Cour administrative d'appel de Marseille, 8e chambre, 12 janvier 2021, n° 19MA00596

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 8e ch., 12 janv. 2021, n° 19MA00596
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 19MA00596
Décision précédente : Tribunal administratif de Nice, 3 décembre 2018, N° 1602291
Dispositif : Satisfaction partielle

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat de copropriétaires du complexe artisanal industriel et commercial Espace Antibes (CAIC Espace Antibes) et l’association Espaces Antibes et Environs, ont demandé au tribunal administratif de Nice d’annuler l’arrêté du 28 décembre 2015 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré immédiatement cessibles, conformément aux plans parcellaires, les immeubles désignés aux plans et à l’état parcellaire au bénéfice de la communauté d’agglomération Sophia Antipolis dont l’acquisition est nécessaire à l’exécution de l’arrêté préfectoral du 18 juin 2013 déclarant d’utilité publique le projet d’aménagement d’un transport en commun en site propre pour le « Bus Tram » et emportant mise en compatibilité des plans locaux d’urbanisme des communes d’Antibes et de Biot.

Par un jugement n° 1602291 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2019, le syndicat de copropriétaires du complexe artisanal industriel et commercial Espace Antibes (CAIC Espace Antibes) et l’association Espaces Antibes et Environs, représentés par Me B, demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 décembre 2018 ;

2°) d’annuler l’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

—  la procédure suivie est irrégulière : les réserves du commissaire enquêteur n’ont pas été réellement levées, l’avis du commissaire enquêteur doit être requalifié d’avis défavorable, les réserves n’ayant pas été levées par la délibération du 28 septembre 2015 de la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis ; les dispositions de l’article 112-23 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ont, par suite, été méconnues ;

—  l’arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l’article R.131-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dès lors que le syndicat de copropriétaires requérant n’a pas été destinataire d’un plan permettant de vérifier les limites exactes de l’emprise et compte tenu des réserves du commissaire enquêteur, les plans et l’état parcellaire mis à jour à partir desquels a été pris l’arrêté de cessibilité, modifié pour tenir compte des réserves émises par le commissaire enquêteur, n’ont pas été soumis à l’enquête parcellaire ;

— l’arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l’article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dès lors qu’il ne précise pas l’emplacement de la ligne divisoire distinguant la partie de la partie de la parcelle à exproprier.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2020, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2020, la communauté d’agglomération Sophia Antipolis, représentée par Me D, conclut au rejet de la requête, subsidiairement, à ce que les effets de l’annulation de l’arrêté de cessibilité du 28 décembre 2015 soient différés à une date postérieure de six mois à compter à la notification de l’arrêt à intervenir, et à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête d’appel ne sont pas fondés et, au soutien de sa demande subsidiaire, qu’une annulation de l’arrêté de cessibilité aurait des conséquences excessives sur le chantier de réalisation du « Bus-Tram », dont l’utilité publique a été reconnue.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

— et les observations de Me A, substituant Me D, représentant la communauté d’agglomération Sophia Antipolis.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 18 juin 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré d’utilité publique le projet d’aménagement d’un transport en commun en site propre dit le « Bus Tram », et a autorisé la communauté d’agglomération Sophia Antipolis à acquérir à l’amiable ou par voie d’expropriation les immeubles nécessaires à la réalisation de ce projet. Par une délibération du

8 décembre 2014, le bureau communautaire de la communauté d’agglomération Sophia Antipolis a approuvé le contenu du dossier d’enquête parcellaire et a autorisé son président à saisir le préfet des Alpes-Maritimes en vue de l’ouverture de l’enquête parcellaire. Par arrêté du 11 décembre 2014, le préfet des Alpes-Maritimes a prescrit l’ouverture de cette enquête, qui s’est déroulée du 19 janvier 2015 au 4 février 2015, au terme de laquelle, le 6 mars 2015, le commissaire enquêteur a émis son avis. Par un arrêté du 28 décembre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré immédiatement cessibles les immeubles désignés aux plans et à l’état parcellaire au bénéfice de la communauté d’agglomération Sophia Antipolis, dont l’acquisition est nécessaire à l’exécution de l’arrêté préfectoral du 18 juin 2013. Le syndicat de copropriétaires du complexe artisanal industriel et commercial Espace Antibes (CAIC Espace Antibes), propriétaire de la parcelle cadastrée DR n° 134 à Antibes, et l’association Espaces Antibes et Environs relèvent appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 28 décembre 2015.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « Lorsque la déclaration d’utilité publique prévoit, conformément à l’article L. 122-7, le retrait des emprises expropriées de la propriété initiale, l’acte prononçant la cessibilité précise l’emplacement de la ligne divisoire. ». En outre, aux termes de l’article 7 du décret du

