COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 2ème chambre - formation à 3, 28 août 2012, 11LY00937, Inédit au recueil Lebon

  • Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées·
  • Taxe sur la valeur ajoutée·
  • Contributions et taxes·
  • Liquidation de la taxe·
  • Remboursements de TVA·
  • Déductions·
  • Valeur ajoutée·
  • Facture·
  • Hôtel·
  • Administration

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 2e ch. - formation à 3, 28 août 2012, n° 11LY00937
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 11LY00937
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Grenoble, 18 juillet 2011, N° 0802579
Identifiant Légifrance : CETATEXT000026383830

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 septembre 2011, présentée pour la SARL HOTEL LES MARQUISATS, dont le siège est au 400 route des Resses à Aviernoz (74540) ;

La SARL HOTEL LES MARQUISATS demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0802579 du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à l’expiration du 4e trimestre 2007, assorti des intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la restitution demandée pour un montant de 45 851 euros, assortie du versement des intérêts moratoires ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient que :

 – la décision rejetant sa réclamation concernant le crédit de taxe en litige est entachée d’un défaut de motivation et est totalement incompréhensible ;

 – l’administration ne pouvait lui refuser le remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu’aucune disposition n’impose que les prix HT et TTC figurent sur les factures pour leur valeur unitaire, que, contrairement à ce que prétend l’administration, sur chaque facture il était mentionné que les prestations relevaient du taux normal de TVA à 19,6% ainsi que le montant auquel cela correspondait, que les prestations de service ont été systématiquement détaillées lors de l’établissement des factures, que l’administration n’établit pas qu’elle a eu connaissance des irrégularités de facturation, la réponse Francou du 1er juin 1979 comme le Conseil d’Etat ayant indiqué que pouvait être déduite et récupérée la taxe mentionnée en cas de bonne foi, et qu’aucun risque de pertes ne subsistait ;

 – elle a justifié de sa demande de remboursement de taxe d’un montant de 125 751 euros dès lors que cette somme provenait notamment, à concurrence de 30 482 euros, d’une régularisation de TVA collectée correspondant à la quote-part de prix qui n’avait pas été encaissée, cette TVA lui ayant été réclamée à tort sur la cession d’une promesse de permis de construire, et que, concernant les factures exclues du droit à déduction, le refus de déduire méconnait le principe communautaire de neutralité et d’effectivité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

 – le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la décision de rejet est inopérant ;

 – la société ne justifie pas que le montant de 125 751 euros dont elle demande le remboursement comprenait une somme de 30 482 euros relative à une régularisation de taxe collectée correspondant à la quote-part de prix qui n’avait pas été encaissée ; qu’elle a mentionné une taxe déductible d’un montant de 125 751 euros à rembourser dans sa déclaration CA3 mais récapitulé dans deux relevés un montant total de taxe déductible de 97 169 euros ; que la différence entre ces deux sommes s’élève à 28 582 euros et non à 30 482 euros ; qu’elle n’a pas mentionné expressément de régularisation de taxe collectée dans la ligne correspondante dans sa déclaration de décembre 2007, ni dans les précédentes ;

 – l’examen des factures produites a conduit à rejeter trois factures pour un montant total de 17 269 euros au titre de l’année 2005 dès lors que :

o concernant la facture Suorant’Alp, le numéro de Siret correspond à une autre société et son activité ne correspond pas aux prestations facturées, la dénomination précise ainsi que le prix unitaire hors taxe et le taux de TVA légalement applicable ne sont pas mentionnés pour chacun des services rendus et il n’est pas établi que cette facture aurait été acquittée ;

o concernant la facture Alex menuiseries, le document produit est un devis ;

o concernant la facture Oskan, cette société n’est pas connue du registre du commerce et des sociétés, aucun numéro de SIRET n’est porté sur la facture, l’adresse est vague, la dénomination précise ainsi que le prix unitaire hors taxe et le taux de TVA légalement applicable ne sont pas mentionnés pour chacun des services rendus et il n’est pas établi que cette facture aurait été acquittée ;

o le droit à déduction n’existe que dans la mesure où la taxe mentionnée sur la facture était légalement due par l’émetteur du document comme l’a jugé la cour de justice de l’Union européenne ;

o la taxe illégalement facturée n’est pas déductible pour le destinataire en vertu des articles 272-2 et 283-4 du code général des impôts ;

o le risque fiscal n’est pas éliminé et la société ne peut utilement invoquer le principe de neutralité fiscale ;

o le droit à déduction est lié au paiement des factures en vertu de l’article 271-I du code général des impôts ;

o la société ne pouvait ignorer les erreurs et anomalies contenues dans les factures Suorant’Alp et Oksan ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mars 2012, présenté pour la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que la régularisation de taxe collectée, d’un montant plutôt de 25 480 euros, résultait d’une taxe exigible prévue dans un acte de cession, que celle-ci correspondait à des prestations de service relatives à l’obtention d’un permis de construire, qu’en raison de l’absence de délivrance de permis de construire elle n’a pu réclamer cette somme, et qu’il n’y avait pas lieu de porter sur une déclaration CA3 une TVA qui n’avait pas été déclarée spontanément ;

