CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 11 octobre 2018, 17VE00993, Inédit au recueil Lebon

  • Agents contractuels et temporaires·
  • Fonctionnaires et agents publics·
  • Fin du contrat·
  • Licenciement·
  • Commune·
  • Justice administrative·
  • Contrats·
  • Non titulaire·
  • Durée·
  • Illégalité

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 5e ch., 11 oct. 2018, n° 17VE00993
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 17VE00993
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Sur renvoi de : Conseil d'État, 28 mars 2017, N° 393150
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037491966

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… C… a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d’une part, de condamner la commune de Bagneux à lui verser la somme de 191 050 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de l’illégalité de son licenciement, d’autre part, de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1110669 du 5 novembre 2013, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d’une part, condamné la commune de Bagneux à verser à M. C… la somme de 4 952,46 euros en réparation de la privation du bénéfice du préavis prévu par l’article 40 du décret du 15 février 1988, d’autre part, mis à la charge de la commune le versement à l’intéressé de la somme globale de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C….

Par un arrêt n° 14VE00156 du 2 juillet 2015, la Cour administrative d’appel de Versailles a, d’une part, rejeté l’appel formé par M. C… contre ce jugement, d’autre part, sur appel incident de la commune de Bagneux, annulé l’article 1er du jugement et rejeté la demande présentée par l’intéressé devant le tribunal administratif.

Par une décision n° 393150 du 29 mars 2017, le Conseil d’Etat a, sur pourvoi de M. C…, annulé cet arrêt et renvoyé l’affaire à la Cour administrative d’appel de Versailles.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés sous le n° 14VE00156 respectivement le 14 janvier 2014, le 24 mars 2015 et le 19 juin 2015, et, après cassation et renvoi, par deux mémoires, enregistrés sous le n°17VE00993 respectivement le 31 mai 2017 et le 2 août 2017, M. C…, représenté par Me Daboussy, avocat, demande à la Cour :

1° de réformer le jugement attaqué en portant l’indemnité allouée à la somme de 191 050 euros ou, à titre subsidiaire, à la somme de 43 111,48 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ;

2° de mettre à la charge de la commune de Bagneux les entiers dépens et le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— sa requête, formée dans le délai d’appel, est recevable ;

 – ses conclusions subsidiaires tendant à la condamnation de la commune à lui verser une indemnité de licenciement sur le fondement des articles 43 et suivants du décret du 15 février 1988, alors que le chiffrage global de son préjudice demeure inchangé et qu’il s’agit du même fait générateur et de la même cause juridique, sont recevables ;

 – il était titulaire, en application des dispositions du II de l’article 15 de la loi du 26 juillet 2005 et depuis la publication de cette loi, d’un contrat à durée indéterminée dès lors qu’il remplissait, au 1er juin 2004, l’ensemble des conditions prévues par ces dispositions et, en particulier, celle tenant à l’occupation d’un emploi en application du cinquième alinéa de l’article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ; en outre, son activité auprès de la commune ne saurait être considérée comme secondaire ou accessoire ;

 – il justifie avoir exercé, depuis son engagement par la commune, son activité à mi-temps ; en outre, la commune ne peut invoquer sa méconnaissance des dispositions des articles 10 et 18 du décret du 29 juillet 2004 qu’elle a elle-même méconnues ; en conséquence, en lui proposant, par son courrier du 7 avril 2011, de poursuivre son activité, sous contrat à durée indéterminée, à temps complet pour une rémunération identique à celle qu’il a perçue jusqu’alors pour un temps partiel, l’autorité territoriale a modifié substantiellement les conditions d’exercice de son activité ; la décision mettant fin à son contrat et refusant de régulariser sa situation, suite à son refus d’accepter un tel contrat, constitue donc un licenciement dépourvu de tout fondement ;

 – cette illégalité est constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

 – cette faute lui a causé un préjudice tenant à une perte de rémunération entre la date de son licenciement et celle à laquelle il pourra faire valoir ses droits à la retraite, soit cinquante-cinq mois de traitement pour une rémunération mensuelle de 3 110 euros bruts, préjudice qui doit donc être évalué à la somme de 171 050 euros ;

