Cour Administrative d'Appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 13 mars 2012, 10MA00648, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 7e ch. - formation à 3, 13 mars 2012, n° 10MA00648
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 10MA00648
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Montpellier, 10 décembre 2009, N° 0705220
Identifiant Légifrance : CETATEXT000025628145

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 16 février 2010 au greffe de la Cour administrative d’appel de Marseille, sous le n° 10MA00648, , présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE », représentée par ses représentants légaux en exercice, dont le siège social est sis Avenue du Clapas, Lot l’Adret à Murviels Les Montpellier (34570), par Me Margaria, avocate ;

La SOCIETE « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0705220 du 11 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 22 octobre 2007 par laquelle le préfet de la Région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault, a mis à sa charge une somme de 38 366 euros correspondant aux dépenses ne pouvant être rattachées à l’exécution d’une action de formation professionnelle continue ;

2°) d’annuler ladite décision ;

3°) subsidiairement, lui donner acte de ce qu’elle se réserve le droit d’engager une action en responsabilité à l’encontre de l’Etat en réparation des préjudices résultant de la décision en cause ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, en ce qui concerne la légalité externe de la décision contestée, que cette dernière est intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière ; qu’en effet, alors que, par une décision du 16 avril 2004, prise au vu des programmes de formation qu’elle dispensait en 2003 et des contrats de formation professionnelle conclus, la Direction Régionale du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle du Languedoc-Roussillon lui a indiqué que son dossier était conforme à la nouvelle réglementation en matière de formation professionnelle continue et qu’il était procédé à l’annulation de la radiation prononcée à son encontre le 10 février 2004 et à l’attribution d’un numéro de formateur, le préfet a considéré, par la décision contestée du 22 octobre 2007, que son activité ne pouvait être analysée comme une action de formation professionnelle continue sans pour cela disposer d’aucun élément nouveau sur le contenu des actions de formation qu’elle dispensait, le contrôle opéré par l’administration en 2006 s’étant borné à un examen de ses documents comptables ; qu’ainsi il y a une totale contradiction entre la décision prise le 16 avril 2004 et la décision du 22 octobre 2007 ;

