CAA de NANTES, 6ème chambre, 15 décembre 2020, 19NT02096, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 6e ch., 15 déc. 2020, n° 19NT02096
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 19NT02096
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Sur renvoi de : Conseil d'État, 22 mai 2019
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042699517

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D… F… a demandé au tribunal administratif d’Orléans d’annuler le titre de recette n° 627 émis le 5 octobre 2016 à son encontre par la commune de la Chapelle Saint-Mesmin pour un montant de 9 615,67 euros ainsi que les actes de poursuites et de saisie s’y rapportant, de le décharger de l’obligation de payer ces sommes et, à titre subsidiaire, de limiter la créance de la commune à 6 959,07 euros.

Par un jugement n° 1604088 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Le 31 janvier 2019, M. F… a saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi contre ce jugement.

Par une ordonnance du 23 mai 2019, le Conseil d’Etat a renvoyé l’affaire à la cour.

Par des mémoires enregistrés les 29 octobre 2019 et 13 novembre 2020, M. F…, représenté par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif d’Orléans du 4 décembre 2018 ;

2°) d’annuler le titre de recette ainsi que les actes de poursuites et de saisie y afférant ;

3°) de le décharger de l’obligation de payer la somme de 9 615,67 euros ;

4°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de la créance de la commune à 6 959,07 euros ;

5°) de mettre à la charge de la commune de la Chapelle-Saint-Mesmin le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré du fait que la commune ne serait fondée à récupérer que le trop-perçu des quatre derniers mois suivant sa demande de reversement ;

 – le titre de recette, auquel aucun document n’était joint, ne mentionne pas de manière suffisante les bases de la liquidation ;

 – la décision de la commune de lui verser un demi-traitement dans l’attente de la liquidation de ses droits à pension a créé des droits à son profit et ne pouvait être retirée que dans le délai de quatre mois ; en tout état de cause, la commune n’est fondée à récupérer que le trop-perçu des quatre derniers mois suivant sa demande de reversement ;

 – les sommes litigieuses lui ont été versées pour compenser le manque de diligence de la commune dans le traitement de son dossier de mise à la retraite pour invalidité ; ces sommes indemnisent les troubles dans ses conditions d’existence résultant du retard dans le versement de sa pension ;

 – il ne peut lui être réclamé une somme supérieure à celle de 6 959,07 euros qu’il a perçue, les prélèvements effectués au titre de la mutuelle ne pouvant lui être réclamés dès lors qu’ils ont été déduits de sa rémunération brute et non payés par la commune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2020, la commune de la Chapelle Saint-Mesmin, représentée par Me E…, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. F… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. F… ne sont pas fondés.
M. F… n’a pas été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle par une décision du 13 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le décret 87-602 du 30 juillet 1987 ;

 – le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme B…,

 – les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

 – et les observations de Me C…, substituant Me E…, représentant la commune de la Chapelle Saint-Mesmin.

Considérant ce qui suit :

1. M. F…, adjoint technique de 1re classe recruté par la commune de la Chapelle Saint-Mesmin, a été placé en congé de longue maladie du 12 octobre 2009 au 11 octobre 2010, en congé de longue durée du 12 octobre 2010 au 11 octobre 2014 puis en disponibilité d’office à compter du 12 octobre 2014. Par un arrêté du 13 juin 2016, il a été admis à la retraite pour invalidité avec effet rétroactif au 24 avril 2015 et radié des cadres de la commune. Il a perçu sa pension de retraite à compter du 30 juin 2016. Le 5 octobre 2016, la commune, qui a continué à lui verser un demi-traitement dans l’attente de la liquidation de ses droits à pension, a émis un titre de recette à l’encontre de M. F… pour un montant de 9 615,67 euros en vue du remboursement par l’intéressé des sommes qu’il a perçues au titre de son demi-traitement du 24 avril 2015 au 30 juin 2016. M. F… relève appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ce titre de recette et à la décharge des sommes qui lui sont réclamées. Il demande à ce que cette somme soit ramenée à 6 959,07 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le tribunal administratif d’Orléans a indiqué au point 4 du jugement attaqué, que M. F… n’était pas en droit de cumuler une pension de retraite avec le demi-traitement versé en application des dispositions de l’article 37 du décret du 30 juillet 1987 dans l’attente de l’avis de la commission de réforme et de la CNRACL et qu’en conséquence, en lui demandant de rembourser les salaires perçus entre le 24 avril 2015 et le 30 juin 2016, la commune n’avait pas rapporté une décision créatrice de droits. Ce faisant, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen du requérant.

Sur la régularité du titre de recette :

3. Aux termes de l’article 24 du décret du 7 novembre 2012 : « Toute créance liquidée faisant l’objet d’une déclaration ou d’un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ». Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l’état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

4. Il ressort des énonciations du titre de recette litigieux qu’il porte la mention « reversement demi-traitement du 24 avril 15 au 30 juin 16 versé en attente décision CNRACL retraite pour invalidité ». En outre, le détail du calcul de la somme figurant sur ce titre de recette a été adressé par courriel à M. F… le 20 septembre 2016 en lui précisant qu’un avis des sommes à payer lui serait adressé par la trésorerie territorialement compétente. Par suite, le requérant n’est pas fondé à soutenir que le titre de recette dont il sollicite l’annulation ne mentionnerait pas suffisamment les bases de la liquidation.

