CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 6 octobre 2020, 18MA00589, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 8e ch., 6 oct. 2020, n° 18MA00589
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 18MA00589
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nîmes, 11 décembre 2017, N° 1502982, 1503469, 1603572, 1603642
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042420702

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I… E…, Mme H… E… et M. B… E… ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté du 23 juillet 2015 par lequel le préfet de la Lozère a déclaré d’utilité publique le projet de création d’une zone artisanale sur le territoire de la commune de Cocurès, l’arrêté du 20 août 2015 par lequel le préfet a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à ce projet et les deux arrêtés du 12 septembre 2016 par lesquels le préfet a modifié, respectivement, ces arrêtés du 23 juillet 2015 et du 20 août 2015.

Par un jugement n° 1502982, 1503469, 1603572, 1603642 du 12 décembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les requêtes des consorts E….

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 12 février 2018 et le 18 octobre 2019, les consorts E…, représentés par Me D… demandent à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du 12 décembre 2017 ;

2°) d’annuler ces arrêtés du 23 juillet 2015, du 20 août 2015 et du 12 septembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros en application de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

 – en ce qui concerne l’arrêté du 23 juillet 2015, le contenu du dossier soumis à enquête publique est insuffisant au regard des prescriptions de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique pour ce qui est de la notice explicative, qui n’examine ni les autres partis envisagés par la communauté de communes Florac Sud-Lozère, ni les avantages du choix retenu, l’insertion paysagère du projet étant imprécisément décrite, et des caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ainsi que de l’appréciation sommaire des dépenses ;

 – le rapport du commissaire enquêteur est incomplet au sujet de l’impact du projet sur le trafic routier et ses conclusions ne sont pas suffisamment motivées ;

 – le projet est dépourvu d’utilité publique dans la mesure où il ne répond pas à une finalité d’intérêt général, que la nécessité de recourir à l’expropriation n’est pas établie et que les atteintes portées à la propriété privée, son coût financier et l’atteinte portée à l’environnement sont excessifs par rapport à l’intérêt qu’il présente ;

 – l’arrêté du 12 septembre 2016 modifiant celui du 23 juillet 2015 est entaché des mêmes illégalités externes que celui-ci ;

 – dès lors que la convention signée entre la communauté de communes et l’Etablissement Public foncier de Languedoc-Roussillon ne respecte pas les prescriptions de l’article L. 321-1 du code de l’urbanisme, le second établissement ne pouvait être substitué au premier en qualité de bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique litigieuse ;

 – l’absence d’utilité publique du projet entache d’illégalité l’arrêté du

12 septembre 2016 modifiant celui du 23 juillet 2015 ;

 – l’arrêté du 20 août 2015 est illégal par voie de conséquence de l’illégalité de celui du 23 juillet 2015 ;

 – l’arrêté du 12 septembre 2016 modifiant celui du 20 août 2015 est illégal par voie de conséquence de l’illégalité des arrêtés du 23 juillet 2015 et du 12 septembre 2016 modifiant celui-ci.

Une mise en demeure a été adressée le 26 mars 2019 au ministre de l’intérieur.

Par un mémoire enregistré le 3 octobre 2019, la communauté de communes Gorges Causses Cévennes, venant aux droits de la communauté de communes Florac-Sud-Lozère, représentée par Me F…, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des consorts E… en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 22 octobre 2019, la clôture de l’instruction a été fixée au

6 novembre 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – le décret n° 2008-670 du 2 juillet 2008 ;

 – le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. J… pour présider la formation de jugement en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. A…,

 – les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

 – et les observations de Me D…, représentant les consorts E… et de Me C…, substituant Me F…, représentant la communauté de communes Gorges Causse Cévennes.

Considérant ce qui suit :

1. Mme I… E…, Mme H… E… et M. B… E… font appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs requêtes tendant à l’annulation de l’arrêté du 23 juillet 2015 par lequel le préfet de la Lozère a déclaré d’utilité publique, au profit de la communauté de communes Florac-Sud Lozère, le projet de création d’une zone artisanale sur le territoire de la commune de Cocurès, de l’arrêté du

20 août 2015 par lequel le préfet a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à ce projet et des deux arrêtés du 12 septembre 2016 par lesquels le préfet a modifié, respectivement, ces arrêtés du 23 juillet 2015 et du 20 août 2015.

