Cour administrative d'appel de Versailles, 4 décembre 2013, n° 12VE03209

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 4 déc. 2013, n° 12VE03209
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 12VE03209
Décision précédente : Tribunal administratif de Montreuil, 21 juin 2012, N° 1102621

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE VERSAILLES

N° 12VE03209


SOCIETE REZIDOR PARK ORANGE


M. Demouveaux

Président


M. Delage

Rapporteur


M. Soyez

Rapporteur public


Audience du 21 novembre 2013

Lecture du 4 décembre 2013

__________

Code PCJA : 19-01-01-05

19-04-01-02-06-01

Code Lebon : C+

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Versailles

6e chambre

Vu la requête, enregistrée le 28 août 2012, présentée pour la société REZIDOR PARK ORANGE, dont le siège est route de Caderousse à XXX, représentée par son président directeur général en exercice, par Me Devis, avocat ; la société REZIDOR PARK ORANGE demande à la Cour :

1° d’annuler le jugement n° 1102621 du 22 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la restitution de la retenue à la source versée en 2009 à hauteur de 9 613 euros ;

2° de prononcer la décharge de l’imposition contestée ;

3° de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, nonobstant la dénonciation de la convention franco-danoise, qui a pris effet au 1er janvier 2009, ladite convention s’applique aux revenus relatifs à l’année 2008, même si leur paiement n’est intervenu qu’en 2009 ; qu’elle sollicite le dégrèvement demandé sur le fondement de l’instruction administrative 14 B-2-10 du 29 juillet 2010 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2012, présenté par le ministre de l’économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

— le Danemark ayant dénoncé la convention le 10 juin 2008, celle-ci a cessé de produire ses effets au 1er janvier 2009 ; l’article 1671 A du code général des impôts précise que le fait générateur de la retenue à la source est la réalisation du paiement de l’entreprise française à l’entreprise non résidente, quelle que soit l’année de rattachement de la créance ; en l’espèce le paiement des retenues à la source a eu lieu en mai 2009 et ainsi la convention ne s’appliquait plus ;

— l’instruction invoquée, qui prévoit par exception l’application de la convention pour les revenus dont la mise en paiement est intervenue à compter du 1er janvier 2009 mais dont le fait générateur est intervenu avant cette date ne concerne que les bénéficiaires des revenus et non le débiteur ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale entre la France et le Danemark tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur les revenus et la fortune, signée le 8 février 1957 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 novembre 2013 :

— le rapport de M. Delage, premier conseiller,

— et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;

1. Considérant que société REZIDOR PARK ORANGE a fait l’objet d’une retenue à la source à raison de la rémunération versée à la société Rezidor Hotels ApS Danmark, résidente danoise, en contrepartie de prestations réalisées en 2008 en France par cette dernière ; que la requérante a saisi le Tribunal administratif de Montreuil d’une demande tendant à la restitution de ladite retenue à la source ; qu’elle relève appel du jugement du 22 juin 2012 par lequel le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

2. Considérant que si une convention bilatérale conclue en vue d’éviter les doubles impositions peut, en vertu de l’article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l’imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l’impôt, lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à une telle convention, de se placer d’abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l’imposition contestée a été valablement établie et, dans l’affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu’il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer – en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s’agissant de déterminer le champ d’application de la loi, d’office – si cette convention fait ou non obstacle à l’application de la loi fiscale ;

3. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 182 B du code général des impôts : « I. Donnent lieu à l’application d’une retenue à la source, lorsqu’ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, qui n’ont pas dans ce pays d’installation professionnelle permanente : (…) c) Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France » ; que l’article 1671 A du même code, dans sa rédaction applicable aux sommes versées à compter du 1er janvier 2009, dispose que « Les retenues prévues aux articles 182 A, 182 A bis et 182 B sont opérées par le débiteur des sommes versées et remises au service des impôts accompagnées d’une déclaration conforme au modèle fixé par l’administration, au plus tard le 15 du mois suivant celui du paiement (…)» ; que la requérante ayant payé la société Rezidor Hotels ApS Danmark, non résidente, au titre de prestations de services fournies par cette dernière en France, elle était assujettie à la retenue à la source sur le fondement du c) du I de l’article 182 B du code général des impôts, ce qu’elle ne conteste au demeurant pas sur le terrain du droit interne ;