Vu l’ordonnance en date du 9 mars 2012 fixant la clôture d’instruction au 30 mars 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 3 juillet 2012 :

— le rapport de M. Segado, premier conseiller ;


- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui avait réalisé une opération de promotion immobilière au cours des années 2005 et 2006 dans le département de la Haute-Savoie a demandé le 21 janvier 2008 le remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle estimait disposer à l’expiration du 4e trimestre 2007, d’un montant de 124 924 euros correspondant à la différence entre une taxe déductible de 125 751 euros mentionnée dans sa déclaration CA3 et la taxe brute due de 827 euros mentionnée dans ladite déclaration ; que, la société a produit, concernant ces opérations ouvrant droit à déduction, des justificatifs appuyés de deux relevés pour un montant total de taxe déductible de 97 169 euros ; qu’après avoir notamment remis en cause trois de ces justificatifs correspondant à un montant total de taxe de 17 269 euros, le directeur des services fiscaux de la Haute-Savoie n’a fait droit que partiellement au remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée que la société requérante avait sollicité, à concurrence de 79 073 euros ; que la SARL HOTEL LES MARQUISATS relève appel du jugement du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée restant en litige ;

Sur la régularité de la décision du 31 mars 2008 :

Considérant que les vices qui entachent la décision par laquelle l’administration rejette une réclamation préalable d’un contribuable sont sans influence sur la régularité et le bien fondé des impositions contestées ; que la demande de remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée présentée par la SARL HOTEL LES MARQUISATS le 21 janvier 2008 constitue une réclamation contentieuse préalable ; que, par suite, les moyens tirés d’une insuffisante motivation de la décision du 31 mars 2008 par laquelle l’administration n’a pas donné entièrement satisfaction à la réclamation du 21 janvier 2008 du contribuable, et de ce que cette décision serait « totalement incompréhensible » ne lui permettant pas de connaître précisément les griefs retenus à son encontre, sont inopérants et ne peuvent, dès lors, qu’être écartés ;

Sur le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à une régularisation de taxe collectée :

Considérant que la SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient que sa demande de remboursement de crédits de taxe porterait, outre la taxe déductible, sur une régularisation de taxe sur la valeur ajoutée collectée correspondant à la quote-part de prix qui n’avait pas été encaissée au sujet des prestations de services relatives à un permis de construire qui n’a pas été finalement délivré ; qu’elle a estimé initialement cette régularisation de taxe collectée à un montant de 30 482 euros, somme excédant, comme le fait valoir l’administration, celle de 28 582 euros qui résulte de la différence entre la taxe déductible déclarée d’un montant de 125 751 euros et la somme de 97 169 euros correspondant au montant total figurant sur les justificatifs et les deux relevés produits par la société concernant les opérations ouvrant à déduction, la société requérante ayant ensuite précisé que le crédit correspondant à cette régularisation de taxe collectée serait « plutôt » d’un montant de 25 480 euros ; que la SARL HOTEL LES MARQUISATS ne produit cependant aucun élément de nature à établir ses allégations, alors que, par ailleurs, elle n’a mentionné dans sa déclaration CA3 du 21 janvier 2008, valant demande de remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée, qu’un montant de taxe déductible de 125 751 euros et n’a précisé aucune somme à la rubrique « régularisation sur la TVA collectée » ;

Sur le remboursement de taxe sur la valeur ajoutée déductible figurant sur trois « factures » :

Considérant qu’en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l’article 230 de l’annexe II à ce code, applicables aux périodes d’imposition en litige, la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d’opérations imposables est déductible, dans le cas de services facturés à l’entreprise, de la taxe à laquelle celle-ci est assujettie à raison des opérations en cours, à condition que les factures mentionnent ladite taxe, qu’elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur, qu’elles correspondent effectivement à l’exécution de la prestation de services dont elles font état, et que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l’entreprise ; que, dans le cas où l’auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l’administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d’établir qu’il s’agissait d’une facture fictive ou d’une facture de complaisance; que si l’administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d’apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

