Conseil d'État, 1ère chambre, 20 février 2019, 420745, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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www.lmsavocats.fr · 18 mars 2019

Dans une décision du 20 février 2018, le Conseil d'Etat a rappelé les conditions de l'intérêt à agir en annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager du voisin immédiat du projet. Il est prévu à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme qu'une «personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à …

 

Vulpi Avocats - Chronique de jurisprudence · 18 mars 2019

Février 2019 Actes et décisions (v. aussi le n° 29) 1 - Commission d'accès aux documents administratifs – Avis défavorable à la communication d'un document – Demande d'annulation de cet avis pour excès de pouvoir – Requête manifestement irrecevable. Est manifestement irrecevable car dirigée contre un acte insusceptible de recours, la requête en excès de pouvoir contre un avis de la CADA défavorable à la communication d'un document administratif. (1er février 2019, M. X., n° 415034) 2 - Circulaire ministérielle commentant une loi – Demande d'annulation – Circulaire ne …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 1re ch., 20 févr. 2019, n° 420745
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 420745
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Bordeaux, 21 mars 2018
Identifiant Légifrance : CETATEXT000038151208
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2019:420745.20190220

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La société Hanoe Residential Property Portfolio a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 28 mars 2017 par lequel le maire de Bordeaux a délivré à l’office public de l’habitat Gironde Habitat un permis de construire pour la réhabilitation et la construction de bâtiments comprenant 198 logements, une école, un hôtel, une brasserie et un local associatif sur un terrain situé 87, rue de l’Abbé de l’Epée.

Par un jugement n° 1703778 du 22 mars 2018, le tribunal d’administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 mai 2018, 17 août 2018 et 23 janvier 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société Hanoe Residential Property Portfolio demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux et de Gironde Habitat la somme de 2 000 euros chacun au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code de l’urbanisme ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,

— les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de la société Hanoe Residential Property Portfolio, à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat de la commune de Bordeaux, et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’OPH Gironde Habitat ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 janvier 2019, présentée par Gironde Habitat.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société Hanoe Residential Property Portfolio a demandé l’annulation, pour excès de pouvoir, de l’arrêté du 28 mars 2017 par lequel le maire de Bordeaux a accordé à l’office public de l’habitat Gironde Habitat le permis de réhabiliter un immeuble et d’en construire un nouveau sur la parcelle cadastrée KX 38, aux fins de création de 198 logements, d’une école, d’un hôtel, d’une brasserie et d’un local associatif, sur une surface de plancher totale de 18 682 m2. Par un jugement du 22 mars 2018 contre lequel la société requérante se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande comme irrecevable au motif qu’au regard des exigences de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, l’intéressée ne justifiait pas d’un intérêt lui donnant qualité à agir contre l’arrêté attaqué.

2. Aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : « Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation ».

3. Il résulte de ces dispositions qu’il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société Hanoe Residential Property Portfolio est propriétaire d’un immeuble bâti à proximité du terrain d’assiette objet du permis de construire attaqué. A supposer même que cette proximité ne soit pas suffisante pour permettre de la regarder comme un voisin immédiat, l’extrémité est de sa parcelle est située à quelques mètres de la parcelle assiette du projet, dont elle n’est séparée que par un espace végétalisé. Il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond que le projet contesté comprend la construction d’un bâtiment d’une hauteur de 14,74 mètres, sur le côté ouest du terrain d’assiette, susceptible d’altérer la vue entièrement dégagée dont disposait la société requérante au sud-est de sa parcelle, en obstruant la perspective sur l’ancien Institut des sourdes-muettes, protégé au titre des monuments historiques. Le bâtiment à construire est de surcroît susceptible d’avoir pour effet de diminuer l’ensoleillement et la luminosité de son terrain. Eu égard à son ampleur, cet important projet de densification urbaine, prévoyant la création de 268 places de stationnement en sous-sol, risque en outre de détériorer les conditions de circulation dans le quartier et d’en aggraver les nuisances sonores, tant du fait de la circulation automobile que de l’occupation du bâtiment à construire, destiné à accueillir une résidence de jeunes actifs et une école maternelle. Le projet contesté est ainsi de nature à affecter les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de l’immeuble dont la société requérante est propriétaire. Par suite, le tribunal administratif de Bordeaux a inexactement qualifié les faits de l’espèce en jugeant que la requérante ne justifiait pas d’un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation pour excès de pouvoir du permis de construire attaqué et en rejetant sa demande comme irrecevable pour ce motif.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que la requérante est fondée à demander l’annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 mars 2018.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Bordeaux et de Gironde Habitat le versement, chacun, d’une somme de 1 500 euros à la société Hanoe Residential Property Portfolio au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la requérante, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 mars 2018 est annulé.

Article 2 : L’affaire est renvoyée au tribunal administratif de Bordeaux.

Article 3 : La commune de Bordeaux et l’office public de l’habitat Gironde Habitat verseront chacun une somme de 1 500 euros à la société Hanoe Residential Property Portfolio au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l’office public de l’habitat Gironde Habitat et de la commune de Bordeaux présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Hanoe Residential Property Portfolio, à la commune de Bordeaux et à l’office public de l’habitat Gironde Habitat.

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