 – cette faute lui a causé un préjudice moral, compte tenu de la privation soudaine de son emploi, après seize années de service, sans aucun préavis et en toute illégalité, qui doit être évalué à la somme de 20 000 euros ;

 – à titre subsidiaire, si la Cour considère son licenciement comme légal, il est en droit de demander, d’une part, une indemnité en réparation de la privation du bénéfice du préavis auquel il avait droit en application des dispositions des articles 39 et 40 du décret du 15 février 1988, soit la somme de 4 952,46 euros, d’autre part, l’indemnité de licenciement prévue par les articles 43 et suivants du même décret, soit, compte tenu de sa dernière rémunération et de ses années de service, la somme de 18 159,02 euros, enfin, la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral résultant de l’irrégularité de son licenciement.

— ---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code civil ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984;

 – la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

 – le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. d’Haëm,

 – les conclusions de Mme Bonfils, rapporteur public,

 – et les observations de Me E…, substituant Me Daboussy, pour M. C…, et celles de M. C… ainsi que les observations de Me D…, substituant Me A…, pour la commune de Bagneux.

1. Considérant que M. C… a été engagé par la commune de Bagneux à compter du 1er avril 1995, par deux contrats successifs d’une durée de trois ans chacun, en qualité de médecin du travail ; qu’à compter du 1er juin 2001, il a été recruté pour une durée d’un an afin d’occuper, en qualité d’agent non titulaire, un emploi de médecin territorial de 2e classe, créé par une délibération du conseil municipal en date du 6 mars 2001 ; que cet engagement a ensuite été reconduit, chaque année, jusqu’au 31 mai 2011 ; que, par un courrier du 7 avril 2011, le maire de Bagneux lui a proposé de renouveler son contrat par un contrat à durée indéterminée pour un service à temps complet ; que l’intéressé ayant refusé, par des courriers des 19 avril 2011 et 17 mai 2011, cette proposition et demandé à son employeur le bénéfice d’un contrat à durée indéterminée pour un service à mi-temps, le maire, par un courrier du 30 mai 2011, a décidé de ne pas renouveler son contrat ; que, par un jugement du 5 novembre 2013, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, faisant partiellement droit à la demande de M. C… tendant à la condamnation de la commune de Bagneux à lui verser la somme de 191 050 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de l’illégalité de son licenciement, a condamné la commune à lui verser la somme de 4 952,46 euros en réparation de la privation du bénéfice du préavis prévu par l’article 40 du décret du 15 février 1988 ; que M. C… relève appel de ce jugement et demande à la Cour de porter l’indemnité allouée à la somme de 191 050 euros ou, à titre subsidiaire, à la somme de 43 111,48 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ; que, par la voie de l’appel incident, la commune de Bagneux demande à la Cour d’annuler l’article 1er du jugement la condamnant à verser à l’intéressé la somme de 4 952, 46 euros ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Bagneux et tirée de la tardiveté de la requête :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 811-2 du code de justice administrative : « Sauf dispositions contraires, le délai d’appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l’instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et 751-4-1 (…). » ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. C… a reçu notification du jugement attaqué, par lettre recommandée avec avis de réception, le 14 novembre 2013 ; que sa requête a été enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2014, soit dans le délai d’appel de deux mois prévu par les dispositions précitées ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Bagneux et tirée de la tardiveté de la requête ne peut être accueillie ;

Sur la responsabilité de la commune de Bagneux :

En ce qui concerne la nature du contrat en litige et de la mesure prise à l’encontre de M. C… :

4. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : « Les collectivités et établissements mentionnés à l’article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d’un congé de maladie, d’un congé de maternité, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale, ou de l’accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, de leur participation à des activités dans le cadre de l’une des réserves mentionnées à l’article 74, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d’un an à la vacance d’un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. » ; qu’aux termes des troisième à sixième alinéas de ce même article : " Par dérogation au principe énoncé à l’article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : / 1° Lorsqu’il n’existe pas de cadre d’emplois de fonctionnaires susceptibles d’assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. / Toutefois, dans les communes de moins de 1 000 habitants et dans les groupements de communes dont la moyenne arithmétique des nombres d’habitants ne dépasse pas ce seuil, des contrats peuvent être conclus pour pourvoir des emplois permanents à temps non complet pour lesquels la durée de travail n’excède pas la moitié de celle des agents publics à temps complet. » ;

