CAA de NANTES, 4ème chambre, 22 mars 2016, 14NT02187, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 4e ch., 22 mars 2016, n° 14NT02187
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 14NT02187
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 10 juin 2014
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032295297

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’association A.N.A.I parrainage a demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler la décision du 14 avril 2011 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la qualité d’association poursuivant un but exclusif d’assistance et de bienfaisance.

Par un jugement n° 1109606 du 11 juin 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 août 2014, l’association A.N.A.I parrainage, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 juin 2014 ;

2°) d’annuler la décision du 14 avril 2011 du préfet de la Loire-Atlantique lui refusant la qualité d’association poursuivant un but exclusif d’assistance et de bienfaisance ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – c’est à tort que les premiers juges ont estimé qu’au vu de ses statuts elle n’aurait pas pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance ou la recherche scientifique ou médicale ; il devait être tenu compte des actions concrètes qu’elle réalise et qui relève de la bienfaisance ; la seule mention statutaire de « favoriser les liens d’amitié et de solidarité » s’explique par l’histoire de l’association ;

 – la définition de l’association de bienfaisance par les services fiscaux ne lui interdit pas de travailler avec des agents locaux ; le contrôle qu’elle exerce sur ceux-ci est réel :

 – contrairement à ce que soutient l’administration, ses comptes et bilans sont le reflet des actions exercées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2014, le préfet de la Loire-Atlantique demande à la cour de rejeter la requête ;

Il soutient qu’aucun des moyens invoqués par l’association A.N.A.I parrainage n’est fondé.

Un courrier a été adressé aux parties le 7 décembre 2015 en application de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Une ordonnance du 7 janvier 2016 a porté clôture immédiate de l’instruction en application de l’article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 26 janvier 2016, l’instruction a été réouverte.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code civil ;

 –  la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ;

 – la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures ;

 – le décret n° 2007-807 du 11 mai 2007 relatif aux associations, fondations, congrégations et établissements publics du culte et portant application de l’article 910 du code civil ;

 – le décret n° 2010-395 du 20 avril 2010 relatif au régime de libéralités consenties aux associations, fondations, congrégations et établissements publics du culte ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

1. Considérant que, par délibération du 13 décembre 2008, le conseil d’administration de l’association A.N.A.I parrainage a accepté un legs d’un montant de 27 000 euros consenti par testament olographe du 25 décembre 2003 d’une légataire, précisant que cette libéralité serait délivrée nette de tous frais et droits, et a prévu d’affecter ce legs à des actions de bienfaisance menées par deux religieuses au Cambodge, à Phnom Penh et dans la région ouest de Battambang ; que, n’étant pas reconnue d’utilité publique, elle a déposé le 16 décembre 2010 une demande de reconnaissance de son but exclusif d’assistance et de bienfaisance pour percevoir ce legs avec exonération de tous droits ; que le préfet a instruit son dossier selon la procédure de rescrit administratif prévue par le paragraphe V de l’article 111 de la loi du 12 mai 2009 ; que l’association relève appel du jugement du 11 juin 2014 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 14 avril 2011 du préfet de la Loire-Atlantique lui refusant la qualité d’association poursuivant un but exclusif d’assistance et de bienfaisance ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire : «  (…) Les associations déclarées qui ont pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance (…) peuvent accepter les libéralités entre vifs ou testamentaires dans des conditions fixées par décret en Conseil d’ Etat » ; qu’aux termes des deuxième et troisième alinéas de l’article 910 du code civil : « (…) les dispositions entre vifs ou par testament au profit des fondations, des congrégations et des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités (…) sont acceptées librement par celles-ci. / Si le représentant de l’Etat dans le département constate que l’organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu’il n’est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d’effet » ; qu’aux termes du V de l’article 111 de la loi du 12 mai 2009 susvisée : « (…) V.-Toute association qui, n’ayant pas reçu de libéralité au cours des cinq années précédentes, souhaite savoir si elle entre dans l’une des catégories d’associations mentionnées au dernier alinéa de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association (…) pour prétendre au bénéfice des dispositions législatives ou réglementaires applicables à la catégorie d’associations dont elle revendique le statut, peut interroger le représentant de l’Etat dans le département qui se prononce sur sa demande dans des conditions définies par décret. (…) » ;

