Cour administrative d'appel de Marseille, 4 décembre 2012, n° 10MA04342

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 4 déc. 2012, n° 10MA04342
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 10MA04342
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 4 octobre 2010, N° 0800923

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE MARSEILLE

N° 10MA04342


ASSOCIATION POUR SALIN COMMUNE

___________

M. Férulla

Président rapporteur

___________

M. Salvage

Rapporteur public

___________

Audience du 15 novembre 2012

Lecture du 04 décembre 2012

___________

135-02-01-01-02-02

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d’appel de Marseille

(5e chambre)

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille le 3 décembre 2010, sous le n° 10MA04342, présentée pour l’association pour Salin commune, représentée par son président en exercice, dont le siège est 10 rue de Bois à Salin-de-Giraud (13129), par Me Boulisset ;

L’association pour Salin commune demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0800923 du 5 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 6 décembre 2007 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de création de la commune de Salin-de-Giraud par détachement de la commune d’Arles ;

2°) d’annuler la décision susmentionnée du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— le maire d’Arles, également de conseiller général, était nécessairement « intéressé à l’affaire » lors du vote de l’assemblée délibérante du conseil général des Bouches-du-Rhône sur le projet de création de la commune de Salin-de-Giraud et n’aurait pas dû, de ce fait, y prendre part ;

— l’argument selon lequel le projet de création de la nouvelle commune aurait pour conséquence d’amputer la commune d’Arles du tiers de son territoire et de toute sa façade littorale est empreint d’une erreur de fait, le commissaire enquêteur ayant au contraire indiqué que l’accès aux plages et à la Camargue ne serait pas pour autant bloqué ;

— contrairement à ce qu’a également retenu le tribunal administratif, la charte du parc naturel régional de Camargue adoptée en 2010 a pris acte de l’intention de principe du conseil général des Bouches-du-Rhône de construire un pont sur le Rhône ;

— avec ses deux mille habitants, le hameau de Salin-de-Giraud, qui se trouve situé à quarante kilomètres d’Arles et dispose des principaux services et commerces de proximité, deviendrait ainsi la 120ème commune des Bouches-du-Rhône, se classerait au 7e rang national parmi les communes les plus étendues territorialement et ferait partie des 15 % des communes les plus peuplées ;

— l’arrêté du 6 décembre 2007 repose sur des faits matériellement inexacts et est entaché d’erreur manifeste d’appréciation ;

Vu le courrier du 16 juillet 2012 adressé aux parties en application des dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et précisant la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2 ;

Vu l’avis d’audience adressé le 25 octobre 2012 portant clôture d’instruction en application des dispositions de l’article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 novembre 2012 :

— le rapport de M. Férulla, président rapporteur,

— les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

— les observations de M. X Y, président de l’association pour Salin commune,

— et les observations de Me Hequet substituant Me Guin, avocat pour la commune d’Arles ;

1. Considérant qu’en application des articles L. 2112-2 et suivants du code général des collectivités territoriales, plus d’un tiers des électeurs inscrits sur les listes électorales d’Arles et résidant dans le hameau de Salin-de-Giraud ont déposé une pétition auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône en vue de l’érection de cette portion de territoire en commune ; qu’à l’issue d’une enquête publique diligentée du 5 au 30 septembre 2005, le commissaire enquêteur a émis un avis favorable au projet ; que si la commission syndicale élue par les électeurs et propriétaires fonciers de Salin-de-Giraud a également émis un avis favorable le 16 novembre 2005, le conseil municipal d’Arles et le Conseil général des Bouches-du-Rhône ont quant à eux émis des avis défavorables respectivement les 22 avril et 20 octobre 2006 ; qu’au vu de ses éléments et à la suite de l’instruction réalisée par ses services, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de création de la commune de Salin-de-Giraud par un arrêté du 6 décembre 2007 ; que l’association pour Salin commune relève appel du jugement du 5 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation dudit arrêté préfectoral ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2112-6 du code général des collectivités territoriales : « Tout projet de modification des limites territoriales des communes est soumis à l’avis du conseil général : 1° Lorsque le projet tend à modifier les limites cantonales ; 2° A défaut d’accord des conseils municipaux et des commissions syndicales intéressés sur les changements proposés. » ;

3. Considérant qu’ainsi que l’a relevé à juste titre le tribunal administratif, aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obstacle, à peine de nullité, à ce que le maire de la commune d’Arles commune prenne part, en sa qualité de conseiller général, au vote de l’assemblée délibérante du conseil général à laquelle il appartient ; que dès lors, le moyen tiré de ce que le conseil général des Bouches-du-Rhône aurait été irrégulièrement consulté en raison de la participation du maire d’Arles au vote relatif au projet de création de la commune de Salin-de-Giraud, doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2112-2 du code général des collectivités territoriales : « Les modifications aux limites territoriales des communes et le transfert de leurs chefs-lieux sont décidés après enquête dans les communes intéressées sur le projet lui-même et sur ses conditions. Le représentant de l’Etat dans le département prescrit cette enquête lorsqu’il a été saisi d’une demande à cet effet soit par le conseil municipal de l’une des communes, soit par le tiers des électeurs inscrits de la commune ou de la portion de territoire en question. Il peut aussi l’ordonner d’office. L’enquête n’est pas obligatoire s’il s’agit d’une fusion de communes. Si la demande concerne le détachement d’une section de commune ou d’une portion du territoire d’une commune pour l’ériger en commune séparée, elle doit, pour être recevable, être confirmée à l’expiration d’un délai d’une année. » ; que les dispositions de l’article L. 2112-5 du même code précisent : « Sous réserve des dispositions des articles L. 3112-1 et L. 3112-2 concernant les limites des départements, les décisions relatives à la modification des limites territoriales des communes et à la fixation ou au transfert de chefs-lieux résultant ou non de cette modification sont prononcées par arrêté du représentant de l’Etat dans le département. » ;

