CAA de PARIS, 10ème chambre, 30 mai 2017, 16PA02102, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 10e ch., 30 mai 2017, n° 16PA02102
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 16PA02102
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 24 avril 2016, N° 1407947/5-3
Identifiant Légifrance : CETATEXT000034850140

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A… B… a demandé au Tribunal administratif de Paris d’annuler la décision implicite de rejet par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a rejeté sa demande d’indemnisation des préjudices subis à la suite de la suppression du statut des conservateurs des hypothèques par l’article 30 du décret n° 2009-208 du 20 février 2009.

Par jugement n° 1407947/5-3 du 25 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juillet 2016, M. B…, représenté par Me C…, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1407947/5-3 du 25 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 37 205 euros à parfaire augmentée des intérêts légaux, en réparation du préjudice financier subi ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le jugement attaqué est entaché d’erreur de droit et d’erreur d’appréciation car la responsabilité pour faute de l’Etat doit être engagée dès lors qu’en l’excluant du dispositif de compensation de perte de revenu institué par note du 20 juin 2013 du directeur général des finances publics, le principe d’égalité de traitement a été méconnu ; que l’attribution de cette garantie de maintien des rémunérations suite de la suppression du statut des conservateurs des hypothèques devait s’appliquer à l’ensemble des conservateurs des hypothèques quelles que soient leur catégorie d’appartenance et leur réaffectation dans un nouveau corps ;

 – pour les motifs sus-invoqués, sa demande en réparation du préjudice subi à hauteur de 37 205 euros est fondée ;

 – " dans la mesure où sa requête est fondée, la Cour écartera les deux fins de

non-recevoir soulevées en première instance par le ministre ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2016, le ministre de l’économie et des finances, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique enregistré le 27 février 2017, présenté par la Selarl d’avocats Cornet-Vincent-Ségurel, qui se substitue à la Selarl Publi-Juris, M. B… maintient ses conclusions.

Il reprend ses précédents moyens et soutient, en outre, que la différence de traitement instaurée entre les conservateurs des hypothèques de différentes catégories par la note du 20 juin 2013 était manifestement disproportionnée et contraire au principe d’égalité de traitement, que le Tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit en estimant qu’il n’avait pas été détaché d’office sur l’emploi de chef de service de la publicité foncière et qu’il ne pouvait pas se prévaloir des dispositions du décret du 16 septembre 1985 dès lors que la rémunération des conservateurs des hypothèques n’était pas liée à une rémunération indiciaire, qu’en l’excluant de l’engagement de garantie de rémunération pris à titre professionnel par le D.G.F.I.P. de l’époque et sur la base duquel il s’est ensuite positionné et a accepté sa promotion sur le bureau de Paris 8, l’administration a porté atteinte au principe de sécurité juridique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

 – l’ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010 ;

 – le décret modifié n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

 – le décret modifié n° 2006-814 du 7 juillet 2006 ;

 – le décret n° 2009-208 du 20 février 2009 ;

 – le décret n° 2010-467 du 7 mai 2010 ;

 – le décret n° 2010-986 du 26 août 2010 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Pagès,

 – les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

 – et les observations de M. B….

Une note en délibéré, enregistrée le 19 mai 2017, a été présentée par M. B….

1. Considérant que M. B… a été nommé conservateur des hypothèques à Nantes le 1er septembre 2010, puis conservateur des hypothèques de 1re catégorie à compter du 30 décembre 2011 au bureau des hypothèques de Paris 8 ; qu’à la suite de la suppression des conservations des hypothèques et de la mise en extinction du grade de conservateur des hypothèques à compter du 1er janvier 2013, il a été détaché dans le corps des administrateurs des finances publiques et classé au 3e échelon du grade d’administrateur général des finances publiques (AGFIP) de 1re classe, indice 1320 (hors échelle E, 2e chevron), pour une durée de 7 mois, par arrêté du directeur général des finances publiques du 2 janvier 2013, publié au Bulletin officiel des finances publiques du 3 mars 2014 ; qu’il a été affecté au service de la publicité foncière de Paris 8 en qualité de chef de service ; que par arrêté du 19 juin 2013, M. B… a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er août 2013 ; qu’il est constant qu’il a quitté cette fonction le 31 juillet 2013 ; que, par courrier de la direction générale des finances publiques en date du 26 décembre 2013, il a été informé qu’il ne bénéficierait pas du dispositif gracieux de garantie de maintien de rémunération qui avait été envisagé en faveur des conservateurs des hypothèques ayant subi une perte de rémunération à compter du 1er janvier 2013 ; qu’il a présenté une réclamation préalable auprès du ministre des finances et des comptes publics le 26 février 2014 qui a été implicitement rejetée ; que M. B… relève régulièrement appel du jugement du 25 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir soulevées en première instance par le ministre des finances et des comptes publics ;

