CAA de NANTES, 2ème chambre, 26 décembre 2018, 18NT01516, Inédit au recueil Lebon

  • Naturalisation·
  • Ajournement·
  • Tribunaux administratifs·
  • Justice administrative·
  • Recours gracieux·
  • Pouvoir d'appréciation·
  • Décret·
  • Demande·
  • Aide juridique·
  • Autorité publique

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 2e ch., 26 déc. 2018, n° 18NT01516
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 18NT01516
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 12 mars 2018, N° 1506681
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037995858

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C… D… a demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler la décision du 5 mai 2015 par laquelle le ministre de l’intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 7 juillet 2015 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1506681 du 13 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions du ministre de l’intérieur du 5 mai 2015 et du 7 juillet 2015 et a enjoint au ministre de réexaminer la demande de naturalisation présentée par M. D… dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 avril 2018 et le 14 août 2018, le ministre de l’intérieur demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 mars 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D… devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

­ la décision litigieuse n’est pas entachée d’incompétence ;

­ elle n’est pas entachée d’erreur manifeste d’appréciation dès lors que les faits reprochés à M. D…, ne sont pas anciens et ne sont pas dénués de gravité ;

­ elle n’est pas entachée d’erreur de droit dès lors qu’une décision d’ajournement peut être prise pour les mêmes motifs que la précédente décision d’ajournement s’ils présentent une certaine gravité ;

­ les autres moyens développés en première instance par M. D… sont inopérants compte tenu du motif de la décision contestée ;

­ Il dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour accorder ou refuser une naturalisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2018, M. C… D…, représenté par Me B…, conclut au rejet de la requête du ministre et à ce que l’Etat lui verse la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu’aucun moyen soulevé par le ministre n’est fondé et réitère ses moyens développés en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ le code civil ;

­ le décret n° 93-1362 du 30 décembre modifié ;

 –  la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique modifiée ;

­ le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 relatif à l’aide juridique modifié ;

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

­ le rapport de M. A…'hirondel,

­ et les observations de Mme E… pour le ministre de l’intérieur.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l’intérieur relève appel du jugement du 13 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. D…, sa décision du 5 mai 2015 ajournant à deux ans la demande de naturalisation de ce dernier et sa décision du 7 juillet 2015 rejetant son recours gracieux.

Sur la légalité de la décision contestée :

2. Aux termes de l’article 21-15 du code civil : « (…) l’acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique résulte d’une naturalisation accordée par décret à la demande de l’étranger ». L’article 48 du décret du 30 décembre 1993 prévoit : « Si le ministre chargé des naturalisations estime qu’il n’y a pas lieu d’accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l’ajournement en imposant un délai ou des conditions. (…) ». En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la naturalisation à l’étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d’opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.

3. Pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de M. D…, le ministre chargé des naturalisations s’est fondé sur le motif tiré de ce que l’intéressé a été l’auteur de faits d’acquisition, de détention ou d’emploi de stupéfiants commis le 25 janvier 1988, de conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique commis le 8 mai 1988, d’outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique commis le 15 juin 2001 et de dégradation ou détérioration grave d’un bien appartenant à autrui, de violence avec usage ou menace d’une arme suivie d’une incapacité n’excédant pas huit jours et de conduite de véhicule sous l’empire d’un état alcoolique commis le 4 juin 2003.

4. Si la matérialité de ces faits n’est pas contestée, ils remontaient toutefois à 27 ans, 14 ans et 12 ans à la date de la décision contestée. En outre, il est constant qu’en 2007, une décision d’ajournement à deux ans avait déjà été opposée à la demande de naturalisation formée par M. D… pour les mêmes faits et que depuis cette dernière décision, soit pendant une période de sept ans, l’intéressé ne s’est rendu coupable d’aucune nouvelle infraction. Si cette première décision d’ajournement ne fait pas, par principe, obstacle à ce qu’une nouvelle décision d’ajournement puisse être prise, pour le même motif, les faits reprochés à M. D…, qui n’ont pas donné lieu à récidive, sont toutefois anciens et ne sont pas d’une gravité telle que le ministre ait pu, dans les circonstances de l’espèce, alors même qu’il dispose d’un large pouvoir d’appréciation, prendre une nouvelle décision d’ajournement, pour le même motif, sans entacher sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l’intérieur n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé ses décisions du 10 avril 2015 et du 7 juillet 2015.

Sur les frais liés au litige :

6. Pour l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D… et non compris dans les dépens.


DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l’intérieur est rejetée.

Article 2 : L’Etat versera à M. D… la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’intérieur et à M. C… D….

Délibéré après l’audience du 11 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

— M. Pérez, président,

 – Mme Brisson, président-assesseur,

 – M. A…'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 décembre 2018.


Le rapporteur,
M. F… Le président,

A. PEREZ


Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01516

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de NANTES, 2ème chambre, 26 décembre 2018, 18NT01516, Inédit au recueil Lebon