Elle soutient, en second lieu, en ce qui concerne la légalité interne de la décision en litige, que le préfet n’était pas fondé à lui réclamer le reversement d’une somme égale aux dépenses de formation ayant été contrôlées par l’administration dès lors qu’elle était régulièrement déclarée, qu’elle a subi divers contrôles administratifs et financiers de l’administration, qu’elle lui a fourni l’ensemble des documents réclamés et a satisfait à l’ensemble des formalités requises et, qu’enfin, ses actions de formation relatives à « la relation d’aide par le toucher », qui visaient à permettre aux participants d’acquérir une connaissance et une maîtrise de soi pour surmonter et gérer des difficultés notamment professionnelles ou de stress, entraient dans le cadre des actions de formation professionnelle visées par l’article L. 900-2 du code du travail ; qu’en jugeant l’inverse, le Tribunal administratif a commis une erreur de fait et de droit ; qu’en outre, la décision contestée est intervenue en méconnaissance du principe général de sécurité juridique ; que la non rétroactivité de la loi constitue un élément fondamental de la sécurité juridique ; que le principe de non rétroactivité a valeur constitutionnelle en matière répressive, comme c’est le cas en l’espèce s’agissant d’une sanction financière ; que, dans le cas présent, la décision du préfet, lui ordonnant le reversement de dépenses effectuées au titre des exercices 2003 et 2004, est contraire au principe de non rétroactivité et peut s’analyser en un retrait illégal de droits acquis ; qu’elle était en droit d’exercer une activité de formation au regard de la décision précitée du 16 avril 2004 et la décision contestée du 22 octobre 2007 remet en cause la décision du 16 avril 2004 ; que ce revirement brutal après plusieurs années a créé une insécurité juridique qui lui a été préjudiciable ; que la décision en litige est entachée d’un détournement de pouvoir et de procédure ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2010 au greffe de la Cour, présenté, au nom de l’Etat, par le ministre du travail, de l’emploi et de la santé qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir, en premier lieu, en ce qui concerne le moyen tiré du vice de procédure qui résulterait de la prétendue contradiction de la décision contestée avec une décision antérieure de l’administration, que ce moyen qui n’a pas trait à la forme de la décision en litige mais à son contenu est un moyen de légalité interne ; que, contrairement à ce que soutient la société appelante, le courrier en date du 16 avril 2004 par lequel la Direction Régionale du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle du Languedoc-Roussillon, intervenu conformément aux dispositions de l’article 5 du décret n° 2002-1176 du 17 septembre 2002 pris pour l’application de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 définissant les nouvelles modalités d’enregistrement des dispensateurs de formation, ne visait qu’à établir la conformité du dossier de cette société, enregistrée en qualité d’organisme de formation depuis 1996, à cette nouvelle législation et ne préjugeait pas d’un contrôle futur de l’administration sur l’activité de ladite société ; qu’en outre, les éléments sollicités par l’administration dans le cadre de cette procédure ne peuvent être assimilés à ceux collectés par les inspecteurs du travail dans le cadre du contrôle sur place diligenté en janvier 2006 en application de l’article L. 991-1 du code du travail ; qu’en l’espèce, compte tenu du caractère nouveau et complexe du domaine concerné, la somatothérapie, ainsi que du caractère abscons de la terminologie utilisée dans les plaquettes publicitaires et les programmes de la société requérante, l’administration ne pouvait appréhender la réalité de l’activité de cette société que par le biais du contrôle prévu par l’article L. 991-1 du code du travail, lequel s’effectue au vu de documents administratifs et comptables ; qu’à l’occasion du contrôle effectué en 2006, des explications sur le contenu des stages et des précisions apportées, qui n’étaient pas connues de l’administration en 2004, ont été déterminantes pour appréhender les conditions de fonctionnement de l’organisme et les modalités de déroulement des sessions, éléments nouveaux qui ne ressortaient pas des plaquettes publicitaires, programmes et contrats de formation établis par ladite société, et pour apprécier la réalité de la nature de l’activité de la société en cause qui ne relevait pas de la formation professionnelle continue ; qu’ainsi le moyen invoqué n’est pas fondé ;

Il fait valoir, en second lieu, en ce qui concerne les moyens de légalité interne, que les demandes de pièces effectuées par l’administration en 2004 ne sont pas assimilables au contrôle administratif et financier, effectué en 2006 par l’administration, sur le fondement des dispositions de l’article L. 991-1 du code du travail ; que le courrier du 16 avril 2004 se bornait à attribuer à la société requérante un numéro de déclaration d’activité sans faire aucune allusion à ses dépenses ; que, contrairement à ce que soutient ladite société, sa prestation de relation d’aide par le toucher n’entre pas dans le cadre des actions visées au 2°) de l’article L. 900-2 du code du travail ; qu’en effet, il résulte des dispositions des articles L. 900-1, L. 900-2 et L. 920-1 du code du travail que les actions de formation doivent avoir un lien avec un poste ou une situation de travail identifiés et que la recherche de l’épanouissement personnel, de l’acquisition d’une connaissance et d’une maîtrise de soi s’inscrit dans une démarche de développement personnel dépourvue de caractère professionnalisant et qu’ainsi la prestation proposée par la société requérante n’entre pas dans le champ de l’article L. 900-2 du code du travail ; qu’en conséquence, le Tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit ; que, par ailleurs, le droit de reprise de l’administration, prévue par les articles L. 991-1 et suivants du code du travail, est par nature rétroactif ; que l’octroi d’un numéro de déclaration d’activité étant conditionné par la réalisation de prestations dans le champ de la formation professionnelle continue et une telle condition n’étant pas remplie en l’espèce, le moyen tiré de ce que la décision attaquée opèrerait le retrait illégal de droits acquis n’est pas fondé ; que le moyen tiré du principe de sécurité juridique ne peut être utilement invoqué dès lors que la décision en litige a été prise à la suite d’un contrôle et de sanctions prévus expressément par la loi ; que l’activité de la société requérante au titre de la formation professionnelle continue ne représentant que 7 à 10 % de son chiffre d’affaires et la décision en litige n’ayant pas d’incidence sur le reste de l’activité de la société requérante, la société requérante n’est pas fondée à soutenir que la décision en cause aurait été prise dans le but de mettre un terme à son activité ; qu’ainsi le moyen tiré du détournement de pouvoir et de procédure n’est pas fondé ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 3 février 2012 au greffe de la Cour, présenté pour la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » qui conclut aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, qu’il lui a été réclamé le reversement d’une somme de 15 512 euros pour l’exercice 2003 et une somme de 22 854 euros pour l’année 2004, correspondant selon les services de contrôles de l’administration, respectivement à 7,5 % et 10 % des charges totales ; qu’il résulte des dispositions du code du travail que l’organisme de formation doit reverser une somme égale au montant des dépenses n’entrant pas dans le cadre des actions de formation professionnelle et non pas de toutes les dépenses contrôlées ; qu’ainsi, c’est à tort que l’administration lui a réclamé le reversement de l’intégralité des dépenses contrôlées correspondant à la quote-part d’activité de formation continue ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 ;

