CAA de PARIS, 2ème chambre, 26 janvier 2022, 21PA00358, Inédit au recueil Lebon

  • Sociétés·
  • Impôt·
  • Valeur ajoutée·
  • Chiffre d'affaires·
  • Imposition·
  • Procédures fiscales·
  • Tribunaux administratifs·
  • Taxation·
  • Boisson·
  • Justice administrative

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 2e ch., 26 janv. 2022, n° 21PA00358
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 21PA00358
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Sur renvoi de : Conseil d'État, 30 décembre 2020, N° 431799
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045080075

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Nass-Y-Beach et M. A… B… ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction, en droits et majorations, de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle la société Nass-Y-Beach a été assujettie au titre de l’exercice 2012 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 15 novembre 2011 au 31 août 2013, la décharge de la cotisation foncière des entreprises mentionnée dans un avis à tiers détenteur du 30 mars 2016, la réduction, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B… a été assujetti au titre de l’année 2012, la décharge de l’obligation de payer de la société Nass-Y-Beach résultant de l’avis à tiers détenteur précité, la décharge de l’obligation de payer de M. B… résultant d’une mise en demeure de payer du 24 mars 2016 et la condamnation de l’Etat à leur payer la somme de 5 000 euros à titre des dommages et intérêts avec capitalisation des intérêts au taux légal.

Par un jugement n° 1707744/2-2 du 26 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d’instance au profit de M. B… et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Par une ordonnance n° 18PA02918 du 19 avril 2019, le président de la 9ème chambre de la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté la requête de la société Nass-Y-Beach tendant à l’annulation de ce jugement et à la décharge des impositions précitées mises à la charge de la société.

Par une décision n° 431799 du 31 décembre 2020, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux a, saisi d’un pourvoi présenté pour la société Nass-Y-Beach, annulé l’ordonnance du 19 avril 2019 et renvoyé l’affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2018, la société Nass-Y-Beach, représentée par Me Philippe Morisset et Me Lucas Lopez, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1707744/2-2 du 26 juin 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu’il rejette sa demande ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et majorations, de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice 2012 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 15 novembre 2011 au 31 août 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la procédure de taxation d’office est irrégulière en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée de la période du 1er février au 31 juillet 2012, en l’absence de preuve du dépôt tardif des déclarations, et l’impôt sur les sociétés de l’exercice 2012, en l’absence de notification d’une mise en demeure ;

 – l’administration ne l’a pas informée de l’exercice du droit de communication et de la teneur et de l’origine des documents obtenus, en méconnaissance de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

 – la méthode de reconstitution de ses recettes est radicalement viciée et excessivement sommaire ;

 – les intérêts de retard et les pénalités doivent être dégrevés par voie de conséquence.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 février 2019 et 4 février 2021, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par la société Nass-Y-Beach ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 25 janvier 2021, la clôture de l’instruction a été fixée au 26 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Platillero,

 – et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Nass-Y-Beach, qui exploite un bar-restaurant et dont M. B… est associé unique et président, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité, à l’issue de laquelle une proposition de rectification du 17 mars 2014 lui a été adressée. Au terme de la procédure, elle a été assujettie à une cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice clos en 2012 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 15 novembre 2011 au 31 août 2013, assortis des intérêts de retard et de pénalités. La société Nass-Y-Beach et M. B… ont saisi le Tribunal administratif de Paris d’une demande unique tendant notamment à la décharge des impositions mises à leur charge. Par un jugement du 26 juin 2018, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d’instance au profit de M. B… et rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par une ordonnance du 19 avril 2019, le président de la 9ème chambre de la Cour a rejeté la requête de la société Nass-Y-Beach tendant à l’annulation de ce jugement. Par une décision du 31 décembre 2020, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a, saisi d’un pourvoi présenté pour la société Nass-Y-Beach, annulé l’ordonnance du 19 avril 2019 et renvoyé l’affaire à la Cour.

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d’office : (…) 2° à l’impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n’ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l’article L. 68 ; 3° aux taxes sur le chiffre d’affaires, les personnes qui n’ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (…) « . Aux termes de l’article L. 68 du même livre : » La procédure de taxation d’office prévue aux 2° et 5° de l’article L. 66 n’est applicable que si le contribuable n’a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d’une mise en demeure (…) ".

3. D’une part, le ministre a produit les déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée de la période du 1er février au 31 juillet 2012, qui mentionnent la date légale du dépôt et sont signées par la société Nass-Y-Beach à des dates postérieures. La requérante n’est ainsi pas fondée à soutenir que la procédure de taxation d’office mise en œuvre au titre de cette période est irrégulière en l’absence de preuve du dépôt tardif de ses déclarations mensuelles. D’autre part, le ministre a produit la mise en demeure du 20 juin 2013 de déposer la déclaration d’impôt sur les sociétés de l’exercice clos en 2012 et l’avis de réception du pli recommandé qui la contenait, notifié à l’adresse du siège social et retourné à l’administration faute d’avoir été retiré par la société, avisée le 25 juin 2013, la déclaration de résultat, datée du 28 novembre 2013, n’étant remise qu’en cours de contrôle le même jour. La requérante n’est ainsi pas fondée à soutenir que la procédure de taxation d’office mise en œuvre au titre de cet exercice est irrégulière, en l’absence de notification d’une mise en demeure.

