CAA de NANTES, 3ème chambre, 16 mars 2018, 16NT01799, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 3e ch., 16 mars 2018, n° 16NT01799
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 16NT01799
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Caen, 6 avril 2016, N° 1500220
Identifiant Légifrance : CETATEXT000036720355

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MMA Iard assurances mutuelles a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner in solidum la commune de Deauville et la société Santos CV à lui verser la somme de 17 000 euros en remboursement des sommes qu’elle a versées à son assurée, l’association Bac environnement, à la suite de l’accident dont a été victime l’un des salariés de celle-ci le 10 octobre 2007.

Par un jugement n° 1500220 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de Caen a condamné la société Santos CV à lui verser la somme demandée et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er juin 2016 et 9 mars 2017 la société MMA Iard assurances mutuelles, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 7 avril 2016 en tant qu’il a rejeté ses conclusions dirigées contre la commune de Deauville ;

2°) de condamner solidairement la commune de Deauville et la société Santos CV à lui verser la somme de 17 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de l’introduction de sa requête ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Deauville la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la commune de Deauville, en sa qualité de maître d’ouvrage, a commis une faute en s’abstenant de désigner un coordonateur sécurité prévention santé, conformément aux articles R. 4532-1 et suivants du code du travail ;

 – la société Bac environnement, en sa qualité de fournisseur de personnel, n’avait aucun rôle dans l’organisation du chantier ;

 – la commune de Deauville, en sa qualité de maître d’oeuvre du chantier, devait assurer la coordination et la surveillance des travaux : en s’abstenant de prendre des mesures permettant de prévenir l’accident, elle a commis une faute engageant sa responsabilité ;

 – les fautes commises par la commune sont à l’origine de l’accident car une organisation adéquate des travaux aurait permis d’éviter la présence simultanée sur le chantier de la victime et de la société Santos CV, alors que leurs activités étaient incompatibles du point de vue de la sécurité ;

 – la responsabilité de la société Santos CV doit être confirmée ;

 – elle a justifié en première instance des sommes engagées à hauteur de 17 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 28 juin 2016 la commune de Deauville, représentée par Me D…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de la société MMA Iard assurances mutuelles une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la requête est irrecevable dès lors que la société MMA Iard assurances mutuelles a obtenu en première instance le versement de l’intégralité de la somme qu’elle demandait ;

 – les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La société Santos CV a été mise en demeure de produire un mémoire en défense par courrier du 20 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code du travail ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Le Bris,

 – les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

 – et les observations de Me B…, substituant Me D…, représentant la commune de Deauville.

1. Considérant qu’au cours de l’été 2007 la commune de Deauville a conclu plusieurs marchés publics pour assurer la rénovation d’un lavoir situé sur son territoire, opération dont elle assurait également la maîtrise d’oeuvre ; qu’un salarié de l’association Bac environnement, qui avait conclu un contrat avec la commune pour la fourniture de main d’oeuvre, a été victime le 10 octobre 2007 sur le chantier d’un accident provoqué par la chute d’une poutre métallique que manipulaient des salariés de la société Santos CV, laquelle participait également à l’opération de rénovation ; que l’association Bac environnement a été condamnée par un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen du 13 janvier 2014 à indemniser la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados à hauteur des préjudices de la victime, évalués à la somme de 16 000 euros ; que la société MMA Iard assurances mutuelles, assureur de l’association Bac environnement, s’est acquittée de cette somme et a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner solidairement la commune de Deauville et la société Santos CV à lui rembourser ce montant ainsi qu’une somme de 1 000 euros qu’elle a dû verser à la victime au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; qu’elle relève appel du jugement du 7 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Caen a condamné la société Santos CV à lui verser la somme de 17 000 euros, en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions présentées à l’encontre de la commune de Deauville ;

Sur les conclusions à fin d’indemnisation :

2. Considérant, en premier lieu, que le dommage dont la société MMA Iard assurances mutuelles demande réparation est survenu à l’occasion d’une opération de travaux public à laquelle participait la victime ; que, par suite, pour engager la responsabilité de la commune de Deauville, la requérante doit établir que cette dernière a commis une faute, ainsi que l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et le dommage ; que si, dans le domaine des dommages de travaux publics, les fautes commises par des tiers sont en principe sans influence sur les obligations du maître de l’ouvrage à l’égard de la victime ou de ses ayants droit, il en va différemment lorsque le tiers co-auteur du dommage est l’employeur de la victime, contre lequel le maître de l’ouvrage ne peut exercer d’action en garantie ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi que le soutient la requérante, la commune de Deauville a commis une faute en s’abstenant de désigner, comme elle en avait l’obligation en application de l’article R. 4532-2 du code du travail, un coordonateur en matière de sécurité et de santé des travailleurs, lequel a pour mission, conformément à l’article R. 4532-13 du même code, et quelle que soit l’importance du chantier concerné, de coordonner les activités simultanées ou successives des entreprises qui participent aux travaux ainsi que l’échange entre elles des consignes en matière de sécurité et de protection de la santé ; que, cependant, il ressort des éléments de l’enquête pénale versés au dossier que l’accident est survenu alors que trois salariés de la société Santos CV ont laissé échapper une poutre métallique de 250 kgs destinée à soutenir la toiture, qui est venue heurter la victime, occupée à maçonner un regard dans un bassin du lavoir à proximité immédiate de l’opération ; que l’accident résulte directement de l’imprudence et du défaut de vigilance de ces salariés, qui n’ont pas pris de précautions suffisantes pour réaliser en toute sécurité une opération qui ne présentait pas de difficultés particulières et avait du reste déjà été pratiquée à plusieurs reprises ; que la victime aurait également pu prendre l’initiative de s’écarter du chantier, le fait qu’elle affirme ne pas s’être rendu compte de ce qu’une poutre était en train d’être déplacée alors qu’elle se trouvait à moins de 5 mètres révélant également un manque de vigilance de sa part ; qu’il ne résulte pas de l’instruction, contrairement à ce que soutient la société requérante, que si un coordonnateur avait été nommé il aurait nécessairement interdit tout travail simultané des salariés de la société Santos CV et de ceux de l’association Bac environnement, alors que, ainsi qu’il a été dit, le déplacement et la mise en place des poutres ne présentaient pas des risques tels que des précautions élémentaires ne pouvaient les pallier ; que, par suite, c’est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre la faute commise par le maître d’ouvrage en ne désignant pas un coordonnateur SPS et l’accident survenu le 10 octobre 2007 n’était pas établie ;

4. Considérant, en dernier lieu, que si la requérante soutient également que la commune de Deauville a commis des fautes dans l’exécution de sa mission de maître d’oeuvre, elle n’assortit pas cette affirmation de précisions suffisantes, ces fautes ne pouvant être caractérisées par la seule circonstance qu’un accident est survenu au cours des travaux ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la société MMA Iard assurances mutuelles n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les frais de l’instance :

6. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Deauville, qui n’est pas dans la présente instance partie perdante, la somme demandée par la société MMA Iard assurances mutuelles au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société requérante le versement à la commune de Deauville de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société MMA Iard assurances mutuelles est rejetée.

Article 2 : La société MMA Iard assurances mutuelles versera à la commune de Deauville la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société MMA Iard assurances mutuelles, à la commune de Deauville et à la société Santos CV.

Délibéré après l’audience du 22 février 2018, à laquelle siégeaient :

— Mme Perrot, président de chambre,

 – M. Berthon, premier conseiller,

 – Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2018.


Le rapporteur,

I. Le BrisLe président,

I. Perrot

Le greffier,
M. C…

La République mande et ordonne au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 16NT01799

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