Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 mai 2019, 18-15.799, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 23 mai 2019, n° 18-15.799
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-15.799
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Rennes, 20 février 2018
Textes appliqués :
Article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038567441
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:C200702
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 2

MF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 23 mai 2019

Cassation

Mme FLISE, président

Arrêt n° 702 F-D

Pourvoi n° V 18-15.799

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Z… C…, domicilié chez Mme Q… C…, […],

contre l’arrêt rendu le 21 février 2018 par la cour d’appel de Rennes (5e chambre), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Assurances du crédit mutuel, société anonyme, dont le siège est […] ,

2°/ à M. I… K…, domicilié […],

3°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique, dont le siège est […],

défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 10 avril 2019, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mme Rosette, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. C…, de la SCP Gaschignard, avocat de la société Assurances du crédit mutuel, l’avis de Mme Nicolétis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l’article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;

Attendu que seule est inexcusable au sens de ce texte la faute volontaire d’une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le 30 août 2008 vers 1h du matin, M. C…, alors âgé de 17 ans, qui se trouvait avec des amis sur un parking et consommait de l’alcool, a voulu arrêter le cyclomoteur sur lequel circulait M. K…, qui n’a pu éviter de le percuter ; que M. C… a assigné M. K… et son assureur, la société Assurances du crédit mutuel, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie de Loire Atlantique en indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que pour dire que M. C… avait commis une faute inexcusable, cause exclusive de l’accident et n’avait pas droit à l’indemnisation des atteintes à sa personne, l’arrêt retient que ce dernier s’est volontairement placé au milieu de la chaussée à l’arrivée du cyclomoteur et a continué à avancer vers lui dans le but de l’arrêter, malgré la manoeuvre d’évitement du conducteur et s’est exposé, par cette faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, sans aucune raison à un danger dont il connaissait l’existence, que cette faute inexcusable a été la cause exclusive de l’accident dont il a été victime ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les éléments relevés ne caractérisaient pas l’existence d’une faute inexcusable, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 21 février 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Assurances du crédit mutuel aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. C… la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. C….

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR dit que loi du 5 juillet 1985 est applicable au litige, d’AVOIR dit que M. C… a commis une faute inexcusable, cause exclusive de l’accident et n’a pas droit à l’indemnisation des atteintes à sa personne et d’AVOIR débouté M. Z… C… de sa demande d’indemnisation de son préjudice corporel ;