Vu le décret n° 2002-1176 du 17 septembre 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 7 février 2012 :


- le rapport de Mme Buccafurri, président assesseur,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant que la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE », dont l’activité consiste dans l’enseignement de la somatothérapie ou «  relation d’aide par le toucher », a été enregistrée en qualité d’organisme de formation auprès du préfet de la région Languedoc-Roussillon, le 7 février 1996 ; que, dans le cadre des dispositions issues de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 modifiant les modalités d’enregistrement des dispensateurs de formation et instituant un régime de déclaration d’activité se substituant à la déclaration d’existence antérieurement en vigueur, et conformément aux dispositions de l’article 5 du décret n° 2002-1176 du 17 septembre 2002, pris pour l’application de ces dispositions législatives, les services de la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle de Languedoc-Roussillon ont adressé à ladite société, le 12 janvier 2004, un courrier lui réclamant des documents sur son activité de formateur et ont prononcé, par une décision du 10 février 2004, la radiation du numéro de déclaration d’existence qu’elle détenait ; que, sur recours gracieux formé par la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE », les services de la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle de Languedoc-Roussillon ont, par un courrier du 16 avril 2004 procédé à l’annulation de la radiation prononcée le 10 février 2004 et lui ont délivré un récépissé de déclaration d’activité de prestataire de formation conformément au nouveau régime applicable ; que, le 27 janvier 2006, la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » a été informée que son activité de dispensateur de formation professionnelle continue, exercée au titre des années 2003 et 2004, ferait l’objet d’un contrôle sur place en application des dispositions des articles L. 991-1 et suivants du code du travail alors en vigueur ; qu’au vu du rapport du contrôle ainsi effectué, le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault a, par une décision du 25 juin 2007, décidé, après avoir estimé que l’activité poursuivie par la société en cause en 2003 et 2004 ne pouvait être analysée comme une activité de formation professionnelle continue, que les dépenses, d’un montant de 15 512 euros pour 2003 et d’un montant de 22 854 euros pour 2004, soit un total de 38 366 euros, n’étaient pas rattachables à une activité de formation au sens de l’article L. 920-10 du code du travail désormais reprises à l’article L. 991-5 du même code et a, en conséquence, ordonné le reversement au Trésor Public de ces sommes ; que la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » a formé devant le préfet, le 24 août 2007, par un courrier reçu le 28 août suivant, le recours préalable obligatoire prévu par l’article R. 991-8 du code du travail ; que, par une décision en date du 22 octobre 2007, le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault a confirmé sa décision du 25 juin 2007 ; que la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » relève appel du jugement n° 0705220 du 11 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 22 octobre 2007 précitée ;


