Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 décembre 2018, 17-19.336, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 13 déc. 2018, n° 17-19.336
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-19.336
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8 mars 2017
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000037850871
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C301096
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Sur les parties

Texte intégral

CIV.3

JL

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 13 décembre 2018

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 1096 F-D

Pourvoi n° U 17-19.336

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Bruno X…,

2°/ Mme C… Y…, épouse X…,

tous deux domiciliés […] ,

contre l’arrêt rendu le 9 mars 2017 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (4e chambre A), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme Sylvie Z…,

2°/ à Mme D… A…,

3°/ à Mme Q… B…,

toutes trois domiciliées […] ,

défenderesses à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 13 novembre 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Parneix, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Parneix, conseiller, les observations de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. et Mme X…, de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de Mmes Z…, A… et B…, l’avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 mars 2017), que Mme Z… est usufruitière et Mmes A… et B… nues-propriétaires de parcelles situées dans le hameau dit de […] et desservies par un chemin qui traverse une parcelle appartenant à M. et Mme X… ; que, ceux-ci lui ayant enjoint de ne plus utiliser ce chemin, Mme Z… les a assignés en rétablissement du passage ;

Attendu que M. et Mme X… font grief à l’arrêt d’accueillir la demande ;

Mais attendu que constitue un chemin d’exploitation celui qui longe divers héritages, ou y aboutit et sert à la communication ou à l’exploitation des fonds qu’il dessert ; qu’ayant relevé que le chemin litigieux figurait dans des actes anciens, ainsi que sur des photographies de l’institut géographique national et des cartes d’état major et que, sur un plan de 1867, son point de départ se situait au hameau de […] et retenu que la présence d’une ligne téléphonique le long de son tracé laissait présumer son usage non seulement au profit du hameau, mais aussi des propriétés riveraines, et que de nombreuses attestations établissaient que ce chemin était utilisé au moins depuis le début du 20e siècle pour la communication et l’exploitation des propriétés situées dans le hameau, la cour d’appel en a souverainement déduit que le chemin présentait les caractéristiques d’un chemin d’exploitation et que M. et Mme X… devaient être condamnés à rétablir le passage ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X… et les condamne à payer à Mmes Z…, A… et B… la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X…

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que le chemin dit « […] », constituant le tracé n° 2 reproduit en page 26 du rapport d’expertise de M. E… en date du 10 juin 2014, constitue un chemin d’exploitation au sens de l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime, dont Sylvie Z…, D… A… et Q… B… ont l’usage pour la desserte de leur fonds, d’avoir condamné les époux X… à procéder ou à faire procéder aux travaux destinés à reconstituer l’assiette de ce chemin afin que celui-ci soit carrossable et utilisable par des véhicules de tourisme, dans le délai de 8 mois suivant la signification du présent arrêt sous peine, passé ledit délai, d’une astreinte de 500 euros par jour de retard pendant le délai de 6 mois passé lequel il sera à nouveau statué et d’avoir condamné les époux X… à payer à Mme Z… la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts compensatoires de son préjudice de jouissance, enfin d’avoir condamné les époux X… à payer à Mmes Z…, A… et B… la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « aux termes de l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime : « Les chemins d’exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l’usage en est commun à tous les intéressés » ; doit ainsi être qualifié de chemin d’exploitation, un chemin, même implanté sur le fonds d’un seul propriétaire, utilisé pour la desserte d’une autre propriété ;

en l’occurrence, Mme Z… soutient que le chemin, correspondant au tracé n° 2, tel que décrit par l’expert, a été créé lors du partage du domaine de […] en 1833 et 1867, la mention de ce chemin apparaissant dans des actes anciens (acte de Me F…, notaire à Grimaud, du 11 octobre 1867 ; acte de Me R…, notaire à Grimaud, du 23 décembre 1906 ; acte de Me G…, notaire à Cogolin, du 15 mars 1930) ; il est notamment communiqué un plan établi en 1867, lors du partage, matérialisant un chemin au départ du « patecq » de […] ;