Sur l’arrêté déclaratif d’utilité publique du 23 juillet 2015 :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Aux termes de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, alors applicable : " I. L’exploitant adresse au préfet pour être soumis à l’enquête un dossier qui comprend obligatoirement : / 1° Une notice explicative ; / 2° Le plan de situation ; / 3° Le plan général des travaux ; / 4° Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; / 5° L’appréciation sommaire des dépenses ; / 6° L’étude d’impact définie à l’article R. 122-3 du code de l’environnement lorsque les ouvrages ou travaux n’en sont pas dispensés ou, s’il y a lieu, la notice exigée en vertu de l’article R. 122-9 du même code (…) Dans les cas prévus aux I et II ci-dessus, la notice explicative indique l’objet de l’opération et les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l’insertion dans l’environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à l’enquête a été retenu. (…) ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du

15 octobre 2013, le conseil de la communauté de communes du pays de Florac et du Haut Tarn a décidé d’engager la procédure visant à ce que soit déclaré d’utilité publique le projet de création d’une zone artisanale à Cocurès. La circonstance que cette délibération mentionne l’existence d’une autre possibilité de création d’une zone artisanale sur la commune de Florac, à laquelle se sont opposés les entreprises susceptibles de s’y installer, ne saurait révéler, en l’absence de tout autre élément, que cette solution aurait été réellement étudiée et devrait être regardée comme un parti envisagé au sens de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Ainsi, le dossier soumis à l’enquête publique n’avait pas à mentionner les raisons pour lesquelles le projet a été implanté sur le territoire de la commune de Cocurès, notamment s’agissant du point de vue de l’insertion dans l’environnement, dès lors qu’un seul parti a été envisagé. En conséquence, alors même que la notice explicative comporte certains développements sur l’historique du projet et son insertion dans l’environnement, les requérants ne peuvent utilement soutenir que ces mentions seraient insuffisantes.

4. En deuxième lieu, les documents soumis à l’enquête publique ont pour objet, non de décrire le détail des ouvrages envisagés, mais de permettre au public de connaître la nature et la localisation des travaux prévus ainsi que les caractéristiques générales des travaux les plus importants. Sur ce point, d’une part, le dossier soumis à l’enquête localise et mentionne de façon précise la surface réservée à la création d’un bassin de rétention des eaux pluviales dont l’exutoire sera le ruisseau du Briançon. La notice explicative relève que, la parcelle concernée étant en forte pente, une étude spécifique permettra de connaître la faisabilité et les préconisations à mettre en oeuvre, selon une fiche technique également jointe au dossier. Dès lors, en dépit de la portée générale des informations contenues dans cette fiche, dans la mesure où les autres caractéristiques du bassin de rétention qui sera construit en l’espèce ne seront connues qu’après constitution du dossier de demande d’autorisation au titre de la législation sur l’eau, une omission sur ce point n’a pas été de nature à nuire à l’information de l’ensemble des personnes intéressées par l’opération, ni à exercer une influence sur les résultats de l’enquête et, par suite, sur la décision de l’autorité administrative. D’autre part, le dossier indique la création d’une voie interne de desserte des lots débouchant sur la RD 135, dont il précise la largeur ainsi que celle du cheminement piéton de 1,40 m de large, en ajoutant qu’un accès au lot 6 sera créé face à la voie de desserte des autres lots. Le projet étant établi de part et d’autre de la RD 135, la notice explicative mentionne qu’un recalibrage de la chaussée de cette route, à 6 m, sera effectué depuis le carrefour avec la RD 998 jusqu’à la voie interne de la zone artisanale. Alors que la notice explicative précise que le débouché de la voie de desserte et de l’accès au lot n° 6 et les travaux sur la RD 135 feront l’objet d’une demande d’accord préalable auprès du département de la Lozère, il ne ressort pas des pièces du dossier que des travaux d’aménagement importants, autre que l’élargissement précité, soient prévus au niveau du carrefour entre la RD 998 et la

RD 135, dont les caractéristiques n’auraient pas été mentionnés. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier exposerait d’une façon insuffisante les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants.