5. Considérant qu’il résulte des dispositions précitées que les collectivités et les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée peuvent, en application du premier alinéa de l’article 3 de la même loi, recruter pour une durée maximale d’un an un agent non titulaire pour faire face temporairement à la vacance d’un emploi de titulaire qui ne peut être immédiatement pourvu par un fonctionnaire ; que lorsqu’ils n’ont pas été en mesure de recruter un fonctionnaire à l’issue de ce délai d’un an, ils ne peuvent renouveler le contrat de l’agent pour le même motif ; que s’agissant des emplois du niveau de la catégorie A, le contrat peut, en revanche, être renouvelé sur le fondement du cinquième alinéa du même article jusqu’à ce qu’un fonctionnaire ait pu être recruté ;

6. Considérant, par ailleurs, qu’aux termes du II de l’article 15 de la loi du 26 juillet 2005 susvisée portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l’agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : / 1° Etre âgé d’au moins cinquante ans ; / 2° Etre en fonction ou bénéficier d’un congé en application des dispositions du décret mentionné à l’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée ; / 3° Justifier d’une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; / 4° Occuper un emploi en application des quatrième, cinquième ou sixième alinéas de l’article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée dans une collectivité ou un établissement mentionné à l’article 2 de la même loi » ;

7. Considérant qu’en l’espèce, il résulte de l’instruction que M. C…, engagé par la commune de Bagneux, à compter du 1er avril 1995, en qualité de médecin du travail, a été recruté par cette collectivité à compter du 1er juin 2001, pour une durée d’un an, sur le fondement du premier alinéa de l’article 3 précité de la loi du 26 janvier 1984 afin d’occuper, en qualité d’agent non titulaire, un emploi permanent de médecin territorial de 2e classe relevant du niveau de la catégorie A, qui a été créé par une délibération du conseil municipal en date du 6 mars 2001 et qui était demeuré vacant en l’absence de recrutement d’un fonctionnaire ; que cet engagement a ensuite été reconduit jusqu’au 31 mai 2011 pour des durées maximales d’un an et pour le même motif ; que, cependant, eu égard à ce qui a été dit au point 5 et la commune de Bagneux n’ayant pas été en mesure de recruter un fonctionnaire à l’issue du premier engagement d’un an de M. C…, les contrats dont celui-ci a bénéficié à partir de l’année 2002 doivent être regardés comme des contrats conclus sur le fondement du cinquième alinéa de l’article 3 précité de la loi du 26 janvier 1984 ; qu’ainsi et contrairement à ce que soutient la commune de Bagneux, M. C…, qui occupait, à raison des besoins du service, un emploi permanent du niveau de la catégorie A, remplissait, à la date du 1er juin 2004, la condition posée au 4° du II de l’article 15 précité de la loi du 26 juillet 2005 ; qu’en outre, il est constant qu’à cette date, l’intéressé, qui avait plus de cinquante ans, était en fonction et justifiait d’une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années, remplissait également les conditions prévues aux 1° à 3° du II de cet article 15 ; qu’enfin, la commune de Bagneux, qui soutient au surplus qu’elle employait l’intéressé à temps plein, n’établit par aucun élément que l’activité exercée auprès d’elle en qualité de médecin du travail par M. C…, qui n’avait pas par ailleurs la qualité de fonctionnaire, mais a occupé en qualité de non titulaire, auprès d’autres employeurs, des emplois à temps non complet, n’aurait revêtu qu’un caractère accessoire ou secondaire de nature à faire obstacle à l’application des dispositions précitées de l’article 15 de la loi du 26 juillet 2005 ; que, par suite, par application de ces dispositions, son contrat à durée déterminée a été transformé de plein droit en contrat à durée indéterminée à la date de publication de la loi, soit le 27 juillet 2005 ; qu’il suit de là que la décision par laquelle le maire de la commune de Bagneux a mis fin au contrat de M. C…, avec effet au 31 mai 2011, ne constitue pas une décision de non renouvellement d’un contrat à durée déterminée, conclu pour la période du 1er juin 2010 au 31 mai 2011, mais doit s’analyser comme une rupture du contrat à durée indéterminée qui le liait à la commune, et donc comme un licenciement ;

