Cour de cassation, Chambre civile 2, 18 octobre 2012, 11-22.307, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 18 oct. 2012, n° 11-22.307
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 11-22.307
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 28 juillet 2011
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000026517199
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2012:C201677
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 29 juillet 2011), que M. X…, assisté de son épouse intervenant en qualité de curatrice, a formé le 27 juin 2011 une demande de récusation de Mme B…, vice-présidente du tribunal de grande instance de Lyon, chargée du service du tribunal d’instance de cette ville, avant que celle-ci ne statue sur le renouvellement de la mesure de protection, au motif notamment qu’elle avait entendu de manière non contradictoire l’avocat de M. Y…, avec lequel le majeur protégé est en litige ; que par une ordonnance du 4 juillet 2011, le magistrat visé par la requête a rejeté la demande de récusation et dit qu’en application de l’article 350 du code de procédure civile, le secrétariat-greffe communiquerait copie de la demande de récusation et de l’ordonnance au premier président de la cour d’appel ;

Sur le premier moyen, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. X… et son épouse, ès qualités, font grief à l’arrêt de rejeter la requête en récusation ;

Mais attendu que le juge faisant l’objet d’une requête en récusation doit, en application de l’article 347 du code de procédure civile, faire connaître par écrit soit son acquiescement à la récusation, soit les motifs pour lesquels il s’y oppose ; qu’ayant relevé que le juge visé par la requête avait, par voie d’ordonnance, rejeté la demande de récusation présentée, faisant connaître les motifs pour lesquels il s’y opposait et que les explications écrites ainsi données, peu important la formalisation adoptée, devaient s’analyser comme l’expression du refus du juge de se déporter, c’est sans méconnaître les textes susvisés ni commettre d’excès de pouvoir que la cour d’appel a statué comme elle l’a fait ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. X… et son épouse, ès qualités, font le même grief à l’arrêt ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel, motivant sa décision, a retenu que le fait pour le juge des tutelles d’avoir entendu, dans le cadre de l’examen du renouvellement de la mesure de protection, l’avocat d’une partie opposée au majeur protégé dans un litige autre, n’était pas de nature à faire peser sur ce juge un soupçon légitime de partialité ;

Et attendu que fût-il démontré que ce juge aurait commis des erreurs de procédure, celles-ci pourraient donner lieu à l’exercice de voies de recours et ne sauraient susciter un doute légitime sur son impartialité ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. Thierry X…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la requête en récusation formée le 27 juin 2011 par Monsieur Thierry X…, majeur protégé sous curatelle, assisté de sa curatrice, Madame Nadège X… ;

AUX MOTIFS QUE « l’article 350 du Code de procédure civile dispose que le secrétaire communique la demande de récusation avec la réponse du juge ou mention de son silence, au Premier président ; que la Cour a été régulièrement saisie par Monsieur le Premier président, auquel le tribunal d’instance a transmis l’entier dossier de fond, avec la demande de récusation et la réponse faite à cette demande ; que bien que l’article 346 du Code de procédure civile dispose que le juge, dès qu’il a communication de la demande, doit s’abstenir jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la récusation, c’est par voie d’ordonnance que le juge, objet de la demande de récusation, a rejeté la demande de récusation présentée, faisant connaitre les motifs pour lesquels il s’y oppose ; que les explications écrites ainsi données par le juge, peu important la formalisation adoptée, doivent s’analyser comme l’expression du refus du juge de se déporter » ;