3. Considérant que la décision du 14 avril 2011 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé à l’association A.N.A.I. parrainage la qualité d’association poursuivant un but exclusif d’assistance et de bienfaisance, au sens de dispositions précitées de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901, doit être regardée, compte tenu de la nature et de la portée des termes utilisés ainsi que de l’effet d’une telle prise de position sur les ressources de l’association, comme une décision faisant grief à celle-ci et susceptible de recours pour excès de pouvoir ;

4. Considérant que, pour apprécier si une association bénéficiaire d’un legs a pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance ou la recherche scientifique ou médicale au sens des dispositions précitées de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901, il y a lieu d’examiner non seulement son objet statutaire mais aussi la nature de son activité ; qu’à cet égard, les actions d’assistance et de bienfaisance s’entendent non seulement des actions tendant à améliorer les conditions de vie des personnes en situation précaire ou difficile mais également des actions d’information et de sensibilisation inhérentes à cet objectif ou y contribuant, notamment en permettant de recueillir les fonds nécessaires à cet effet ; que, toutefois, la part des ressources consacrée à l’amélioration des conditions de vie des personnes en situation précaire ou difficile doit demeurer prépondérante par rapport à celle des ressources consacrées aux autres actions, notamment d’information et de sensibilisation, de l’association ;

5. Considérant qu’il n’est pas sérieusement contesté que l’association requérante poursuit un but humanitaire se traduisant principalement par des actions de parrainages permettant des aides matérielles concrètes en vue d’actions sociales telles que la scolarisation d’enfants démunis, la construction d’écoles, de garderies ou d’orphelinats, l’achat de médicaments et la prise en charge financière d’interventions chirurgicales pédiatriques, l’attribution de secours à des familles en difficulté ; que, si les fonds collectés pour ces actions sont adressés directement à des religieuses dans les pays concernés, il est constant que celles-ci ne jouent qu’un rôle d’intermédiaires et qu’un employé de l’association contrôle sur place l’effectivité des opérations destinées uniquement aux enfants et familles ainsi parrainés ; qu’il ressort également des pièces du dossier que, par les parrainages reversés, dons et actions spécifiques qui constituent les modalités de distribution des aides attribuées par l’association, une part prépondérante, de l’ordre de 85%, des ressources perçues et récoltées par celle-ci se trouve affectée à des actions tendant à améliorer les conditions de vie de personnes en situation précaire ou difficile ; que, dans ces conditions, l’association A.N.A.I. parrainage doit être regardée comme ayant pour objet exclusif l’assistance et la bienfaisance  ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en refusant, par la décision contestée du 14 avril 2011, de reconnaître à la requérante la qualité d’association ayant pour objet exclusif l’assistance et la bienfaisance, le préfet de la Loire-Atlantique a apprécié de manière manifestement erronée l’activité de celle-ci ; qu’il suit de là que l’association A.N.A.I. parrainage est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l’association A.N.A.I parrainage et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1109606 du 11 juin 2014 du tribunal administratif de Nantes et la décision du 14 avril 2011 du préfet de la Loire-Atlantique refusant à l’association A.N.A.I parrainage la qualité d’association poursuivant un but exclusif d’assistance et de bienfaisance sont annulés.

Article 2 : L’Etat versera 1 500 euros à l’association A.N.A.I parrainage en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association A.N.A.I parrainage et au ministre de l’intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.


Délibéré après l’audience du 1er mars 2016, à laquelle siégeaient :

— M. Lainé, président de chambre,

 – Mme Loirat, président-assesseur,

 – M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 mars 2016.


Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 14NT02187

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