CAA de DOUAI, 1ère chambre, 16 juin 2020, 19DA00279, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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www.jorion-avocats.com · 20 avril 2022

(CAA Douai, 16 juin 2020, EPF de Normandie, req. n° 19DA00279) La question de l'autorité compétente pour préempter est complexe. Il est rare, en pratique, que les conseils municipaux continuent à exercer ce droit, tant les délégations de compétence sont nombreuses. La jurisprudence donne plusieurs exemples de délégations de compétence irrégulière du fait d'une publicité insuffisante. Il en va ainsi en cas d'absence de publicité : « Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du 29 juillet 2016 portant délégation du droit de préemption du président de la métropole de Rouen …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Douai, 1re ch. bis, 16 juin 2020, n° 19DA00279
Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro : 19DA00279
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Rouen, 20 décembre 2018, N° 1603857
Dispositif : Satisfaction totale
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042019070

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C… a demandé au tribunal administratif de Rouen d’annuler la décision du 9 août 2016 par laquelle le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur une parcelle cadastrée AA n° 26 située chemin des Ondes, lieu-dit « Le Boquet » au Mesnil-Esnard ainsi que la décision du 28 septembre 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1603857 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 février 2019, Mme C…, représentée par Me D… E…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d’annuler la décision du 9 août 2016 du directeur général de l’établissement public foncier de Normandie et la décision du 28 septembre 2016 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l’établissement public foncier de Normandie la somme de 4 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

— ---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l’urbanisme ;

 – l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Claire Rollet-Perraud, président-assesseur,

 – et les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1.Mme C… est propriétaire d’un terrain cadastré section AA n° 26 situé chemin des Ondes, lieudit « Le Boquet », au Mesnil-Esnard. Le 20 avril 2016, elle a consenti à la société Bouygues immobilier une promesse de vente de ce terrain. Par une décision du 9 août 2016, le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur cet ensemble immobilier. Mme C… a demandé au tribunal administratif de Rouen d’annuler cette décision ainsi que la décision du 28 septembre 2016 rejetant son recours gracieux. Le tribunal a rejeté sa demande par un jugement du 21 décembre 2018 dont Mme C… fait appel.

Sur les conclusions aux fins d’annulation des décisions en litige :

2. Par une délibération du 29 juin 2016, le conseil métropolitain de la métropole Rouen Normandie a donné délégation à son président pour exercer et déléguer l’exercice du droit de préemption urbain à l’occasion de l’aliénation du bien appartenant à Mme C…. Par décision du 29 juillet 2016, le président de la métropole Rouen Normandie a délégué à l’établissement public foncier de Normandie l’exercice du droit de préemption sur le bien en cause. Par la délibération du 10 mars 2016, le conseil d’administration de l’établissement public foncier avait délégué à son président l’exercice du droit de préemption et de priorité à mettre en oeuvre dans le cadre des missions foncières dont l’établissement a accepté la prise en charge.

En ce qui concerne la décision du 29 juillet 2016 :

3. Aux termes de l’article L. 213-3 du code de l’urbanisme : « Le titulaire du droit de préemption peut déléguer son droit à l’Etat, à une collectivité locale, à un établissement public y ayant vocation ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement. Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties des zones concernées ou être accordée à l’occasion de l’aliénation d’un bien (…) ». Les décisions individuelles par lesquelles un établissement public délégataire exerce, en application des dispositions citées ci-dessus de l’article L. 213-3 du code de l’urbanisme, le droit de préemption au nom d’un établissement public de coopération intercommunale, ne peuvent être compétemment prises par cet établissement avant l’entrée en vigueur de l’acte réglementaire lui déléguant l’exercice du droit de préemption.

4. Aux termes de l’article L. 5211-3 du code général des collectivités territoriales : « Les dispositions du chapitre premier du titre III du livre premier de la deuxième partie relatives au contrôle de légalité et au caractère exécutoire des actes des communes sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale. ». Aux termes de l’article L. 2131-1 du même code : « Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu’à leur transmission au représentant de l’Etat dans le département ou à son délégué dans l’arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. ».

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du 29 juillet 2016 portant délégation du droit de préemption du président de la métropole de Rouen Normandie à l’établissement public foncier de Normandie aurait fait l’objet d’une publication ou d’un affichage. Par suite le caractère exécutoire de la délégation n’étant pas établi, l’établissement public n’était pas compétent pour exercer le droit de préemption urbain dont la métropole de Rouen Normandie était titulaire.

En ce qui concerne la délibération du 10 mars 2016 :

6. Aux termes de l’article R. 321-12 du code de l’urbanisme : « Les actes à caractère réglementaire pris par délibération du conseil d’administration ou du bureau des établissements publics fonciers de l’Etat, des établissements publics d’aménagement, de l’établissement public Grand Paris Aménagement ou par le directeur général par délégation du conseil d’administration ou en vertu de ses compétences propres en application des lois et règlements sont publiés dans un recueil tenu par l’établissement dans les conditions fixées par le règlement intérieur. Les décisions relatives à l’exercice du droit de préemption ou de priorité font, en plus de la publication prévue à l’alinéa précédent, l’objet d’un affichage dans les mairies concernées par celles-ci pendant une durée de deux mois. »

7. La délibération du 10 mars 2016 qui autorise le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie, établissement public de l’Etat, à exercer le droit de préemption en vue de la réalisation de toute action ou opération répondant aux objets définis à l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme revêt un caractère réglementaire nécessitant qu’il soit procédé à sa publication selon les modalités fixées par l’article R. 321-12 du code de l’urbanisme pour qu’elle soit exécutoire. Par suite, l’établissement public foncier de Normandie n’est pas fondé à soutenir que le caractère exécutoire de ladite délibération résulterait de sa seule notification à l’auteur de la déclaration d’aliéner et de sa transmission au préfet de région en application des dispositions des articles R. 321-18 et R. 321-19 du code de l’urbanisme. En outre, en l’absence d’élément justifiant que la délibération du 10 mars 2016 aurait fait l’objet d’une publication, notamment sur le site internet de l’établissement, son caractère exécutoire n’est pas établi à la date de la décision du 9 août 2016 en litige par laquelle le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur l’ensemble immobilier propriété de Mme C…. Par suite, cette décision a été prise par une autorité incompétente.

8. Pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, aucun des autres moyens invoqués n’est susceptible d’entraîner, en l’état du dossier soumis à la cour, l’annulation de la décision contestée.

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 7 que la décision du 9 août 2016 par laquelle le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée AA n° 26 au Mesnil-Esnard est illégale et doit être annulée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C… est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 9 août 2016 ainsi que par voie de conséquence la décision du 28 septembre 2016 rejetant son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C…, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l’établissement public foncier de Normandie réclame au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de l’établissement public foncier de Normandie une somme de 2 000 euros à verser à Mme C… au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 21 décembre 2018 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La décision du 9 août 2016 par laquelle le directeur général de l’établissement public foncier de Normandie a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée AA n° 26 située chemin des Ondes, lieu-dit « Le Boquet » au Mesnil-Esnard appartenant à Mme C… et la décision du 28 septembre 2016 rejetant son recours gracieux sont annulées.

Article 3 : L’établissement public foncier de Normandie versera une somme de 2 000 euros à Mme C… au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l’établissement public foncier de Normandie tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A… B… née C… et à l’établissement public foncier de Normandie.

Copie en sera adressée pour information à la métropole Rouen Normandie.


N°19DA00279 2

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