Conseil d'État, 5ème chambre, 21 décembre 2018, 423051, Inédit au recueil Lebon
Chronologie de l’affaire
Commentaire • 1
Sur la décision
Référence : | CE, 5e ch., 21 déc. 2018, n° 423051 |
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Juridiction : | Conseil d'État |
Numéro : | 423051 |
Importance : | Inédit au recueil Lebon |
Type de recours : | Excès de pouvoir |
Décision précédente : | Tribunal administratif de Montreuil, 28 juin 2018, N° 1805046 |
Identifiant Légifrance : | CETATEXT000037847542 |
Identifiant européen : | ECLI:FR:CECHS:2018:423051.20181221 |
Sur les parties
- Rapporteur : M. Cédric Zolezzi
- Rapporteur public : Mme Cécile Barrois de Sarigny
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
M. A… B… a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, d’enjoindre au ministre de l’intérieur de lui fournir un certificat immatriculation provisoire à son nom pour son véhicule et de prononcer, au-delà d’un délai de quarante-huit heures, une astreinte de 500 euros par jour de retard. Par une ordonnance n°1805046 du 29 juin 2018, le juge des référés a rejeté sa demande et l’a condamné à une amende de 500 euros en application de l’article R.741-12 du code de justice administrative.
Par un pourvoi, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 août, 23 août et 3 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B… demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
— le code de la route ;
— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;
— l’arrêté du 9 février 2009 relatif aux modalités d’immatriculation des véhicules ;
— le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
— le rapport de M. Cédric Zolezzi, maître des requêtes en service extraordinaire,
— les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. B….
1. Considérant que M. B… a demandé le 3 juin 2018 au juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, d’enjoindre au ministre de l’intérieur de lui fournir un certificat immatriculation provisoire ; qu’il se pourvoit contre l’ordonnance du 29 juin 2018 par laquelle le juge des référés a rejeté sa requête et lui a infligé une amende pour recours abusif ;
Sur les conclusions du pourvoi dirigées contre l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif en tant qu’elle a rejeté la demande de M. B… tendant à la délivrance d’un certificat d’immatriculation provisoire :
2. Considérant qu’il résulte des pièces soumises au Conseil d’Etat que le certificat d’immatriculation provisoire demandé par M. B… lui a été délivré le 18 juillet 2018 ; que, dès lors, les conclusions du pourvoi dirigées contre l’ordonnance attaquée en tant qu’elle a refusé d’enjoindre au ministre de délivrer un tel certificat, présentées après cette délivrance, doivent être regardées comme dépourvues d’objet et doivent être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions du pourvoi dirigées contre l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif en tant qu’elle a infligé à M. B… une amende pour recours abusif :
3. Considérant qu’aux termes de l’article R. 741-12 du code de justice administrative : « Le juge peut infliger à l’auteur d’une requête qu’il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros » ;
4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. B… a présenté une demande de certificat d’immatriculation par courrier électronique à la préfecture, qui l’a renvoyé vers l’adresse courriel " siv-part@intérieur.gouv.fr » ; que le 22 novembre 2017, il a reçu un accusé de réception automatique de sa demande, émis par le « centre de contact citoyens » de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) ; qu’il a réitéré sa demande par un courriel du 30 novembre 2017 et a obtenu de l’ANTS le 18 décembre 2017 une réponse lui demandant des éléments complémentaires ; que malgré une relance par courrier électronique le 4 janvier 2018 , puis par lettre le 10 janvier 2018, il n’a pas obtenu de réponse ; qu’ayant enregistré sa demande sur le site internet de l’ANTS en mars 2018, il était toujours sans réponse lorsqu’il a saisi le juge des référés le 3 juin 2018 ; qu’il soulevait devant celui-ci des moyens tirés de l’urgence de sa demande et de l’utilité à lui délivrer un tel certificat ; que, par suite, eu égard à l’objet de la requête de M. B… et aux moyens qui y étaient développés, le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a inexactement qualifié cette demande d’abusive ; que son ordonnance doit, dès lors, être annulée en tant qu’elle a condamné M. B… à une amende pour recours abusif ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761 1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
5. Considérant que M. B… a obtenu le bénéfice de l’aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, et sous réserve que la SCP Foussard-Froger, avocat de M. B…, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Foussard-Froger ; que ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B… la somme que l’Etat demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les conclusions du pourvoi dirigées contre l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montreuil en tant qu’elle a rejeté la demande d’injonction de M. B… sont rejetées.
Article 2 : L’article 2 de l’ordonnance du tribunal administratif de Montreuil en date du 29 juin 2018 est annulé.
Article 3 : L’Etat versera à la SCP Foussard-Froger, avocat de M. B…, une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat.
Article 4 : Les conclusions de l’Etat présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A… B… et au ministre de l’intérieur.
Textes cités dans la décision