Sur le bien-fondé du titre de recette :

5. En premier lieu, aux termes des dispositions de l’article 37 du décret du 30 juillet 1987 : « Le fonctionnaire ne pouvant, à l’expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi (…), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (…) Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l’avis du comité médical, soit l’avis de la commission de réforme, soit l’avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu’à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d’admission à la retraite. ».

6. L’inaptitude de M. F… à poursuivre ses fonctions ou tout autre fonction n’étant pas contestée, il incombait à la commune de la Chapelle Saint-Mesmin de placer son agent dans l’une des positions prévues par son statut dans l’attente de l’avis de la commission de réforme et de la CNRACL et de lui verser, en application des dispositions précitées du décret du 30 juillet 1987, un demi-traitement jusqu’à l’intervention d’une décision le plaçant à la retraite pour invalidité. Si dans sa décision du 17 mars 2015 visant ce décret, la commune n’a pas indiqué à M. F… qu’il devra rembourser une partie de ces sommes lorsque sa pension de retraite lui sera rétroactivement attribuée, ce dernier ne tirait d’aucune disposition légale ou réglementaire le droit de cumuler les sommes versées sur la base de ce fondement et sa pension de retraite versée pour la même période. Il est constant que, le 4 juillet 2016, l’intéressé a perçu la somme de 12 372,51 euros, comprenant le paiement de sa pension de retraite au titre du mois de juin 2016 ainsi que le rappel de sa pension pour la période d’avril 2015 à juin 2016. En conséquence, contrairement à ce que soutient le requérant, en procédant, par le titre de recette litigieux, à la régularisation des traitements qui lui ont été versés durant cette dernière période, la commune n’a pas retiré une décision créatrice de droits mais a seulement régularisé sa situation en lui demandant de rembourser l’avance qu’elle lui avait consentie. Par suite, ce moyen ne peut qu’être écarté, ainsi que celui soulevé subsidiairement par M. F… tiré de ce que la commune ne serait, à tout le moins, fondée à récupérer le trop-perçu par lui que pour les quatre derniers mois.

7. En second lieu, dans le cas d’un recours portant à titre principal sur la légalité d’un titre exécutoire, si le requérant à l’encontre duquel a été émis ce titre se porte à titre subsidiaire sur le terrain indemnitaire, le juge de plein contentieux peut, tout en confirmant intégralement ou partiellement le bien-fondé du montant de la créance concernée par le titre exécutoire, condamner la partie qui a émis le titre à verser au requérant une somme à titre de dommages et intérêts pouvant, selon l’éventuel partage de responsabilité retenu par le juge, atteindre 100 % du montant du titre. Le juge ne peut toutefois prononcer une telle condamnation indemnitaire que s’il est saisi de conclusions chiffrées en ce sens et, même ainsi saisi, ne peut en tout état de cause opérer une compensation financière entre le montant du titre exécutoire restant dû et le montant de la condamnation indemnitaire prononcée.

8. Il résulte de l’instruction que M. F… n’a formulé explicitement aucune conclusion indemnitaire chiffrée à l’encontre de la commune de la Chapelle Saint-Mesmin mais s’est uniquement borné à invoquer une carence de sa part dans le traitement de son dossier de mise à la retraite pour invalidité. Par suite, et alors au demeurant que l’intéressé ne démontre aucune faute de la commune dans la gestion de sa fin de carrière, le requérant n’est pas fondé à soutenir que les sommes litigieuses lui auraient été versées en compensation des troubles dans ses conditions d’existence résultant du manque de diligence de la commune et qu’en conséquence, la commune ne pourrait lui en demander le reversement.

Sur les conclusions tendant à la réduction de la somme demandée :

9. Il résulte de l’instruction que la somme de 9 615,67 euros dont le remboursement est demandé à M. F… correspond aux traitements qu’il a perçus, diminués de la part salariale des cotisations de retraite et des cotisations Urssaf. Si l’intéressé ne conteste pas ce calcul, en revanche, il soutient que la commune ne pouvait intégrer dans ses salaires les cotisations versées à sa mutuelle au titre du régime complémentaire de santé. Les bulletins de paie de l’intéressé de l’année 2015 font cependant apparaître un versement mensuel de 180,80 euros à la mutuelle MNT. Par suite, la commune, qui versait cette somme à cet organisme par un système de précompte, était fondée à les ajouter aux traitements perçus par M. F… et, en conséquence, à lui en demander le remboursement. Dans ces conditions, le requérant n’est pas fondé à soutenir que la somme réclamée par la commune ne saurait être supérieure à 6 959,07 euros.

10. Il résulte de ce tout ce qui précède, que M. F… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de la Chapelle Saint-Mesmin, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. F… de la somme qu’il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de M. F… le versement à la commune de la Chapelle Saint-Mesmin de la somme qu’elle demande sur le même fondement.


DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de la Chapelle Saint-Mesmin tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D… F… et à la commune de la Chapelle Saint-Mesmin.

Délibéré après l’audience du 27 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

 – M. Gaspon, président de chambre,

 – M. Coiffet, président-assesseur,

 – Mme B…, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 19NT02096

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