ALORS QUE nul ne peut être juge en sa propre cause ; qu’en matière de récusation, dès qu’il a connaissance de la demande, le juge doit s’abstenir jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la récusation ; que s’il s’oppose à la requête, il fait connaitre par écrit les motifs de cette opposition et la demande de récusation est alors jugée sans délai par la Cour d’appel ; que le magistrat qui rejette lui-même la requête en récusation dont il est l’objet commet un excès de pouvoir ; qu’en l’espèce, Madame le juge des Tutelles du tribunal d’instance de LYON a, par voie d’ordonnance, « rejet (é) la demande de récusation de Monsieur Thierry X… assisté de sa curatrice, Madame Nadège X… » formée à son encontre (ordonnance du 4 juillet 2011, p. 2 alinéa 1er) ; que la Cour d’appel, après avoir pourtant constaté que « c’est par voie d’ordonnance que le juge, objet de la demande de récusation, a rejeté la demande de récusation présentée », a néanmoins décidé que le juge des Tutelles avait fourni « des explications écrites (qui), peu important la formalisation adoptée, doivent s’analyser comme l’expression du refus du juge de se déporter » ; qu’en statuant ainsi, cependant que le juge objet d’une requête en récusation ne peut jamais statuer lui-même sur les mérites et le bien-fondé de cette requête, la Cour d’appel, à qui il appartenait d’annuler l’ordonnance ainsi rendue, a elle-même commis un excès de pouvoir et violé les articles 346, 347 et 349 du Code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés fondamentales.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la requête en récusation formée par Monsieur Thierry X… assisté de sa curatrice ;

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Thierry X…, assisté de sa curatrice, Madame Nadège Z… épouse X…, au visa des dispositions des article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 341 du Code de procédure civile, fonde son action en récusation de Madame Evelyne B…, juge des tutelles, sur sa partialité qu’il tire de la violation par celle-ci du principe du contradictoire ; qu’il soutient également ne pas avoir eu connaissance de tous les éléments du dossier susceptibles d’être retenu contre lui, ce qui est de nature à porter atteinte à son droit de se défendre en toute connaissance de cause ; qu’il se déduit tout d’abord du soit-transmis du juge des tutelles du 13 mai 2011, conforté en cela par les nombreuses pièces produites à l’appui de la requête et notamment les multiples correspondances adressées au juge des tutelles que le majeur protégé comme sa curatrice ou leurs conseils respectifs ont non seulement eu accès au dossier mais aussi communication de l’ensemble des pièces demandées, figurant au dossier à la date de consultation ; qu’en tout état de cause, aucun élément n’est produit de nature à permettre à la Cour de considérer que des pièces aient pu être délibérément occultées par le juge ; qu’en application de l’article 425 du Code de procédure civile « le Ministère public doit avoir communication des procédures relatives … à l’ouverture ou à la modification des mesures judiciaires de protection juridique des majeurs » ; qu’aucune conséquence sur la partialité du juge des tutelles en charge du dossier ne peut en conséquence être tirée de la communication de la procédure au Procureur de la République, qui constitue une obligation légale ; que si le Procureur de la République doit émettre un avis, la loi n’enferme celui-ci dans aucune forme particulière, il peut être écrit ou oral, la contradiction dans cette dernière hypothèse se formant à l’audience ; qu’aussi, faute pour le requérant d’établir que le Parquet aurait rendu un avis écrit qui lui aurait été délibérément dissimulé par le juge lors de la consultation du dossier ou de la communication des pièces, aucune violation par ce dernier du principe du contradictoire et/ ou des droits de la défense, de nature à établir sa partialité, n’est, sur ces points, démontrée ; que la requête en récusation présentée par Monsieur Thierry X… assisté de sa curatrice, Madame Nadège Z… épouse X…, est essentiellement fondée sur le fait que Maître A…, conseil d’un de leurs adversaires dans des procédures judiciaires, ait été reçu par le juge des Tutelles ; qu’il en tirent pour conséquence que ce rendez-vous a permis à ce dernier non seulement d’apporter au magistrat des informations dont ils ne connaissent pas la teneur mais aussi d’accéder au dossier confidentiel du majeur protégé, ce qui constitue selon eux une violation du principe du contradictoire et des droits de la défense du majeur protégé, caractérisant la partialité du juge à l’égard de Monsieur Thierry X… ; qu’il convient tout d’abord de rappeler que le juge des tutelles a pour mission générale d’assurer la protection de la personne même du majeur tout autant que celle de ses biens ; telle que définie aux articles 425 et suivants du Code civil et 1220 et suivants du Code de procédure civile ; que pour assurer au mieux la préservation des droits et intérêts de la personne à protéger, il doit donc procéder à toutes mesures d’instruction utiles afin de recueillir les informations, notamment d’ordre médical, financières ou juridiques, nécessaires au choix de la mesure de protection la plus adaptée à la préservation des intérêts du majeur à protéger ; que le juge des Tutelles n’a, par contre, pas à trancher des litiges pouvant exister entre des personnes sous protection judiciaire et des tiers ; qu’aussi, en recevant le 10 mai 2011, rendez-vous obtenu après d’incessantes pressions de la part de Maître A…, conseil d’un des créanciers du majeur protégé, et alors que les requérants indiquent eux-mêmes dans leur courrier du 8 juillet 2011 qu’il s’agit « d’une partie avec qui ils sont ouvertement en conflit depuis des années », le juge des tutelles n’a pas outrepassé sa mission, sauf à considérer que le majeur et son curateur aient souhaité dissimuler au juge l’existence des procédures en cours opposant Monsieur Thierry X… à des créanciers ; qu’il est en outre observé que Monsieur Thierry X… assisté de sa curatrice Madame Nadège Z…, épouse X…, assistés eux-mêmes de leurs conseils respectifs, ont pour leur part été entendus par le juge des Tutelles le 30 mai 2011 et qu’ils n’établissent pas plus qu’ils ne soutiennent n’avoir pu faire entendre leurs moyens et arguments lors de leur audition ; que la teneur des nombreux courriers adressés par Maître A… tant au juge qu’à leur conseil est telle que les requérants qui en ont régulièrement eu communication (cf. le soit-transmis du juge des tutelles du 13 mai 2011) ont été en mesure d’appréhender la nature et le contenu des informations données au juge par cet auxiliaire de justice et, en tant que de besoin, de faire valoir en réponse leurs moyens de droit ou de fait, en lien avec la mesure de protection envisagée, lors de l’audition du 30 mai 2011, ou ultérieurement lors de la tenue de l’audience de jugement ; qu’enfin, contrairement aux affirmations du requérant, rien dans les pièces et documents communiqués par Monsieur Thierry X… assisté de sa curatrice, Madame Nadège Z… épouse X… au soutien de la requête, ne permet de déduire ou conclure que Maître A… ait eu accès au contenu du dossier du majeur protégé ; qu’en effet dans les conclusions déposées par ce dernier, il n’est fait état que de la nature et de l’étendue de l’incapacité frappant Monsieur Thierry X… à l’exclusion des causes de celle-ci ;