AUX MOTIFS QU’aux termes de l’article 3, alinéa 1, de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident ; que cet article prévoit également une exception à cette indemnisation lorsque la victime a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi ; que les ACM soutiennent à tort que M. C… a volontairement recherché la survenance du dommage ; qu’en effet, il ressort des déclarations des témoins de l’accident entendus dans le cadre de l’enquête pénale diligentée, que la volonté d’Z… C… était d’empêcher le véhicule à deux roues de passer mais non pas de provoquer les graves blessures dont il a été atteint ; que seule est inexcusable, au sens de l’article 3 précité, la faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ; qu’il ressort du procès-verbal de gendarmerie que les faits ont eu lieu à 1h10 dans la zone industrielle de l’agglomération de la Chevrolière ; que M. C… et des amis s’étaient donné rendez-vous sur le parking d’une entreprise et y consommaient de l’alcool lorsque le cyclomoteur de 50 cm3 de M. K… est arrivé ; que le dépistage d’alcoolémie s’est révélé négatif sur M. K… et positif sur M. C…, ce dernier ayant un taux d’alcool de 2,05 gramme par litre de sang ; que si la victime n’a pas été entendue, M. K…, conducteur du cyclomoteur, a indiqué qu’il avait aperçu un groupe de personnes sur sa droite qui, à sa vue, se sont rapprochées du bord de la route ; qu’il a précisé qu’il avait eu peur mais n’avait pas freiné, compte-tenu de la distance mais s’était déporté totalement sur sa gauche car il avait vu l’un des jeunes gens se mettre au milieu de la chaussée ; qu’il a précisé : « en m’approchant du lieu, j’ai vu que cette personne cherchait à m’attraper lors de mon passage. J’ai donc freiné et au moment où je passais, il s’est jeté devant mon engin. Je l’ai vu dans le phare, le choc était inévitable » ; que trois amis qui se trouvaient avec M. C…, ont décrit à leur tour, la scène ; que M. J… U… qui a reconnu qu’il avaient tous bu plus que de raison sauf Y… V… qui était resté sobre, a précisé qu’en voyant la « motocyclette », Z… C… avait dit « je vais l’arrêter », qu’il s’est mis au milieu de la chaussée et qu’il levait les bras. Il a déclaré : « j’ai vu que le pilote commençait à prendre peur. Il s’est déporté sur sa gauche presqu’au niveau du trottoir opposé. Mais il n’a pas pu éviter le choc » ; qu’il a estimé que la responsabilité incombait totalement à son ami Z… qui « s’était volontairement mis en travers de la route pour empêcher la petite moto de passer » ; que M. W… X… a témoigné ainsi : « Z… a dit qu’il voulait l’arrêter. Il s’est mis au milieu de la route. La petite moto est arrivée, elle n’a pas ralenti. Il a essayé de l’éviter en se décalant. Mais il n’a pas pu éviter Z… qui a continué à avancer dans sa direction. Le choc était inévitable » ; qu’enfin, M. Y… V… a déclaré qu’Z… C… qui était « bien énervé » a décidé de s’interposer et qu’il l’a vu aller au milieu de la chaussée, qu’il a bien vu le pilote de la petite motocyclette essayer de l’éviter, en faisant un écart sans ralentir et il a précisé : « c’est au moment où ce pilote a fait l’écart qu’Z… a continué à aller à la rencontre de la petite moto. Le choc était alors inévitable » ; qu’il ressort de ces quatre témoignages concordants, qui précisent que la scène a été extrêmement rapide, que M. C… s’est volontairement placé au milieu de la chaussée dans le but déclaré d’arrêter le cyclomoteur, que le cyclomoteur s’est tout de suite déporté sur son extrême gauche mais que le piéton a continué à s’avancer vers lui, M. K… indiquant même qu’il cherchait à l’attraper ; que le taux d’imprégnation alcoolique de M. C… n’est pas de nature à enlever à cette faute son caractère volontaire ; que la vitesse excessive du conducteur de cyclomoteur n’est pas démontrée ; qu’il ne peut être reproché au conducteur du cyclomoteur de ne pas avoir ralenti lorsqu’il s’est déporté de sa voie alors que d’une part, les gendarmes ont fait vérifier par un expert que le moteur 50 cm3 qui ne pouvait dépasser 45 km/h n’était pas débridé, que d’autre part, il est légitime que ce dernier ait pris peur et ait pu craindre comme il le dira plus tard, que ce groupe de jeunes cherche à lui voler son cyclomoteur, et qu’enfin, il a bien réagi au danger puisqu’il a fait un écart important sur sa gauche en frôlant le trottoir opposé à son sens de circulation, ce qui aurait été suffisant à éviter la collision si M. C… n’avait pas continué à avancer vers lui ; qu’il ressort de l’ensemble de ces éléments que le piéton s’est volontairement placé au milieu de la chaussée à l’arrivée du cyclomoteur et a continué à avancer vers lui dans le but de l’arrêter, malgré la manoeuvre d’évitement du conducteur et s’est exposé, par cette faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, sans aucune raison à un danger dont il connaissait l’existence, ayant obtenu l’épreuve théorique du code de la route et pratiquant la conduite accompagnée et que cette faute inexcusable a été la cause exclusive de l’accident ont il a été victime ;

ALORS QU’est seule inexcusable la faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ; qu’en jugeant que M. C… aurait commis une faute inexcusable, par cela seul qu’il se serait volontairement placé au milieu de la chaussée à l’arrivée du cyclomoteur conduit par M. K… et aurait continué à avancer vers lui dans le but de l’arrêter, malgré la manoeuvre d’évitement du conducteur, la cour d’appel a violé l’article 3 de la loi du 5 juillet 1985.

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