5. En troisième lieu, le dossier d’enquête doit mettre le public en mesure de connaître le coût réel de l’opération tel qu’il peut être raisonnablement apprécié à la date de l’enquête. L’appréciation sommaire des dépenses évalue le projet à 640 000 euros TTC. Elle détaille les différents postes du projet entre les travaux pour 277 700 euros hors taxes et les acquisitions foncières et études diverses pour 252 929 euros hors taxes. Si les requérants font valoir que des dépenses prévisionnelles relatives à l’archéologie préventive n’ont pas été incluses, ils n’en établissent pas la certitude, dès lors d’une part, qu’ils ne démontrent pas la présence, qu’ils allèguent simplement, d’une voie romaine à l’intérieur du périmètre de l’opération, et d’autre part, que l’existence d’un tombeau protestant sur la parcelle cadastrée A n° 253, soit à l’extérieur de ce périmètre, est, en tout état de cause, sans incidence sur l’anticipation budgétaire de l’opération. En outre, l’appréciation sommaire des dépenses portant sur les charges générées par l’opération et non sur les produits attendus liés à la réalisation du projet, le produit prévisionnel de la vente des terrains aux futurs acquéreurs, n’avait pas davantage à être indiqué. Enfin, la délibération du 15 octobre 2013 du conseil de la communauté de communes du pays de Florac et du Haut Tarn, relève que la Direction départementale des Territoires (DDT) avait estimé à 660 000 euros TTC le coût total de l’opération en prenant alors comme base de calcul une surface de 14 200 m² comportant 5 lots, alors que, comme il vient d’être dit, l’appréciation sommaire des dépenses évalue ce coût à 640 000 euros TTC, le projet actualisé portant sur une surface totale de 21 631 m² comportant 6 lots répartis sur une surface de 16 636 m². Eu égard à la différence de 20 000 euros entre ces deux évaluations et dès lors que la première estimation n’a pas été détaillée par postes de dépenses, il ne ressort pas des pièces du dossier que le coût réel du projet déclaré d’utilité publique n’aurait pas été raisonnablement apprécié à la date de l’enquête.

6. En quatrième lieu, le commissaire enquêteur a relaté dans son rapport le déroulement de l’enquête publique. N’étant pas tenu de répondre à chacune d’entre elles, il a résumé les observations formulées au cours de cette enquête, qu’il a classées selon cinq thématiques. Il a répondu, dans le cadre de la thématique relative aux atteintes environnementales, à des observations reprochant l’augmentation prévisible du trafic routier sur la RD 998. Il n’avait pas à aborder les questions de l’aménagement du carrefour de la RD 998 et de la RD 135 et de l’accès des véhicules de secours sur la voie de desserte interne de la zone artisanale dès lors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que ces questions avaient fait l’objet d’observations au cours de l’enquête, alors même qu’elles n’avaient pas été abordées par l’autorité expropriante dans le dossier soumis à l’enquête. Par ailleurs, il a donné un avis favorable sans réserve ni recommandation après avoir exposé les raisons pour lesquelles, selon lui, d’une part, notamment, les solutions suggérées au cours de l’enquête d’implanter une zone artisanale à Florac ou de privilégier des zones existantes plus éloignées n’étaient pas pertinentes, d’autre part, le choix de l’implanter sur le site retenu, qui n’entraînait pas un trafic routier plus significativement important que celui existant actuellement, répondait à l’intérêt général de la commune. Ainsi, cet avis doit être regardé comme suffisamment motivé.

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée ou à des intérêts généraux, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente.

8. Il ressort du dossier que le projet litigieux a pour objet de créer une zone artisanale sur une zone réservée à cet effet par le plan d’occupation des sols depuis 1993, située au croisement de deux axes routiers. Il offrira de meilleures conditions d’installation à trois entreprises locales aux activités complémentaires, ce qui permettra de maintenir et de créer, le cas échéant, une quinzaine d’emplois. Ces entreprises ainsi que des entreprises extérieures à la commune de Cocurès se sont engagées à acquérir un ou plusieurs lots. L’opération déclarée d’utilité publique par le préfet de la Lozère répond donc à une finalité d’intérêt général, alors même qu’elle sert également l’intérêt particulier des entreprises locales précitées et nonobstant le fait que des aléas économiques pourraient, le cas échéant, compromettre les installations d’entreprises prévues.