Sur la légalité de la décision du 22 octobre 2007 :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 920-4 du code du travail alors en vigueur : « 1. Toute personne physique ou morale qui réalise des prestations de formation professionnelle continue au sens de l’article L. 900-2 doit déposer, auprès de l’autorité administrative de l’Etat chargée de la formation professionnelle, une déclaration d’activité, dès la conclusion de la première convention de formation professionnelle ou du premier contrat de formation professionnelle, conclus respectivement en application des articles L. 920-1 et L. 920-13. / 2. Nul ne peut, même de fait, exercer une fonction de direction ou d’administration dans un organisme de formation au sens du présent livre s’il a fait l’objet d’une condamnation pénale à raison de faits constituant des manquements à la probité, aux bonnes moeurs et à l’honneur. / 3. La déclaration d’activité comprend les informations administratives d’identification de la personne physique ou morale, ainsi que les éléments descriptifs de son activité. L’autorité administrative de l’Etat chargée de la formation professionnelle procède à l’enregistrement des déclarations au vu des pièces produites. Après une mise en demeure dont le délai est défini par décret, l’enregistrement est annulé par décision de la même autorité administrative lorsqu’il apparaît que les prestations réalisées ne correspondent pas aux actions visées à l’article L. 900-2 ou lorsque les règles définies aux articles L. 920-1 et L. 920-13 ne sont pas respectées. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 900-2 de ce code : " Les types d’actions de formation qui entrent dans le champ d’application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue, sont les suivants : 1° Les actions de préformation et de préparation à la vie professionnelle. Elles ont pour objet de permettre à toute personne, sans qualification professionnelle et sans contrat de travail, d’atteindre le niveau nécessaire pour suivre un stage de formation professionnelle proprement dit ou pour entrer directement dans la vie professionnelle ; 2° Les actions d’adaptation et de développement des compétences des salariés. Elles ont pour objet de favoriser l’adaptation des salariés à leur poste de travail, à l’évolution des emplois, ainsi que leur maintien dans l’emploi, et de participer au développement des compétences des salariés ; 3° Les actions de promotion. Elles ont pour objet de permettre à des travailleurs d’acquérir une qualification plus élevée ; 4° Les actions de prévention. Elles ont pour objet de réduire les risques d’inadaptation de qualification à l’évolution des techniques et des structures des entreprises, en préparant les travailleurs dont l’emploi est menacé à une mutation d’activité, soit dans le cadre, soit en dehors de leur entreprise ; 5° Les actions de conversion. Elles ont pour objet de permettre à des travailleurs salariés dont le contrat de travail est rompu d’accéder à des emplois exigeant une qualification différente ou à des travailleurs non salariés d’accéder à de nouvelles activités professionnelles ; 6° Les actions d’acquisition, d’entretien ou de perfectionnement des connaissances. Elles ont pour objet d’offrir aux travailleurs les moyens d’accéder à la culture, de maintenir ou de parfaire leur qualification et leur niveau culturel ainsi que d’assumer des responsabilités accrues dans la vie associative ; 7° Les actions de formation continue relative à la radioprotection des personnes prévues à l’article L. 1333-11 du code de la santé publique ; 8° Les actions de formation relatives à l’économie de l’entreprise. Elles ont notamment pour objet la compréhension par les salariés du fonctionnement et des enjeux de l’entreprise ; 9° Les actions de formation relatives à l’intéressement, à la participation et aux dispositifs d’épargne salariale et d’actionnariat salarié. / Entrent également dans le champ d’application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue, les actions permettant de réaliser un bilan de compétences. Elles ont pour objet de permettre à des travailleurs d’analyser leurs compétences professionnelles et personnelles ainsi que leurs aptitudes et leurs motivations afin de définir un projet professionnel et, le cas échéant, un projet de formation. / Il en est de même des actions permettant aux travailleurs de faire valider les acquis de leur expérience en vue de l’acquisition d’un diplôme, d’un titre à finalité professionnelle ou d’un certificat de qualification figurant sur une liste établie par la commission paritaire nationale de l’emploi d’une branche professionnelle, enregistrés dans le répertoire national des certifications professionnelles visé à l’article L. 335-6 du code de l’éducation. » ; qu’aux termes de l’article L. 991-1 de ce code dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée: " L’Etat exerce un contrôle administratif et financier sur : 1° Les dépenses de formation exposées par les employeurs au titre de leur obligation de participation au développement de la formation professionnelle continue instituée par l’article L. 950-1 et les actions prévues aux articles L. 900-2 et L. 900-3 qu’ils conduisent, financées par l’Etat, les collectivités locales ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue ; 2° Les activités conduites en matière de formation professionnelle continue par les organismes paritaires agréés, par les organismes habilités à percevoir la contribution de financement visée aux articles L. 953-1, L. 953-2, L. 953-3 et L. 953-4, par les organismes de formation et leurs sous-traitants, par les organismes chargés de réaliser les bilans de compétences et par les organismes qui interviennent dans le déroulement des actions destinées à la validation des acquis de l’expérience ; 3° Les activités d’accueil, d’information, d’orientation et d’évaluation, en matière de formation professionnelle continue, au financement desquelles l’Etat concourt par voie de convention. / Le contrôle administratif et financier porte sur l’ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l’exclusion des qualités pédagogiques, mis en oeuvre pour la formation professionnelle continue. » ; qu’aux termes de l’article L. 991-5 dudit code : " I. – Les organismes mentionnés aux 2° et 3° de l’article L. 991-1 sont tenus, à l’égard des agents mentionnés à l’article L. 991-3 : 1° De présenter les documents et pièces établissant l’origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l’exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l’utilisation des fonds aux dispositions législatives et réglementaires régissant ces activités. / A défaut de remplir les conditions prévues aux 1° et 2° ci-dessus, les organismes font, pour les dépenses considérées, l’objet de la décision de rejet prévue à l’article L. 991-8. / Les organismes prestataires d’actions entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l’article L. 900-2 sont tenus, de même, de présenter tous documents et pièces établissant la réalité desdites actions. A défaut, celles-ci sont réputées inexécutées au sens de l’article L. 991-6. / II. – Les organismes prestataires d’actions entrant dans le champ de la formation professionnelle défini à l’article L. 900-2 doivent, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, verser au Trésor public une somme égale au montant des dépenses ayant fait l’objet d’une décision de rejet en application du I.(…) » ; qu’aux termes de l’article L. 991-8 du code du travail en vigueur à la date de la décision contestée : « Les contrôles prévus au présent chapitre peuvent être opérés soit sur place, soit sur pièces. / Les résultats du contrôle sont notifiés à l’intéressé dans un délai ne pouvant dépasser trois mois à compter de la fin de la période d’instruction avec l’indication des procédures dont il dispose pour faire valoir ses observations. Cette notification interrompt la prescription courant à l’encontre du Trésor public, au regard des versements dus et des pénalités fiscales correspondantes. / Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnés au présent chapitre prises par l’autorité de l’Etat chargée de la formation professionnelle ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si la procédure contradictoire mentionnée au deuxième alinéa a été respectée. Ces décisions sont motivées et notifiées aux intéressés. / S’il y a lieu, transmission en est également faite à l’administration fiscale. Le recouvrement des versements exigibles au titre des contrôles effectués en application des articles L. 991-1 et L. 991-2 est établi et poursuivi selon les modalités ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires. / Lorsque les contrôles ont révélé l’inexécution d’actions financées par l’Etat, les collectivités locales ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue, l’autorité administrative chargée de la formation professionnelle les en informe, chacun pour ce qui le concerne, à l’issue de la procédure contradictoire prévue au deuxième alinéa. » ;

Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la décision susvisée du 16 avril 2004 des services de la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle de Languedoc-Roussillon a été prise dans le but d’assurer la mise en oeuvre des nouvelles dispositions applicables en matière de formation professionnelle continue, telles que définies par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 à l’égard des organismes de formation ayant souscrit antérieurement une déclaration d’existence ; que cette décision a un objet distinct de la décision prise par le préfet après le contrôle sur place, nécessairement plus approfondi, effectué par les inspecteurs du travail en application des dispositions de l’article L. 991-1 du code du travail alors en vigueur et qui doit porter, selon les dispositions dudit article, sur l’ensemble des moyens financiers techniques et pédagogiques de l’organisme et sur la nature des formations dispensées ; qu’il résulte, en outre, de la combinaison des dispositions des L. 920-4 et L. 991-1 et suivants du code du travail que la déclaration d’activité en qualité d’organisme de formation n’exclut pas un contrôle ultérieur de l’administration sur l’activité du dispensateur de formation ; que, par suite, ainsi que l’ont à juste titre estimé les premiers juges, alors même que, par la décision du 16 avril 2004, les services de la direction du travail se sont prononcés au vu des programmes détaillés des formations dispensées en 2003 par la société requérante ainsi que de la dernière convention de formation professionnelle continue signée, le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault, a pu légalement estimer, par la décision contestée du 22 octobre 2007, après le contrôle administratif et financier effectué sur place et à la suite d’un contrôle plus approfondi sur la nature des formations dispensées, que ces dernières n’entraient pas dans le cadre des actions de formation professionnelle continue telles que définies par l’article L. 900-2 du code du travail alors applicable ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière ne peut qu’être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la circonstance que les services de la direction du travail aient procédé, par la décision précitée du 16 avril 2004, à la délivrance d’un récépissé de déclaration d’activité en qualité d’organisme de formation de la société requérante ne faisait pas obstacle à ce que le préfet exerce un contrôle ultérieur sur la nature des actions menées par ladite société ; qu’il ressort des pièces du dossier, et notamment des conclusions du contrôle opéré par les inspectrices du travail en mars et avril 2006, que la société requérante a pour activité la formation de praticiens à la relation d’aide psycho-corporelle par le toucher de somato-psychothérapeute s’échelonnant sur trois niveaux, chacun de ces niveaux ayant une durée de 200 heures, soit sous la forme de sept week-ends plus une semaine d’été, soit en cycles résidentiels plus une semaine d’été, ces trois niveaux étant suivis d’un cycle optionnel de 200 à 500 heures ; que le contenu de la formation repose sur la méthode de l’ECOLE DU CORPS CONSCIENCE privilégiant «  le toucher comme outil révélateur, thérapeutique et considère le corps dans toutes ses dimensions physiques et subtiles… » ; que l’enseignement du premier niveau s’effectue par plusieurs techniques telles que le massage californien, le shiatsu, la réflexologie plantaire, la relaxation coréenne, les techniques du magnétisme ; que l’enseignement du second niveau assimile les apports de la médecine orientale et des techniques de psychothérapie et l’enseignement du niveau 3 est un temps d’approfondissement pour ceux souhaitant pratiquer professionnellement ; que le cycle optionnel est une « recherche d’axe en soi et de présence juste dans la relation à l’autre » ; que les stagiaires ayant suivi les trois niveaux ainsi que le cycle optionnel peuvent obtenir un certificat de psycho-somatothérapeute, qui ne figure pas au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) visé à l’article L. 900-3 du code du travail alors en vigueur ni n’est reconnu dans les classifications d’une convention collective nationale de branche ; qu’enfin, il n’est pas demandé aux stagiaires de formation préalable pour suivre ces actions, ni de préciser leurs objectifs, personnels ou professionnels, au début de la formation ; qu’eu égard à l’ensemble des caractéristiques de ces actions et de leurs objectifs, le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault, n’a pas entaché sa décision d’un erreur d’appréciation en estimant que les dépenses afférentes à ces actions ne relevaient pas d’une action de formation professionnelle continue ; qu’à cet égard, la circonstance, invoquée par la société requérante, que ces actions permettraient aux bénéficiaires de mieux gérer leur stress professionnel ne suffit pas à faire regarder de telles actions comme relevant des « actions d’adaptation et de développement des compétences des salariés » au sens du 2° de l’article L. 900-2 du code du travail ou comme des « actions d’acquisition, d’entretien ou de perfectionnement des connaissances » au sens du 6° du même article ; que, par suite, ainsi que l’a à juste titre estimé le Tribunal administratif qui n’a, ce faisant, commis ni erreur de fait ni erreur de droit, le préfet a pu légalement ordonner le reversement des dépenses afférentes à ces actions en application des dispositions précitées de l’article L. 991-5 du code du travail alors en vigueur ;

