CAA de PARIS, 5ème chambre, 24 juin 2021, 20PA03458, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 5e ch., 24 juin 2021, n° 20PA03458
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 20PA03458
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Montreuil, 14 octobre 2020, N° 1907591
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043703839

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A… C… a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d’annuler la décision du 14 juin 2019 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de son épouse.

Par un jugement n° 1907591 du 15 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 novembre 2020 et des pièces enregistrées le 21 mars 2021, M. C…, représenté par Me B…, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1907591 du 15 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d’annuler la décision du 14 juin 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d’enjoindre au préfet d’autoriser le regroupement familial au profit de son épouse sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai d’un mois de la notification de l’arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C… soutient que :

 – le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur dans l’appréciation de ses ressources ;

 – le préfet a méconnu l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n’a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. D…,

 – et les observations orales de Me B… pour M. C….

Considérant ce qui suit :

1. M. C…, ressortissant tunisien, a sollicité le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse. Par une décision du 14 juin 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé d’accorder le regroupement familial. M. C… relève appel du jugement du 15 octobre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision.

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 411-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d’un des titres d’une durée de validité d’au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d’au moins dix-huit ans (…) ». Aux termes de l’article L. 411-5 du même code : « Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l’un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l’allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles, à l’article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d’un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l’allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 ou L. 821-2 du code de la sécurité sociale (…) ». Aux termes de l’article R. 411-4 de ce code : « Pour l’application du 1° de l’article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu’elles atteignent un montant équivalent à : – cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (…) ».

3. Il résulte des dispositions précitées de l’article L. 411-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que le regroupement familial peut notamment être refusé au motif que le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont à cet égard prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations et allocations mentionnées à cet article. En vertu des dispositions de l’article R. 411-4 du même code, les ressources sont considérées comme suffisantes pour une famille de deux ou trois personnes lorsqu’elles atteignent un montant équivalent à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance, appréciées sur une période de douze mois.

4. Il ressort des pièces du dossier qu’au cours de la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande de regroupement familial, M. C… a perçu une rémunération mensuelle moyenne de 1 462 euros, et non de 1 361 euros, en prenant en compte les indemnités journalières qu’il a perçues en raison de divers arrêts maladie. Cependant, cette somme reste en-deçà du salaire minimum de croissance, 1 630 euros, prévu par les dispositions précitées. Il en résulte que M. C… n’est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de fait dans la prise en compte de ses ressources pour l’application des dispositions précitées.

5. En deuxième lieu, s’il ressort des pièces du dossier que c’est par une erreur de fait que le préfet a retenu que les enfants de M. C… résidaient en Tunisie à la date de la décision et que la demande de regroupement familial constituait, de ce fait, une rupture de la cellule familiale, il ressort toutefois des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait pris la même décision s’il s’était fondé sur le seul motif tiré de l’insuffisance des ressources financières de M. C… pour subvenir aux besoins de sa famille au regard des critères analysés au point qui précède. Dans ces conditions, l’erreur commise par le préfet est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

6. En troisième lieu, aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

7. Il ressort des pièces du dossier qu’à la date à laquelle M. C… a présenté sa demande de regroupement familial au profit de son épouse, qui séjourne de manière irrégulière sur le territoire français depuis le mois de décembre 2016, ses revenus mensuels restaient en moyenne, sur la période de référence, nettement inférieurs à la moyenne mensuelle majorée d’un dixième du salaire minimum interprofessionnel de croissance. M. C… n’allègue en outre pas que ses ressources financières auraient augmenté à la date de la décision litigieuse du préfet de la Seine-Saint-Denis. Dans ces conditions, la décision attaquée n’a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C… une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en refusant d’accorder le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, qui peut, s’il s’y estime fondé, présenter une nouvelle demande à l’autorité préfectorale compte tenu de sa situation actuelle, doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d’injonction et celles tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, l’État n’étant pas la partie perdante dans la présente instance, doit dès lors être rejetée.


DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… C… et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l’audience du 10 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Marion, premier conseiller,

- M. D…, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2021.


Le rapporteur,

B. D… Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 20PA03458

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