1/ ALORS QUE le juge des tutelles – dont la mission est d’assurer, par les mesures qu’il ordonne, la protection tant de la personne du majeur incapable dont les facultés sont altérées, que de ses intérêts patrimoniaux – procède à l’audition, s’il l’estime opportun, des personnes énumérées à l’article 430 du code civil, à savoir le conjoint du majeur à protéger, son partenaire civil de solidarité, son concubin, un parent ou allié ou une personne entretenant avec lui des liens étroits et stables ; qu’il n’entre pas dans les attributions du juge des Tutelles de permettre à des tiers ayant des intérêts antagonistes de ceux du majeur objet de la mesure de protection judiciaire de s’immiscer dans la procédure de renouvellement de cette mesure ; qu’en décidant néanmoins que n’avait pas outrepassé sa mission ni manqué à son exigence d’impartialité le juge des Tutelles ayant procédé à l’audition, de manière non contradictoire dans le cadre du réexamen d’office de la mesure de protection dont bénéficiait Monsieur X…, du Conseil de l'« adversaire judiciaire » du majeur protégé, avec lequel ce dernier est en conflit depuis de très nombreuses années, cependant que Monsieur X… était fondé à ce que sa situation soit examinée par le juge des Tutelles sans qu’une personne ne cherchant qu’à nuire à ses intérêts soit entendue par ce magistrat, la Cour d’appel a violé les articles 425 du Code civil et 1220 et suivants du Code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés fondamentales.

2°/ ALORS QU’au surplus, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; qu’en refusant en l’espèce, après avoir procédé à l’audition litigieuse du Conseil de Monsieur Y…, d’entendre à son tour Maître Thierry C…, avocat des époux X…, le juge des Tutelles a rompu l’égalité des armes ; qu’en décidant néanmoins que ce faisant, ce magistrat n’avait pas manqué à son exigence d’impartialité, la Cour d’appel a une nouvelle fois violé les articles 425 du Code civil et 1220 et suivants du Code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés fondamentales.

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