Cour administrative d'appel de Lyon, 27 mai 2021, n° 21LY00816

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 27 mai 2021, n° 21LY00816
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 21LY00816
Décision précédente : Tribunal administratif de Grenoble, 1er mars 2021
Dispositif : Rejet

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B C a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, sur le fondement des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert chargé de déterminer les désordres affectant le mur de clôture de sa propriété située au 15 rue des Lilas à Seyssins.

Par ordonnance n° 2007972 du 2 mars 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2021, M. B C, représenté par Me A, demande à la cour :

1°) d’annuler l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 2 mars 2021 ;

2°) de désigner un expert chargé de décrire les désordres affectant le mur de clôture de sa propriété située au 15 rue des Lilas à Seyssins, d’en déterminer l’origine, les causes, la nature et l’importance et de définir les solutions techniques pour y remédier.

Il soutient que :

— il est bien propriétaire du mur de clôture litigieux situé sur la parcelle lui appartenant, ce que la ville de Seyssins n’a jamais contesté ; suite à des travaux d’aménagement d’un carrefour, ce mur sert depuis plusieurs années de soutènement à la voirie communale ;

— l’exception de prescription quadriennale opposée en défense sera écartée car les dommages affectant le mur en cause sont évolutifs et, même si les premiers signes d’affaissement sont apparus dès 2004, les désordres se sont aggravés au cours de l’année 2018 ;

— le lien de causalité entre les désordres, non sérieusement contestés par la commune et attestés par un constat d’huissier établi le 9 juin 2020, et l’état de la voirie est suffisamment établi ; la responsabilité de la commune de Seyssins est susceptible d’être engagée pour promesse non tenue au vu de ses engagements de procéder à des travaux de remise en ordre du mur de clôture, et celle de la métropole Grenoble-Alpes pour dommage de travaux publics ;

— la mesure sollicitée revêt un caractère utile afin de décrire les désordres affectant le mur de clôture et déterminer les travaux à mettre en oeuvre pour y remédier ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2021, Grenoble-Alpes métropole, représentée par Me D, conclut au rejet de la requête et à ce que M. C soit condamné à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— il oppose l’exception de prescription quadriennale quant à son éventuelle responsabilité tenant au transfert de la compétence « création, aménagement et entretien de voirie » de la commune de Seyssins en application de l’article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales ; en effet, selon son courrier du 8 novembre 2004, M. C a indiqué que l’effondrement partiel du mur de clôture serait lié aux travaux d’aménagement du carrefour nécessairement antérieurs et aucune nouvelle démarche n’a été entreprise par le requérant avant 2018 ;

— la propriété du mur de clôture n’est pas établie ; le lien de causalité entre les désordres affectant le mur de clôture et les prétendus travaux d’aménagement du carrefour n’est étayé par aucun commencement de preuve, ce mur n’étant pas recensé comme mur de soutènement de la voirie ; la matérialité des désordres est déjà attestée par un constat d’huissier établi le 9 juin 2020 ;

— à titre subsidiaire, la mission de l’expert devrait être étendue à la recherche de toutes causes des désordres, et notamment des propres travaux entrepris par le requérant, et à l’assureur de la métropole, la société Axa France IARD.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code civil ;

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code de justice administrative.

Par une décision du 3 septembre 2020, le président de la cour administrative d’appel de Lyon a désigné M. Gayrard, président assesseur de la 6e chambre, en qualité de juge des référés.

Considérant ce qui suit.

Sur le bien-fondé de l’ordonnance attaqué :

1. L’article L. 555-1 du code de justice administrative prévoit que : « Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d’appel ou le magistrat qu’il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d’appel contre les décisions rendues par le juge des référés. L’article R. 532-1 du même code précise : » Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction. () « . L’utilité d’une mesure d’instruction ou d’expertise qu’il est demandé au juge des référés d’ordonner sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens et, d’autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective d’un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d’expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l’appui de prétentions qui se heurtent à la prescription. De même, il ne peut faire droit à une demande d’expertise permettant d’évaluer un préjudice, en vue d’engager la responsabilité d’une personne publique, en l’absence manifeste de lien de causalité entre le préjudice à évaluer et la faute alléguée de cette personne. L’article 578 du code civil dispose enfin que : » L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance. ".