4. Considérant, en second lieu, que la société requérante soutient que les stipulations de l’article 18 de la convention fiscale franco-danoise du 8 février 1957 susvisée font obstacle à l’application de la retenue à la source litigieuse ; que, pour rejeter sa demande, le tribunal a considéré que ladite convention, qui avait été dénoncée par le Danemark par une note diplomatique du 10 juin 2008, ne s’appliquait plus au revenu constitué, pour la société danoise, par la rémunération des prestations effectuées, dès lors que ledit revenu avait été disponible en 2009, année de son paiement par la requérante ;

5. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 28 de la convention franco-danoise susvisée : « La présente convention restera en vigueur pendant une durée indéfinie. / Toutefois, à partir du 1er janvier 1960, chacun des deux Etats contractants pourra notifier à l’autre Etat, dans le courant du premier semestre de chaque année, par écrit et par la voie diplomatique, son intention de mettre fin à la présente convention. En ce cas, la convention cessera de produire effet à partir du 1er janvier de l’année suivant la date de la notification, étant entendu que cet effet se trouvera limité : a) En ce qui concerne les impôts perçus par voie de retenue à la source sur les revenus des capitaux mobiliers, à l’imposition des revenus dont la mise en paiement sera intervenue pendant l’année au cours de laquelle la dénonciation aura été notifiée ; b) En ce qui concerne les impôts sur les autres revenus, à l’imposition des revenus afférents à l’année pendant laquelle cette notification aura eu lieu ou aux exercices clos au cours de cette année ; c) En ce qui concerne l’impôt sur la fortune, à l’imposition de la fortune existant au 31 décembre de l’année pendant laquelle la notification aura eu lieu ou au dernier jour des exercices clos au cours de cette année. » ; que la retenue à la source en litige ne porte pas sur des revenus de capitaux mobiliers et ne concerne pas l’impôt sur la fortune ; que les prestations en cause ont été réalisées en 2008 ; que le revenu en résultant, alors même que le paiement est intervenu en 2009, constituait un revenu afférent à l’année 2008 au sens du b) de l’article 28 de la convention franco-danoise ; qu’il suit de là que, contrairement à ce qu’ont considéré les premiers juges, la société requérante peut utilement invoquer les stipulations de la convention franco-danoise pour contester la retenue à la source litigieuse ;

6. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 18 de ladite convention : « Les revenus non mentionnés aux articles précédents ne sont imposables que dans l’Etat du domicile fiscal du bénéficiaire » ; qu’il résulte de l’instruction que les sommes perçues en rémunération des prestations réalisées en France en 2008 par la société Rezidor Hotels ApS Danmark ne sont mentionnées à aucun des articles qui précèdent l’article 18 de la convention franco-danoise ; qu’il suit de là que la somme versée à la société n’était imposable qu’au Danemark, Etat de résidence de la société bénéficiaire ; que, dès lors, les stipulations de l’article 18 de la convention franco-danoise font obstacle à l’application de la retenue à la source en litige à la somme versée par la requérante à la société Rezidor Hotels ApS Danmark ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin de statuer sur l’autre moyen de la requête, la société REZIDOR PARK ORANGE est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros que la société demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1102621 du 22 juin 2012 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La société REZIDOR PARK ORANGE est déchargée de la retenue à la source versée en 2009 pour un montant de 9 613 euros.

Article 3 : L’Etat versera à la société REZIDOR PARK ORANGE une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société REZIDOR PARK ORANGE et au ministre de l’économie et des finances.

Délibéré après l’audience du 21 novembre 2013, où siégeaient :

M. Demouveaux, président ;

M. Luben, président assesseur ;

M. Delage, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 4 décembre 2013.

Le rapporteur, Le président,

Ph. DELAGE J.-P. DEMOUVEAUX

Le greffier,

V. BRIDET

La République mande et ordonne au ministre de l’économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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