En ce qui concerne la légalité du licenciement de M. C… :

8. Considérant que M. C… soutient que son licenciement est illégal dès lors qu’il est fondé sur son refus d’accepter des modifications substantielles de ses conditions d’emploi, la commune lui ayant proposé, alors qu’il travaillait à mi-temps, un service à temps complet, assorti au surplus d’une rémunération identique à celle qu’il percevait jusque-là ;

9. Considérant que M. C… justifie par les pièces qu’il produit, notamment une lettre du 19 mai 2003 du directeur général des services de la commune de Bagneux faisant état d’une « prestation à mi-temps » et deux attestations d’anciens collègues en date des 18 octobre et 17 novembre 2011 décrivant une activité à mi-temps, qu’il a été engagé par cette collectivité, à compter du 1er avril 1995, et y a exercé son activité, en qualité de médecin du travail, selon un service à mi-temps, la commune défenderesse n’apportant aucun élément de nature à établir un tel engagement ou une telle activité selon un service à temps plein ; que, dans ces conditions, en lui proposant, par son courrier du 7 avril 2011, un contrat à durée indéterminée pour un service à temps complet, le maire de Bagneux a entendu modifier de manière substantielle les modalités d’engagement de l’intéressé ;

10. Considérant, toutefois, qu’il résulte de l’instruction que cette modification était justifiée, ainsi que le fait valoir en défense la commune de Bagneux, par l’intérêt et les besoins du service, comme le démontre en particulier l’embauche à temps complet, par un arrêté du 26 décembre 2011, du successeur de l’intéressé ; que M. C… ne conteste d’ailleurs pas que cette modification substantielle de ses conditions de travail ait été décidée dans l’intérêt du service ; qu’en outre, alors qu’il résulte également de l’instruction que M. C… percevait déjà une rémunération fixée par référence à l’indice brut 750 et l’indice majoré 619, soit un traitement correspondant à celui d’un emploi de médecin territorial de 2e classe, 8e échelon, et équivalent à un service à temps plein, son employeur ne pouvait légalement lui proposer, de façon concomitante, une augmentation substantielle de sa rémunération et, en particulier, le doublement de cette dernière, dès lors qu’une telle rémunération aurait revêtu un caractère manifestement disproportionné ; que, par suite, en se fondant sur le refus de l’intéressé d’accepter la modification de son contrat de travail, laquelle était justifiée par les besoins et l’intérêt du service, le maire de Bagneux a pu légalement décider son licenciement ;

Sur les indemnités demandées par M. C… :

En ce qui concerne les indemnités demandées à titre principal :

11. Considérant que M. C… demande, à titre principal, la condamnation de la commune de Bagneux à lui verser la somme de 191 050 euros en réparation de la perte de rémunération, entre la date de son licenciement et celle à laquelle il pourra faire valoir ses droits à la retraite, et du préjudice moral qu’il estime avoir subi du fait de l’illégalité de son licenciement qui serait, selon lui, privé de tout fondement ; que, toutefois, le maire de Bagneux ayant pu légalement, ainsi qu’il a été dit au point 10, licencier M. C…, celui-ci n’est pas fondé à demander que la commune soit condamnée à lui verser une indemnité réparant le préjudice matériel et moral qu’il invoque du fait de l’illégalité de son licenciement ;

En ce qui concerne les indemnités demandées à titre subsidiaire :

S’agissant de l’indemnité de préavis :

12. Considérant qu’en vertu de l’article 40 du décret du 15 février 1988 susvisé, le licenciement d’un agent non titulaire engagé pour une durée indéterminée ne peut intervenir qu’après un préavis sauf si le licenciement est prononcé pour des motifs disciplinaires, pour inaptitude physique, à la suite d’un congé sans traitement d’une durée égale ou supérieure à un mois, ou au cours ou à l’expiration d’une période d’essai ;

