CAA de NANTES, 2ème chambre, 26 février 2021, 19NT01876, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 2e ch., 26 févr. 2021, n° 19NT01876
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 19NT01876
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 7 mars 2019, N° 1610534, 1610535
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043204733

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Enedis a demandé au tribunal administratif de Nantes, d’une part, d’annuler l’arrêté du 17 octobre 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a infligé une amende administrative sur le fondement des dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement et, d’autre part, d’annuler l’arrêté du 17 octobre 2016 par lequel cette même autorité lui a infligé une amende administrative sur le fondement des dispositions du 4° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement.

Par un jugement n° 1610534, 1610535 du 8 mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a, après les avoir jointes, rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 mai 2019 et le 21 février 2020, la société Enedis, représentée par Me D…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 mars 2019 ;

2°) d’annuler les arrêtés contestés ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- faute de mentionner le délai dans lequel les amendes devaient être payées, les arrêtés du préfet de la Loire-Atlantique du 17 octobre 2016 méconnaissent les dispositions de l’article R. 554-37 du code de l’environnement ;

- le second rapport réalisé par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement ne lui a pas été transmis préalablement à l’édiction des arrêtés lui infligeant des amendes, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 171-6 du code de l’environnement ;

- n’étant pas responsable du projet au sens de l’article R. 554-1 du code de l’environnement, les sanctions litigieuses ne pouvaient légalement lui être infligées ;

- subsidiairement, en prononçant à son encontre l’amende prévue par les dispositions du 4° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement, le préfet de la Loire-Atlantique a méconnu les dispositions de l’article R. 554-23 du même code ;

- en prononçant à son encontre l’amende prévue par les dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement, qui, de surcroît, ne concernent pas les défauts de renouvellement de déclarations, le préfet de la Loire-Atlantique a fait une inexacte application des dispositions du V de l’article R. 554-22 de ce code.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’environnement ;

 – le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme C…,

 – les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

 – et les observations de Me B…, substituant Me D… et représentant la société Enedis.

Considérant ce qui suit :

1. Le 5 avril 2016, à l’occasion de travaux réalisés dans le cadre d’un programme d’enfouissement des lignes à haute tension de l’entreprise ERDF, devenue la société Enedis, un pipeline exploité par Total et reliant la raffinerie de Donges au dépôt de Vern-sur-Seiche a été accidentellement perforé à Campbon (Loire-Atlantique). A l’issue d’une enquête administrative, le préfet de la Loire-Atlantique a, par deux arrêtés du 17 octobre 2016, infligé à la société Enedis deux amendes administratives, d’un montant de 1 500 euros chacune, sur le fondement des dispositions des 3° et 4° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement. La société Enedis relève appel du jugement du 8 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l’annulation des arrêtés du 17 octobre 2016.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Aux termes de l’article L. 554-1 du code de l’environnement : « I. – Les travaux réalisés à proximité des ouvrages constituant les réseaux souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution ou à proximité des ouvrages mentionnés à l’article L. 562-8-1 sont effectués dans des conditions qui ne sont pas susceptibles de porter atteinte à leur intégrité, sécurité ou continuité de fonctionnement, à l’environnement, à la sécurité des travailleurs et des populations situées à proximité du chantier ou à la vie économique. / II. – Lorsque des travaux sont réalisés à proximité d’un ouvrage mentionné au I, des dispositions techniques et organisationnelles sont mises en oeuvre, dès le début du projet et jusqu’à son achèvement, sous leur responsabilité et à leurs frais, par le responsable du projet de travaux, par les exploitants des ouvrages et par les entreprises exécutant les travaux. / (…) ». Aux termes de l’article R. 554-35 du code de l’environnement : " (…), une amende administrative dont le montant ne peut être supérieur à 1 500 euros peut être appliquée lorsque : / (…) / 3° Le responsable du projet n’adresse pas à un ou plusieurs des exploitants concernés, autres que ceux de canalisations mentionnées à l’article L. 554-5, la déclaration de projet de travaux prévue à l’article R. 554-21 ; / 4° Le responsable du projet commande des travaux sans avoir communiqué à l’exécutant les déclarations et réponses aux déclarations de projet de travaux correspondantes ou sans avoir prévu les investigations complémentaires ou les clauses contractuelles appropriées, lorsque celles-ci sont nécessaires en application de l’article R. 554-23, ou sans avoir communiqué le résultat de ces investigations aux exploitants concernés ; / (…) ".

3. En premier lieu, la société Enedis réitère en appel les moyens soulevés en première instance et tirés de la méconnaissance de l’article R. 554-37 du code de l’environnement et de la méconnaissance de l’article L. 171-6 du même code. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

4. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction que pour infliger à la société Enedis la sanction prévue par les dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement, le préfet de la Loire-Atlantique s’est fondé sur la circonstance que les déclarations de travaux émises le 18 février 2013 n’avaient pas été renouvelées alors que l’article R. 554-22 prévoit un délai de validité de trois mois. Toutefois, les dispositions du 3° de l’article R. 554-35, lesquelles, s’agissant d’une sanction, sont d’interprétation stricte, s’appliquent au défaut de déclaration de projets de travaux prévue à l’article R. 554-21 du code de l’environnement et non au défaut de renouvellement exigé par l’article R. 554-32 du même code. L’arrêté du 17 octobre 2016 infligeant à la société Enedis une sanction de 1 500 euros sur le fondement des dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement est, par suite, illégal.