4. En second lieu, aux termes de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales : « L’administration est tenue d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition (…) ».

5. Il résulte de la proposition de rectification du 17 mars 2014 que, contrairement à ce que soutient la société Nass-Y-Beach, le chiffre d’affaires reconstitué n’a pas été déterminé d’après des encaissements bancaires qui auraient été constatés à la suite de l’exercice par l’administration de son droit de communication, mais est fondé sur une méthode qui s’appuie sur une comptabilité matière. La société Nass-Y-Beach n’est ainsi pas fondée à soutenir que l’administration ne l’aurait pas informée de l’exercice du droit de communication et de la teneur et de l’origine des documents obtenus, en méconnaissance de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Il résulte de l’instruction que le vérificateur, après avoir notamment constaté que les seuls justificatifs de recettes présentés à l’appui des produits comptabilisés au titre des recettes déclarées étaient les relevés bancaires de la société Nass-Y-Beach, qu’aucun justificatif journalier retraçant l’exhaustivité des ventes réalisés n’était produit et que les inventaires correspondant au stock initial et au stock final n’étaient pas établis, a écarté comme irrégulière et dépourvue de valeur probante la comptabilité, ce que la société requérante ne conteste pas. Pour reconstituer le chiffre d’affaires, le vérificateur a analysé les factures d’achats au titre de l’exercice clos en 2012 pour déterminer les quantités de boissons achetées et comptabilisées. Il a calculé les recettes à partir du nombre de doses vendues par produit, les doses retenues étant établies en tenant compte des éléments fournis par le président de la société dans le cadre de la description des conditions d’exploitation, et des tarifs qui figuraient sur la carte de l’entreprise, aussi bien pour les boissons que pour les repas, complétés des tarifs « happy hour » et du tarif des boissons non mentionnées sur la carte. Il a ensuite retenu des pourcentages de pertes, d’offerts et de consommation du personnel suivant les boissons pour déterminer le chiffre d’affaires des liquides, puis a déterminé le chiffre d’affaires relatif aux repas en fixant un pourcentage par rapport au chiffre d’affaires global de 27 %, correspondant aux conditions d’exploitation décrites et corroboré par les tickets RAZ des mois de novembre et décembre 2012.

7. La société Nass-Y-Beach soutient que cette méthode de reconstitution ne tient pas compte de ses conditions d’exploitation, dès lors que le vérificateur n’a pas pris en compte le faible nombre de règlements en espèces et que le résultat de la reconstitution est incohérent avec le chiffre d’affaires réalisés par le précédent exploitant du fonds de commerce. Toutefois, elle n’apporte aucun élément à l’appui de ses allégations selon lesquelles le nombre des règlements en espèces aurait une incidence sur la méthode précédemment décrite. Par ailleurs, la seule circonstance que le précédent exploitant a déclaré un chiffre d’affaires inférieur au montant reconstitué n’établit pas que la méthode de reconstitution utilisée, fondée sur les éléments propres à la société Nass-Y-Beach, est radicalement viciée. La société requérante soutient également que la méthode de reconstitution est excessivement sommaire, dès lors que le taux d’offerts, de pertes et de consommations du personnel a été fixé à 4 % en ce qui concerne les vins et champagnes. Toutefois, elle n’apporte aucune preuve à l’appui de ses allégations selon lesquelles ce taux devrait être fixé à 15 %.

8. Dans ces conditions, la société Nass-Y-Beach, qui supporte la charge de la preuve dès lors, d’une part, qu’elle a été taxée d’office sur l’ensemble de la période vérifiée, à l’exception du mois d’août 2012 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et d’autre part que, s’agissant de cette dernière période, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur la chiffre d’affaires a émis un favorable au maintien des rectifications, n’établit pas que la méthode de reconstitution est excessivement sommaire ou radicalement viciée, ni ne démontre l’exagération des bases d’imposition retenues par l’administration.

Sur les pénalités :

9. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le moyen tiré de ce que les intérêts de retard et les pénalités mises à la charge de la société Nass-Y-Beach devraient être dégrevés par voie de conséquence doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Nass-Y-Beach n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d’annulation de ce jugement et de décharge, en droits et majorations, des impositions en litige doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Nass-Y-Beach demande au titre des frais qu’elle a exposés.


DECIDE :


Article 1er : La requête de la société Nass-Y-Beach est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nass-Y-Beach, à Me Yohann Yang-Ting ès qualités de mandataire judiciaire et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l’audience du 12 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.


Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 janvier 2022.


Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL’AVALa République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

2

N° 21PA00358

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de PARIS, 2ème chambre, 26 janvier 2022, 21PA00358, Inédit au recueil Lebon