Sur la responsabilité pour faute de l’administration :

En ce qui concerne la méconnaissance du principe d’égalité :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 30 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 : " I.- Dans les conditions prévues par l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, des mesures qui relèvent du domaine de la loi, pour : 1° Instituer à compter du 1er janvier 2013 une taxe au profit de l’Etat due par les usagers du service de la publicité foncière, aux mêmes conditions d’assiette, de tarif, de contrôle et de recouvrement que le salaire du conservateur prévu par l’article 879 du code général des impôts qu’elle remplace ; 2° substituer à compter de cette même date et sans remettre en cause le service rendu à l’usager, la responsabilité de l’Etat à celle des conservateurs des hypothèques tant dans l’exécution du service public de la publicité foncière que dans les obligations en résultant et des droits et biens qui les garantissent (…) » ; qu’aux termes de l’article 18 de l’ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010 portant suppression du régime des conservateurs des hypothèques : « I. Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2013. / (…) II. Les salaires des conservateurs des hypothèques dus en application de l’article 881 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2012, sont acquittés au profit du Trésor à compter du 1er janvier 2013. / Le paiement des salaires des conservateurs des hypothèques, exigé sur le fondement d’avis de mise en recouvrement prévus à l’article L. 256 du livre des procédures fiscales, est effectué au profit du Trésor à compter du 1er janvier 2013 » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’à la date du 1er janvier 2013, l’administration était tenue de placer les conservateurs encore en activité à cette date dans une position statutaire régulière afin d’assurer la continuité de leur carrière ;

3. Considérant qu’en application des dispositions de l’article 5-3 du décret n° 2006-814 du 7 juillet 2006 modifié par le décret n° 2010-988 du 26 août 2010, les conservateurs des hypothèques occupant au 31 décembre 2012 un bureau des hypothèques de catégories 3 à 6, ont pu être nommés dans l’emploi de chef des services comptables à compter du 1er janvier 2013 ; que les conservateurs des hypothèques occupant au 31 décembre 2012 un bureau des hypothèques de catégories 1 et 2 correspondant à un volume d’affaires plus important, ont été détachés dans le corps des administrateurs des finances publiques et classés dans le grade d’administrateur général des finances publiques de 1re classe ou de classe normale ;

4. Considérant que M. B… fait valoir qu’en excluant les conservateurs des hypothèques de catégories 1 et 2 du dispositif purement gracieux de garantie de maintien de rémunération mis en place dans le cadre de la suppression du régime des conservateurs des hypothèques par note de service du 20 juin 2013, l’administration a méconnu le principe d’égalité ; qu’un avantage non prévu par un texte au profit d’un agent public doit s’appliquer à l’ensemble des agents se trouvant dans une situation analogue, sauf motif d’intérêt général ; qu’à la lecture du courrier du directeur général des finances publiques du 26 décembre 2013, le dispositif de garantie n’était pas limité aux seuls agents des catégories 3 à 6 ; que la circonstance qu’il soit rattaché à la catégorie 1 ne faisait pas obstacle à ce qu’il bénéficiât de la garantie du maintien de sa rémunération ;

5. Considérant qu’il est constant que jusqu’au 31 décembre 2012, les conservateurs des hypothèques régis par le décret du 2 août 1995 percevaient une rémunération proportionnelle au volume financier des affaires traitées annuellement par le bureau dont ils avaient la responsabilité classé en 6 catégories, dans les conditions alors définies par les articles 879 et suivants du code général des impôts ; que le législateur n’a pas imposé lors de leur reclassement à compter du 1er janvier 2013 un droit au maintien du niveau du salaire perçu ; qu’il ressort de la note du 20 juin 2013 du directeur général des finances publiques produite en première instance que : « certains conservateurs des hypothèques devenus responsables d’un service de publicité foncière au 1er janvier 2013 et détachés dans l’emploi de chef de services comptables ont vocation à bénéficier d’une garantie de maintien de rémunération (…), que la présente note a pour objet d’exposer les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif » ; « que son versement est conditionné à leur » parcours de carrière « et à la » comparaison entre la rémunération résultant des rémunérations brutes annuelles perçues au cours des trois dernières années et la rémunérations brute comparable issue de la catégorie de détachement dans l’emploi de chef de services comptables » ; qu’il s’en suit que ce dispositif n’a pas eu pour objet de maintenir une rémunération égale au salaire antérieurement perçu par l’ensemble des conservateurs des hypothèques, mais d’organiser un dispositif de compensation financière partielle de rémunération destiné, sous certaines conditions, aux seuls conservateurs des hypothèques de catégorie 3 à 6 qui, conformément à l’article 5-3 du décret du 7 juillet 2006, avaient vocation à être nommés dans l’emploi de chef des services comptables, tandis que ceux de catégories 1 et 2 avaient vocation à être détachés dans le grade d’administrateur général des finances publiques de 1re classe ou de classe normale ; que le principe d’égalité entre les membres d’un même corps ne fait pas obstacle à ce que soient traités différemment des agents placés dans des situations différentes ; que M. B…, qui a été classé dans le grade d’administrateur général des finances publiques de 1re classe à compter du 1er janvier 2013, n’est pas fondé à soutenir qu’il se trouvait dans une situation analogue à celle de ses collègues de catégories 3 à 6, nommés dans l’emploi de chef des services comptables ; qu’en tout état de cause, cette différence de traitement entre les conservateurs d’hypothèques issus de différentes catégories, n’est manifestement pas disproportionnée par rapport à la différence de leur situation après reclassement ; que, par suite, M. B… n’est pas fondé à soutenir que le principe d’égalité a été méconnu ;