certes le chemin litigieux ne figure pas au cadastre, mais son tracé apparaît sur des photographies de l’IGN datant de 1950, 1955 et 1971 et, comme l’indique l’expert, il est reproduit sur des anciennes cartes d’état-major où il est figuré en un tracé double ininterrompu, signe d’un chemin existant praticable ; en outre, M. E… a relevé la présence, le long du tracé, d’une ligne téléphonique faisant, selon lui, présumer d’un usage continu du chemin non seulement par le « patecq » mais également pour tous les propriétaires bénéficiant de cet usage (sic) ; de nombreuses attestations sont produites aux débats, qui émanent notamment d’habitants ou d’anciens habitants du hameau, dont les propriétés étaient desservies par le chemin ; il en résulte que les bastides de […] étaient, depuis des temps anciens, accessibles par le chemin dit «[…] » qui partait de la plaine et suivait la crête entre Cogolin et la Mole ; ainsi, les anciens propriétaires de la maison cadastrée […] , acquise par Mme Z… en 1988, attestent ce qui suit : Ma mère est née dans cette maison en […] . Mon grand-père a toujours utilisé le chemin avec les charrettes de Liège et foin pour se rendre chez lui (

) Ce chemin partait de la plaine du Val d’Astier sur la commune de Cogolin et a toujours permis de rejoindre la campagne du quartier de […] (Gaston H…) ; né en […] , j’ai toujours connu la maison de […] dans laquelle ma mère est née et où mon grand-père vivait. De cette époque depuis nos jours, on accédait à la maison par le chemin que conteste M. X…. De plus, ce chemin reliait les aires à blé et de battage, le tombeau des T… (anciens propriétaires du domaine […]) la maison, les champs et la route de Cogolin à la Mole (Guy H…) ;

il est donc établi que jusqu’en 2009, date à laquelle M. et Mme X… ont fait interdiction à Mme Z… (comme aux autres habitants du hameau) d’utiliser le chemin litigieux, celui-ci constituait la voie normale d’accès au hameau, qu’utilisait ses habitants depuis, à tout le moins, le début du XXe siècle ; il ne peut être soutenu que le chemin ne présente pas toutes les caractéristiques pour être qualifié de chemin d’exploitation au sens de l’article L. 162-1 susvisé, alors qu’il assurait la desserte de fonds appartenant à des propriétaires différents, dont les attestations sont d’ailleurs versées aux débats (Jacques I…, Jacqueline J…, Alain K…, Marie-France L…, Michel M… U…), peu important qu’il desservait ou pas à l’origine un seul héritage ;

il ressort des énonciations du rapport d’expertise que le chemin dit « […] » est devenu partiellement inutilisable pour des véhicules de tourisme en raison du passage des engins utilisés par M. et Mme X… pour le terrassement de leur parcelle ; un procès-verbal de constat dressé le 26 septembre 2011 par Me N…, huissier de justice, relate ainsi le mauvais état du chemin en certains endroits du fait de la création de fossés ou de ravines, de l’existence d’accumulation de terre meuble et grasse et du creusement de nids de poule et de fossés ;

l’expert a également relevé l’existence, sur les anciennes cartes d’état-major, d’un chemin, le tracé 4a, figuré en tracé double ininterrompu dans sa partie nord, signe d’un chemin existant praticable, se prolongeant par un simple sentier, le tracé 3, figuré en tracé simple non double, le long d’un ruisseau ; si ce tracé figure également sur les photographies de l’IGN de 1950, 1955 et 1971, il ne constituait pas, selon M. E…, la voie « historique » d’accès au hameau de […] ; il n’est d’ailleurs utilisable qu’en période sèche, le fond du ruisseau étant, par endroits, au même niveau altimétrique que le chemin et même légèrement plus bas, ainsi que l’indique M. O…, géomètre expert, dans un courrier adressé le 28 septembre 2011 à Mme Z… ; c’est vainement que M. et Mme X…, se fondant sur une note technique rédigée le 21 juillet 2011 par M. P…, prétendent que ce tracé serait le plus pratique au motif que des travaux importants d’aménagement y ont été réalisés sur au moins 50 m, qui ont consisté en l’apport d’une couche conséquente de « tout venant » avec du gravier et des éléments argileux, permettant le compactage de l’ensemble et la création d’une bande de roulement en parfait état ; en effet, les photographies annexées au rapport d’expertise, prises en décembre 2012, montrent que le chemin a été recouvert de boue après un épisode pluvieux, rendant impossible le passage des véhicules, et une attestation de constat établie le 24 décembre 2014 par le garde champêtre assermenté de la commune indique que le chemin d’accès au hameau de […] (le tracé 4a) a été dégradé suite à des inondations à répétition survenues depuis le mois de novembre 2014, un ruissellement le long du chemin privé de M. X… ayant provoqué une ravine qui a creusé la voie, rendant le passage difficile pour les voitures de tourisme (sic) ;