Considérant, en troisième lieu, que, comme il a été rappelé ci-dessus, la circonstance que les services de la direction du travail aient procédé, par la décision précitée du 16 avril 2004, à l’enregistrement de la déclaration d’activité en qualité d’organisme de formation de la société requérante ne faisait pas obstacle à l’exercice ultérieur par le préfet du contrôle administratif et financier prévu par la loi sur les prestations réalisées afin de vérifier qu’elles entraient dans le champ d’application des actions pouvant être retenues au titre de la formation professionnelle continue ; que la décision du 16 avril 2004, qui se bornait à procéder à l’enregistrement de la déclaration d’activité de la société requérante, dans le cadre du nouveau régime juridique applicable, sans exclure un contrôle ultérieur de l’administration du travail sur la nature des prestations réalisées, ne conférait à la société requérante aucun droit acquis à voir les prestations réalisées par cette dernière prises en compte au titre de la formation professionnelle continue ; que, par suite, la décision contestée du 22 octobre 2007 n’a ni pour objet ni pour effet d’opérer un retrait illégal de droits acquis et n’est pas entachée d’une rétroactivité illégale dès lors qu’elle ne remet pas en cause une situation juridique définitivement constituée ; que, pour les mêmes motifs, en ordonnant le reversement de sommes indûment perçues au titre de la formation professionnelle, le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault, n’a pas méconnu le principe de sécurité juridique ;