En ce qui concerne la méconnaissance des règles de détachement :

6. Considérant qu’aux termes de l’article 30 du décret du 16 septembre 1985 susvisé : « Le fonctionnaire détaché d’office dans le cas prévu à l’article 14, 1°, continue à percevoir la rémunération afférente à son grade et à son échelon dans son administration ou service d’origine, si le nouvel emploi occupé comporte une rémunération moindre » ; que le 1° de l’article 14 du même décret porte sur le « détachement auprès d’une administration ou d’un établissement public de l’Etat dans un emploi conduisant à pension du code des pensions civiles et militaires de retraite » ;

7. Considérant que M. B… fait valoir que les conservateurs des hypothèques étaient titulaires d’une charge attributive de droits et de revenus dont ils ne pouvaient être privés unilatéralement sans indemnité ; que s’il a été détaché d’office dans le grade d’administrateur général des finances publics suite à la suppression de son statut, il ne peut pas être privé de la garantie prévue à l’article 30 du décret du 16 septembre 1985 ; que, toutefois, contrairement aux allégations de M. B…, les conservateurs des hypothèques, bien qu’officiers publics, n’étaient pas titulaires de leur charge et percevaient, ainsi qu’il a été dit précédemment, un salaire variable issu de l’exécution des formalités liées aux mutations immobilières ; que la circonstance de son détachement dans le corps des administrateurs des finances publiques, à la première classe du grade d’administrateur général, dans le but de lui assurer une rémunération statutaire la plus proche de celle, variable et sans lien direct avec un quelconque indice, qu’il percevait en tant que conservateur des hypothèques, ne lui permet cependant pas de se prévaloir des dispositions de l’article 30 du décret du 16 septembre 1985 dans le champ duquel il n’entre pas dès lors, comme il vient d’être dit, que sa rémunération de conservateur des hypothèques n’était pas fondée sur un indice de la fonction publique ;

En ce qui concerne la méconnaissance du principe de sécurité juridique :

8. Considérant qu’à la date de sa nomination, le 30 décembre 2011, en tant que conservateur des hypothèques de 1re catégorie à Paris 8, M. B… n’était pas sans savoir que le remplacement des conservateurs par un service de la publicité foncière à compter du 1er janvier 2013 avait été initié par la loi de finances rectificative pour 2009 et mis en oeuvre par l’ordonnance du 10 juin 2010 ; que diverses dispositions ont été adoptées entre juin 2010 et décembre 2012 pour permettre aux anciens conservateurs appelés à rester en fonctions après le 31 décembre 2012 d’être placés dans une situation statutaire et réglementaire la plus équivalente possible et, en particulier, le décret du 26 août 2010 qui, modifiant le décret du 7 juillet 2006, a notamment permis le détachement des conservateurs des hypothèques de catégories 1 et 2, comme tel est le cas de M. B…, dans le corps des administrateurs des finances publiques, au grade d’administrateur général de 1re classe ou de classe normale ; que s’il fait valoir qu’il a reçu des engagements professionnels et personnels quant au maintien de sa rémunération, il ne produit aucun justificatif à l’appui de ses allégations ; qu’ainsi, il n’est pas fondé à se prévaloir d’une méconnaissance du principe de sécurité juridique ;

9. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la responsabilité pour faute de l’administration n’était pas engagée au motif d’une rupture d’égalité de traitement, d’une méconnaissance des règles de détachement ou d’une atteinte au principe de sécurité juridique ; que, dès lors, les conclusions indemnitaires présentées par M. B… ne peuvent qu’être rejetées ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. B… au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;


DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. B… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… B… et au ministre de l’action et des comptes publics (secrétariat général).


Délibéré après l’audience du 9 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Auvray, président de la formation de jugement,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 30 mai 2017.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 16PA02102

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