Considérant que l’administration a refusé de restituer à la SARL HOTEL LES MARQUISATS la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 17 269 euros grevant une facture « Suorant’alp » établie le 10 janvier 2005, un devis de fournitures établi par l’entreprise « Alex menuiseries » daté du 28 mai 2005, et une facture « Ets Oskan » du 10 mai 2005 que la société requérante avait produits pour justifier du caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur ces documents ; que la SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient qu’elle devait bénéficier du droit à déduction concernant ces trois « factures » dès lors que les mentions qui y étaient portées étaient suffisantes pour bénéficier de ce droit et qu’elle ignorait les irrégularités de facturation dont fait état l’administration ;

Considérant que, comme le fait valoir l’administration, le « devis de fournitures » de l’entreprise « Alex menuiserie » ne constitue pas une facture et la société requérante ne produit aucune facture répondant aux exigences de l’article 289 du code général des impôts concernant ces achats ; que s’agissant de la facture « Suorant’alp », celle-ci mentionne un numéro de Siret qui concerne une autre société, la Sarl Savoie en liquidation judiciaire et dont le co-gérant est M. Pierre qui est aussi gérant de la société requérante, ladite société ayant une activité de « fabrication de charpentes » qui ne correspond pas aux prestations facturées qui font notamment état de prestations d’agencement ; que cette facture ne détaille pas en outre le prix unitaire hors taxe et le taux de taxe sur la valeur ajoutée pour chacun des services rendus et ne contient pas de dénomination précise desdites prestations ; que, s’agissant de la facture établie par l’établissement Oskan, cette entreprise n’est connue ni du registre du commerce et des sociétés, ni de l’administration fiscale, la facture produite par la société requérante ne mentionne aucun numéro de SIRET et ne détaille pas le prix unitaire hors taxe et le taux de taxe sur la valeur ajoutée pour chacun des services rendus ; que la société n’apporte aucun autre élément concernant la réalisation de ces prestations par ces sociétés ; qu’ainsi, c’est à bon droit que l’administration a regardé les sommes relatives à ces deux factures comme ne constituant pas la contrepartie de prestations réellement fournies par ces sociétés et comme ne constituant pas ainsi des dépenses nécessaires à l’exploitation au sens de l’article 230 susmentionné de l’annexe II ; qu’au surplus, l’administration fait valoir, sans être contredite par la société requérante qui ne produit aucune pièce concernant le règlement desdites factures, que cette dernière ne démontre pas qu’elle aurait acquitté les factures « Suorant’alp » et « Oksan » ; qu’il s’ensuit que c’est à bon droit que l’administration a refusé à la SARL HOTEL LES MARQUISATS, pour ces motifs et au regard des dispositions précitées du code général des impôts, la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur ces deux factures et sur le devis établi par l’entreprise « Alex menuiseries » ; que la société requérante ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce que la non-conformité des documents aux exigences formelles prescrites par les dispositions de l’article 242 nonies de l’annexe II au code général des impôts en raison des anomalies recensées par l’administration fiscale, constituerait un formalisme excessif portant atteinte à la neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée et au principe d’effectivité, ni soutenir qu’elle ignorait le caractère non déductible des taxes figurant sur ces trois documents ;

Sur l’application de la doctrine :

Considérant que si la société requérante a entendu se prévaloir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la réponse ministérielle faite à M. Francou, sénateur, publiée le 1er juin 1979, qui indique que « Dans la mesure où la bonne foi des parties n’est pas contestée, il est cependant admis que la personne qui a facturé la taxe sur la valeur ajoutée au titre d’opérations non passibles de cette taxe puisse, dans les conditions fixées à l’article 272 du code général des impôts, opérer l’imputation ou obtenir la restitution de la taxe acquittée à tort », la SARL HOTEL LES MARQUISATS ne rentre pas, en tout état de cause, dans les prévisions de cette doctrine dès lors que le caractère non déductible de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les trois documents en cause ne résulte pas du fait que les opérations n’étaient pas passibles de cette taxe ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SARL HOTEL LES MARQUISATS n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au versement d’intérêts moratoires et à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être, par voie de conséquence, rejetées ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL HOTEL LES MARQUISATS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL HOTEL LES MARQUISATS et au ministre de l’économie et des finances.

Délibéré après l’audience du 3 juillet 2012, où siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Segado et Lévy Ben-Cheton.


Lu en audience publique, le 28 août 2012.

''

''

''

''

2

N° 11LY00937

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 2ème chambre - formation à 3, 28 août 2012, 11LY00937, Inédit au recueil Lebon