Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 18 juillet 2018, 418910, Inédit au recueil Lebon

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Jacqueline Rossant-lumbroso · Gazette du Palais · 16 octobre 2018

Vulpi Avocats - Chronique de jurisprudence · 11 septembre 2018

Juillet-Août 2018 Actes et décisions 1 - Motivation des actes – Avis défavorable du conseil d'administration d'une université – Motivation insuffisante car trop sommaire – Annulation – Obligation d'une nouvelle délibération. Doit être considérée comme insuffisamment motivée la décision du conseil d'administration d'une université qui, pour émettre un avis défavorable à la candidature d'une personne classée première par le conseil académique, se borne à retenir que « le candidat classé en première position ne correspond pas au profil du poste publié ». On comprend que le candidat …

 

Conclusions du rapporteur public · 18 juillet 2018

N° 406470 M. P… N° 418910 M. G… 4ème et 1ère chambres Séance du 4 juillet 2018 Lecture du 18 juillet 2018 CONCLUSIONS Mme Sophie-Justine LIEBER, rapporteur public Ces deux affaires, qui portent sur des sanctions ordinales infligées à des médecins ayant rédigé des « rapports tendancieux », vous amèneront à préciser votre jurisprudence en la matière, lorsque les rapports en cause ont été produits dans une hypothèse particulière : celle de médecins consultés comme conseils, pour appuyer une partie dans un litige. Ces rapports médicaux peuvent donc ensuite être …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 4e et 1re ch. réunies, 18 juill. 2018, n° 418910
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 418910
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037220745
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2018:418910.20180718

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

M. A… D… a porté plainte contre M. B… C… devant la chambre disciplinaire de première instance de Languedoc-Roussillon de l’ordre des médecins. Par une décision du 8 janvier 2016, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C… la sanction d’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois.

Par une décision du 6 février 2018, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a rejeté l’appel formé par M. C… contre cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mars et 10 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. C… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cette décision ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de M. D… la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code de la santé publique ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,

— les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. C… et à la SCP Richard, avocat de M. D…;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. E…, s’estimant victime de fautes commises lors d’une intervention médicale effectuée par M. D…, médecin spécialiste en ophtalmologie, a sollicité à titre amical M. C…, médecin généraliste, lequel a rédigé, sur la base de certains éléments du dossier médical de M. E…, une note qu’il a directement adressée le 1er octobre 2014 à l’avocat de celui-ci et qui présente plusieurs arguments permettant d’étayer la mise en cause de M. D… ; que ce dernier a porté plainte contre M. C… devant la chambre disciplinaire de première instance de Languedoc-Roussillon de l’ordre des médecins ; que M. C… se pourvoit en cassation contre la décision du 6 février 2018 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a rejeté son appel dirigé contre la décision du 8 janvier 2016 par laquelle la chambre disciplinaire de première instance lui a infligé la sanction d’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois ;

2. Considérant, en premier lieu, que les juridictions disciplinaires de l’ordre des médecins, saisies d’une plainte contre un praticien, peuvent légalement connaître de l’ensemble du comportement professionnel de l’intéressé, sans se limiter aux faits dénoncés dans la plainte ni aux griefs articulés par le plaignant ; qu’à ce titre, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins peut légalement se fonder, pour infliger une sanction à un médecin, sur des griefs nouveaux qui n’ont pas été dénoncés dans la plainte soumise à la chambre disciplinaire de première instance, à condition toutefois d’avoir mis au préalable l’intéressé à même de s’expliquer sur ces griefs ;

3. Considérant qu’il ressort des termes mêmes de sa décision que la chambre disciplinaire nationale a, pour prononcer la sanction dont M. C… demande l’annulation, notamment retenu qu’il avait méconnu l’obligation déontologique de respecter le secret médical, en ce qu’il avait transmis directement sa note du 1er octobre 2014 à l’avocat de M. E… et non à ce dernier ; que si ce grief n’était soulevé ni en première instance ni dans les mémoires d’appel, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a toutefois, par deux courriers des 7 et 17 novembre 2017, informé les parties de ce qu’elle était susceptible d’examiner d’office « le grief tiré de la violation du secret médical » ; que, dans les circonstances particulières de l’espèce, alors que le seul fait en débat devant les juges du fond était la rédaction de la note du 1er octobre 2014, l’absence de mention, dans les courriers de la chambre disciplinaire nationale, de ce que cette possible violation du secret médical était liée aux conditions de transmission de cette note, n’a pas fait obstacle à ce que M. C… soit mis à même de s’expliquer sur le grief en question ; que, par suite, il n’est pas fondé à soutenir que la décision attaquée, qui est suffisamment motivée sur ce point, est entachée d’irrégularité ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article R. 4127-28 du code de la santé publique : « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite » ; que le premier alinéa de l’article R. 4127-56 du même code dispose, par ailleurs, que : « Les médecins doivent entretenir entre eux des rapports de bonne confraternité » ; que ces obligations déontologiques s’imposent à tout médecin, y compris celui qui est librement sollicité par un particulier en vue d’apporter son concours, par des analyses ou des conseils, dans le cadre d’un litige ou d’une expertise ;

5. Considérant qu’il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que, pour confirmer la sanction litigieuse, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a retenu que M. C… avait, dans la note adressée le 1er octobre 2014 à l’avocat de M. E…, procédé à des affirmations inexactes, fait état de vérités tronquées, donné pour établis des faits qui ne l’étaient pas, ou à l’inverse, présenté comme hypothétiques des faits dont la réalité était incontestable ; qu’en déduisant de l’appréciation souveraine ainsi portée, sans dénaturation, sur le contenu de la note en question, d’une part, que sa rédaction était constitutive d’une méconnaissance de l’interdiction déontologique de délivrer un rapport tendancieux et, d’autre part, qu’une telle mise en cause tendancieuse du comportement professionnel de M. D…, formulée sans prendre l’attache de ce dernier ni demander des renseignements complémentaires à M. E…, était constitutive d’un manquement au devoir déontologique de confraternité, la chambre disciplinaire nationale a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu’il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction retenue n’est pas hors de proportion avec la faute commise et qu’elle a pu dès lors être légalement prise ; qu’en l’espèce, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a pu légalement estimer que les fautes déontologiques reprochées à M. C… justifiaient, eu égard à leur gravité, la sanction d’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois qui lui avait été infligée par la chambre disciplinaire de première instance ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. C… n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision qu’il attaque ;

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de M. D…, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. C… une somme de 3 000 euros à verser à M. D… au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. C… est rejeté.


Article 2 : M. C… versera à M. D… la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B… C… et à M. A… D….

Copie en sera adressée au Conseil national de l’ordre des médecins.

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