Conseil d'État, 3ème SSJS, 18 décembre 2014, 382163, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CE, 3e ss-sect. jugeant seule, 18 déc. 2014, n° 382163
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 382163
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 16 juin 2014, N° 1402529-1402635-1403365
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032629922
Identifiant européen : ECLI:FR:CESJS:2014:382163.20141218

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure

Le 25 mars 2014, Mme B… A… a demandé au tribunal administratif de Nantes de la déclarer élue à l’issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune de Deux-Evailles (Mayenne) en vue de l’élection des conseillers municipaux, ou, à titre subsidiaire, d’annuler ces opérations électorales. Le 26 mars 2014, M. C… A… a saisi le tribunal administratif de Nantes d’une protestation tendant aux mêmes fins. Le 4 avril 2014, le préfet de la Mayenne a demandé au tribunal administratif de Nantes que le procès-verbal des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans cette commune soit rectifié et que l’élection de Mme A… au conseil municipal soit annulée.

Par un jugement n° 1402529-1402635-1403365 du 17 juin 2014, le tribunal administratif de Nantes, après avoir joint les protestations de Mme A… et de M. A… et le déféré du préfet de la Mayenne, a annulé l’élection de Mme A… à l’issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune des Deux-Evailles et rejeté les protestations de Mme A… et de M. A….


Procédure devant le Conseil d’Etat

Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 juillet et 10 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, Mme A… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 juin 2014 et de la déclarer élue conseillère municipale de la commune de Deux-Evailles à l’issue des opérations électorales qui se sont déroulées dans cette commune le 23 mars 2014 ;

2°) en application de l’article L. 117-1 du code électoral, de communiquer le dossier de l’élection au procureur de la République ;

3°) à titre subsidiaire, d’annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune de Deux-Evailles.

Vu :

 – les autres pièces du dossier ;

 – le code électoral ;

 – le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Romain Victor, maître des requêtes,


- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 décembre 2014, présentée par Mme A… ;

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Si, lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à la validité de certains bulletins de vote, le juge de l’élection doit d’abord rechercher si, eu égard au nombre des bulletins concernés et à l’argumentation développée devant lui, cette contestation est de nature à remettre en cause l’élection d’un ou plusieurs candidats et, dans l’affirmative, étendre ses vérifications à l’ensemble des bulletins des mêmes bureaux, annexés au procès-verbal des opérations électorales en vertu des articles L. 66, R. 66 et R. 68 du code électoral, puis, au terme de ces vérifications, réviser les décomptes des voix et, le cas échéant, modifier les résultats de l’élection, il ne peut procéder à ces dernières vérifications sans en informer les parties.

2. Il résulte de l’instruction que, tant dans sa protestation du 25 mars 2014 que dans son mémoire complémentaire du 5 avril 2014, Mme A… a demandé au tribunal administratif de contrôler la validité, non d’une partie, mais de la totalité des 61 bulletins de vote et enveloppes annexés au procès-verbal des opérations électorales du 23 mars 2014. Par suite, le tribunal administratif a pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de la procédure, procéder à l’examen de ces bulletins sans en avoir préalablement informé les parties.

Sur le déféré du préfet de la Mayenne :

3. Il résulte des énonciations du procès-verbal des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune de Deux-Evailles en vue de la désignation des onze conseillers municipaux de cette commune, pour lesquelles Mme B… A… était seule candidate, que le bureau de vote a constaté qu'" aucun candidat ne [remplissait] les conditions pour être élu « et que » le président (…) a déclaré qu’il y avait lieu à un second tour de scrutin pour 11 sièges restant à pourvoir ", après avoir relevé que Mme A… avait recueilli 37 suffrages, soit un nombre de suffrages inférieur au seuil du quart des 151 électeurs inscrits requis pour être élu dès le premier tour de scrutin en vertu du 2° de l’article L. 253 du code électoral. Ainsi, Mme A… n’a pas été déclarée élue conseillère municipale de la commune de Deux-Evailles à l’issue des opérations électorales du 23 mars 2014. En conséquence, en tant qu’elles tendaient à l’annulation de l’élection de Mme A… à l’issue de ces opérations électorales, les conclusions du déféré du préfet de la Mayenne étaient irrecevables. Par suite, c’est à tort que le tribunal administratif de Nantes a fait droit à ces conclusions et prononcé l’annulation de l’élection de Mme A… à l’issue des opérations électorales du 23 mars 2014 par l’article 1er de son jugement, qui doit être annulé, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens des requêtes.

Sur les protestations de Mme A… et de M. A… :

4. En premier lieu, aux termes de l’article L. 66 du code électoral, dans sa rédaction applicable au litige : « Les bulletins blancs, (…) les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions injurieuses pour les candidats ou pour des tiers n’entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement. / Mais ils sont annexés au procès-verbal (…) et contresignés par les membres du bureau. / Chacun de ces bulletins annexés doit porter mention des causes de l’annexion. / Si l’annexion n’a pas été faite, cette circonstance n’entraîne l’annulation des opérations qu’autant qu’il est établi qu’elle a eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ».

5. D’une part, la circonstance, à la supposer établie, que les deux enveloppes comportant les 61 bulletins de vote et enveloppes annexés au procès-verbal des opérations électorales du 23 mars 2014 n’étaient pas closes lors de leur transmission au tribunal administratif ne suffit pas à remettre en cause l’authenticité de ces bulletins et enveloppes. D’autre part, il résulte de l’instruction, et notamment des énonciations du procès-verbal des opérations électorales que si, comme le relèvent les requérants, ces bulletins et enveloppes ne portent pas mention des causes de leur annexion au procès-verbal, en méconnaissance des dispositions précitées du code électoral, toutefois ces mêmes bulletins et enveloppes, qui sont tous contresignés par les membres du bureau, consistent en 23 enveloppes vides, en un bulletin déchiré de façon caractéristique dans le sens de la largeur, en un bulletin comportant une mention injurieuse rayée de couleur rouge et en 36 bulletins sur lesquels le nom de Mme A… a été rayé. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que certains des bulletins annexés au procès-verbal doivent être attribués à Mme A…, qui recueillerait ainsi le nombre de suffrages, supérieur à 37, nécessaire pour être élue dès le premier tour des élections municipales. Ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que l’absence de mention des causes de l’annexion au procès-verbal de ces 61 bulletins de vote et enveloppes serait constitutive d’une manoeuvre susceptible d’avoir porté atteinte à la sincérité du scrutin.

6. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède qu’en ne proclamant pas Mme A… élue conseillère municipale à l’issue des opérations électorales du 23 mars 2014, le bureau de vote n’a commis aucune irrégularité.

7. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que le préfet de la Mayenne aurait modifié les énonciations du procès-verbal des opérations électorales du 23 mars 2014 manque en fait.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A… et M. A… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par les articles 2 et 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs protestations.

Sur l’application des dispositions de l’article L. 117-1 du code électoral :

9. Aux termes de l’article L. 117-1 du code électoral : « Lorsque la juridiction administrative a retenu, dans sa décision définitive, des faits de fraude électorale, elle communique le dossier au procureur de la République compétent. ». Aucun fait de fraude électorale n’ayant été constaté en l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de saisine du procureur de la République en application de ces dispositions.

D E C I D E :

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Article 1er : L’article 1er du jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 juin 2014 est annulé.

Article 2 : Le déféré du préfet de la Mayenne et le surplus des conclusions de Mme A… et de M. A… sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B… A…, à M. C… A… et au ministre de l’intérieur.

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Textes cités dans la décision

  1. Code électoral
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