4 janvier 1955 : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu’il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit). Le lieu-dit est remplacé par l’indication de la rue et du numéro pour les immeubles situés dans les parties agglomérées des communes urbaines. / Lorsqu’il réalise ou constate une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l’acte ou la décision doit désigner l’immeuble tel qu’il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division, sauf en cas de lotissement effectué dans le cadre de la législation sur les lotissements ou s’il s’agit d’immeubles situés dans les communes où le cadastre n’est pas rénové. La constitution sur une fraction de parcelle d’un droit d’usufruit, d’un droit de superficie ou d’un bail emphytéotique est considérée comme un changement de limite de propriété. / Lorsque, sans réaliser ou constater une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, il ne concerne qu’une ou plusieurs fractions d’un immeuble, l’acte ou la décision judiciaire doit comporter à la fois la désignation desdites fractions et celle de l’ensemble de l’immeuble. La désignation de la fraction est faite conformément à un état descriptif de division, ou, éventuellement, à un état modificatif, établi dans les conditions fixées par décret, et préalablement publié ; elle doit mentionner le numéro du lot dans lequel la fraction est comprise, et, sous réserve des exceptions prévues audit décret, la quote-part dans la propriété du sol afférente à ce lot. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables lorsque l’acte ou la décision concerne soit une servitude, soit un droit d’usage ou d’habitation, soit un bail de plus de douze années. Elles sont également sans application lorsque l’acte ou la décision entraîne la suppression de la division de l’immeuble. / Les mêmes indications doivent obligatoirement figurer dans tout bordereau, extrait, expédition ou copie, déposé en vue de l’exécution de la formalité. / S’il s’agit d’immeubles situés dans les communes où le cadastre a été rénové, et faisant l’objet d’une mutation par décès, d’un acte ou d’une décision judiciaire translatif, déclaratif ou constitutif d’un droit réel susceptible d’hypothèque, la désignation est faite conformément à un extrait cadastral ayant moins de six mois de date au jour de la remise au service chargé de la publicité foncière, et, en cas de changement de limite, d’après les documents d’arpentage établis spécialement en vue de la conservation du cadastre. Cet extrait ou ces documents doivent être remis au service chargé de la publicité foncière à l’appui de la réquisition de la formalité. ".

3. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que lorsqu’un arrêté déclare cessibles une fraction seulement des parcelles appartenant à un propriétaire, ce qui implique d’en modifier les limites cadastrales, un document d’arpentage doit être préalablement réalisé afin que l’arrêté de cessibilité désigne avec exactitude les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document. Le défaut d’accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d’expropriation, entache d’irrégularité l’arrêté de cessibilité.

4. En l’espèce, il ressort de l’état parcellaire annexé à l’arrêté de cessibilité en litige que la procédure d’expropriation portait sur une partie, d’une surface de 361 m2 sur une totalité de 7 525 m2, de la parcelle cadastrée DR n° 134. Si l’état parcellaire annexé à l’arrêté de cessibilité désigne les deux fractions issues de la parcelle DR n° 134 concernées par la procédure d’expropriation, ainsi que leur contenance, cette mention ne saurait suffire à identifier précisément les terrains cessibles alors qu’il n’est pas contesté que le projet de document d’arpentage réalisé à cette fin, daté du 14 septembre 2016, n’a pas été porté à la connaissance des propriétaires concernés avant l’édiction de l’arrêté de cessibilité litigieux.

5. Il résulte de ce qui précède que l’arrêté contesté est entaché d’une irrégularité de nature à entraîner son annulation, en tant qu’il déclare cessible, au profit de la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis, une partie de la parcelle DR n° 134 appartenant au syndicat de copropriétaires CAIC Espace Antibes. Par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens des requérants, ceux-ci sont fondés à soutenir que c’est tort que, par le jugement du 4 décembre 2018 attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs conclusions dirigées contre cet arrêté.

Sur les conclusions à fin de modulation de l’arrêt prononcé par la Cour :

6. La communauté d’agglomération Sophia Antipolis fait valoir que l’annulation de l’arrêté de cessibilité du 28 décembre 2015 aura pour effet de compromettre gravement l’avancée des travaux de réalisation du « Bus-Tram » et demande en conséquence, compte-tenu de l’utilité publique de tels travaux, que les effets de cette annulation soient différés de six mois, le temps de reprendre une décision régulière. Toutefois, l’annulation prononcée par la Cour ne concerne que la partie de la parcelle DR n° 134, ce qui n’a pas pour effet de compromettre dans des proportions importantes l’avancée des travaux, et de nuire ainsi gravement à l’intérêt général. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin de modulation des effets du présent arrêt.

Sur les conclusions relatives aux frais d’instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge conjointe de l’Etat et de la communauté d’agglomération Sophia Antipolis la somme de 2 000 euros à verser au syndicat de copropriétaires CAIC Espace Antibes et à l’association Espace Antibes et Environs, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge des appelantes, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : L’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 décembre 2015 est annulé en tant qu’il déclare cessible au profit de la communauté d’agglomération Sophia Antipolis une partie de la parcelle DR n° 134.

Article 3 : L’Etat et la communauté d’agglomération Sophia Antipolis verseront conjointement au syndicat de copropriétaires du complexe artisanal industriel et commercial Espace Antibes et à l’association Espaces Antibes et Environs la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au le syndicat de copropriétaires du complexe artisanal industriel et commercial Espace Antibes et à l’association Espaces Antibes et Environs, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la ministre de la transition écologique et à la communauté d’agglomération Sophia Antipolis.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l’audience publique du 15 décembre 2020, où siégeaient :

' M. Badie, président,

' M. d’Izarn de Villefort, président assesseur,

' Mme C, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 12 janvier 2021.

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