CAA de NANCY, 4ème chambre, 28 décembre 2021, 20NC03045, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 4e ch., 28 déc. 2021, n° 20NC03045
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 20NC03045
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nancy, 2 juin 2020, N° 2001253
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044635883

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… A…, alors placé en rétention administrative, a demandé au tribunal administratif de Nancy d’annuler l’arrêté du 11 mai 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin l’a obligé à quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé et lui a interdit de circuler sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2001253 du 3 juin 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 octobre 2020 et 29 octobre 2021, M. A…, représenté par Me Le Guennec – Schmitt, demande :

1°) d’annuler ce jugement de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy du 3 juin 2020 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 11 mai 2020 pris à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à son conseil d’une somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

sur le jugement attaqué :

 – la première juge a commis une erreur de droit et d’appréciation en retenant que la mesure d’éloignement ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale ;

 – la première juge a commis une erreur d’appréciation en retenant que la mesure d’interdiction de circuler ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

 – la préfète n’a pas procédé à un examen individuel de sa situation personnelle ;

 – la décision porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – la décision est entachée d’erreur manifeste d’appréciation ;

sur la décision refusant un délai de départ volontaire :

 – la décision n’est pas motivée en fait ;

 – la décision porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et à l’intérêt supérieur de ses enfants ;

sur la décision d’interdiction de circuler sur le territoire français d’une durée de trente-six mois :

 – la préfète n’a pas procédé à un examen individuel de sa situation personnelle ;

 – la décision encourt l’annulation par exception d’illégalité de la décision d’obligation de quitter le territoire français ;

 – la décision porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n’a pas présenté de mémoire en défense.

M. A… a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 8 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – la convention internationale relative aux droits de l’enfant ;

 – le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

 – le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme Picque, première conseillère, a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A…, ressortissant roumain né le 13 avril 1983, déclare être entré en France au mois de mai 1999. Par un arrêté du 11 mai 2020, la préfète du Bas-Rhin l’a obligé à quitter le territoire français sur le fondement des 1° et 3° de l’article L. 511-3-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, alors en vigueur, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de circuler sur le territoire français d’une durée de trente-six mois. M. A… fait appel du jugement n° 2001253 du 3 juin 2020 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. A… soutient que la première juge aurait commis une erreur de droit et des erreurs d’appréciation, ces circonstances, si elles étaient fondées, seraient seulement susceptibles d’affecter le bien-fondé du jugement, dont le contrôle est opéré par l’effet dévolutif de l’appel, et sont sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier des motifs de la décision, qui font notamment état des conditions du séjour de M. A… en France ainsi que de sa situation personnelle et familiale, que la préfète du Bas-Rhin n’aurait pas procédé à un examen individuel de la situation de l’intéressé avant d’édicter la mesure d’éloignement en litige. Par suite, ce moyen tiré de l’erreur de droit doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

5. M. A… n’apporte aucun élément de nature à établir qu’il séjournerait en France depuis 1999 comme il l’affirme. Il ressort des pièces du dossier que sa compagne est également en situation irrégulière et qu’elle résidait en Roumanie à la date de la décision attaquée. Il n’est dès lors pas démuni d’attaches dans son pays d’origine alors que, par ailleurs, il n’apporte aucun élément sur les liens personnels qu’il a pu nouer en France et ne démontre ainsi pas qu’il y aurait tissé des liens d’une particulière intensité. Si le requérant soutient que ses deux enfants mineurs, nés en 2009 et 2015, vivent à Strasbourg chez leurs grands-parents et sont scolarisés, compte tenu de ce qui vient d’être dit aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Roumanie. Dans ces conditions, en obligeant M. A… à quitter le territoire français, la préfète du Bas-Rhin n’a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A… une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par sa décision. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le requérant n’est pas fondé à soutenir que l’autorité administrative aurait apprécié de façon manifestement inexacte les conséquences de la mesure d’éloignement sur sa situation personnelle et familiale.

En ce qui concerne la décision fixant refusant un délai de départ volontaire :

6. Aux termes de l’article L. 511-3-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans sa version alors en vigueur, l’étranger ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne « dispose, pour satisfaire à l’obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d’un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. A titre exceptionnel, l’autorité administrative peut accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ».

7. L’arrêté attaqué énumère l’ensemble des condamnations pénales dont M. A… a fait l’objet et indique que, pour ces motifs, il y a « urgence » à éloigner l’intéressé du territoire français. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, la décision refusant d’accorder un délai de départ volontaire à M. A… est suffisamment motivée en fait.

8. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant, qui reprennent les mêmes arguments que ceux développés à l’appui de la contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

9. Il résulte de tout ce qui précède que, par les moyens qu’il invoque, M. A… n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision par laquelle la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne la décision d’interdiction de circuler sur le territoire français d’une durée de trente-six mois :

10. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier des motifs de la décision contestée que la préfète du Bas-Rhin n’aurait pas procédé à un examen individuel de la situation de l’intéressé avant d’édicter la mesure en litige. Par suite, ce moyen tiré de l’erreur de droit doit être écarté.

11. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui reprend les mêmes arguments que ceux développés à l’appui de la contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

12. En dernier lieu, l’illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire n’étant pas établie, le moyen tiré de l’exception d’illégalité de cette décision, soulevé à l’appui des conclusions à fin d’annulation de la décision d’interdiction de circuler sur le territoire français d’une durée de trente-six mois doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A… sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.


D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B… A… et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

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N° 20NC03045

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