Considérant, en quatrième lieu, que la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » soutient que l’administration ne pouvait lui ordonner le reversement de l’intégralité des dépenses contrôlées correspondant à la quote-part d’activité de formation continue ; qu’il ressort, toutefois, des pièces du dossier, et notamment du rapport de contrôle, d’une part, que ladite société, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 920-8 alinéa 2 du code du travail alors en vigueur, ne tenait pas de comptabilité distincte pour son activité de formation professionnelle continue, d’autre part, que pour arrêter les sommes en litige à 7,5 % du chiffre d’affaires total de la société pour l’année 2003 et à 10 % du chiffre d’affaires total pour l’année 2004, les inspectrices du travail ont pris en compte une clé de répartition, entre les dépenses de formation dispensées dans un but personnel et celles liées à la formation professionnelle continue, déterminée par la société requérante elle-même, et qu’enfin, comme il a été dit ci-dessus, les dépenses en cause n’avaient pas été exposées pour l’exercice d’actions de formation professionnelle continue ;

Considérant, enfin, que si les conclusions du rapport de contrôle dressé par les inspectrices du travail en mars et avril 2006 font état des risques de «  dérive mentale » présentés par l’activité de la société requérante, l’existence de tels risques n’est pas reprise dans la décision préfectorale contestée, laquelle n’est pas fondée sur une telle circonstance ; que la décision en litige ordonnant le reversement des sommes indûment perçues au titre de la formation professionnelle continue n’a pas pour conséquence nécessaire de mettre un terme à l’activité de la société requérante ; que, dès lors, le détournement de procédure et de pouvoir allégué n’est pas établi ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué du 11 décembre 2009, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 22 octobre 2007 par laquelle le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault, a mis à sa charge une somme de 38 366 euros correspondant aux dépenses ne pouvant être rattachées à l’exécution d’une action de formation professionnelle continue ;

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire par la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » :

Considérant qu’il n’appartient pas au juge administratif de donner acte à une partie de ses réserves quant à la formation ultérieure d’une action indemnitaire à l’encontre d’une personne publique ; que, par suite, les conclusions subsidiaires de la société requérante, tendant à ce que la Cour lui donne acte de ses réserves quant à l’engagement d’un recours indemnitaire à l’encontre de l’Etat, ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » et non compris dans les dépens ;

C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL « ECOLE DU CORPS CONSCIENCE » et au ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

Copie en sera adressée au préfet de la région Languedoc-Roussillon.

Délibéré après l’audience du 7 février 2012, où siégeaient :

— M. Moussaron, président de chambre,

 – Mme Buccafurri, président assesseur,

 – Mlle Josset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2012.

Le rapporteur,

I. BUCCAFURRILe président,

R. MOUSSARON

Le greffier,

J-P. LEFEVRE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l’emploi et de la santé, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 10MA00648 2

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Cour Administrative d'Appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 13 mars 2012, 10MA00648, Inédit au recueil Lebon