Cour administrative d'appel de Paris, 4 octobre 2012, n° 11PA04440

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 4 oct. 2012, n° 11PA04440
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 11PA04440
Décision précédente : Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, 12 juillet 2011, N° 10379

Texte intégral

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

N° 11PA04440


Association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi

__________

Mme Lackmann

Président

__________

M. Bergeret

Rapporteur

__________

Mme Vidal

Rapporteur public

__________

Audience du 20 septembre 2012

Lecture du 4 octobre 2012

__________

dr

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Paris

(1re Chambre)

C

Vu la requête, enregistrée le 13 octobre 2011, présentée pour l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, ayant son siège route municipale 7 Ouenghi, BP 237 à Boulouparis (98812), par Me Clément ; l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 10379 du 13 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 13 septembre 2011 par laquelle le président de l’assemblée de la province Sud a refusé de prononcer la fermeture de l’installation classée d’aviculture exploitée à Boulouparis par la SARL Ferme de la Coulée ;

2°) d’annuler cette décision ;

3°) d’enjoindre au président de l’assemblée de la province Sud d’ordonner la fermeture de l’installation ;

4°) de mettre à la charge de la province Sud la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la délibération de l’assemblée territoriale n° 14 du 21 juin 1985 modifiée relative aux installations classées pour la protection de l’environnement ;

Vu la délibération n° 25-2009/APS du 20 mars 2009 relative au code de l’environnement de la province Sud ;

Vu l’arrêté n° 67-99 du 23 août 1999 fixant les règles techniques et prescriptions générales applicables aux élevages de volailles et de gibier à plumes soumis à déclaration selon la nomenclature annexée à la délibération n° 145-95/APN du 12 octobre 1995 rubrique 40.4 ;

Vu le code de justice administrative dans sa version applicable à la Nouvelle Calédonie ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 20 septembre 2012 :

— le rapport de M. Bergeret, rapporteur,

— les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,

— les observations de Me Clement pour l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi et celles de Me Lazennec pour la province Sud,

— et connaissance prise de la note en délibéré présentée le 26 septembre 2012 pour l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, par Me Clément ;

1. Considérant que par courrier en date du 25 juin 2010, l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi a demandé au président de l’assemblée de la province Sud d’ordonner la fermeture de l’installation d’élevage avicole et de production d’œufs exploitée par la SARL Ferme de la Coulée sur la commune de Boulouparis en application d’un arrêté d’autorisation d’installation classée pour la protection de l’environnement en date du 9 septembre 2008, en se prévalant des nuisances graves et persistantes causées par cette exploitation ; que, par décision du 13 septembre 2010, le président de l’assemblée de la province Sud a rejeté cette demande ; que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi relève appel du jugement en date du 13 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision ;

Sur la recevabilité de l’appel :

2. Considérant, d’une part, que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, demanderesse en première instance, disposait en cette qualité d’un intérêt pour faire appel ; que, d’autre part, elle produit une délibération en date du 12 octobre 2011 de son assemblée générale, qui donne mandat à son président pour faire appel du jugement précité ; qu’ainsi, et dès lors qu’aucune disposition de ses statuts, dont elle a produit copie devant les premiers juges, n’habilite expressément un autre organe pour la représenter en justice, son président était régulièrement habilité à présenter en son nom la requête d’appel ; qu’il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir présentées par la province Sud doivent être rejetées ;

Sur l’intervention de M. Léon A :

3. Considérant que dès lors qu’il ressort de l’instruction que M. A, ancien président de l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, est propriétaire voisin de l’élevage avicole litigieux, et que son intervention doit ainsi être admise ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant, en premier lieu, que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi soutient que le jugement est insuffisamment motivé, en méconnaissance de l’article L. 9 du code de justice administrative, dès lors qu’il n’explique pas en quoi l’enfouissement sur le site, en juin 2010, de milliers de volailles abattues lors de l’épidémie de salmonellose ayant frappé l’élevage ne pourrait être assimilé à une « décharge » ; que ce moyen doit être écarté en tout état de cause dès lors que les premiers juges se sont bornés à indiquer que la requérante ne pouvait utilement présenter l’argument résumé ci-dessus ;