5. En troisième lieu, le préfet de la Loire-Atlantique a relevé que la société Enedis n’avait ni annexé les récépissés de ses déclarations de projet de travaux au dossier de consultation des entreprises ni prévu de clauses contractuelles permettant à l’exécutant de travaux de prendre les précautions particulières tenant compte de l’incertitude de localisation des réseaux souterrains.

6. D’une part, l’article R. 554-1 du code de l’environnement définit le responsable de projet au sens et pour l’application de la réglementation relative à la sécurité des réseaux souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution, comme la personne pour le compte de laquelle les travaux sont exécutés ou son représentant ayant reçu délégation. En l’espèce, il résulte de l’instruction que, le 16 janvier 2013, la société Enedis a conclu avec la société ARC un marché global dit d’achat d’ouvrage portant sur six affaires relatives à l’enfouissement des lignes à haute tension dans le secteur de Pontchâteau, chaque affaire devant donner lieu à une commande « études » et une commande « travaux ». A ce titre, le cahier des clauses techniques particulières « Etudes » qui, selon son résumé, présente « les exigences applicables aux prestations d’études pour le compte d’ERDF qu’elles soient réalisées par un Titulaire ou par un chargé d’affaires ERDF », prévoit que ERDF « confie au Titulaire par une commande tout ou partie des prestations énumérées ci-après ». Plusieurs clauses des documents contractuels versés à l’instruction prévoient, il est vrai, que le « titulaire » du marché prépare et adresse les déclarations de projet de travaux mentionnées à l’article R. 554-21 du code de l’environnement. Toutefois, il résulte de l’économie générale du contrat que si ERDF a entendu confier certaines missions au titulaire du marché, cette entreprise, qui en vertu de l’article 3 des conditions particulières d’achat a créé en son sein une équipe projet « maîtrise d’ouvrage » et qui est la seule à pouvoir lever les « points d’arrêt » en cas de difficultés, a conservé ses prérogatives de maître d’ouvrage. Les déclarations de projet de travaux ont d’ailleurs été signées par ERDF comme le prévoit au demeurant l’article 35.4 du cahier des clauses techniques particulières « Travaux ». Dans ces conditions et en tout état de cause, la société Enedis ne peut être regardée comme ayant délégué à la société ARC sa qualité de responsable de projet au sens de l’article R. 554-1.

7. D’autre part, les articles 20 et 31 des clauses particulières d’achat de même que l’annexe du cahier des clauses techniques particulières « Travaux » prévoient que l’issue de la phase d’études est matérialisée par un « dossier d’études » qui doit être remis par le titulaire du marché à ERDF au moins quatre semaines avant le début des travaux. L’article 37-2 des clauses particulières d’achat prévoit, en outre, la remise en fin de prestation d’un « dossier travaux » notamment constitué du dossier de consultation des entreprises. Ce dossier est destiné à mettre ERDF à même de désigner un exécutant de travaux en lançant un appel d’offres ou en passant la commande « travaux » auprès d’ARC. Alors qu’il ne résulte pas de l’instruction qu’un tel appel d’offres ait eu lieu, il n’est ni établi ni même allégué qu’un dossier, comportant toutes les déclarations de projet de travaux et réponses à ces déclarations recueillies durant l’élaboration du projet, ait été annexé à la commande « Travaux » passée auprès de la société ARC. Si cette dernière s’était vu confier le soin d’exécuter certaines des obligations incombant au responsable de projet, il est constant que celles-ci ont fait l’objet d’un contrat de sous-traitance. En outre, la société requérante ne conteste pas que les documents contractuels liant ERDF à la société ARC ne prévoyaient aucune clause notamment financière permettant à cette dernière de prendre les dispositions nécessaires à la localisation précise des réseaux et à leur protection. La société requérante ne saurait sérieusement se prévaloir de son choix de passer un marché global alors qu’il lui appartenait de prévoir dans ce marché les stipulations lui permettant de se conformer à ses obligations réglementaires. Ainsi, la sanction infligée par le préfet de la Loire-Atlantique sur le fondement des dispositions du 4° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement est légalement fondée.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la société Enedis est seulement fondée à demander l’annulation du jugement du 8 mars 2019 en tant qu’il rejette sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 octobre 2016 lui infligeant une sanction sur le fondement des dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de l’Etat le versement à la société Enedis d’une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E:


Article 1er : L’arrêté du 17 octobre 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a infligé à la société Enedis une sanction administrative sur le fondement des dispositions du 3° de l’article R. 554-35 du code de l’environnement et le jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 mars 2019 en tant qu’il rejette la demande tendant à l’annulation de cet arrêté sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Enedis et au ministre de la transition écologique.

Délibéré après l’audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :


- M. Pérez, président de chambre,

- Mme A…, présidente assesseur,

- Mme C…, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 février 2021.

Le rapporteur,

K. C…

Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 19NT01876

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