2. Par ordonnance du 2 mars 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande présentée par M. C sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative tendant à ce qu’une expertise soit ordonnée afin de décrire les désordres affectant un mur de clôture de sa propriété sis 15 rue des lilas à Seyssins, et d’en déterminer leur origine, leurs causes, leur nature et leur importance, en opposant comme motif unique que le requérant ne justifiait pas de sa propriété dudit mur. Toutefois, par un relevé de propriété récent, M. C justifie être l’usufruitier de la parcelle cadastrée AN 92 sur laquelle est implantée le mur de clôture litigieux et peut, à ce titre, prendre toute mesure conservatoire, notamment en sollicitant une expertise, en application de l’article 578 du code civil. En outre, il ressort des termes des échanges entre la commune de Seyssins et le requérant depuis 2005 que la propriété de ce mur n’a jamais été sérieusement contestée. Il s’ensuit que c’est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a opposé l’absence de justification de la propriété du mur litigieux pour rejeter la demande de M. C fondée sur l’article R. 532-1 du code de justice administrative.

3. Aux termes de l’article du premier alinéa de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics  : « Sont prescrites, au profit de l’État, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Lorsque la responsabilité d’une personne publique est recherchée au titre d’un dommage causé à un tiers par un ouvrage public, les droits de créance invoqués par ce tiers en vue d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices doivent être regardés comme acquis, au sens de ces dispositions, à la date à laquelle la réalité et l’étendue de ces préjudices ont été entièrement révélées, ces préjudices étant connus et pouvant être exactement mesurés. La créance indemnitaire relative à la réparation d’un préjudice présentant un caractère évolutif doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ce préjudice a été subi.

4. M. C soutient que les désordres affectant le mur de clôture de son habitation découlent de travaux d’aménagement, par la commune de Seyssins, d’un carrefour situé à proximité ayant eu pour conséquence de relever le niveau de la voirie de telle façon que ce mur sert depuis plusieurs années de soutènement de la voirie communale, laquelle a été transférée à Grenoble-Alpes métropole en application de l’article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales. L’établissement public intercommunal oppose la prescription quadriennale à la créance que M. C est susceptible d’invoquer, sur le fondement des dommages de travaux publics, du fait des désordres affectant le mur litigieux en relevant que, par courrier du 8 novembre 2004, M. C avait déjà saisi la commune de Seyssins à propos d’une demande de reconstruction d’une partie du muret d’enceinte de sa propriété et qu’il n’a effectué de nouvelles démarches tendant aux mêmes fins auprès de la commune qu’en 2018. Si M. C admet que l’origine et la nature de ses préjudices lié à l’effondrement de son mur de clôture était connue dès 2004, il soutient néanmoins que ce n’est que courant 2018 qu’il a constaté une aggravation importante des désordres affectant le mur. Toutefois, comme l’oppose la métropole, il n’apporte aucun commencement de preuve à l’appui de ses allégations sur le caractère évolutif de ses dommages. Il s’ensuit qu’en l’état de l’instruction, Grenoble-Alpes métropole est fondée à soutenir que la prescription quadriennale susceptible d’être opposée à la créance dont se prévaudrait M. C au titre d’un dommage de travaux publics fait perdre son utilité à la mesure d’expertise sollicitée.

5. En outre, contrairement à ce que le requérant soutient, les éléments produits, et notamment un constat d’huissier établi à sa demande le 9 juin 2020, ne permettent manifestement pas d’établir un lien de causalité entre les désordres affectant le mur de la clôture et l’état de la voirie découlant de travaux d’aménagement du carrefour à proximité, non datés, et dont la réalité même est contestée par la métropole. Enfin, la mesure d’expertise sollicitée ne présente aucun caractère d’utilité pour établir l’existence ou non d’une faute de la commune tenant à un engagement non tenue de réaliser des travaux de reconstruction du mur. Dans ces conditions, M. C n’est pas fondé à se plaindre que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande présentée sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Grenoble-Alpes métropole tendant à l’application de ces dispositions.

ORDONNE:

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Grenoble-Alpes métropole sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B C, à la commune de Seyssins et à Grenoble-Alpes métropole.

Fait à Lyon, le 27 mai 2021.

Le juge des référés,

Jean-Philippe GAYRARD

La République mande et ordonne au préfet de l’Isère en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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