5. Considérant, en second lieu, que le tribunal n’était pas tenu de répondre à tous les arguments de la requérante ; que dès lors, la circonstance que le jugement attaqué n’aurait pas écarté spécifiquement les arguments tirés de ce que l’exploitant aurait été dans l’incapacité de se conformer aux prescriptions de son arrêté d’autorisation et ne se serait pas conformé aux arrêtés du 12 juillet 2010 portant prescriptions complémentaires ne constitue pas l’omission à statuer invoquée par l’association appelante ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi n’est pas fondée à soutenir que le jugement est entaché d’irrégularité ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

7. Considérant, en premier lieu, qu’il ressort de l’article 2 des statuts de l’association appelante, aux termes duquel elle s’est donnée pour but « la protection et la défense contre toutes pollutions ainsi que la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, y compris Port-Ouenghi », qu’elle disposait ainsi d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la décision précitée ;

8. Considérant, en second lieu, que si l’article 9 des statuts de cette association prévoit qu’elle est dirigée par son conseil d’administration, il ne désigne pas, ainsi, un organe spécifiquement compétent pour décider une action en justice et pour représenter l’association devant les juridictions ; que, par suite, l’assemblée générale de l’association en donnant, aux termes de sa délibération en date du 6 février 2008, « tous pouvoirs au président, aux fins d’agir en justice », a régulièrement mandaté celui-ci pour, notamment, introduire en son nom l’action envisagée devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie à l’encontre de la décision en date du 13 septembre 2011 par laquelle le président de l’assemblée de la province Sud a refusé de prononcer la fermeture de l’exploitation avicole de la SARL Ferme de la Coulée ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la province Sud n’est pas fondée à soutenir que la demande présentée devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie par l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi était irrecevable ;

Au fond :

10. Considérant, en premier lieu, que l’association appelante fait valoir qu’en reconnaissant d’une part l’incapacité de l’exploitant à respecter les prescriptions imposées, de même que l’incapacité de l’administration à les faire respecter, et d’autre part l’absence d’atteinte aux intérêts protégés par l’article 412-1 du code de l’environnement de la province Sud, le jugement serait entaché d’une contradiction de motifs ; qu’il ressort cependant des termes du jugement qu’il se fonde sur la circonstance qu’il n’était pas impossible de remédier auxdites atteintes par des prescriptions adaptées, sans qu’il soit nécessaire de procéder à la fermeture de l’exploitation ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi ne s’est prévalue devant les premiers juges que de ce que la décision attaquée était entachée d’erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article 416-7 du code de l’environnement de la province Sud ; que par suite, le moyen qu’elle présente devant la Cour, tiré de ce que cette décision est entachée d’une insuffisance de motivation, est irrecevable comme fondé sur une cause juridique distincte ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 416-7 du code de l’environnement de la province Sud : « Un arrêté du président de l’assemblée de province peut ordonner la fermeture ou la suppression de toute installation, figurant ou non dans la nomenclature, qui présente, pour les intérêts mentionnés à l’article 412-1, des dangers ou inconvénients tels que les mesures prévues par le présent titre ne puissent les faire disparaître » ; que l’article 412-1 du même code dispose : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers, et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature et de l’environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments (…) » ;

