Cour de cassation, Chambre criminelle, 9 mars 2021, 20-81.107, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Claudine Bernfeld · Gazette du Palais · 4 mai 2021

Jean-baptiste Mahieu · Gazette du Palais · 4 mai 2021
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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 9 mars 2021, n° 20-81.107
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-81.107
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Nouméa, 6 janvier 2020
Textes appliqués :
Article 464 du code de procédure pénale.

Article 1240 du code de civil et le principe de la réparation intégrale.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043301968
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:CR00212
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Sur les parties

Texte intégral

N° Y 20-81.107 F-D

N° 00212

CK

9 MARS 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,

DU 9 MARS 2021

Mme S… E…, partie civile, a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Nouméa, chambre correctionnelle, en date du 7 janvier 2020, qui dans la procédure suivie contre M. W… M… du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme S… E…, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l’audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et M. Bétron, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Mme S… E… a été victime d’un accident de la circulation qui l’a laissée paraplégique.

3. Par jugement du 3 juillet 2015, le conducteur du véhicule a été déclaré coupable de blessures involontaires et la constitution de partie civile de la victime a été déclarée recevable.

4. Par jugement du 27 mai 2019, le tribunal statuant sur les intérêts civils a alloué la totalité des sommes sollicitées par Mme E….

5. Le Fonds de garantie des assurances automobiles a relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen est pris de la violation de l’article 464 du code de procédure pénale.

7. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a réservé trois postes de préjudices sans fixer de date de renvoi alors « que le juge ne peut interrompre le cours de la justice en ordonnant un renvoi à une date indéterminée ; qu’en réservant certains postes de préjudice : frais d’adaptation de véhicule ; projet d’adaptation d’un futur logement ; lit médicalisé, sans fixer une date de renvoi, la cour d’appel a interrompu le cours de la justice. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 464 du code de procédure pénale :

8. Aux termes de ce texte, si lorsqu’elles ne peuvent prononcer en l’état sur une demande de dommages et intérêts, les juridictions correctionnelles ont la faculté d’ordonner un renvoi à date fixe, elles ne sauraient en revanche, sans interrompre le cours de la justice, réserver pour un temps indéterminé la liquidation de postes de préjudices.

9. La cour d’appel a réservé l’indemnisation de trois postes de préjudice au motif que, cinq ans après l’accident, Mme E… ne produit aucun élément concret démontrant la viabilité du projet de bâtir sa maison et la volonté de mettre en oeuvre ce projet.

10. En statuant ainsi, par une décision qui s’analyse en un sursis à statuer pour un temps indéterminé et alors qu’elle pouvait, si nécessaire, ordonner une mesure d’instruction et en fixer le terme, la cour d’appel a interrompu le cours de la justice et a violé le texte susvisé.

11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Sur les deuxième et troisième moyens

Enoncé des moyens

12. Le deuxième moyen critique l’arrêt en ce qu’il a réservé le poste de préjudice des frais d’adaptation de véhicule, en le subordonnant à l’obtention d’un permis de conduire alors « que la victime atteinte d’un handicap permanent doit être indemnisée des dépenses qu’elle a engagées ou qu’elle engagera certainement après la date de consolidation ; que les frais de véhicule adapté auxquels peut prétendre la victime et inhérents à l’équipement du véhicule au moyen d’un dispositif technique permettant son utilisation malgré le handicap ne sont pas subordonnés à la condition que la victime conduise elle-même le véhicule ; qu’en conditionnant l’indemnisation de Mme E… à l’obtention du permis de conduire, la cour d’appel a méconnu le principe de la réparation intégrale et violé l’article 1240 du code civil. »

13. Le troisième moyen critique l’arrêt en ce qu’il a d’une part, refusé de procéder à la capitalisation des différents postes de préjudices liés aux dépenses de santé futures et d’autre part de les avoir soumis à la présentation de justificatifs alors « qu’en subordonnant l’indemnisation de Mme E… à la production de justificatifs alors qu’il lui appartenait, pour liquider son préjudice, de procéder à la capitalisation des frais futurs en déterminant le coût des appareillages nécessaires ainsi que la périodicité de leur renouvellement, la cour d’appel a méconnu l’article 1240 du code civil ainsi que le principe de la réparation intégrale. »

Réponse de la Cour

Les moyens sont réunis

Vu l’article 1240 du code de civil et le principe de la réparation intégrale :

14. Il résulte de ce texte et du principe sus mentionné qu’il appartient aux juges de réparer le préjudice dont ils reconnaissent le principe.

15. Pour refuser d’appliquer un barème de capitalisation et réserver des postes de préjudices, l’arrêt attaqué énonce qu’il convient de rappeler aux parties que les postes de préjudice correspondant à des besoins réels ne peuvent faire l’objet d’une capitalisation mais doivent être liquidés « in concreto » au vu de devis ou de factures et que telle sera la démarche suivie par la cour.

16. La cour d’appel relève, s’agissant des frais d’adaptation du véhicule, que l’expert ergothérapeute, a évalué les aménagements, combiné accélérateur, frein mécanique, boule au volant, coffre de toit avec bras articulé à la somme de 885 008 FCFP et que le rapport final de l’expert estime ce poste de dépense à 1000 000 FCFP.

17. Elle en déduit que Mme E… se déplaçant en ambulance ou en véhicule sanitaire léger et n’ayant pas le permis de conduire ne peut prétendre qu’aux frais de surcoût d’un véhicule adapté à son handicap et au remboursement des aménagements qu’elle devra y apporter.

18. Elle conclut que les frais de remplacement des équipements tous les dix ans sont subordonnés à l’achat d’un véhicule et seront mis à la charge de M. M…, sous réserve que Mme E… justifie de l’obtention d’un permis de conduire.

19. Elle retient encore que Mme E… sollicite des frais futurs de matériels médicaux au vu du rapport de l’ergothérapeute et que les frais d’achat et de renouvellement tous les cinq ans sont calculés en appliquant un coefficient multiplicateur fondé sur son espérance de vie.

20. Elle en déduit que ces modalités de calcul ne sont pas conformes aux règles d’indemnisation qui prennent en compte les besoins réels et nécessaires de la victime.

21. Elle conclut que les frais de renouvellement de ces matériels interviendront sur factures et que les renouvellements pour l’année "N+1" devront être sollicités en début d’année.

22. En subordonnant l’indemnisation de Mme E… à la production de justificatifs, alors qu’il lui appartenait de réparer définitivement les préjudices dont elle avait reconnu le principe et d’indemniser, en procédant à leur capitalisation, les frais de santé futurs en déterminant le coût des appareillages nécessaires ainsi que la périodicité de renouvellement, la cour d’appel a méconnu le texte et le principe susvisé.

23. La cassation est à nouveau encourue de ces chefs.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Nouméa, en date du 7 janvier 2020, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Nouméa, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Nouméa, et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf mars deux mille vingt et un.

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Textes cités dans la décision

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  2. Code de procédure pénale
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