Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 décembre 2014, 14PA01426, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 10e ch., 31 déc. 2014, n° 14PA01426
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 14PA01426
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 28 janvier 2014, N° 1302077/8
Identifiant Légifrance : CETATEXT000030085092

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2014, présentée pour Mme D… A…, demeurant au…, par la société Vigo cabinet d’avocats ; Mme A… demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1302077/8 du 29 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du

22 janvier 2013 par laquelle la résidence de services Abbaye-Bords de Marne a prononcé sa radiation des cadres ensemble la décision du 8 mars 2013 rejetant sa réclamation préalable, d’autre part, à la condamnation de la résidence services Abbaye-Bords de Marne à lui verser la somme de 43.940,22 euros en réparation des préjudices subis ;

2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision précitée du 22 janvier 2013 ;

3°) de condamner la résidence de services Abbaye-Bords de Marne à lui verser la somme de 43.940,22 euros ;

4°) de mettre à la charge de la résidence de services Abbaye-Bords de Marne le versement d’une somme de 12.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l’instance, y compris la contribution pour l’aide juridique prévue à l’article R. 761-1 du même code ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 décembre 2014 :

— le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

— les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

— et les observations de Me B… pour Mme A… et de Me C… pour la résidence de services Abbaye-Bords de Marne ;

1. Considérant que, par décision du 22 janvier 2013, le directeur de la résidence de services Abbayes-Bords de Marne, établissement public d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, a prononcé la radiation des cadres de Mme A…, recrutée par contrat à durée indéterminée du 1er juillet 2009 en qualité de pharmacienne ; que Mme A… relève régulièrement appel du jugement du 29 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision ainsi qu’à la condamnation de la résidence de services Abbayes-Bords de Marne à lui verser la somme de 43.940,22 euros en réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. Considérant qu’une mesure de radiation de cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l’agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu’il appartient à l’administration de fixer ; qu’une telle mise en demeure doit prendre la forme d’un document écrit, notifié à l’intéressé, l’informant du risque qu’il encourt d’une radiation de cadres sans procédure disciplinaire préalable ; que lorsque l’agent ne s’est ni présenté ni n’a fait connaître à l’administration aucune intention avant l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l’absence de toute justification d’ordre matériel ou médical, présentée par l’agent, de nature à expliquer le retard qu’il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d’estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l’intéressé ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 janvier 2013, le directeur de la résidence de services Abbaye-Bords de Marne, après avoir constaté l’absence sans justificatif de la requérante depuis le 10 janvier 2013 lui a demandé de régulariser sa situation " en reprenant [son] travail ou en envoyant un justificatif d’absence au plus tard 8 jours après réception de ce courrier faute de quoi, [elle]sera licenciée pour abandon de poste, sans procédure disciplinaire préalable. » ; que cette mise en demeure informe ainsi précisément l’intéressée du risque de licenciement, et par voie de conséquence de radiation des cadres, sans procédure disciplinaire ; que, par suite, Mme A… n’est pas fondée à soutenir que la décision en litige a été prise au terme d’une procédure irrégulière ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision du 22 janvier 2013 qui vise notamment les textes applicables et l’absence de Mme A… sans justificatif depuis le 10 janvier 2013 comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle est fondée ; qu’ainsi le moyen tiré de son insuffisante motivation ne peut être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, et ainsi qu’il a été dit au point 2, que le refus par un agent en activité de rejoindre l’emploi auquel il est affecté malgré la mise en demeure qui lui a été faite manifeste, lorsqu’il ne trouve pas sa cause dans un motif légitime, la volonté de cet agent de rompre ses liens avec le service ; que Mme A…, agent contractuel de droit public, qui ne peut en conséquence utilement se prévaloir d’une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail, doit être regardée, en faisant état de la violation du code de la santé publique par la résidence de services Abbaye-Bords de Marne et du harcèlement moral dont elle s’estime victime, comme invoquant des motifs légitimes justifiant son refus de reprendre son travail ;

6. Considérant, d’une part, qu’à supposer même que les demandes faites par la direction de la résidence de services à Mme A… aient été contraires aux dispositions de l’article

L. 5126-1 du code de la santé publique, la requérante n’établit pas plus en appel qu’en première instance que les ordres qu’elle a reçus étaient de nature à compromettre gravement un intérêt public ; qu’ainsi, comme l’a jugé le Tribunal administratif de Melun, Mme A… n’est pas fondée à soutenir que ce motif était légitime et de nature à justifier son absence ;

7. Considérant, d’autre part, qu’aux termes du premier alinéa de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : « Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ; que pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique ; que, dès lors qu’elle n’excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l’intérêt du service, en raison d’une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n’est pas constitutive de harcèlement moral ; qu’il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement ; qu’il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile ;

8. Considérant que Mme A… soutient que le motif légitime de son abandon de poste est constitué par les faits de harcèlement moral dont elle a été victime ; qu’elle fait valoir que la direction de l’établissement lui a refusé une formation, que ses congés ont fait l’objet de demandes d’explications, qu’elle a cessé à partir de juin 2012 d’être destinataire des compte rendu de réunion de cadres et qu’il lui a été proposé en complément de son poste au sein de la résidence de services Abbaye-Bords de Marne un remplacement de pharmacien dans un établissement de santé distant de 15 kilomètres de son lieu de travail ; que, toutefois, ces différents faits répétés n’excèdent pas les limites de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique, dès lors que le refus de formation était motivé par l’intérêt du service, que les congés de l’intéressée lui ont été accordés après qu’elle a respecté les modalités prévues pour les solliciter, qu’elle a pu assister aux réunions de cadres concernant son secteur d’activité, que le remplacement d’un pharmacien dans un autre établissement n’était qu’une proposition de complément d’activité en sus de celle qu’elle exerçait déjà ; que, par ailleurs, elle n’a sollicité la réévaluation de sa rémunération qu’en 2012 ; qu’ainsi, et en dépit du certificat médical, au demeurant établi sur les seules déclarations de l’intéressée, pour attester de son état d’anxiété, Mme A… ne produit en tout état de cause, pas d’éléments de nature à permettre de faire présumer qu’elle aurait été victime de faits de harcèlement moral pouvant constituer un motif légitime de son abandon de poste ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme A… doit être regardée comme ayant manifesté sa volonté de rompre tout lien avec son administration, que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d’annulation de la décision du 22 janvier 2013 portant radiation des cadres ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d’indemnisation :

10. Considérant qu’à l’appui de ses conclusions aux fins d’indemnisation, Mme A… fait valoir que la responsabilité de la résidence de services Abbaye-Bords de Marne est engagée du fait du harcèlement moral dont elle a été victime et de l’illégalité de la décision du 22 janvier 2013 prise au terme d’une procédure irrégulière ; qu’elle se prévaut par ailleurs d’une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail de droit public pour solliciter le versement d’une indemnité de préavis, d’une indemnité de licenciement, d’une indemnité de congés payés et de dommages et intérêts en raison du caractère infondé de son licenciement ; que, toutefois, Mme A… n’apporte sur ces points aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l’appréciation portée par le Tribunal administratif de Melun sur son argumentation de première instance ; qu’il y a lieu, dès lors, d’écarter les moyens qu’elle soulève en appel par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme A… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ; que, par ailleurs, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A…, partie perdante en la présente instance, une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par la résidence de services Abbaye-Bords de Marne et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu en outre, de laisser à la charge de Mme A… la contribution pour l’aide juridique prévue à l’article R. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :


Article 1er : La requête de Mme A… est rejetée.

Article 2 : Mme A… versera à la résidence de services Abbaye-Bords de Marne une somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 14PA01426

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