Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 décembre 2013, 12-24.232, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Jean-françois Barbièri · Bulletin Joly Sociétés · 1er février 2014
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 10 déc. 2013, n° 12-24.232
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 12-24.232
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Basse-Terre, 25 mars 2012
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000028329578
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:CO01210
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Basse-Terre, 26 mars 2012), que M. X…, détenteur de plus de 5 % du capital de la société anonyme Matouba Source Roudelette (la société), a posé à M. Y…, président-directeur général de cette société, des questions écrites portant sur les relations entre la société et sa filiale, la société Codea, et sur des avantages consentis à la société Sodicar, dirigée par M. Y… ; qu’estimant que les réponses à ces questions n’étaient pas satisfaisantes, M. X… a saisi le président du tribunal de commerce d’une demande de désignation d’un expert, sur le fondement de l’article L. 225-231 du code de commerce ;

Attendu que la société fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen, que saisi d’une demande d’expertise de gestion, le juge doit rechercher si l’acte litigieux est suspect et s’il est, ou non, conforme à l’intérêt social ; qu’en ordonnant une expertise de gestion, au seul motif que M. X… aurait été insuffisamment informé sur la société filiale Codea et sur les avantages accordés à la société Sodicar, sans caractériser en quoi la prise de participation de la société Matouba au sein de la société Codea et les liens entretenus entre la société Matouba et la société Sodicar constituaient des actes de gestion suspects et de nature à porter atteinte à l’intérêt social, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 225-231 du code de commerce ;

Mais attendu que l’arrêt retient que, s’agissant des relations entre la société et sa filiale, la société Codea, le rapport du commissaire aux comptes de la société, émettant des réserves relatives à la valeur des titres et au montant du compte débiteur de la filiale, conclut que la situation financière et les perspectives de développement de cette dernière restent non connues et, s’agissant des relations entre la société et la société Sodicar, que ce rapport constate que la convention entre ces deux sociétés n’a pas été autorisée préalablement et que la société Sodicar bénéficie d’un délai de règlement exceptionnel au regard de l’en-cours de cette dernière représentant 80 % des comptes clients de la société ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel, qui a ainsi fait ressortir des présomptions d’irrégularités ou un risque d’atteinte à l’intérêt social, justifiant la mesure d’expertise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Matouba Source Roudelette aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X… la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Matouba Source Roudelette et M. Y…, en qualité de président-directeur général de ladite société.

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir ordonné une expertise de gestion en application des dispositions de l’article L. 223-37 du code de commerce portant sur les « relations entre la société Matouba et sa filiale Codea » et les « relations entre la société Matouba et la société Sodicar » ;

AUX MOTIFS QUE M. X… est recevable en sa demande en ce qui concerne les conditions de représentation du capital puisqu’il détient 45, 11 % du capital social ; qu’en application de l’article L. 225-231 du code de commerce, l’actionnaire doit avoir interrogé par écrit le président du conseil d’administration sur la ou les opérations de gestion pour lesquelles il souhaite obtenir des éclaircissements et la demande qui doit porter sur une ou plusieurs opérations de gestion déterminées doit être appréciée au regard de l’intérêt de la société ou du groupe ; qu’enfin, l’actionnaire ne doit pas avoir reçu de réponse dans un délai d’un mois ou n’avoir pas reçu des éléments de réponse satisfaisants ;

