ministérielles ;

— le fait de ne pas respecter un arrêté municipal ne suffit pas en lui-même à caractériser une atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, conformément aux dispositions de l’article L 3332-15 du code de la santé publique ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2013, présenté par le préfet de la Haute-Garonne qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet fait valoir que :

— les termes des dispositions de l’article L 3332-15 du code de la santé publique confient au préfet des pouvoirs distincts et indépendants de ceux relatifs à la police municipale comme du pouvoir de substitution du préfet à l’égard d’une seule commune après mise en demeure ; en l’espèce la décision est bien fondée sur le premier alinéa dudit article qui donne compétence au préfet pour fermer provisoirement les établissements visés suite à des infractions aux lois et règlements, ce qui est bien le cas d’espèce ;

— dès lors qu’elle bénéficie d’une licence de débit de boissons entrant dans la catégorie des « licences à emporter », l’épicerie en cause doit être regardée comme un débit de boissons au sens des dispositions du code de la santé publique et relève donc des dispositions de l’article L 3332-15 du même code ; l’arrêté contesté n’est dès lors entaché d’aucune erreur de droit ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 février 2014 présenté pour la SARL SAEN qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et à ce que soit mise à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l’arrêté du maire de Toulouse, en date du 7 décembre 1999 portant réglementation de la vente de boissons alcoolisées sur le territoire de la commune ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 juin 2014 :

— le rapport de M. Bertrand Riou, président-assesseur ;

— les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

— les observations de Me Abadie, avocat de la SARL Saen ;

1. Considérant que la SARL Saen exploite à Toulouse une épicerie de nuit, sise XXX ; que le 10 septembre 2009, un avertissement lui a été adressé, à la suite d’infractions aux horaires de vente d’alcool à emporter réglementés par un arrêté du maire de Toulouse en date du 7 décembre 1999 ; qu’à la suite de deux nouvelles infractions de même nature, constatées les 26 et 30 septembre 2009, le gérant de la société a été convoqué à la préfecture le 27 novembre 2009 et invité à présenter ses observations ; que le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté en date du 3 décembre 2009 pris sur le fondement de l’article L. 3332-15 du code de la santé publique, ordonné la fermeture administrative de l’établissement pour une durée de quinze jours ; que la société SAEN relève appel du jugement, en date du 19 octobre 2012, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L.3332-15 du code de la santé publique :

« 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l’Etat dans le département pour une durée n’excédant pas six mois, à la suite d’infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. Cette fermeture doit être précédée d’un avertissement qui peut, le cas échéant, s’y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d’une défaillance exceptionnelle de l’exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. 2. En cas d’atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l’Etat dans le département pour une durée n’excédant pas deux mois. » ; qu’aux termes de l’article L.3331-3 du code de la santé publique : « Les établissements titulaires d’une licence à consommer sur place ou d’une licence de restaurant peuvent vendre pour emporter les boissons correspondant à la catégorie de leur licence. Les autres débits de boissons à emporter sont répartis en deux catégories, selon l’étendue de la licence dont ils sont assortis : 1° La « petite licence à emporter » comporte l’autorisation de vendre pour emporter les boissons des deux premiers groupes ; 2° La « licence à emporter » proprement dite comporte l’autorisation de vendre pour emporter toutes les boissons dont la vente est autorisée. » ;

3. Considérant, en premier lieu, qu’en prévoyant que le représentant de l’Etat dans le département peut ordonner la fermeture administrative, pour une durée maximum de six mois, des débits de boissons qui commettent des infractions aux « lois et règlements relatifs à ces établissements », les dispositions législatives précitées du 1 de l’article L.3332-15 du code de la santé publique, sur le fondement desquelles a été pris l’arrêté contesté, ont entendu conférer au préfet le pouvoir de prononcer une telle mesure en cas notamment de défaut de respect, par un débit de boissons, d’un arrêté municipal réglementant les heures d’ouverture de ces établissements ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne était compétent pour prendre la mesure litigieuse, sans que puissent être utilement invoqués le fait que l’arrêté municipal du 7 décembre 1999 précise que le maire et le secrétaire général sont chargés de son exécution, non plus que le moyen tiré de l’invocation des dispositions du 1° de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales précisant les conditions dans lesquelles le préfet peut se substituer au maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police ;

4. Considérant, en second lieu, que les dispositions de l’article L.3332-15 du code de la santé publique ne limitent pas leur champ d’application aux débits de boissons à consommer sur place mentionnés à l’article L. 3331-1 du même code, mais visent les débits de boissons en général ; que, par suite, les « autres débits de boissons » qui, en vertu de l’article L.3331-3 précité dudit code, doivent, pour vendre des boissons alcooliques, être pourvus soit d’une « petite licence à emporter » soit d’une « licence à emporter » sont au nombre des établissements que visent les dispositions de l’article L.3332-15, sans que la société requérante puisse utilement invoquer les différences de « code NAF », ou la « charte de la vie nocturne » mise en place par la ville de Toulouse, ou encore des réponses ministérielles qui en tout état de cause ne se prononcent pas au regard des dispositions servant de fondement à l’arrêté contesté ; qu’il ressort des pièces du dossier que le commerce d’épicerie sis au XXX à Toulouse était titulaire de la « licence à emporter » prévue par l’article L.3331-3 du code de la santé publique ; que, dès lors, c’est par une exacte application des dispositions de l’article L.3332-15 du code de la santé publique que le préfet de la Haute-Garonne, après avoir constaté les infractions à la réglementation définie par l’arrêté du maire de Toulouse du 7 décembre 1999, a pris la mesure de fermeture administrative contestée ; que la société requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article L.2215-6 du code général des collectivités territoriales dans leur rédaction issue de la loi n°2011-267 du 14 mars 2011 dès lors, en tout état de cause, que l’arrêté contesté ne trouve pas son fondement dans ces dispositions ;

5. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SARL Saen n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

6. Considérant que l’Etat n’étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par la SARL Saen au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Saen est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Saen et au ministre de l’intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l’audience du 16 juin 2014, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président de chambre,

M. Bertrand Riou, président assesseur,

Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller

Lu en audience publique, le 15 juillet 2014

Le rapporteur, Le président,

Bertrand RIOU Aymard de MALAFOSSE

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre de l’économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Virginie MARTY

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour administrative d'appel de Bordeaux, 15 juillet 2014, n° 12BX03267