13. Considérant que pour soutenir qu’en refusant de prononcer la fermeture de l’élevage avicole exploité par la SARL Ferme de la Coulée à Boulouparis, le président de l’assemblée de la province Sud a méconnu les dispositions précitées de l’article 416-7 du code de l’environnement de la province Sud, l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi, qui soutient sans l’établir que l’arrêté d’autorisation n’était pas assorti des prescriptions nécessaires, fait valoir que le non respect par l’exploitant d’un certain nombre de ces prescriptions est à l’origine de dangers ou inconvénients, pour les intérêts visés par l’article 412-1, auxquels seule une mesure de fermeture pourrait remédier ; que s’il ressort ainsi en effet de l’instruction que l’exploitant a renoncé à mettre en service le système de granulation de fientes, présenté dans son dossier de demande comme écologique et performant, s’est abstenu de procéder à un certain nombre des analyses périodiques prescrites sur la qualité des eaux de surface à proximité de l’exploitation, et n’a pas mis en œuvre le système prévu de captage des poussières, les prescriptions complémentaires ou mesures coercitives que le président de l’assemblée de province est habilité à prendre en vertu du code de l’environnement de la province Sud, et qu’il a d’ailleurs partiellement mises en œuvre, sont de nature, sans qu’il soit besoin de recourir à la fermeture de l’exploitation, à remédier aux dangers et inconvénients créées par ces divers manquements ; qu’il en est de même, à les supposer établis, des manquements allégués à l’encontre de l’exploitant qui, selon l’association, appelante ne respecterait pas les règles d’hygiène imposées à l’élevage, aurait accueilli dans les bâtiments d’élevage des volailles en nombre supérieur à celui autorisé, procéderait de façon habituelle à l’enfouissement sur le site de déchets organiques, ou encore procéderait à des transports de fientes dans des conditions de nature à nuire à la salubrité et à la santé publique ; que par ailleurs, si l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi fait valoir que l’enfouissement sur place des 30 000 volailles abattues lors de l’épidémie de salmonellose qui s’est déclarée dans l’exploitation en avril 2010 a créé un risque important de pollution des sols et eaux souterraines, ainsi que des eaux de surface en aval du site, il ne ressort pas de l’instruction que l’administration, alors même que les prescriptions et mesures prises à cet égard à l’encontre de l’exploitant n’ont pas toutes été suivies d’effet en temps utile, devait nécessairement, pour faire cesser cette menace de pollution, prendre une mesure de fermeture de l’installation ;

14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande ;

Sur l’injonction :

15. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande de l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi tendant à ce qu’il soit enjoint au président de l’assemblée de la province Sud d’ordonner la fermeture de l’installation doit être rejetée ; qu’en revanche, eu égard aux carences avérées de l’administration dans sa mission de contrôle de cette installation classée pour la protection de l’environnement, il y a lieu d’enjoindre au président de l’assemblée de la province Sud, d’une part, de procéder, dans un délai de trois mois, à la mise à jour des prescriptions annexées à l’arrêté d’autorisation de l’exploitation avicole pour tenir compte de l’abandon par l’exploitant du procédé de granulation de fientes et, d’autre part, de prendre toute mesure de nature à faire assurer par l’exploitant le respect effectif de ses obligations d’analyses périodiques de la qualité des eaux de surface à proximité de l’exploitation ;

Sur les conclusions de la province Sud tendant au prononcé d’une amende pour recours abusif :

16. Considérant qu’aux termes de l’article R. 741-12 du code de justice administrative : « Le juge peut infliger à l’auteur d’une requête qu’il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros » ; que la faculté prévue par cette disposition constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la province Sud tendant à ce que l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi soit condamnée au paiement d’une telle amende ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par l’association pour la protection de l’environnement de la vallée de la Ouenghi doivent dès lors être rejetées ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions que la province Sud présente à son encontre sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : L’intervention de M. Léon A est admise.

Article 2 : Il est enjoint au président de l’assemblée de la province Sud, d’une part, de procéder, dans un délai de trois mois, à la mise à jour des prescriptions annexées à l’arrêté d’autorisation de l’exploitation avicole de la SARL Ferme de la Coulée pour tenir compte de l’abandon par l’exploitant du procédé de granulation de fientes et, d’autre part, de prendre toute mesure de nature à faire assurer par l’exploitant le respect effectif de ses obligations d’analyses périodiques de la qualité des eaux de surface à proximité de l’exploitation.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la province Sud tendant au prononcé d’une amende pour recours abusif et à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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