9. Si les requérants soutiennent que certaines zones artisanales existantes auraient offert les mêmes avantages que le projet retenu tout en présentant des inconvénients moindres, il n’appartient pas au juge de l’excès de pouvoir d’apprécier l’opportunité du projet retenu. En outre, en faisant valoir que la communauté de communes du pays de Florac et du Haut Tarn pouvait réaliser ce projet en rachetant sur la commune de Florac, commune membre de cet établissement, des terrains précédemment vendus par cette commune à un opérateur privé, ils ne démontrent pas que le projet pouvait être réalisé sans recourir à l’expropriation sur des terrains dont la communauté de communes était déjà propriétaire.

10. La création de la zone d’activités économiques de Cocurès nécessitera l’expropriation de trois propriétaires. Ceux-ci exercent une activité agricole mais les terrains concernés par l’opération ont la nature de prairies de fauche et il ne ressort pas des pièces du dossier que l’expropriation aura pour effet de compromettre leur exploitation. Le coût important de l’opération, dû notamment à la création d’un bassin de rétention, aura pour corollaire un prix de vente des lots assez élevé sans être dissuasif pour les entreprises ayant exprimé leur volonté de s’y installer. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour assurer l’intégration paysagère des bâtiments, qui seront de faible hauteur et devront être implantés de façon à dissimuler le stockage de divers matériaux. L’évaluation des incidences sur le site Natura 2000 « Vallées du Tarn, du Tarnon et de la Mimente » ne révèle aucune incidence notable sur les habitants et les espèces d’intérêts communautaires susceptibles de fréquenter le ruisseau du Briançon. La question du rejet des eaux collectées par le bassin de rétention fera l’objet d’une étude précise lors de la demande d’autorisation au titre de la législation sur l’eau. Par suite, les différents inconvénients que les requérants font valoir ne sont pas de nature à retirer à l’opération d’extension de la zone d’activités de Cocurès son caractère d’utilité publique.

Sur l’arrêté du 12 septembre 2016 modifiant celui du 23 juillet 2015 :

11. Aux termes de l’article L. 321-1 du code de l’urbanisme alors applicable : « Dans les territoires où les enjeux d’intérêt général en matière d’aménagement et de développement durables le justifient, l’Etat peut créer des établissements publics fonciers. (…). Dans le cadre de leurs compétences, ils peuvent contribuer au développement des activités économiques, à la politique de protection contre les risques technologiques et naturels ainsi qu’à titre subsidiaire, à la préservation des espaces naturels et agricoles en coopération avec la société d’aménagement foncier et d’établissement rural et les autres organismes chargés de la préservation de ces espaces, dans le cadre de conventions. Les établissements publics fonciers sont compétents pour réaliser toutes acquisitions foncières et immobilières dans le cadre de projets conduits par les personnes publiques et pour réaliser ou faire réaliser toutes les actions de nature à faciliter l’utilisation et l’aménagement ultérieur, au sens de l’article L. 300-1, des biens fonciers ou immobiliers acquis. (…) Les biens acquis par les établissements publics fonciers ont vocation à être cédés ou à faire l’objet d’un bail. L’action des établissements publics fonciers pour le compte de l’Etat, des collectivités territoriales et de leurs groupements ou d’un autre établissement public s’inscrit dans le cadre de conventions ». L’article 2 du décret du

2 juillet 2008 portant création de l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon, pris pour l’application de l’article L. 321-1 du code de l’urbanisme, dispose que les conventions conclues entre cet établissement et les collectivités territoriales ou leurs groupements prévoient obligatoirement le rachat des biens dans un délai déterminé et, le cas échéant, la garantie de l’emprunt souscrit.

