Cour administrative d'appel de Marseille, 12 février 2015, n° 14MA03889

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 12 févr. 2015, n° 14MA03889
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 14MA03889
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 16 juin 2014, N° 1205866

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE MARSEILLE

N° 14MA03889

__________

Mme C X

__________

M. Pourny

Rapporteur

__________

M. Maury

Rapporteur public

__________

Audience du 22 janvier 2015

Lecture du 12 février 2015

__________

17-03

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d’appel de Marseille

(3e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2014, présentée pour Mme C X, demeurant XXX à XXX, par la société civile professionnelle d’avocats Y – Y et associés, agissant par Me Marc Y ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d’annuler l’article 1er du jugement n° 1205866 du 17 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître sa demande tendant à la décharge de l’obligation de payer révélée par un commandement de payer valant saisie au tiers détenteur du 29 mars 2012 à hauteur d’un montant de 2 963 211,52 euros ;

2°) de prononcer la décharge de l’obligation de payer révélée par ce commandement de payer valant saisie au tiers détenteur ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— le tribunal administratif a méconnu les dispositions de l’article R. 711-3 du code de justice administrative en ne lui communiquant pas le sens des conclusions du rapporteur public, la simple mention de la solution proposée sur l’application informatique dénommée Sagace, à la supposer établie, ne suffisant pas au respect du caractère contradictoire de la procédure ;

— les conclusions du rapporteur public ne répondant pas à l’obligation qui pèse sur lui, le jugement encourt l’annulation;

— le jugement attaqué est irrégulier en tant qu’il ne comporte pas l’analyse des moyens contenus dans le mémoire enregistré le 30 mai 2014 ;

— le jugement attaqué est irrégulier en tant qu’il ne s’est pas prononcé sur la question de l’exigibilité de la somme réclamée par le commandement de payer du 29 mars 2012 ;

— le jugement attaqué est insuffisamment motivé en tant qu’il n’expose pas les motifs pour lesquels elle ne serait pas recevable à solliciter du juge de l’impôt la décharge de l’obligation de payer litigieuse ;

— aucun titre exécutoire émis à l’encontre du débiteur ne peut lui être opposé et elle ne peut être tenu du chef des inscriptions légales ou du chef de l’inscription d’hypothèque légale prise courant janvier 1999 après la donation consentie en décembre 1998 ;

— elle n’a été destinataire d’aucun titre exécutoire établi avant ou après le décès de sa mère et a reçu sa part indivise du bien immobilier nécessairement libre de toute inscription ;

— ayant cause à titre universel à la suite du décès de sa mère, elle ne peut avoir la qualité de tiers détenteur ;

— elle n’est pas redevable des sommes revendiquées ;

— l’action en recouvrement était prescrite ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics, qui conclut au rejet de la requête, à la mise à la charge de Mme X d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et sa condamnation aux dépens ;

Il soutient que :

— le comptable public, responsable de la trésorerie de Vitrolles est créancier d’une somme de 2 963 211 euros sur la succession vacante des époux B correspondant à des cotisations d’impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 1993 à 1995 et à des cotisations de taxe d’habitation et de taxes foncières au titre des années 2009 à 2011 ;

— une procédure de saisine immobilière a été engagée sur un immeuble grevé d’une hypothèque légale depuis 1993, régulièrement renouvelée ;

— la contestation visant le commandement de payer valant saisie immobilière, dans le cadre du droit de suite en application de l’article 2463 du code civil, ne relève pas de la compétence du tribunal administratif ;

— la procédure relative à l’exercice du droit de suite a été respectée ;

Vu l’ordonnance du 4 décembre 2014 fixant la clôture d’instruction au 30 décembre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 22 janvier 2015 :

— le rapport de M. Pourny, président,

— et les conclusions de M. Maury, rapporteur public ;

1. Considérant que le comptable public, responsable de la trésorerie de Vitrolles, a fait procéder dès 1993 à des inscriptions hypothécaires sur une maison d’habitation, située XXX à Vitrolles, pour le paiement de diverses impositions établies au nom de M. ou Mme B, lesquels ont donné, par un acte du 17 décembre 1998, la nue propriété de cette maison à leur fille, Mme M B, épouse X, en s’en réservant l’usufruit ; que Mme M B est devenue pleinement propriétaire de cet immeuble, par extinction de l’usufruit, après le décès de sa mère, Mme A B, survenu le 19 mai 2010, à la succession de laquelle elle a renoncé ; que Mme M B, épouse X, elle-même décédée en XXX, a transmis la propriété de cette maison hypothéquée à ses propres héritiers, M. K X, son époux, M. G X, son fils, et Mme C X, sa fille ; qu’estimant que la succession demeurée vacante de Mme A B restait redevable d’une somme de 2 963 211,52 euros pour le paiement de cotisations d’impôt sur le revenu et de contributions sociales, mises à la charge de M. et Mme B au titre des années 1993 à 1995, et de cotisations de taxe foncière et de taxe d’habitation, établies au nom de Mme A B au titre des années 2009 à 2011, le responsable de la trésorerie de Vitrolles a adressé, le 29 mars 2012, à M. K X, M. G X et Mme C X un commandement de payer valant saisie au tiers détenteur pour recouvrer une somme de 2 963 211,52 euros ; que Mme C X conteste le jugement du 17 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître sa demande tendant à la décharge de l’obligation résultant de ce commandement de payer valant saisie ;

2. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R. 711-3 du code de justice administrative : « si le jugement de l’affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l’audience, le sens de ces conclusions sur l’affaire qui les concerne » ; que la communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions a pour objet de mettre les parties en mesure d’apprécier l’opportunité d’assister à l’audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu’elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l’appui de leur argumentation écrite et d’envisager, si elles l’estiment utile, la production, après la séance publique, d’une note en délibéré ; qu’en conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l’audience, l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d’adopter, à l’exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que cette exigence s’impose à peine d’irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public ; que si, par ailleurs, il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l’appréciation qu’il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu’appelle, selon lui, le litige, et notamment d’indiquer, lorsqu’il propose le rejet de la requête, s’il se fonde sur un motif de recevabilité ou sur une raison de fond, et, de mentionner, lorsqu’il conclut à l’annulation d’une décision, les moyens qu’il propose d’accueillir, la communication de ces informations n’est pas prescrite à peine d’irrégularité de la décision ; que la requérante ne saurait dès lors se prévaloir de ce que le sens des conclusions du rapporteur public devant le tribunal administratif aurait été communiqué sous la forme d’une affirmation péremptoire, en méconnaissance du principe du contradictoire, ou de ce que les conclusions de ce rapporteur public seraient entachées d’une contradiction pour contester la régularité du jugement attaqué ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le jugement attaqué comporte le visa d’un mémoire enregistré le 30 mai 2014, analysé comme concluant aux mêmes fins par les mêmes moyens ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, ce mémoire ne contenait pas de conclusions nouvelles ; que la circonstance que les premiers juges auraient omis de viser les moyens nouveaux qu’il contiendrait est en tout état de cause sans incidence sur la régularité du jugement attaqué, dès lors que le tribunal administratif a écarté, de manière suffisamment motivée, la compétence de la juridiction administrative pour connaître du litige dont il était saisi ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 2461 du code civil : « Les créanciers ayant privilège ou hypothèque inscrits sur un immeuble, le suivent en quelques mains qu’il passe, pour être payés en suivant l’ordre de leurs créances ou inscriptions » ; qu’à ceux de l’article 2462 du même code : « Si le tiers détenteur ne remplit pas les formalités qui seront ci-après établies pour purger sa propriété, il demeure, par l’effet seul des inscriptions, obligé comme détenteur à toutes les dettes hypothécaires, et jouit des termes et délais accordés au débiteur originaire. » ; que selon l’article 2463 du même code : « Le tiers détenteur est tenu, dans le même cas, ou de payer tous les intérêts et capitaux exigibles, à quelque somme qu’ils puissent monter, ou de délaisser l’immeuble hypothéqué, sans aucune réserve. » et qu’enfin l’article 2464 du même code dispose que « Faute par le tiers détenteur de satisfaire à l’une de ces obligations, chaque créancier titulaire d’un droit de suite sur l’immeuble a le droit de poursuivre la saisie et la vente de l’immeuble dans les conditions du titre XIX du livre III. » ;

5. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le commandement de payer valant saisie litigieux n’a pas été adressé à Mme X en tant qu’héritière de Mme Z B, à la succession de laquelle elle a renoncé, ou en tant que redevable des impositions mises en recouvrement, mais en tant que tiers détenteur, en indivision, d’un immeuble grevé d’hypothèques légales pour le recouvrement des impositions dont la succession de Mme B restait redevable ; que si Mme X soutient avoir reçu l’immeuble libre de toute hypothèque, ne pas avoir la qualité de tiers détenteur de cet immeuble et ne pas être tenue au paiement des impositions dont sa grand-mère aurait été redevable, elle ne saurait contester devant la juridiction administrative ni les inscriptions d’hypothèques auxquelles a fait procéder l’administration, ni l’exercice du droit de suite prévu par les articles 2461 à 2464 du code civil ; que, dès lors, ainsi que l’a jugé le tribunal administratif, le litige relatif à ce commandement de payer valant saisie émis sur le fondement des articles 2461 à 2464 du code civil ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;

6. Considérant, en dernier lieu, que le tribunal administratif a considéré que Mme X était poursuivie en qualité de tiers détenteur d’un bien hypothéqué ; qu’il n’avait par suite pas à se prononcer, en tant que juge de l’impôt, sur les conclusions de Mme X tendant à la décharge de l’obligation de payer des impositions mises à la charge de sa grand-mère ; que, par ailleurs, le tribunal administratif, qui n’était pas saisi sur renvoi d’une juridiction judiciaire, n’avait pas à se prononcer sur les moyens relatifs à l’exigibilité de ces impositions, moyens au demeurant infondés, la majoration de 10 % prévue par l’article 1730 du code général des impôts n’ayant pas à être motivée, l’administration fiscale n’ayant pas à émettre de nouveaux avis d’imposition au nom du curateur de la succession vacante des époux B et la prescription ayant été interrompue par les paiements effectués à la suite d’avis à tiers détenteur, s’agissant des impositions établies au titre des années 1993 à 1995, et n’étant pas encore atteinte, s’agissant des taxes locales des années 2009 à 2011 ; que les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait entaché d’une omission à statuer ou insuffisamment motivé doivent par suite être écartés ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme X n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme C X la somme demandée par l’Etat au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par le ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C X et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d’Azur et du département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l’audience du 22 janvier 2015, où siégeaient :

— Mme Lastier, président de chambre,

— M. Pourny, président-assesseur,

— Mme Markarian, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 février 2015.

Le rapporteur, Le président,

F. POURNY E. LASTIER

Le greffier,

P. RANVIER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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Cour administrative d'appel de Marseille, 12 février 2015, n° 14MA03889