il convient, dans ces conditions, de considérer que le chemin dit « […] », constituant le tracé n° 2 reproduit en page 26 du rapport d’expertise (correspondant au tracé A – F – C – D tel que matérialisé sur la carte d’état-major annexée au rapport de M. P… du 19 avril 2011) constitue un chemin d’exploitation, dont Mmes Z…, A… et B… ont l’usage pour la desserte de leurs parcelles cadastrées commune de la Mole, au lieu-dit « […] », section […] , […], […], […] et […] ; il y a lieu dès lors de faire droit à la demande de celles-ci tendant à la condamnation de M. et Mme X… à reconstituer l’assiette du chemin, selon des modalités qui seront précisées ci-après ;

même si elle a pu accéder à son fonds en utilisant le tracé 4a-3, Mme Z… n’en a pas moins subi un préjudice depuis 2009 lié aux obstacles apportés à l’utilisation d’un chemin, qui assurait jusqu’alors la desserte normale du hameau de […], et aux contraintes subies du fait de l’utilisation d’un chemin, inondable, difficilement praticable en période hivernale ; la cour estime que son préjudice doit être réparé par l’allocation de la somme de 4000 euros à titre de dommages et intérêts ;

au regard de la solution apportée au règlement du litige, M. et Mme X… doivent être condamnés aux dépens de première instance et d’appel, y compris les frais et honoraires de l’expert, ainsi qu’à payer à Mmes Z…, A… et B… la somme de 3 000 euros en remboursement des frais non taxables que celles-ci ont dû exposer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;»

1) ALORS QUE les chemins et sentiers d’exploitation sont ceux qui, longeant divers héritages, enclavés ou non, ou y aboutissant, servent exclusivement à la communication entre eux ou à leur exploitation ; qu’en se bornant à relever, pour en déduire que le chemin litigieux dit « […] » était un chemin d’exploitation, qu’il assurait la desserte de fonds appartenant à des propriétaires différents, la cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à établir que le chemin litigieux longeait divers héritages et servait exclusivement à la communication entre eux ou à leur exploitation, a violé l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime ;

2) ALORS QU’ un chemin destiné à desservir non seulement les fonds riverains mais aussi d’autres propriétés non riveraines ne constitue pas un chemin d’exploitation ; qu’en retenant que le chemin dit « […] » constituait un chemin d’exploitation dès lors qu’il assure la desserte de fonds appartenant à des propriétaires différents dont Jacques I…, Jacqueline J…, Alain K…, Marie-France L… et Michel M… U…, sans rechercher si les fonds de tous ces propriétaires étaient riverains du chemin, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime ;

3) ALORS QUE s’il n’en est pas riverain, un fonds ne peut revêtir la qualification de chemin d’exploitation et bénéficier de l’usage dudit chemin ; qu’en se bornant à relever que le chemin dit « […] » constituait la voie normale d’accès au hameau qu’utilisaient ses habitants depuis au moins le début du XXe siècle et assurait ainsi la desserte de fonds appartenant à des propriétaires différents pour en déduire que les parcelles cadastrées section […] , […], […], […] et […], propriété de Mmes Z…, A… et B…, avaient l’usage dudit chemin pour leur desserte sans même constater que ces parcelles étaient riveraines du chemin litigieux, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime.

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  2. Code rural
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