AUX MOTIFS ENCORE QUE, sur la demande relative à Codea, s’agissant de la première conditions, M. X… invoque plusieurs courriers, dont le courrier par lettre recommandée avec avis de réception en date du 21 janvier 2008, par lequel M. X… a écrit au président de la société Matouba pour obtenir « des informations, détails documents relatifs à l’investissement que la société a réalisé au travers de la filiale Codea à Saint-Domingue (¿) la présente constituant une dernière mise en demeure amiable, elle sera suivie d’une saisine de la juridiction compétente si elle devait, comme mes précédentes demandes, rester sans suite » ; que si les autres courriers, adressés à M. Judes Y…, président directeur général, faisant état de l’absence de communications de pièces, de l’absence de convocation à des assemblées générales, des critiques sur des avantages accordés, des questions concernant les documents comptables, des communications de pièces, ne comportent pas de question concernant un acte de gestion précis de la société ou de ses filiales ou groupe, ce courrier en date du 21 janvier 2008 constitue bien une interrogation par écrit sur une opération de gestion, l’investissement dans une filiale à Saint-Domingue ; que la société Matouba remarque que ce courrier n’est accompagné ni de la preuve d’envoi, ni de l’accusé de réception mais qu’il y est mentionné le numéro de la lettre recommandé avec avis de réception et qu’il y a été indirectement répondu par la télécopie du 10 avril 2008 invitant M. X… à opérer un examen des pièces de Codea à Matouba le 29 avril 2008 ; que la cour considère donc que l’interrogation a été effective ; que s’agissant de la deuxième condition, la société Matouba oppose que la demande doit viser un acte de gestion suspect et que des présomptions sérieuses d’irrégularités doivent être prouvées, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, puisque les comptes de Codea sont disponibles, que les postes significatifs des comptes Codea ont fait l’objet d’une information à destination des actionnaires dans le rapport de gestion de l’exercice 2007 et qu’un rapport sur Codea a été remis à M. X… au cours du conseil d’administration du 23 mai 2008 ; que M. X… répond à juste titre que la recevabilité de la demande d’expertise n’est pas subordonnée à la preuve que les organes sociaux ont méconnu l’intérêt de la société et détourné leurs pouvoirs de sa finalité puisque la mesure d’information et de contrôle tend justement à l’établissement de cette preuve ; qu’en réalité, si la Cour de cassation exige que soit rapportée la preuve d’une présomption d’irrégularité affectant une ou plusieurs opérations de gestion, il est clairement avéré qu’il n’est pas nécessaire d’établir la preuve d’une irrégularité ou d’une atteinte à l’intérêt social ; qu’il suffit que la conformité à l’intérêt social soit douteuse ; que s’agissant de la troisième condition, la société Matouba oppose que les informations sur Codea figuraient dans les rapports de gestion de 2007 et 2008, qu’un rapport sur Codea a été remis à M. X… au cours du conseil d’administration du 23 mai 2008 et que M. Christian X…, ainsi que le commissaire aux comptes, M. Joselyn A… (KPMG) et Mme Monique B…, administrateur, se sont rendus sur place, à Santiago (République Dominicaine) et ont pu constater l’existence de l’usine ; que de plus, M. X… a refusé de se rendre au rendez-vous qui lui avait été fixé le 29 avril 2008 pour prendre connaissance des documents comptables, juridiques et administratifs de Codea ; que les arguments de la société Matouba ne peuvent convaincre, le voyage qui permet de constater la réalité de l’investissement ne constituant pas une information suffisante sur l’opération de gestion constituée par cet investissement ; que malgré l’invitation à consulter les documents comptables, juridiques et administratifs de Codea au retour du PDG de République Dominicaine le 29 avril 2008, force est de constater que cet examen n’a pu avoir lieu, comme le demandait M. X…, ni le 15 avril, ni le 9 juillet 2008 ; que le rapport du commissaire aux comptes en date du 6 juin 2008 émet des réserves relatives à la valeur des titres et au moment du compte débiteur de Codea et conclut que la situation financière et les perspectives de développement de cette filiale restent non connus ; que la société Matouba ne peut donc prétendre avoir fourni une information suffisante pour cette filiale ;

ET AUX MOTIFS ENFIN QUE, sur la demande relative à Sodicar, il résulte du courrier de M. X… en date du 9 octobre 2008 qu’il conteste les avantages accordés à la société Sodicar gérée par M. Y… au détriment de l’intérêt social de la société Matouba et qu’il demande de reporter ce point de l’ordre du jour à une date ultérieure afin d’avoir le temps d’examiner ce projet ; que le nom de Sodicar est également mentionné, parmi les débiteurs divers sur lesquels M. X… demande des informations comptables, dans le courrier par lettre recommandée avec avis de réception du 27 septembre 2007 sollicitant une réponse écrite sur certains points ; qu’il y a donc eu une interrogation effective sur les relations entre Matouba et Sodicar ; que le rapport du commissaire aux comptes en date du 6 juin 2008 constate que la convention avec Sodicar n’a pas été autorisée préalablement et que cette société bénéficie d’un délai de règlement exceptionnel alors que l’encours de Sodicar représente 80 % des comptes clients ; que l’interrogation sur les avantages accordés à la société Sodicar est donc justifiée ; qu’aucune réponse satisfaisante n’a été donnée à cette interrogation et qu’il n’est même pas prétendu qu’il y a été répondu ; qu’il sera donc également fait droit à la demande sur ce point ;

ALORS QUE saisi d’une demande d’expertise de gestion, le juge doit rechercher si l’acte litigieux est suspect et s’il est, ou non, conforme à l’intérêts social ; qu’en ordonnant une expertise de gestion, au seul motif que M. X… aurait été insuffisamment informé sur la société filiale Codea et sur les avantages accordés à la société Sodicar, sans caractériser en quoi la prise de participation de la société Matouba au sein de la société Codea et les liens entretenus entre la société Matouba et la société Sodicar constituaient des actes de gestion suspects et de nature à porter atteinte à l’intérêt social, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 225-231 du code de commerce.

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