5. Considérant que pour rejeter la demande de création de la commune de Salin-de-Giraud par détachement de la commune d’Arles, le préfet des Bouches-du-Rhône s’est fondé sur les motifs tirés de ce qu’il n’existait pas de consensus en faveur de cette création, que la viabilité financière de la future commune n’était pas établie, que le détachement du hameau constituerait un préjudice exorbitant pour Arles, une atteinte à l’identité de la capitale de la Camargue et une démarche préjudiciable à la cohérence de la politique de préservation et de développement coordonné des espaces naturels conduite par le Parc naturel régional de Camargue et enfin, que la création de cette commune ne constituait pas l’unique moyen de satisfaire les attentes exprimées par la population de l’actuel hameau et de poursuivre son développement ;

6. Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que si la commission syndicale élue par les électeurs et propriétaires fonciers de Salin-de-Giraud et le commissaire enquêteur, ont émis un avis favorable au projet, le conseil municipal de la commune d’Arles et le conseil général des Bouches-du-Rhône ont, quant à eux, émis des avis défavorables, de même que les services déconcentrés de l’Etat consultés sur le sujet ; qu’enfin, les différents élus également interrogés sur la question ont adopté des prises de positions variées et nuancées ; que c’est ainsi à juste titre que le préfet a pu considérer, dans son arrêté du 6 décembre 2007, qu’il n’existait pas de consensus en faveur de l’érection en commune du hameau de Salin-de-Giraud ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que s’agissant de la viabilité financière, l’ensemble des institutions ou personnes consultées, y compris le commissaire enquêteur, ont, à bon droit, mis l’accent sur les grandes incertitudes affectant le projet sur ce point, tant au niveau des recettes pouvant être escomptées que de l’importance des charges que devrait assumer la nouvelle commune, tant en matière d’investissement que de fonctionnement ; qu’en particulier la capacité financière de la future commune à conduire de nouveaux programmes d’investissement n’est pas établie, ni l’appartenance à telle intercommunalité plutôt que telle autre, circonstance qui accroît les incertitudes financière précitées, de même que la nécessaire reprise de la lourde dette d’Arles qui concernait la nouvelle commune ; que dans ces conditions, l’association requérante n’est pas fondée à soutenir qu’en estimant que la viabilité financière de la future commune de Salin-de-Giraud n’était pas établie, le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis des erreurs de fait ou une erreur manifeste d’appréciation ;

8. Considérant, en troisième lieu, s’agissant des conséquences pour la commune d’Arles, que le préfet des Bouches-du-Rhône a également relevé que celle-ci se verrait amputer du tiers de son territoire et de toute sa façade littorale ; que si, eu égard à la situation d’Arles à l’intérieur des terres et à l’étendue de son territoire, ces circonstances, qui ne sont pas entachées d’erreur de fait, ne sont pas à elles seules de nature à faire obstacle au projet de scission en cause, néanmoins elles portent, ainsi que le relève l’acte attaqué, atteinte à l’identité de la capitale de la Camargue, constituée d’une ville centre et de hameaux ruraux disséminés dans une zone exceptionnelle ;

9. Considérant, en quatrième lieu, s’agissant du motif tiré de ce que le projet constituait une démarche préjudiciable à la cohérence de la politique de préservation et de développement coordonné des espaces naturels conduite par le Parc naturel régional de Camargue (PNRC), ainsi que l’ont relevé à bon droit les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que des incertitudes existent quant à l’adhésion de la future commune de Salin de Giraud au PNRC précité dont la Charte ne prévoit pas la création d’un pont sur le Rhône tel que le revendique l’association requérante ; que la direction départementale de l’équipement a également relevé que l’hypothèse d’un pont supplémentaire sur le Rhône ne pourrait qu’avoir des effets négatifs sur l’écosystème camarguais ; que les mêmes services de l’Etat ont également noté que la présence d’un propriétaire foncier détenant, à lui seul, les trois quart du territoire de la commune, rendrait difficile pour celle-ci les arbitrages dans l’utilisation raisonnée de l’espace et la protection de l’environnement ;

10. Considérant, enfin, que s’agissant du motif tiré de ce que la création de la commune de Salin-de-Giraud ne constituait pas l’unique moyen de satisfaire les attentes exprimées par la population de l’actuel hameau et de poursuivre son développement, ainsi que l’ont relevé à bon droit les premiers juges, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l’avis émis par le commissaire enquêteur, que la sous-administration évoquée par les habitants du hameau est très relative et constitue plus une impression qu’une réalité et que les griefs faits à la commune d’Arles doivent être relativisés, nombre d’entre eux étant identiques à ceux exprimés dans d’autres communes ;

11. Considérant qu’eu égard à ce qui vient d’être dit, et contrairement à ce que persiste à soutenir l’association pour Salin commune, les motifs qui sous-tendent l’arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 6 décembre 2007 ne reposent pas sur des faits matériellement inexacts et ne sont pas entachés d’erreur manifeste d’appréciation ;

12. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’association pour Salin commune n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ; que ces dispositions font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l’association pour Salin commune demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l’association pour Salin commune est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l’association pour Salin commune, à la commune d’Arles et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l’audience du 15 novembre 2012 où siégeaient :

— M. Férulla, président de chambre,

— Mme Ciréfice, premier conseiller,

— Mme Marzoug, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 décembre 2012.

L’assesseur le plus ancien dans l’ordre du tableau, Le président rapporteur,

V. CIREFICE G. FERULLA

Le greffier,

P. RANVIER

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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