12. Il ressort des pièces du dossier que la communauté de communes Florac-Sud Lozère, venue aux droits de la communauté de communes du pays de Florac et du Haut Tarn, a conclu avec l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon, le 17 août 2016, une convention opérationnelle en vue de la réalisation, par ce dernier des acquisitions par voie amiable et par délégation des droits de préemption et de priorité, puis, dès validation du projet, la maîtrise de l’ensemble des biens nécessaires. Par l’arrêté PREF-BCPEPE -2016256-0001 du 12 septembre 2016, le préfet de la Lozère a modifié son arrêté du 23 juillet 2015 déclarant d’utilité publique le projet de création d’une zone artisanale sur le territoire de la commune de Cocurès en précisant que cette déclaration était prononcée au profit de l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon et que ce dernier était autorisé à acquérir les terrains nécessaires à la réalisation de l’opération soit à l’amiable, soit par voie d’expropriation.

13. D’une part, les requérants soutiennent que cet arrêté du 12 septembre 2016, qui n’est pourtant pas soumis aux mêmes règles de procédure que celui du 23 juillet 2015, est entaché des mêmes illégalités externes que ce dernier. Ce moyen est donc inopérant. L’arrêté du

12 septembre 2016 n’est pas non plus entaché d’illégalité par voie de conséquence d’une prétendue illégalité de l’arrêté du 23 juillet 2015, qui n’est pas démontrée, ainsi qu’il a été constaté aux points précédents, s’agissant notamment du caractère d’utilité publique de l’opération litigieuse.

14. D’autre part, les articles 5.2 et 5.4 de la convention citée au point 12 déterminent, respectivement, les conditions de portage du bien par l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon et celles portant sur le rachat par la communauté de communes Florac-Sud Lozère des biens concernés, la durée de portage des biens acquis par l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon s’achevant au terme de la convention, quelle que soit la date de leur acquisition. L’article 1.2 de la convention stipule que sa durée est de 5 ans à compter de sa date d’approbation par le préfet de région et qu’elle est prorogée en cas de recours contentieux relatif à la maîtrise foncière. Par ailleurs, si l’article 3.3 stipule que l’établissement se réserve la possibilité de recourir à l’emprunt, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’un emprunt ait été effectivement souscrit à la date de la convention. Ainsi, l’absence d’une clause de garantie d’emprunt n’entache pas d’illégalité cette convention. Dans ces conditions et en tout état de cause, le moyen tiré de l’illégalité des clauses de cette convention au regard des dispositions de l’article 2 du décret du 2 juillet 2008 manque en fait.

Sur l’arrêté de cessibilité du 20 août 2015 et l’arrêté du 12 septembre 2016 modifiant cet arrêté :

15. Si les requérants font valoir que l’arrêté du 20 août 2015 est illégal par voie de conséquence de l’illégalité de celui du 23 juillet 2015 et que l’arrêté du 12 septembre 2016 modifiant celui du 20 août 2015, en prononçant la cessibilité des parcelles désignées au profit de l’établissement public foncier de Languedoc-Roussillon, est illégal par voie de conséquence de l’illégalité des arrêtés du 23 juillet 2015 et du 12 septembre 2016 modifiant celui-ci, il résulte des motifs énoncés ci-dessus que l’illégalité des arrêtés du 23 juillet 2015 et du 12 septembre 2016 n’est pas établie. Ces moyens ne peuvent donc qu’être écartés.

16. Il résulte de ce qui précède que les consorts E… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés au litige :

17. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts E… demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge des consorts E… une somme de

2 000 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes Gorges Causses Cévennes, venant aux droits de la communauté de communes Florac-Sud-Lozère, et non compris dans les dépens.


D É C I D E :


Article 1er : La requête des consorts E… est rejetée.

Article 2 : Les consorts E… verseront à la communauté de communes Gorges Causses Cévennes une somme globale de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I… E…, Mme H… E… et M. B… E…, au ministre de l’intérieur, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à l’Etablissement Public foncier d’Occitanie et à la communauté de communes Gorges Causses Cévennes.

Copie en sera adressée au préfet de la Lozère.

Délibéré après l’audience du 22 septembre 2020, où siégeaient :

— M. J…, président,

 – M. A…, premier conseiller,

 – Mme G…, première conseillère,

Lu en audience publique, le 6 octobre 2020.

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N° 18MA00589

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