CAA de LYON, 5ème chambre, 25 février 2021, 19LY01778, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 5e ch., 25 févr. 2021, n° 19LY01778
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 19LY01778
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Lyon, 11 mars 2019, N° 1707273
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043204422

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure

M. C… B… a demandé au tribunal administratif de Lyon :

 – de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et des cotisations sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l’année 2014 ;

 – de prononcer la restitution des sommes en litige assorties des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1707273 du 12 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 mai 2019 et 24 février 2020, M. B…, représenté par Me Farhat, avocat, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 mars 2019 ;

2°) de le décharger des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et cotisations sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l’année 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la prise en charge des factures d’honoraires d’avocat ne constitue pas pour les sociétés Lizeo et Lomg, un acte anormal de gestion, dans la mesure où elle s’est inscrite dans un accord global, qui était essentiel pour parvenir à une solution, sans laquelle leur pérennité respective eut été fortement compromise. Il était de l’intérêt de ces deux sociétés que les protocoles transactionnels rédigés par des conseils externes soient validés par l’ensemble des parties et la prise en charge des frais afférents n’a donc rien de contraire à l’intérêt social puisque cela a permis à Lizeo d’acquérir les titres Lomg sans passer par une longue et aléatoire procédure judiciaire et à la société Lomg d’éviter un contentieux prud’homal. Ainsi, il a bénéficié d’un complément de prix qui ne pouvait être imposé sur le fondement de l’article 111 c du code général des impôts.

Par des mémoires enregistrés les 18 décembre 2019 et 29 septembre 2020, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’en prenant en charge les frais d’avocat litigieux, alors qu’elles n’en avaient pas intérêt, les sociétés Lizeo et Lomg ont permis à M. B… de bénéficier d’un avantage occulte imposable sur le fondement des dispositions prévues par l’article 111-c du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme A…, présidente assesseure ;

 – les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

 – les observations de Farhat, représentant M. B… ;

Considérant ce qui suit :

1. Les sociétés Lizeo on Line Media Group (LOMG) et Lizeo ont fait l’objet de vérifications de comptabilité à l’issue desquelles l’administration a remis en cause sur le fondement de l’acte anormal de gestion, la déduction de leurs résultats de deux factures d’honoraires du cabinet d’avocats HPML en date du 11 décembre 2014 représentant des montants de 24 000 euros et de 164 400 euros respectivement réglées par la société LOMG et par la société Lizeo. La prise en charge de ces frais par les sociétés LOMG et Lizeo ayant été regardée comme une distribution au bénéfice de M. B…, alors associé de ces sociétés, sur le fondement du c de l’article 111 du code général des impôts, l’administration lui a notifié des redressements en matière d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales au titre de l’année 2014. M. B… relève appel du jugement du 12 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales.

2. Aux termes de l’article 111 du code général des impôts : « Sont notamment considérés comme revenus distribués : (…) c. Les rémunérations et avantages occultes (…) ». Lorsqu’une société a pris en charge des dépenses incombant normalement à un associé sans que la comptabilisation de cette opération ne révèle, par elle-même, l’octroi d’un avantage, il appartient à l’administration, si elle entend faire application des dispositions précitées du c de l’article 111 du code général des impôts pour imposer cette somme entre les mains de l’associé, d’établir, d’une part, que la prise en charge de cette dépense ne comportait pas de contrepartie pour la société, et d’autre part, qu’il existait une intention, pour celle-ci, d’octroyer, et pour l’associé, de recevoir, une libéralité.

3. Les sociétés Lizeo et LOMG ont pris en charge les factures d’honoraires des avocats que M. B… avait mandatés pour l’accompagner dans les négociations lors du litige l’opposant à son ancien employeur (LOMG) et son coassocié et l’associé majoritaire dans cette structure, la société Lizeo. L’administration soutient que de tels frais constituent des dépenses qui incombent normalement à M. B…, qu’elles étaient dépourvues de contrepartie et n’ont pas été engagées dans l’intérêt direct des sociétés concernées.

4. Toutefois, il résulte de l’instruction que M. B…, alors qu’il travaillait au sein de la société LOMG, a participé, au développement du projet d’un comparateur de pneus indépendant, « pneu.rezulteo.fr » qui bénéficiait d’un soutien financier du groupe Michelin, lequel ne souhaitant pas apparaître au capital de la société, a conclu avec les associés de celle-ci un accord global de promesse de cession future des parts. Peu avant la date à laquelle le groupe a souhaité exercer son droit d’achat, M. B… a pris connaissance des estimations réelles de la valorisation de la société LOMG à long terme, dont le groupe Michelin avait connaissance longtemps avant la conclusion de la promesse de cession, et du fait que les estimations que l’acquéreur lui a présentées ont été expressément diminuées en sa défaveur. Dans ces conditions, il a refusé de céder ses parts au prix proposé. Suite à ce refus, M. B… a été assigné par le groupe Michelin en vente forcée et licencié par la société LOMG pour faute grave. C’est dans ce contexte que le groupe Michelin, souhaitant éviter un contentieux long et aléatoire et qui, de surplus, portait un risque, premièrement, d’une exposition médiatique dommageable pour son image et deuxièmement, de la révélation de ses liens capitalistiques étroits avec la société LOMG, ce qui risquait de remettre en cause l’indépendance, l’impartialité et la crédibilité de cette dernière allant jusqu’à compromettre sa survie, a invité M. B… à négocier les conditions de son départ du capital et de l’équipe de direction de la société LOMG. S’il est constant que la prise en charge des factures émises par le cabinet d’avocats HPML bénéficie aussi à M. B… et que les dépenses en cause ont été prises en charge par ses adversaires au litige, de telles circonstances ne peuvent, au regard de ce qui précède, et notamment du fait que cette prise en charge avait une contrepartie dans la résolution rapide et discrète des deux procédures judiciaires pendantes ainsi que l’abandon par M. B… de toute prétention future à l’encontre des sociétés MICHELIN et LOMG, permettre de regarder lesdites dépenses comme engagées au profit de l’ancien associé et salarié de ces structures. Il suit de là que l’administration fiscale n’établit pas l’existence, à raison de la prise en charge par ces dernières des dépenses en cause, d’un avantage occulte consenti au profit de M. B….

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de statuer sur l’autre moyen de la requête, M. B… est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l’instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1707273 du tribunal administratif de Lyon du 12 mars 2019 est annulé.

Article 2 : M. B… est déchargé des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l’année 2014.

Article 3 : L’Etat versera à M. B…, une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C… B… et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l’audience du 4 février 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme A…, présidente assesseure,
Mme E…, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.

2

N° 19LY01778

ap

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