13. Considérant que M. C… étant titulaire d’un contrat à durée indéterminée et son licenciement ne rentrant dans aucun des cas mentionnés à l’article 40 du décret du 15 février 1988, il ne pouvait être licencié sans que soit respecté le préavis prévu à cet article ; qu’en vertu des articles 39 et 40 de ce décret, l’intéressé, qui était employé depuis plus de deux ans par la commune de Bagneux, avait droit à un préavis d’une durée de deux mois ; que si aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit le versement d’une « indemnité de préavis » aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, l’intéressé qui a été illégalement privé du bénéfice du préavis a droit à la réparation du préjudice qui en est résulté pour lui ; qu’il n’est pas établi que M. C… aurait retrouvé un emploi avant la fin de la période de deux mois suivant son licenciement ; que, dans ces conditions, M. C… est fondé à demander la réparation de ce préjudice dont il sera fait une juste appréciation en fixant la somme due à ce titre par la commune de Bagneux à 4 952,46 euros ; que, dès lors, les conclusions incidentes de cette dernière tendant à l’annulation de l’article 1er du jugement attaqué la condamnant à verser cette indemnité à M. C… doivent être rejetées ;

S’agissant de l’indemnité de licenciement :

14. Considérant que M. C… a demandé au tribunal administratif la condamnation de la commune de Bagneux à l’indemniser des préjudices résultant de l’illégalité fautive de son licenciement ; que si le requérant demande à la Cour, à titre subsidiaire, de condamner cette collectivité à lui verser l’indemnité de licenciement prévue par les dispositions des articles 43 et suivants du décret du 15 février 1988 susvisé, de telles conclusions, qui ne tendent pas à la réparation des conséquences dommageables de l’illégalité invoquée en première instance, ne se rattachent pas au même fait générateur et ne reposent pas sur la même cause juridique que les chefs de préjudice invoqués devant le tribunal administratif ; qu’elles sont ainsi nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ; qu’elles ne peuvent, dès lors, qu’être rejetées ;

S’agissant du préjudice moral allégué :

15. Considérant, enfin, que si M. C… demande, à titre subsidiaire, la condamnation de la commune de Bagneux à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu’il estime avoir subi du fait de l’illégalité fautive de son licenciement qui serait, selon lui, privé de tout fondement, il résulte de ce qui a été dit au point 14 que ces conclusions ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

16. Considérant, d’une part, que M. C… a droit, ainsi qu’il le demande, aux intérêts au taux légal sur la somme de 4 952,46 euros mise à la charge de la commune de Bagneux, à compter du 2 septembre 2011, date non contestée de réception de sa demande préalable ;

17. Considérant, d’autre part, que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu’à cette date il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s’accomplit à nouveau à l’expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu’il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 22 décembre 2011, date d’enregistrement de la demande de M. C… au greffe du tribunal administratif ; qu’il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 2 septembre 2012, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d’intérêts, ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

18. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. C…, qui a ainsi droit aux intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2011 sur la somme de 4 952,46 euros que la commune de Bagneux a été, par le jugement attaqué, condamnée à lui verser, ainsi qu’à la capitalisation des intérêts échus le 2 septembre 2012 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date, est seulement fondé à demander à ce que ce jugement soit réformé en ce sens ;

Sur les frais liés à l’instance :

19. Considérant, d’une part, qu’aucun dépens n’a été exposé au cours de l’instance d’appel ; que les conclusions présentées à ce titre par M. C… ne peuvent donc qu’être rejetées ;

20. Considérant, d’autre part, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. C…, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Bagneux demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Bagneux une somme de 2 000 euros à verser à M. C… sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : L’indemnité de 4 952,46 euros, que la commune de Bagneux a été condamnée à verser à M. C… par l’article 1er du jugement n° 1110669 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 5 novembre 2013, portera intérêt au taux légal à compter du 2 septembre 2011. Les intérêts échus à la date du 2 septembre 2012, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : L’article 1er du jugement n° 1110669 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 5 novembre 2013 est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Bagneux versera à M. C… la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C…, les conclusions incidentes de la commune de Bagneux et celles qu’elle a présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

2

N° 17VE00993

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 11 octobre 2018, 17VE00993, Inédit au recueil Lebon